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Les dépôts métalliques
au second âge du Fer en Europe tempérée
sous la direction de
Gérard BATAILLE et Jean-Paul GUILLAUMET
Actes de la table ronde de BIBRACTE, 13-14 octobre 2004
Les dépôts métalliques au second âge du Fer
en Europe tempérée
Collection
11
2006
La collection Bibracte est éditée par BIBRACTE, Centre archéologique Européen. Du nom antique de la capitale des Éduens, elle
rassemble tout d'abord les études analytiques qui traitent des recherches anciennes et des fouilles récentes sur le site du Mont
Beuvray et le territoire éduen. Elle regroupe également des recherches effectuées dans le cadre du Centre.
Le comité de rédaction de la collection est constitué des membres du Conseil scientifique de BIBRACTE, Centre archéologique
Européen.
Ouvrages parus dans la collection Bibracte :
Bibracte 1 Bibracte 2 Bibracte 3 Bibracte 4 Bibracte 5 Bibracte 6 Bibracte 7 Bibracte 8 Bibracte 9 Bibracte 10 Bibracte 11 Bibracte 12 -
L'environnement du Mont Beuvray (1996)
La quantification des céramiques : conditions et protocoles (1998)
Les remparts de Bibracte - : recherches récentes sur la Porte du Rebout et le tracé des fortifications (1999)
Les processus d’urbanisation à l’âge du Fer – Eisenzeitliche Urbanisationsprozesse (2000)
L’aristocratie celte à la fin de l’âge du Fer (2002)
Les âges du Fer en Nivernais, Bourbonnais et Berry oriental (2002)
Les amphores de Bibracte – 2. Le commerce du vin chez les Éduens d’après les timbres d’amphores.
Catalogues : les timbres de Bibracte (1984-1998), les timbres de Bourgogne (2003)
Bibracte : le site de la maison 1 du Parc aux Chevaux (PC 1) : des origines de l'oppidum au règne de Tibère (2004)
Archéologie des pratiques funéraires : approches critiques (2004)
Études sur Bibracte - 1 (2006)
Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée (2006)
Celtes et Gaulois, l’Archéologie face à l’Histoire (2006)
12-1 : Celtes et Gaulois dans l’Histoire, l’historiographie et l’idéologie moderne.
12-2 : La Préhistoire des Celtes
12-3 : Les Civilisés et les Barbares (du Ve au IIe siècle avant J.-C.)
12-4 : Les mutations de la fin de l’âge du Fer
12-5 : La romanisation et la question de l’héritage celtique
Les dépôts métalliques
au second âge du Fer en Europe tempérée
Actes de la table ronde organisée par L'UMR 5594
CNRS – Culture – université de Bourgogne
Archéologie, cultures et société en Bourgogne et en France orientale
Équipe 3 : la société gauloise
Glux-en-Glenne, 13-14 octobre 2004
sous la direction de
Gérard BATAILLE et Jean-Paul GUILLAUMET
Collection Bibracte - 11
BIBRACTE – Centre archéologique européen
F - 58370 Glux-en-Glenne
2006
Couverture : les objets du dépôt découvert à Sajópetri (Hongrie) en 2002
(recherches archéologiques franco-hongroises en Hongrie,“L'occupation
celtique de la Grande Plaine hongroise”, co-dirigées par M. Szabó, professeur
à l'université de Budapest, et J.-P. Guillaumet, D.R. au CNRS, UMR 5594).
©Bibracte/A. Maillier
Notice catalographique
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir. — Les dépôts métalliques au second âge
du Fer en Europe tempérée. Glux-en-Glenne : Bibracte, Centre archéologique
européen, 2006 (Collection “Bibracte”; 11, ISSN 1281-430X, ISBN 2-909668-44-4).
ISBN 2-909668-44-4
Premier élément date et référence bibliographique
Bataille, Guillaumet 2005 : BATAILLE (G.), GUILLAUMET (J.-P.) dir. —
Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée.
Glux-en-Glenne : Bibracte, Centre archéologique européen, 2006, 336 p.,
187 ill. (Bibracte ; 11).
Directeurs de la publication
Gérard BATAILLE (Docteur en archéologie, chercheur associé, UMR 5594, Dijon - F)
Jean-Paul GUILLAUMET (Directeur de recherche au CNRS, UMR 5594, Dijon - F)
Auteurs et collaborateurs (titres au jour du colloque)
Anne-Marie ADAM (Professeur, université Marc-Bloch, Strasbourg, UMR 7044 - F)
Gérard BATAILLE (Docteur en archéologie, chercheur associé, UMR 5594, Dijon - F)
Marion BERRANGER (Doctorante, université Paris-I, UMR 7041 - F)
Tomasz BOCHNAK (Maître de conférence, université de Rzeszów - P)
Louis BONNAMOUR (Conservateur au musée de Chalon-sur-Saône - F)
Sébastien CHEVRIER (Doctorant, université de Bourgogne, UMR 5594, Dijon - F)
Frédéric DEVEVEY (Ingénieur INRAP, chercheur associé, UMR 6565 - F)
Émilie DUBREUCQ (Doctorante, université de Bourgogne, UMR 5594, Dijon - F)
Annie DUMONT (Ingénieur de recherche au DRASSM, UMR 5594, Dijon - F)
Mots clefs
Archéologie, Europe tempérée, dépôts terrestres, dépôts fluviaux, métal, outils,
parure, armement, fragmentation, Néolithique, âge du Bronze, âge du Fer,
époque romaine.
Andrej GASPARI (Université de Primorska - SL)
José GOMEZ DE SOTO (Directeur de recherche au CNRS, UMR 6566, Rennes/
Nantes - F)
Jean-Paul GUILLAUMET (Directeur de recherche au CNRS, UMR 5594, Dijon - F)
Crédit des illustrations
Illustrations originales des divers auteurs participant à l’ouvrage.
Mise aux normes éditoriales : Charlotte Félix (BIBRACTE)
Directeur de la collection
Vincent Guichard (BIBRACTE)
Secrétaire d’édition/Mise en page
Charlotte Félix (BIBRACTE)
Colin HASELGROVE (Professeur, université de Leicester - GB)
Richard HINGLEY (Professeur, université de Durham - GB)
Peter JUD (Chercheur au fonds. nat. Suisse de la rech. scient., UMR 7044,
Strasbourg - CH)
Bernard LAMBOT (CRAVO - Compiègne, chercheur associé, UMR 8546, ENS, - F)
Anne LARCELET (Ingénieur INRAP - F)
Patrice MÉNIEL (Directeur de recherche au CNRS, UMR 5594, Dijon - F)
Olivier NILLESSE (Ingénieur INRAP - F)
Aide à la mise en forme des textes
Myriam Giudicelli (BIBRACTE)
Patrick PION (Maître de conférence, université Paris-X, Nanterre, UMR 7055 - F)
Relecteurs
D. Garcia (Professeur, université Aix-Marseille)
C. Mordant (Professeur, université de Bourgogne)
J.-P. Thevenot (Conservateur Général du Patrimoine, Dijon)
Pavel SANKOT (Directeur du département Pré et Protohistoire, musée national,
Prague - CZ)
Diffusion/distribution
BIBRACTE - Centre archéologique européen
F - 58370 Glux-en-Glenne – e-mail : edition@bibracte.fr
Téléphone : 33 (0)3 86 78 69 00 – Télécopie : 33 (0)3 86 78 65 70
Copyright 2006 : BIBRACTE
ISSN 1281-430X – ISBN 2-909668-44-4
Imprimé en France
Sabine RIECKHOFF (Professeur, université de Leipzig - D)
Martin SCHÖNFELDER (Chercheur au Römisch-Germanisches Zentralmuseum,
chercheur associé UMR 5594, Dijon - D)
Otto-H. URBAN (Professeur, université de Vienne - D)
Stéphane VERGER (Directeur des Études pour l'Antiquité, Palais Farnèse - I)
Stefan WIRTH (Maître de conférence, chercheur associé UMR 5594, Dijon - F)
Domiciliations complètes, p. 9-10
Remerciements
La tenue de la table ronde à l'origine de ces actes doit beaucoup au soutien matériel du ministère de la Culture et de la
Communication, sous-direction de l'Archéologie, et du Conseil Régional de Bourgogne.
Sommaire
Les origines du phénomène
Patrick PION – “Les dépôts d'avant les dépôts”: un aperçu hexagonal des pratiques antérieures
aux âges des Métaux ...................................................................................................................................................... 15
Stéphane VERGER – À propos de vieux bronzes du dépôt d’Arbedo (Italie)
Essai de séquençage d'un ensemble complexe ......................................................................................................... 23
Sébastien CHEVRIER – Observations sur quelques dépôts du premier âge du Fer
dans le quart nord-est de la France .............................................................................................................................. 57
Les dépôts laténiens
José GOMEZ de SOTO – Les dépôts métalliques du second âge du Fer dans les grottes
du centre-ouest de la France ......................................................................................................................................... 75
Otto-H. URBAN – Ausgewählte latènezeitliche Eisendepotfunde aus Österreich .................................................... 83
Pavel SANKOT – Les dépôts métalliques de Bohême et de Moravie .......................................................................101
Martin SCHÖNFELDER – Ein spätlatènezeitlicher Werkzeug- und Gerätehort aus dem ostkeltischen Gebiet ..109
Peter JUD – Les dépôts d'objets métalliques aux âges du Fer en Suisse : guerriers, femmes et artisans ............129
Anne-Marie ADAM – Dépôts d’objets métalliques du second âge du Fer dans le nord-est de l'Italie
et les Alpes orientales. ..................................................................................................................................................135
Colin HASELGROVE, Richard HINGLEY – Iron deposition and its significance in pre-Roman Britain ..............147
Tomasz BOCHNAK – L’état des recherches sur les dépôts d’objets métalliques du second âge du Fer
en Pologne......................................................................................................................................................................165
Jean-Paul GUILLAUMET – Quelques autres dépôts d'Europe..................................................................................183
Bernard LAMBOT – Assemblages métalliques dans les structures du village d’Acy-Romance (Ardennes) .....193
Marion BERRANGER – Les dépôts de demi-produits de fer (VIIIe - Ier s. av. J.-C.)
Contextes et associations de mobiliers ......................................................................................................................211
Olivier NILLESSE – Les dépôts d’objets en fer dans les établissements ruraux gaulois de l'ouest
de la France : le rituel est-il au fond de la poubelle ? ................................................................................................221
Gérard BATAILLE – Dépôts de mobiliers métalliques de la période de La Tène
Premiers essais de classement.....................................................................................................................................247
Annie DUMONT, Andrej GASPARI, Stefan WIRTH – Les objets métalliques des âges du Fer
découverts en contexte fluvial. Les exemples de la Saône (France), du Danube (Allemagne)
et de la Ljubljanica (Slovénie).....................................................................................................................................257
La continuité du phénomène
Sabine RIECKHOFF – Les dépôts laténiens d’Allemagne : la continuité d'un phénomène en Europe ..............279
Louis BONNAMOUR – La découverte de Tailly (Côte-d’Or). Un dépôt votif d'époque gallo-romaine
en Bourgogne ? ..............................................................................................................................................................293
Frédéric DEVEVEY, Anne LARCELET – Des dépôts métalliques dans un contexte du VIe siècle après J.-C.
à Chevroches “le Domaine de Noé” (Nièvre) ............................................................................................................301
Conclusion
Patrice MÉNIEL – Conclusion de la table ronde ......................................................................................................327
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Avant propos
Les premiers dépôts des âges du Fer, identifiés à la fin XIXe et début du XXe siècle,
furent découverts dans des rivières, des marais et des lacs, comme à La Tène en Suisse
et à Kappel en Allemagne. Au début de la seconde moitié du XXe siècle, furent mis en
évidence d’autres types de dépôts d’objets en fer. Il s’agit en majorité d’outillage artisanal et agricole de la période des oppida, essentiellement en Tchécoslovaquie, dont
les plus connus sont ceux de Kolín, Hostyn, Pohanská. La découverte de dépôts du
premier âge du Fer et du début de la période de la Tène est encore plus récente. En
France, elle a permis de reclasser un certain nombre de dépôts de haches en bronze,
tant dans l'Ouest qu'en Bourgogne et dans les régions limitrophes, en mettant en
valeur une déposition encore méconnue de bracelets en alliage base cuivre. Dans le
même temps, étaient mis en évidence des dépôts d'objets en fer du Hallstatt, surtout
en République tchèque.
Aux âges du Bronze, le phénomène de dépôt est un sujet d’étude emblématique et un des fondements de la connaissance de cette période. Pour les âges du
Fer, le sujet est rarement abordé en tant que tel. Lorsque cela est le cas, il s’agit le
plus souvent d’inventaires. Nous désirions organiser une première confrontation des
approches dans le but de mettre en place une méthodologie commune :réfléchir
aux modalités de composition et aux significations des dépôts. Notre propos n’était
pas de réaliser un recensement exhaustif des dépôts et de traiter de tous les thèmes
possibles ni même de réunir tous les chercheurs s’intéressant à ce sujet. Ainsi, il nous
faut noter l’absence dans les débats de sites importants, comme le dépôt de La Tène,
pourtant site éponyme de notre période, mais dont les conditions de découverte et
la dispersion empêchent d’avoir un aperçu de la globalité de cet ensemble. Le travail
que Thierry Lejars a présenté au colloque AFEAF de Bienne en mai 2005 sur les collections conservées au musée de Bienne sera déjà un premier pas vers une meilleure
compréhension de ce gisement essentiel et pourtant si mal connu.
Les participants n’avaient aucune consigne particulière pour traiter le sujet.
Certains se sont essentiellement attachés aux dépôts de mobilier en fer. En revanche,
d’autres comme Th. Bochnak, ont intégré à leur présentation des dépôts monétaires
ou de métaux précieux. Souvent considérés comme particuliers, ces ensembles sont
aussi, au sens strict, des dépôts d’objets métalliques. Au cours de cette table ronde, il
fut mis en évidence que les notions de “dépôts” et de mobiliers métalliques sont différentes d’un chercheur à l’autre, de même que les approches, ce qui est normal pour
un sujet encore perçu comme peu représentatif des sociétés des âges du Fer.
Lors de la présentation des communications, il est apparu que le sujet des dépôts
d’objets métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée est une source inépuisable de thèmes de recherche, que chaque auteur développe selon sa propre vision.
La diversité des approches témoigne d'une recherche en devenir, avec de nombreuses
pistes que l'on commence à peine à défricher. Ces actes montrent les multiples réalités du phénomène des dépôts : composition, répartition, signification et datation ainsi
que le travail qui reste encore à accomplir.
Ce volume d’actes comprend trois parties. Les origines du phénomène sont abordées pour la période pré-métallique par Patrick Pion. Il y présente, dans le cadre du
territoire de la France actuelle, les rares caches de la fin du Paléolithique dont deux,
La Goulaine et Volgu se situent non loin de Bibracte, dans le Brionnais, et pour le
Néolithique, les dépôts d’objets de grande qualité comme les haches, les herminettes
6
polies et les grandes lames du Grand-Pressigny. Stéphane Verger propose à partir de
la remarquable publication exhaustive de Martin Peter Schindler en 1998, un nouveau regard sur le dépôt d’Arbedo (Italie). Par la méthode novatrice du séquençage,
mis au point par l’auteur, il propose une interprétation où la dimension technique,
cultuelle et historique est prise en compte. Sébastien Chevrier présente une première synthèse sur les dépôts du premier âge du Fer dans le nord-est de la France,
phénomène encore mal quantifié pour cette période.
La seconde partie est au cœur des préoccupations de cette table ronde. Certains
proposent une synthèse régionale : l’Autriche pour Otto-H. Urban, la Bohême et la
Moravie pour Pavel Sankot, la Grande-Bretagne pour Colin Haselgrove et Richard
Hingley, l’Italie du Nord et les Alpes orientales pour Anne-Marie Adam, la Suisse
pour Peter Jud, la Pologne pour Tomasz Bochnak, l'Europe en général pour JeanPaul Guillaumet. D’autres auteurs ont préféré présenter un site, Acy-Romance pour
Bernard Lambot ou un type de site : les grottes pour José Gomez de Soto, les cours
d’eaux pour Annie Dumont, Andrej Gaspari et Stefan Wirth ou les établissements
ruraux pour Olivier Nillesse. Deux auteurs ont mené des réflexions sur les contextes
et associations de type de mobilier tels Marion Berranger et Gérard Bataille.
La troisième partie ébauche la continuité du phénomène. Sabine Rieckhoff,
après un vaste tour d’horizon des dépôts laténiens en Allemagne, les compare
avec des ensembles d’offrandes germaniques de l’Antiquité tardive retrouvées le
long du limes de la Germanie supérieure. Elle y voit la permanence d’un rituel
social remontant aux époques anciennes. Louis Bonnamour, ensuite, présente un
ensemble d’objets en fer, en majorité des bousandales, déposés dans un chaudron
en bronze à proximité d’une source. Sa composition, similaire aux découvertes
recueillies dans les gués de la Saône toute proche, lui fait proposer d’y voir un
dépôt votif. Pour terminer, Anne Larcelet et Frédéric Devevey étudient les ensembles
métalliques découverts lors d’une fouille de sauvetage à Chevroches (Nièvre). Par
le contexte, ces quatre dépôts nivernais apparaissent comme des réserves de métal
liés à l’artisanat du métal et n’ont rien de religieux.
En conclusion, Patrice Méniel a proposé, à partir de son expérience sur les
dépôts d’ossements animaux, une méthode pour pouvoir comparer avec rigueur ces
données disparates : création d’une base de données communes traitant de la description et des questions soulevées par l’étude des dépôts – modalités, composition,
nature.
Cette première table ronde a montré la richesse du sujet et les interrogations qu’il
suscite. D’autres réunions, plus ciblées, sont prévues. Leurs objectifs sont doubles.
Tout d'abord, elles permettront de redéfinir les différents aspects de ce phénomène
encore mal connu pour les âges du Fer. Ensuite, nous pourrons confronter nos interprétations avec les spécialistes d'autres périodes concernées, âge du Bronze, époque
romaine, haut Moyen Âge et Moyen Âge.
Glux-en-Glenne, le 26 mars 2006
Gérard BATAILLE, Jean-Paul GUILLAUMET
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PROGRAMME DE LA TABLE RONDE
LES DÉPÔTS MÉTALLIQUES AUX ÂGES DU FER EN EUROPE
13-14 OCTOBRE 2004
LES ORIGINES DU PHÉNOMÈNE
Patrick PION – Les dépôts au Néolithique.
Stéphane VERGER – Les “vieux bronzes” du dépôt d’Arbedo et les trafics d’offrandes métalliques
en Méditerranée occidentale dans la seconde moitié du VIIe et la première moitié du VIe s. av. J.-C.
Sébastien CHEVRIER – Les dépôts du Hallstatt moyen et final de l’est de la France.
LES DÉPÔTS LATÉNIENS
José GOMEZ DE SOTO – Les dépôts de fer dans les grottes en centre ouest de la France.
Otto-H. URBAN – Ausgewählte Eisendepots in Österreich.
Pavel SANKOT – Les dépôts métalliques de Bohême et de Moravie.
Martin SCHÖNFELDER – Un dépôt d’outillage de La Tène finale dans l’est du monde Celtique.
Peter JUD – Les dépôts métalliques aux âges du Fer en Suisse nord alpine.
Anne-Marie ADAM – Le site de Sanzeno nell’Anaunia et les dépôts d’objets métalliques
en Italie nord orientale.
Colin HASELGROVE, Richard HINGLEY – The deposition of iron in pre-Roman Britain.
Tomasz BOCHNAK – L’état des recherches sur les dépôts d’objets métalliques du IIe âge du Fer
en Pologne.
Jean-Paul GUILLAUMET – Un point sur les dépôts laténiens en Gaule.
Bernard LAMBOT – Assemblages métalliques dans les structures du village d’Acy-Romance
(Ardennes).
Marion BERRANGER – Les dépôts de demi-produits au Ier millénaire avant J.-C.
Émilie DUBREUCQ – Un dépôt d’armes du IIIe s. av. J.-C. à Bourguignon-lès-Morey (Haute-Saône).
Olivier NILLESSE – Les dépôts d’objets métalliques dans les fermes laténiennes.
Gérard BATAILLE – Les dépôts de sanctuaires comparés à d’autres ensembles.
Annie DUMONT, Andrej GASPARI, Stefan WIRTH – Les objets métalliques des âges du Fer
découverts en contexte fluvial : Les exemples de la Saône (France), du Danube (Allemagne)
et de la Ljubljanica (Slovénie).
LA CONTINUITÉ DU PHÉNOMÈNE
Sabine RIECKHOFF – Les dépôts laténiens d’Allemagne et la continuité du phénomène
à l’époque romaine.
Louis BONNAMOUR – Le dépôt de Tailly (Côte-d’Or). Un dépôt votif du IIIe s. de notre ère
en Bourgogne ?
Frédéric DEVEVEY, Anne LARCELET – Les dépôts d’objets métalliques dans un contexte
métallurgique du IVe s. ap. J.-C. à Chevroches (Nièvre).
CONCLUSION
Patrice MÉNIEL — Conclusion des journées de la table ronde sur les dépôts.
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TITRES ET DOMICILIATION DES AUTEURS
Anne-Marie ADAM
Émilie DUBREUCQ
Professeur, université Marc-Bloch de Strasbourg, UMR 7044,
Prof : Palais universitaire,
Doctorante, université de Bourgogne, UMR 5594, Dijon
Domicile : Les Barbiers
9 place de l'université
F - 71990 Saint Prix
F - 67000 Strasbourg
Tél.: 33 (0)3 88 35 37 95
amadam@umb.u-strasbg.fr
Tél.: 33 (0)6 13 27 17 71
emiliedubreucq@yahoo.fr
Annie DUMONT
Gérard BATAILLE
Docteur en archéologie, chercheur associé, UMR 5594, Dijon
Domicile : Les Brenots
Ingénieur de recherche DRASSM (ministère de la Culture),
UMR 5594, Dijon
F - 58430 Arleuf
Prof : Département des recherches archéologiques subaquatiques
et sous-marines (DRASSM), Antenne d'Annecy
Tél.: 33 (0)3 86 78 81 98
58 bis rue des Marquisats
Prof : Bibracte, Centre archéologique européen
F - 74000 Annecy
Le Bourg, F - 58370 Glux-en-Glenne
g.bataille@libertysurf.fr
Tél.: 33 (0)4 50 51 82 74 - Fax.: 33 (0)4 50 51 03 91
annie.dumont@culture.gouv.fr
Marion BERRANGER
Andrej GASPARI
Doctorante, université Paris I Panthéon-Sorbonne, UMR 7041 (MAE)
Domicile : 36 rue de Chaignot
Université de Primorska
Prof : Centre de recherche scientifique,
Institut du patrimoine méditerranéen
F - 21000 Dijon
SL - 6000 Koper
Tél.: 00 386 31 888 117
andrej.gaspari@siol.net
marion.berranger@wanadoo.fr
Tomasz BOCHNAK
Maître de conférence, université de Rzeszów
Prof : Uniwersytet Rzeszowski
Instytut Archeologii
ul. Hoffmanowej 8
José GOMEZ de SOTO
Directeur de recherche au CNRS, UMR 6566, Rennes/Nantes
35-016 Rzeszów
Domicile : 52 rue Fontaine du Lizier
F - 16000 Angoulême
Tél.: (48) 17 872 15 81 / Fax : (48) 17 852 57 37
Tél./ Fax : 33 (0)5 45 92 48 42
tbochnak@univ.rzeszow.pl
jgzdsoto@free.fr
Louis BONNAMOUR
Jean-Paul GUILLAUMET
Conservateur au musée Denon, Chalon-sur-Saône
Prof : Musée archéologique V. Denon
Directeur de recherche au CNRS, UMR 5594, Dijon
Domicile : Chez l'Antoine du Soldat
Place de l'Hôtel de Ville
F - 71100 Chalon-sur-Saône
F - 58370 Glux-en-Glenne
Tél.: 33 (0)3 86 78 69 50 - Fax : 33 (0)3 86 78 65 70
Tél.: 33 (0)3 85 48 29 52- Fax : 33 (0)3 85 93 49 88
jpguillaumet@aol.com
atelier.denon@chalonsursaone.fr
Colin HASELGROVE
Professeur, université de Leicester
Sébastien CHEVRIER
Prof : University of Leicester
Doctorant, université de Bourgogne, UMR 5594, Dijon
School of Archaeology and Ancient History
Domicile : Les Sanrats
F - 71990 La Comelle
University Road
Tél.: 33 (0)3 85 82 59 37
sebchevrier@yahoo.fr
GB - Leicester LE1 7RH
Tél.: (44) 116 252 5016
cch7@leicester.ac.uk
Frédéric DEVEVEY
Ingénieur INRAP, chercheur associé, UMR 6565,Besançon
Prof : Base archéologique INRAP
Richard HINGLEY
Professeur, université de Durham
rue Aristide Berges
F - 21800 Sennecey-lès-Dijon
Department of Archaeology
University of Durham
Tél.: 33 (0)3 80 32 02 70
frederic.devevey@inrap.fr
South Road
GB - Durham DH1 3LE
richard.hingley@dur.ac.uk
9
TITRES ET DOMICILIATION DES AUTEURS
Peter JUD
Pavel SANKOT
Chercheur au Fonds national Suisse de la recherche scientifique,
UMR 7044, Strasbourg
Dir. du département de Pré et Protohistoire,musée national de Prague
Prof : Národni Muzeum
Domicile : Efringerstrasse 24
CH - 4057 Bâle
Tél.: (41) 61 373 21 90
Département d'Archéologie
Vaclavské námesti 68
Plzenska 551
CZ - 115 79 Praha 1
peterjud@hotmail.com
Tél.: (42) 022 449 73 22
Bernard LAMBOT
pavel.sankot@seznam.cz
CRAVO Compiègne, ENS Paris, chercheur associé UMR 8546
Domicile :1 rue des Acacias
F - 60150 Machemont
Prof. : CRAVO, 21 rue des Cordeliers
Martin SCHÖNFELDER
Chercheur au Römisch-Germanisches Zentralmuseum - Allemagne
Chercheur associé UMR 5594, Dijon
F - 61000 Compiègne
Prof : Römisch-Germanisches Zentralmuseum
Tél.: 33 (0)3 44 96 00 04
Ernst-Ludwig-Platz 2
lambotdacy@wanadoo.fr
D - 55116 Mainz
Tél.: (49) 61 31 91 24 266
Anne LARCELET
Fax : (49) 61 31 91 24 199
Ingénieur INRAP
schoenfelder@rgzm.de
Domicile : Les Roulots
F - 71190 La Chapelle-sous-Uchon
Tél.: 33 (0)3 85 54 37 66
larcelet@iksis.fr
Otto-H. URBAN
Professeur, université de Vienne
Prof : Universität Wien
Institut für Ur- und Frühgeschichte
Patrice MÉNIEL
Franz-Klein Gasse 1
Chercheur au CNRS, HDR, UMR 5594, Dijon
A - 1190 Wien
Domicile : La Grilletière
Tél.: (43)1 42 77 40 347 - Fax : (43)1 36 80 575
F - 89240 Escamps
Tél./ Fax : 33 (0)3 86 41 75 06
otto.urban@univie.ac.at
menielpat@aol.com
Stéphane VERGER
Dir. d'études à l'École Pratiques des Hautes Études, IVe section
Prof : École Pratique des Hautes Études
45-47 rue de la Sorbonne
Olivier NILLESSE
Ingénieur INRAP
Domicile : Barzoin
F - 85420 Damvix
Tél.: 33 (0)2 51 87 02 92
olivier.nillesse@inrap.fr
F - 75005 Paris
stephane.verger@ephe.sorbonne.fr
Stefan WIRTH
Maître de conférence associé, université de Bourgogne, UMR 5594
Patrick PION
Maître de conférence, université Paris-X, UMR 7055, Nanterre (MAE)
Prof : Maison de l'archéologie et de l'ethnologie - René Ginouvès
21 allée de l'université
F - 21000 Dijon
F - 92023 Nanterre Cedex
Tél.: 33 (0)3 80 39 38 36 - Fax 33 (0)3 80 39 57 87
Tél.: 33 (0)1 46 69 25 68 - Fax : 33 (0)1 46 69 25 69
stefan.wirth@u-bourgogne.fr
pion@mae.u-paris10.fr
Sabine RIECKHOFF
Professeur, université de Leipzig
Prof : Universität Leipzig
Ritterstraße 14
Tél.: 0341 97 37 051 - Fax : 0341 97 37 046
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Prof : Université de Bourgogne,
UMR 5594 “Archéologie, cultures et sociétés”
6 boulevard Gabriel
Communications orales
“Les dépôts d’avant les dépôts”
un aperçu hexagonal des pratiques antérieures
aux âges des Métaux
Patrick PION
La présence sporadique de culots ou de fragments d’objets en fer dans les dépôts de l’âge du
Bronze final pourrait laisser penser que les dépôts
d’objets métalliques des âges du Fer en constituent
un simple prolongement. Le nouveau métal qu’est
le fer se substituerait simplement au bronze comme
matériau d’affichage : privilégié, pour la manipulation de symboles sociaux, dans un cadre conceptuel
où le phénomène du dépôt – à caractère technoéconomique et/ou rituel – est considéré comme
emblématique des sociétés complexes et très hiérarchisées des âges des Métaux.
Pourtant, sans même rentrer dans une analyse
comparative poussée, des différences flagrantes
s’imposent d’emblée, qu’illustre bien la diversité
des contextes et des contenus embrassés par le
programme de cette table ronde.
Au-delà des aspects chronologiques et d’une
supposée continuité du phénomène qui reste à
préciser, la diversification et la “spécialisation”qui
transparaissent suggèrent que les logiques à l’œuvre derrière les pratiques des âges du Fer sont
quelque peu différentes de celles de l’âge du
Bronze.
Les lignes qui suivent rappellent que le
“dépôt” – terme qui supporte des définitions et
recouvre des réalités variées qu’il conviendrait
de préciser ! – n’est pas un phénomène propre
aux âges des Métaux. Elles visent à élargir la
perspective et le cadre de référence interprétatif
en évoquant brièvement ce que l’on sait de ces
pratiques et de leur variété avant cette période.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p.15-22 (Bibracte ; 11).
PATRICK PION
SÉLECTIONNER, RASSEMBLER, CACHER :
UNE DISPOSITION LARGEMENT PARTAGÉE
DES DÉPÔTS ET DES CACHES
DANS DES “SOCIÉTÉS SIMPLES” ?
La “thésaurisation” n’est pas une disposition
comportementale propre à l’espèce humaine,
et les éthologues en font l’un des critères possibles pour reconnaître l’existence de mécanismes
cognitifs d’anticipation chez certaines espèces
animales. Chacun connaît évidemment le cas
métaphorique de l’écureuil et de ses “magasins
à noisettes et à pommes de pins” méticuleusement approvisionnés avant la mauvaise saison : il
s’agit là non pas d’épargne (en dépit de ce que
voudraient nous faire croire certaines banques !)
mais de réserves alimentaires qui assurent la soudure en période de pénurie. Qui aime Rossini sait
cependant qu’il existe aussi d’autres motifs moins
prosaïques et plus mystérieux – en apparence du
moins ! – à ces comportements d’accumulation : la
pie par exemple, qui cherche tout ce qui brille et
entasse dans son nid…
Trois, voire quatre types de dépôts sont
repérés comme tels dans les groupes de chasseurs-cueilleurs-collecteurs du Paléolithique et du
Mésolithique.
Chez l’humain, le psychologue J. Piaget a
décrit et individualisé une étape fondamentale
et transitoire dans le développement intellectuel
du jeune enfant dont l’une des manifestations
les plus claires est le classement et la collection
(Piaget 1964), tandis que les psychiatres cliniciens
identifient dans le comportement d’accumulation
exacerbé de certains patients le symptôme d’une
névrose obsessionnelle compulsive (TOC), état
extrême d’une structuration névrotique dont le
versant obsessionnel semble corrélatif de l’émergence des comportements symboliques et d’un
inconscient “moderne”.
Si l’on se fie à ce qui est perçu par l’archéologue comme dépôt : un objet ou un lot d’objets
sélectionnés et isolés physiquement de façon
temporaire ou définitive (mis à l’écart, voire
dissimulés) les champs et l’éventail des mobiles
de tels gestes sont donc extrêmement vastes :
du comportement spécifique au comportement
idiosyncrasique propre à un individu dans un
contexte donné, et aux comportements technoéconomiques et sociaux, absents des exemples
que l’on vient d’évoquer mais qui sont généralement les principaux sinon les seuls à être
implicitement retenus dans les interprétations
archéologiques : car ce qui intéresse l’archéologue – à tort ou à raison – c’est avant tout le dépôt
en tant que phénomène et fait social.
16
À côté des dépôts funéraires (Binant 1991),
rares mais parfois spectaculaires 1, sont connues
une poignée de caches de grandes lames en silex
dissimulées dans des anfractuosités, des fissures
de parois ou des chatières inaccessibles de grottes ornées du Paléolithique supérieur pyrénéen 2
(Cordier 1986, Simonnet 1981). La singularité de
ces dépôts se dégage de la taille exceptionnelle
des lames (entre 15 cm et 25 cm de long, soit bien
au-delà des mensurations de celles rencontrées
dans les habitats contemporains, dont les plus
grandes n’excèdent pas 10-12 cm), du caractère
exogène du matériau (un silex veiné et coloré
à grain très fin probablement originaire pour
une part au moins de Dordogne ; et qui ne se
rencontre pratiquement pas, lui non plus, parmi
l’outillage des habitats), et du contexte particulier
que désigne la localisation de ces dépôts dans
des secteurs peu accessibles de grottes ornées.
Ces lames ont en outre toutes été utilisées, certaines vraisemblablement pour racler des surfaces
de paroi décorées. On s’accorde ainsi généralement à reconnaître une dimension symbolique
à ces objets et à ces caches (Simonnet 1981). Il
existe aussi des amas d’ossements ou de crânes
humains ou animaux, des objets disposés géométriquement sur des sols ou des objets “emballés”
dans de l’ocre (Leroi-Gourhan 1964 : chapitre III,
“Objets et rites”).
Il existe enfin de véritables caches isolées en
rase campagne, rares car difficiles à repérer, dont
les trois ou quatre signalées sur le territoire métropolitain regroupent des pièces lithiques de nature
variée. Ces “caches” sont, par la manière dont
elles se présentent, les plus proches des dépôts
métalliques des âges des Métaux. Le paradigme
interprétatif dominant est techno-économique et
fondé sur la nature des assemblages : des tools-kit
associant matière première (nucléus épannelés),
percuteurs, lames ou éclats bruts et quelques
objets façonnés, soit des “réserves” de tailleurs
jalonnant les parcours saisonniers d’un groupe de
chasseurs ainsi allégés dans leurs déplacements.
“LES DÉPÔTS D’AVANT LES DÉPÔTS” : UN APERÇU HEXAGONAL DES PRATIQUES ANTÉRIEURES AUX ÂGES DES MÉTAUX
C’est l’interprétation la plus généralement retenue
pour les dépôts de la culture de Clovis et des autres
cultures du Paléolithique supérieur et de l’Épipaléolithique du continent nord-américain, même si
la qualité exceptionnelle de certaines des pièces
enfouies laisse augurer d’autres significations possibles pour ces dépôts (Collins 1999, p. 76-80 ; Frison,
Bradley 1999, p. 78-81). C’est également l’interprétation techno-économique qui est retenue en France
pour le dépôt du Magdalénien final de La Goulaine
(La-Motte-Saint-Jean, Saône-et-Loire : Breuil 1907,
Surmely et al. 2002) 3. Mais en aucun cas on ne
peut maintenir une telle interprétation pour le
fameux dépôt solutréen voisin de Volgu (Rigny-surArroux, Saône-et-Loire), composé d’une douzaine
de pièces identiques et exceptionnelles 4. On est
là en présence d’une production qui relève de la
prouesse technique à des fins non utilitaires, dont
on peut se demander jusqu’à quel point elle n’a pas
été destinée d’emblée à l’enfouissement. Réserve
de produits valorisés en eux-mêmes à des fins
d’échanges ultérieurs avec d’autres groupes ? Rien
n’autorise à sauter le pas pour en faire un dépôt
rituel, mais on touche là néanmoins au domaine
des comportements non utilitaires et du symbolique stricto sensu, à relier aux autres pratiques de
dépôts en grottes évoquées ci-dessus.
Bien que peu nombreux, les cas documentés
pour le Paléolithique français, essentiellement
datés du Paléolithique supérieur, présentent déjà
tous les cas de figures ultérieurs concernant les
contextes : funéraire, habitat, sanctuaire, dépôts isolés ou “caches”. Parmi ces derniers, on rencontre
également au moins deux types d’assemblages
qui répondent à des motivations différentes et renvoient à la bipolarisation ultérieure et récurrente
des champs d’interprétation, balançant entre pôle
techno-économique et pôle symbolique ou “rituel”
quand il ne se dégage pas de rationalité évidente.
Cantonnées à ces grandes catégories descriptives,
les pratiques connues plus tard ne sont donc pas
l’apanage des sociétés des âges des Métaux, ni
même des premières sociétés agricoles plus ou
moins sédentaires, bref, des sociétés de production. On pourrait en conclure que cette corrélation
entre pratique des dépôts et organisation sociale
complexe est infondée. Mais en fait, ces pratiques
du Paléolithique supérieur constituent plutôt un
indice supplémentaire plaidant contre la thèse
qui voit dans ces sociétés de chasseurs-cueilleurs
des sociétés “simples” (Sassaman 2004 ; Vanhaeren,
d’Errico 2005).
DÉPÔTS ET CACHES
DANS LES PREMIÈRES SOCIÉTÉS
AGROPASTORALES D’EUROPE OCCIDENTALE
Les dépôts sont pour cette période d’une
variété déroutante, tant concernant les contextes que la nature et la composition des dépôts :
matériel lithique, céramique, parures animales
ou animaux associés aussi bien à des contextes
funéraires qu’à des habitats, aux fossés des grandes enceintes interrompues et aux occupations
en grottes (Barret, Kinnes 1989 ; Hodder 1990 ;
Jeunesse 1998). On n’envisagera ici que les dépôts
de type “cache”. Deux types de produits sont
principalement thésaurisés”: les lames de haches
et herminettes polies (parfois accompagnées de
parure comme les anneaux disques) et les produits particuliers comme les lames et “poignards”
pressigniens (Whittle 1995). Leur écart chronologique suffit à expliquer que l’un et l’autre ne sont
jamais associés.
L’exemple des dépôts de haches et
herminettes polies (Ve/début IVe millénaire)
À l’heure actuelle, un peu plus d’une centaine
de dépôts sont répertoriés, dépôts “funéraires”
des tumulus carnacéens inclus (Cordier, Bocquet,
1973 ; 1998).
Le phénomène présente plusieurs caractères
spécifiques qui se dégagent de la localisation des
matières premières comparée à celle des dépôts,
et de l’état des objets en fonction de cette localisation.
La diffusion des produits à partir des sources de
matière première ne s’opère pas par capillarité, du
type “down the line” de Renfrew avec décroissance
proportionnelle au carré de la distance (Renfrew
1975 ; 1977), mais “en ricochet” avec concentrations en cercle au-delà de 500 km (Pétrequin et al.
1997 ; 1998). On est donc en présence de transferts
à longue distance selon des modalités spécifiques : systèmes d’échanges complexes centralisés
de type redistributifs. Les produits subissent d’importantes transformations aux diverses étapes
de ces transferts : sur-polissage, voire gravure et
perforation en font, sur les segments distaux
du réseau, des objets extraordinaires au sens
propre (cf. le poli-miroir et la transparence des
tranchants de certains exemplaires carnacéens),
non fonctionnels et dont la vocation principale
17
PATRICK PION
est d’affichage social. Sauf exception (Bennwihr :
Pétrequin, Jeunesse, 1995), les dépôts sont justement
localisés loin des sources, dans le 2e et le 3e cercle, là
où les produits sont les plus élaborés et ne sont plus
utilitaires (Pétrequin, Croutsch, Cassen 1998, fig. 3) :
on est là dans une “économie des biens de prestiges” circulant entre strates supérieures de sociétés
hiérarchisées (Pétrequin, Cassen 1998).
Ce qui valorise les haches, c’est leur longueur
et la finition du profil et du poli (miroir), traitements qui exigent la compétence de spécialistes
(et du temps) et qui retirent à l’objet sa valeur
fonctionnelle. Sa valeur de prestige est proportionnelle à la distance, soit au nombre de passages
de mains en mains, l’état final figurant l’aboutissement de ces transferts dont il conserverait en
quelque sorte la mémoire (cf. par exemple, en
ethnologie, les objets circulant dans la Kula mélanésienne : leur statut est proportionnel au nombre
et à la notoriété de ceux qui l’ont possédé, dont
la mémoire se transmet et circule avec l’objet :
Malinowski 1921 ; 1922 ; Mauss 1925).
Des aspects plus culturels ressortent également
de ces répartitions. Celles des haches en jadéite
verdâtre et en éclogite vert foncé mettent en évidence une ligne de démarcation Genève/Caen qui
recoupe une opposition “culturelle” entre le nord
(surtout des dépôts hors contexte funéraire) et le
sud (dépôts parfois associés à des sépultures).
Cette variation culturelle des contextes dans
l’espace est à rapprocher des variations diachroniques mises en évidence au Bronze final par
K. Kristiansen, avec l’oscillation dans le temps
entre dépôts isolés de type cache et dépôts funéraires (Kristiansen 1998, p. 74-75).
Il existe donc différentes politiques de dépôts,
qui relèvent d’une dialectique jouant sur tout
l’éventail des formes, et on ne peut étudier une
catégorie de dépôt et en saisir le sens indépendamment ou en ignorant les autres.
L’exemple des dépôts de grandes lames
pressigniennes (IIIe millénaire)
Le cas des lames en silex du Grand Pressigny
(Indre) est différent et complémentaire – voire
inverse – de celui des grandes haches. On n’entrera pas ici dans les détails, d’autant que les
inventaires régionaux en cours ne permettent pas
18
encore le même type d’approche de la diffusion
des produits à grande échelle.
On retiendra pour notre propos qu’il s’agit de
productions spécialisées relevant d’une technologie très sophistiquée qui enchaîne invariablement
une série d’étapes techniques extraction des
nucléus – préformage des nucléus selon exigences
très strictes combinant différents types de percuteur – débitage des lames – polissage et retouches
(possibles seulement si la pièce est polie, et avec
une technique très difficile à maîtriser) qui réclament des compétences et des savoir-faire dont la
maîtrise exige plusieurs années d’apprentissage.
Ce ne sont pas les habitants du Grand Pressigny
qui taillent et les tailleurs – des spécialistes donc semblent assurer la mise en forme finale des lames
en “poignards” une à une sur commande et à
demeure (Pelegrin 2002). La diffusion des produits
est préférentiellement bipolarisée : Bretagne/Jura
et Suisse, mais essaime vers le sud et vers le nord
jusqu’en Belgique et aux Pays-Bas. Des atelierssatellites aux mains des mêmes spécialistes ont
fonctionné plus momentanément en Bergeracois
(?), dans le Vercors, et en Champagne (?). On
connaît quelques dépôts isolés, répondant à au
moins deux motivations différentes bien illustrées
par la comparaison des “cachettes” de Barrou, La
Creusette (Indre-et-Loire) (Geslin, Bastien, Mallet
1975 ; Pelegrin 1997) et de Moigny, La Croix Blanche
(Essonne) (Mallet et al. 1994). Le premier, localisé
sur les gîtes de matière première, consistait en 140
lames brutes dont l’étude technologique montre
qu’il s’agit d’une fraction non sélectionnée d’un
ensemble initial de 500 à 800 lames tirées de 50
à 80 livre de beurre, soit une session de taille de
25 à 40 jours, et un fardeau de 21 à 22 kg pour
un ensemble initial de 77 à 124 kg. Il s’agirait
de la réserve d’un tailleur saisonnier colportant
lui-même ses produits, d’un spécialiste itinérant
(Pelegrin 1997, p. 33 ; 2003).
Le second, découvert aux environs de 1890,
est à plus de 200 km au nord-est des sources de
matière première. Il comportait quinze à vingt
lames dont treize sont conservées et quatorze
connues : toutes les lames sont retouchées (dont
trois en grattoir) mais non utilisées ; aucune ne
provient du même bloc (nucléus) ; les matières
premières attestent diverses origines au sein du
domaine pressignien. Il s’agit là d’un lot constitué
par accrétion, en sélectionnant et prélevant dans
les produits finis qui circulent à distance de la
“LES DÉPÔTS D’AVANT LES DÉPÔTS” : UN APERÇU HEXAGONAL DES PRATIQUES ANTÉRIEURES AUX ÂGES DES MÉTAUX
source, selon un processus de “thésaurisation”
bien différent du mode de constitution du dépôt
précédent. Initiative individuelle d’un Harpagon
chalcolithique ? Pratique communautaire ?
En tout état de cause, les poignards, très convoités, sont thésaurisés neufs (sans avoir servi) et
parfois déposés en nombre dans des tombes,
ou bien seuls en association avec armatures
pédonculées armoricaines, ambre, or, etc. dans les
ensembles tardifs du Campaniforme et du Bronze
ancien d’Armorique et du Wessex. Ils ont un rôle
de marqueur du genre (masculin) et de statut, et
certainement ont eux-mêmes le statut de bien de
prestige. Pourtant, en Suisse comme ailleurs, ils sont
utilisés pour moissonner (Beugnier, Plisson, 2004).
Et sur tous les habitats même les plus lointains, les
poignards brisés sont réutilisés pour fabriquer sur
place un petit outillage varié. Ce qui fait la valeur
du poignard – qui est une faucille – est la longueur
de la lame : brisé, il perd son statut.
ON NE NAÎT PAS (FORCÉMENT)
BIEN DE PRESTIGE, ON LE DEVIENT...
Dans cette perspective, le dépôt enfoui est une
opération qui soustrait l’objet à son devenir naturel,
le fige à jamais dans son statut, et fixe peut-être par la
même occasion et pour l’éternité le statut de son ou
ses détenteurs. Pour pousser la logique à son terme
et s’assurer que jamais il ne deviendra autre chose,
quoi de plus efficace alors que de le détruire rituellement (ce qui est différent de le casser à l’usage).
Les perspectives ouvertes ici par les dépôts antérieurs aux âges des Métaux quand aux mécanismes
qui président à leur constitution reposent sur le fait
que ces dépôts sont constitués d’objets lithiques,
dont la matière première est une, clairement localisée et non recyclable. Leur analyse technologique
permet d’associer spatialement diffusion, changements d’état et changements de statut.
Il en va bien différemment, tant au plan méthodologique qu’à celui de l’interprétation, si le
matériau associe deux matières premières dont les
sources sont géographiquement éloignées, et s’il est
en outre recyclable sans laisser de traces facilement
identifiables d’un état antérieur.
Ces quelques exemples antérieurs aux âges
des Métaux n’épuisent pas – loin s’en faut – la
diversité des pratiques qui caractérisent ces derniers (pour une revue générale : Bradley 1991 ;
2000 ; Kristiansen 1998 ; Wait 1995 ; Hill 1996). Ils
proposent cependant quelques points d’ancrage
susceptible de nourrir la réflexion.
En ce qui concerne la composition variable
des dépôts et leurs significations, ils montrent
notamment qu’il n’y a pas d’objet qui soit en
lui-même et a priori un bien de prestige. Lames
comme haches ont une fonction prosaïque dans
un système technique particulier : moissonner,
abattre des arbres, etc..
On pourrait voir dans l’adoption d’un tel matériau – comme c’est le cas justement avec le bronze
– l’extension d’une logique visant à l’intégration et
au contrôle plus ou moins centralisé d’espaces plus
vastes qu’auparavant, au risque en contrepartie, de
perdre ce contrôle par tarissement de l’une des sources, ou par “parasitage” de la circulation des produits,
détournés à fins de recyclage : le foyer métallurgique
n’est plus lié géographiquement à la localisation de
la matière première (ce que montre bien le vigoureux foyer métallurgique scandinave), et le statut
de l’objet devient relativement autonome de la
distance par rapport à cette dernière (de fait, les
dépôts métalliques de l’âge du Bronze tendent à
se concentrer sur les frontières entre techno-complexes : Brun et al. 1997).
Dans le cas des haches, le statut symbolique
de bien de prestige s’acquiert par une sélection
sur certains critères (la longueur), et par une suite
de transformations/traitements très techniques
qui lui confèrent progressivement un certain
aspect et son statut.
Il en va différemment pour les lames pressigiennes, où l’investissement technique important
qui préside à leur fabrication est d’emblée au
service du symbole. Mais on constate inversement
que ce statut peut se perdre. Dans tous les cas, être
bien de prestige est un statut et un état transitoires
d’un objet en devenir permanent !
Enfin, une solution au problème posé par
la nature duale des biens de prestiges et par la
dérive toujours menaçante qu’elle fait peser sur
leur statut serait de créer des biens de prestige qui
n’auraient d’autre fonction :
– par exemple en usant d’un matériau interdisant l’usage de l’objet (on pense aux haches
à douilles armoricaines en plomb, inutilisables
sans émousser au premier coup le tranchant !)
– ou bien en se satisfaisant d’une “image” de
l’objet (modèles réduits : micro-haches néolithiques, armes des sanctuaires laténiens ; ou
même figurations planes…)
19
PATRICK PION
–
ou bien en créant un objet sans autre usage :
on pense évidemment à la monnaie, car c’est
bien dans cette perspective qu’il faut envisager
plus tard l’apparition des monnayages d’or
et les nombreux dépôts dont ils firent l'objet,
contrairement aux espèces viles qui relevaient
d’une autre sphère de circulation.
La démarche n’aurait en effet aucun sens si l’on
n’envisage pas simultanément – dans une perspective structuraliste – les rapports dialectiques
et diachroniques qu’ils entretiennent nécessairement entre eux et avec les autres formes de dépôts
si largement attestées durant le millénaire qui clôt
la Protohistoire.
On l’aura compris à travers ce panorama
rapidement brossé : saisir les logiques à l’œuvre
derrière les pratiques très diversifiées de dépôts
métalliques, aux époques du Hallstatt et de La
Tène, exige d’abord de les documenter (inventaire, cartographie, chronologie, composition
fonctionnelle et techno-économique, contexte
de découverte…) mais ne saurait s’y cantonner.
D'ailleurs, ces pratiques ne s’arrêteront pas là,
loin s’en faut, et leur spécificité aux âges du Fer
ressortiraient certainement d’autant mieux d’une
approche comparative étendue aux périodes plus
récentes : romaine (Wilkins 1996 ; Rieckhoff 1998),
médiévale (Burkart et al. 2005), et même moderne.
Vaste et dense programme que cette table ronde
– en quelque sorte – inaugure.
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PATRICK PION
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NOTES
1. Soungir (près Vladimir, centre de la plaine russe, 27 700 av. J.-C.). Pour mémoire, trois sépultures à inhumation. I : homme adulte, 3 500 perles en
ivoire et dents de renard bleu cousues sur anorak en peau, pantalon et bottes en peau, nombreux bracelets, colliers et anneaux en ivoire. II : deux
squelettes tête bêche de jeunes adolescents : costume identique au précédent, parures innombrables (bracelets, anneaux et pendeloques en
ivoire), objets divers : statuettes en ivoire de mammouth et de chevaux, rondelles et épingles en ivoire, deux lances en ivoire de 2,42 m et 1,66 m
de long, onze javelots, trois poignards, bâtons percés, etc.
2. Par exemple grotte de Labastide : quatre grandes lames dissimulées dans une anfractuosité suspendue, au milieu d’une paroi peinte et
gravée ; grotte du Mas d’Azil : “cachette” de quatre grandes lames et d’un harpon en bois de renne posés côte à côte sur le sol d’un diverticule
très étroit accessible seulement par reptation ; grotte d’Enlène : trois grandes lames dans une fente de rocher au niveau du diverticule d’accès au
“sanctuaire” des Trois Frères ; Tuc d’Audoubert : grande lame dans une anfractuosité à l’entrée d’une chatière (Simonnet 1981).
3. Découverte fortuite de la fin du XIXe s., qui comportait 400 objets dont plus de 200 lames, groupés sur un petit espace à flanc de colline, à
dater probablement du Magdalénien supérieur. Les 112 pièces conservées au Musée Déchelette (Roanne) se répartissent en quatre nucléus unipolaires à lames, un grand nucléus prêt à être débité (préformé), 82 lames brutes, deux lames brutes semi-corticales, une lame à crête, sept outils
sur lame, douze éclats, trois éclats de ravivage Les caractéristiques de l’assemblage sont : l’origine exogène des matériaux (une source à 150 km
et 1 à 50 minimum) ; la très forte proportion de produits semi-finis ; l’homogénéité des lames brutes, de 8 à 18 cm, qui forment une série issue
d'un ou deux nucléus ; la présence d’outils “neufs” (sans ravivage). Le dépôt est interprété comme une cachette de “tailleur” qui transporte son
matériel : matière première de qualité, préformée (allégement) ; lames brutes prêtes à être retouchées en outils, quelques outils neufs (Surmely
et al. 2002).
4. Découverte fortuite de 1873, lors du creusement du canal latéral à la Loire : douze feuilles de laurier solutréennes disposées côte à côte et
de chant, conservées pour parties au MAN et au British Museum. La matière première est exogène (Gien), les dimensions des pièces exceptionnelles (23 à 35 cm) et l’investissement technique hors du commun. L’examen qu’en a fait J. Pelegrin (com/pers.) montre qu’elles n’ont jamais été
utilisées (tranchants frais sans aucun esquillage) : deux pièces présentent par ailleurs une fracture discrète intervenue en cours de fabrication,
qui fragilise les pièces à tel point qu’elles ont été “finies” en “maquillant”: elles ne pouvaient être utilisées.
22
À propos des vieux bronzes
du dépôt d’Arbedo (Italie)
essai de séquençage d’un ensemble complexe
Stéphane VERGER
Les “dépôts de bronzier” sont-ils des ramassis
aléatoires de fragments récupérés pour la refonte −
et doit-on alors les traiter comme des échantillons
représentatifs de la production ou de la consommation d’une communauté, c’est-à-dire avec des
outils statistiques simples (dans la lignée de Verron
1973, voir par exemple Coffyn, Gomez, Mohen
1981, p. 36-40 ; Garcia 1987, p. 10-11 et plus récemment Gabillot 2000 ; 2003) − ou bien peut-on y
reconnaître des lots cohérents d’objets entiers et
fragmentaires associés selon des modalités plus
ou moins complexes − et doit-on alors effectuer
un long travail préliminaire de mise en évidence
de divers types de connexions entre les pièces
enfouies ensemble ?
comme les restes d’équipement individuel (Verger
1998a). Le travail de Maréva Gabillot sur les dépôts
de l’âge du Bronze moyen (Gabillot 2000, p. 468)
et l’enquête, malheureusement encore inédite,
effectuée par Estelle Gauthier sur les dépôts de la
fin de l’âge du Bronze de la Bourgogne (Gauthier
2001) ont enrichi le corpus et précisé divers
points. La fouille exhaustive du nouveau dépôt de
Faréberviller en Moselle et son étude soigneuse,
que l’on doit à Cécile Véber (1998 ; 2002, notamment p. 76-77), ont offert à la réflexion un cas
exceptionnel dans lequel le caractère complet du
dépôt ne peut être mis en doute, contrairement
à ce qu’il advient généralement pour les dépôts
trouvés anciennement ou fortuitement.
Depuis que cette question a été abordée dans
un article sur les dépôts associant une panoplie
à une épée et un stock de métal sous forme
standardisée (Verger 1992), plusieurs études en
ont montré la pertinence, quoique l’approche
ait fait l’objet de critiques diffuses, qui n’ont
toutefois jamais été véritablement explicitées.
Divers exemples de dépôts comprenant un équipement personnel masculin ou féminin et une
ou plusieurs séries d’objets semblables ont été
examinées (Nicolardot, Verger 1998) et l’on s’est
attaché à définir plus précisément la nature et
les modalités de la constitution des lots identifiés
Un pas supplémentaire a été effectué par
Pierre-Yves Milcent, qui s’est attaché à identifier et
à décrire en détail des situations plus complexes.
Dans certains dépôts, il a reconnu les restes d’équipements personnels, masculin et féminin, formant
un couple, portant une attention toute particulière aux dépôts à connotation féminine (Milcent
2004, vol. I, p. 57, 187-196). Son analyse du dépôt
du Petit Villatte à Neuvy-sur-Barangeon dans le
Cher (Milcent 1998) a clairement montré, grâce à
l’identification de plusieurs groupes d’objets étrangers à la région d’enfouissement, que l’on pouvait
chercher une logique de regroupements par lots
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne- : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 23-55 (Bibracte ; 11).
STÉPHANE VERGER
individuels même dans les dépôts apparemment
les plus confus. Cela justifiait d’ailleurs rétrospectivement les cas les plus problématiques de ce
que j’avais appelé les dépôts de type Bühl-Briod,
comme justement celui de Bühl, sur lequel il faudrait sans doute maintenant revenir plus en détail.
Pierre-Yves Milcent a aussi donné une dimension
géographique et culturelle au groupe des dépôts
contenant un seul équipement personnel à épée,
montrant qu’à la fin de l’âge du Bronze ils étaient
caractéristiques du domaine continental mais à
peu près absents du domaine atlantique (Milcent
1998, p. 64, fig. 5 ; 2004, vol. I, p. 57-58).
Nous tenterons ici de faire encore un pas de
plus, à propos d’un cas apparemment désespéré
qui est généralement considéré, avec ceux de
Larnaud, de Vénat et de San Francesco à Bologne,
comme l’un des exemples types du grand dépôt
de bronzier contenant des objets destinés à la
refonte dans le cadre des activités d’un atelier,
amassés sans logique ou bien en fonction de critères exclusivement techniques.
Il s’agit du dépôt d’Arbedo dans le Tessin
(Italie), qui a été choisi pour sa complexité exceptionnelle, parce qu’il contient des types d’objets
rares que nous avons, par ailleurs, rencontrés
dans une recherche sur les circulations votives
archaïques en Méditerranée occidentale, mais
aussi parce qu’il a bénéficié d’une édition exhaustive récente admirable de la part de Martin Peter
Schindler (1998 ; 2000). Cette étude constituera
pour nous une base de référence irremplaçable et
nous n’y ajouterons que les informations supplémentaires auxquelles les hasards de la recherche
nous ont donnés accès, nous conduisant à proposer, de manière hypothétique, une interprétation
différente du dépôt, dans la lignée des recherches
précédemment mentionnées sur la composition
des ensembles métalliques complexes (sur les
diverses interprétations du dépôt d’Arbedo, voir
Schindler 1998, p. 35-36 ; Adam 2003, p. 304).
Le dépôt d’Arbedo a été mis au jour dans
une localité située immédiatement au nord de
Bellinzona, au confluent du Misox avec le fleuve
Tessin, qui se jette dans le lac Majeur à une vingtaine de kilomètres en aval. Plusieurs nécropoles
importantes du premier et du deuxième âges du
Fer ont été fouillées dans un rayon d’un kilomètre
et demi, autour du confluent (Cerinasca, Molinazzo,
San Paolo, Castione). Elles figurent parmi les ensembles de référence de la culture du Tessin. Il est vrai
24
1. Carte de situation d’Arbedo dans les Alpes centrales
(d'après Schindler 1998).
que l’endroit se trouve au débouché de la Valle
Mesolcina, qui permet d’accéder au col du San
Bernardino et, au-delà, à la haute vallée du Rhin
au niveau de Chur et de la haute vallée du Tessin,
qui conduit vers le col du Saint Gotthard et, de
là, à la haute vallée du Rhône ainsi qu'au lac de
Lucerne (ill. 1). Pour les VIe et Ve s. av. J.-C., la carte de
répartition des petites parures caractéristiques de
la culture de Golasecca montre bien l’importance
des circulations de produits et des personnes qui
suivaient ces itinéraires (Casini 2000, fig. 3 ; Kaenel
2000, fig. 1). C’est à partir du confluent que, venant
de la plaine du Pô, commence l’ascension vers le
cœur de la chaîne des Alpes, puisque d’Arbedo,
qui se trouve à 270 m d’altitude, on atteint en une
quarantaine de kilomètres des altitudes voisines de
2000 m.
C’est à 500 m environ, à l’est du confluent,
qu’un gros dépôt d’objets de bronze a été mis
au jour en janvier 1946. L’emplacement de la
trouvaille fit aussitôt l’objet d’une exploration de
contrôle de la part de l’archéologue Aldo Crivelli
et une grande partie du matériel, prélevée directement par l’inventeur, fut rapidement transférée au
musée de Bellinzona, où elle est encore conservée.
L’ensemble est donc à peu près complet, à l’exception de quelques objets qui ont été emportés par
des particuliers au moment de la découverte. Il a
fait l’objet de plusieurs publications partielles et a
bénéficié récemment d’une remarquable édition
exhaustive, accompagnée d’un très riche commentaire de la part de Martin Peter Schindler, dans la
collection de la Société Suisse de Préhistoire et
d’Archéologie.
Le dépôt se trouvait dans une fosse circulaire
de 55 cm de diamètre et 40 cm de profondeur
dont les parois étaient revêtues de galets et qui
était couverte par une dalle de pierre. On ne sait
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
rien sur la disposition des objets dans la fosse.
Le dépôt contenait environ 4 050 objets et fragments, dont 3 866 sont conservés. Le poids total
devait atteindre 44 kg (près de 43 actuellement).
92 % des objets présentent la même patine, les
autres se répartissent entre quatre autres états
de surface qui s’expliquent peut-être par la position qu’ils occupaient dans la fosse. Plus d’une
centaine de restes organiques ont été repérés et
une dizaine analysés. Il s’agit essentiellement de
restes de graminées, de quelques graines et d’un
cheveu humain. L’examen typologique complet a
confirmé que l’enfouissement avait eu lieu dans la
première moitié du Ve s. av. J.-C.
Les objets se répartissent en trois grandes
catégories :
– les objets finis, le plus souvent fragmentaires
(2 161) ;
– les fragments de lingots (114) ;
– les pièces liées à la manufacture : objets en
cours de fabrication, déchets de fonte et demiproduits (1 320), résidus de métal informes
(271).
Compte tenu de la grande quantité de pièces
liées à la fabrication d’objets de bronze, Martin
Peter Schindler, comme l’avaient d’ailleurs fait
la plupart de ses prédécesseurs, suppose un lien
étroit entre le dépôt et un ou plusieurs ateliers
de bronziers spécialisés d’une part dans la fabrication de petits objets, de parure notamment,
d’autre part dans la production de tôles et de
récipients. Il interprète donc le dépôt comme une
réserve de métal destinée à être refondue dans le
cadre des activités d’une fonderie ou de plusieurs
fonderies installées à proximité (Schindler 1998,
p. 23-25, 250-257). Les trois catégories de fragments
correspondraient ainsi à trois sources d’approvisionnement :
– le métal brut sous forme standardisée (les lingots) ;
– le recyclage interne (les objets en cours de
fabrication, déchets de fonte, demi-produits et
résidus informes) ;
– le recyclage externe (les fragments d’objets
usagés de fabrication régionale ou lointaine).
Ce schéma est convaincant et l’interprétation
fonctionnelle semble s’imposer même s’il reste
difficilement concevable que, dans un gros atelier de bronzier, une réserve d’une quarantaine
de kilogrammes de métal n’a pas été utilisée ou,
dans l’hypothèse d’une cessation brutale d’activité, transformée en lingots faciles à transporter ou
à échanger.
La seconde difficulté provient de la composition du lot de fragments d’objets manufacturés
qui comprend certes une grande majorité de petites parures en usage dans la région au cours du
demi-siècle qui a précédé l’enfouissement, mais
aussi une quantité non négligeable de pièces très
anciennes ou d’origine lointaine qui ne sont pas
attestées par ailleurs dans la région voire, dans
certains cas, dans l’ensemble du domaine nord
italique, alpin et transalpin. Même si ces pièces ont
fini leur existence dans un stock de bronze oublié
par ses propriétaires, on ne peut éviter de s’interroger sur les parcours parfois très complexes qu’elles
ont empruntés. Cette enquête, qui prendra appui
sur l’étude de Martin Peter Schindler, en en précisant certains aspects, conduira à effectuer des
regroupements différents de ceux qu’a proposés
cet auteur, pour tenter d’élaborer une interprétation plus nuancée de l’ensemble exceptionnel
que constitue le dépôt d’Arbedo. Pour cela, nous
examinerons de nouveau rapidement les quelque
2 161 fragments d’objets finis qui ont été recensés
dans la publication. Beaucoup d’entre eux ne sont
pas identifiables.
Les lots qui nous intéressent ici sont plutôt ceux
qui sont constitués d’objets anciens ou étrangers.
LA COMPOSITION DE L’ENSEMBLE DE
FRAGMENTS D’OBJETS MANUFACTURÉS
DU DÉPÔT D’ARBEDO
Objets et lots d’objets italiques
entre le Chalcolithique
et le début de la période orientalisante
Les objets les plus anciens sont originaires
de l’Italie centrale et septentrionale. Ils se répartissent entre quatre époques bien distinctes : le
Chalcolithique, le Bronze ancien, les XIIe-Xe s. av. J.-C.,
la seconde moitié du VIIIe et la première moitié du
VIIe s.
Les deux objets les plus anciens (ill. 2) sont
une hache plate chalcolithique (n° 17), qui n’a
sans doute pas été fabriquée dans la région, mais
dont les meilleurs parallèles se trouvent en Italie
centrale, et une lame de poignard triangulaire
du Bronze ancien (n° 204). On ne connaît pas le
parcours que ces pièces ont suivi avant d’être intégrées au dépôt et il est notamment impossible de
préciser à quelle époque la hache plate a été portée dans la région : au moment de son utilisation
primaire, pendant l’âge du Cuivre, ou bien plus
tard, en même temps que d’autres objets mis au
25
STÉPHANE VERGER
jour dans le dépôt, qui ont la même origine mais
sont bien postérieurs ? Cette question apparemment gratuite prendra tout son sens, on le verra, en
référence à la composition particulière d’autres
lots présents dans le dépôt.
Le deuxième groupe est un petit ensemble de
d’objets des XIIIe-Xe s. av. J.-C. (ill. 3). Ce sont essentiellement des parures de fabrication peut-être
régionale du Bronze récent (épingle n° 216, bracelets n° 208-209, fibule en archet de violon n° 211)
et final (épingle n° 207, fibule n° 212), auxquelles
s’ajoutent deux ustensiles de toilette plus exceptionnels (la pince à épiler n° 210, qui est d’un type
assez largement répandu entre l’Italie centrale et
le domaine nord alpin, et le rasoir n° 19 qui peut
être attribué au type de Terni, qui est caractéristique de l’Italie centrale) ainsi qu’un tronçon de
pointe de lance du Hallstatt A1.
Ce petit ensemble de fragment n’est pas sans
rappeler ceux qui, à l’âge du Bronze final, accompagnent les stocks de lingots − pani a piccone,
palettes à douille brutes et lingots plano-convexes
− dont on connaît maintenant d’assez nombreux
exemples dans la plaine orientale du Pô (à
Frattesina [ill. 4-6] : Salzani 1986, fig. 1 ; 2000, p. 44 ;
2003, fig. 3), dans le Frioul (Borgna 2000-2001), en
Romagne (à Poggio Berni : Morico 1984-1985, fig. 2,
10 et 13) et en Étrurie tyrrhénienne (Peroni 1961,
I. 5, p. 10-11), ainsi qu’au-delà des Alpes vers l’ouest
2. Fragments d’objets
de l’âge du Cuivre et
du Bronze ancien du
dépôt d’Arbedo
(d'après Schindler
1998).
(à Larnaud : Verger 1998b, p. 292-297, fig. 9) comme
vers l’est (en Slovénie, en Croatie et maintenant
aussi dans le sud-ouest de la Hongrie, comme
le montre Zoltán Czajlik dans un article sous
presse). On trouve à Arbedo la même association
caractéristique de types d’Italie du nord, d’objets
spécifiques de l’Italie centrale (le fragment de
rasoir) et de pièces qui constituent des sortes
de marqueurs des réseaux de relations à longue
distance en Italie et à travers les Alpes, comme les
pincettes à décor de bossettes (Delpino 1998, p. 25,
fig. 11). Par sa composition comme par le lieu de
sa découverte, le petit lot d’Arbedo s’intégrerait
parfaitement dans les diverses reconstitutions des
réseaux complexes de relations entre l’Étrurie
tyrrhénienne, l’Italie du Nord, l’arc alpin et à sa
proche périphérie septentrionale, à l’époque où
ceux-ci étaient, semble-t-il, contrôlés par les agglomérations artisanales de la plaine orientale du Pô,
comme le village de Frattesina (Bietti Sestieri 1998,
notamment p. 45-52 ; Cassola Guida 1999). Arbedo
se trouve, en effet, au départ ou au débouché d’une
voie qui devait jouer un rôle important dans les
circulations transalpines à l’âge du Bronze récent
et final. Rappelons simplement que deux dépôts
de l’âge du Bronze final composés essentiellement
de pani a piccone ont été mis au jour dans deux
localités des Grisons (à Schiers dans la vallée du
Langquart et à Filisur dans la vallée de l’Albula :
Keller-Tarnuzzer 1935 ; La Suisse 1998, fig. 105, 2),
dans une zone des Alpes qui, à proximité de la
haute vallée du Rhin, pouvait être reliée à l’Italie
du nord par le col du San Bernardino, à partir
duquel on passait nécessairement par Arbedo.
Six objets peuvent être attribués à la fin de
l’époque villanovienne et au début de la période
orientalisante (ill. 7). Il s’agit de deux rasoirs lunulaires villanoviens (n° 20-21) qui peuvent être
attribués, de manière générique, à un ensemble
de types caractéristiques de la seconde moitié du
3. Fragments d’objets de l’âge du Bronze récent et final du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
26
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
4. Fragments d’objets associés à des
lingots dans le dépôt 2 de Frattesina
di Fratta Polesine
(d’après Salzani 2000).
5. Fragments d’objets associés à des
lingots dans le dépôt 3 de Frattesina
di Fratta Polesine
(d’après Salzani 1986).
6. Fragments d’objets associés à des lingots dans le dépôt 4 de Frattesina di Fratta Polesine (d’après Salzani 2003).
27
STÉPHANE VERGER
7. Fragments d’objets italiques des VIIIe-VIIe s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
VIIIe et du début du VIIe s. et qui sont diffusés dans
l’ensemble de l’Italie centrale et jusqu’à Bologne
vers le nord. Le troisième objet de cette époque
est un bout de fermoir de ceinture rectangulaire
à deux crochets originellement ornés de têtes
animales (n° 22). Il est caractéristique de l’Étrurie
tyrrhénienne centrale et septentrionale dans la
première moitié du VIIe s. av. J.-C., même si quelques
exemplaires proviennent de l’Étrurie interne, du
Picenum, de l’Étrurie méridionale et du Latium. La
hache à ailerons terminés par des volutes (n° 18)
s’insère dans un groupe de types caractéristiques
de l’Étrurie et de l’Étrurie padane dans la seconde
moitié du VIIIe et au début du VIIe s. Elle présente un
détail morphologique rare, une paire appendices
latéraux à volute qui est attesté sur les haches des
très riches tombes A et H1 de la nécropole de
Casa Nocera à Casale Marittimo, dans la région
de Pise, qui datent de la première moitié du VIIe s.
(Esposito 1999, photographie p. 100 ; Morogi Govi
2000, p. 238-239, n° 270). Les deux derniers objets
de cette époque sont beaucoup plus modestes.
Il s’agit d’un côté d’un arc de fibule d’Italie du
nord des VIIIe-VIIe s. (n° 213) ; de l’autre, d’un arc
de fibule a navicella (n° 16) d’un type fréquent
en Italie du Sud, notamment dans les nécropoles
de Campanie mais aussi dans le Latium, dans la
seconde moitié du VIIIe et la première moitié du
VIIe s. Plusieurs exemplaires de ce type ont aussi
été mis au jour dans des sanctuaires d’Italie du
Sud et de Sicile (en particulier dans le sanctuaire
28
de la Malophoros à Sélinonte : Gàbrici 1927, fig.
155a). Ils peuvent alors provenir de strates ou de
contextes de la seconde moitié du VIIe ou de la
première moitié du VIe s., comme nous aurons
l’occasion d'en rappeler.
Un lot réuni en Sicile dans la seconde moitié
du VIIe et la première moitié du VIe s. av. J.-C.
La composante chronologique du dépôt qui
semble la plus hétérogène est celle qui couvre la
seconde moitié du VIIe et la première moitié du VIe s.
Les fragments de cette époque sont originaires de
régions très variées et ne présentent apparemment
aucune cohérence fonctionnelle. Seul un examen
très attentif de l’ensemble permet en réalité d’en
comprendre la logique de composition et de restituer l’histoire complexe de son rassemblement.
On reconnaît d’abord des fragments de vaisselles de fabrication grecque du VIe s. av. J.-C. (ill. 8).
Il est difficile de les dater avec précision dans la
mesure où, dans plusieurs cas, les meilleurs parallèles connus proviennent de sanctuaires grecs
non stratifiés. Les fragments d’Arbedo sont, pour
la plupart, extrêmement réduits ce qui empêche
aussi leur identification précise.
Le fragment le plus reconnaissable est une
partie d’attache d’anse annulaire mobile de chaudron (n° 181). Un récipient complet servait d’urne
cinéraire dans une tombe de Gela (Orsi 1906, col.
323-325, fig. 240). Un autre, très réparé, provient
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
8. Fragments de vases grecs du dépôt d’Arbedo
(d'après Schindler 1998).
du sanctuaire d’Olympie (Gauer 1991, p. 26-27 et
p. 182, pl. 16, 1). Des anses entières, très semblables,
proviennent des sanctuaires d’Héra de Perachora
(Payne 1940, pl. 35, 4) et du Cap Colonne près
de Crotone (Spadea 1996, p. 114, n° 31). Le type
apparaît sans doute dans la seconde moitié du
VIe s. Les exemplaires plus récents sont plus épais
et leur découpe est moins complexe (comme
dans le cas des exemplaires d’Apulie, datés jusque
dans la seconde moitié du Ve s.: Tarditi 1996). On
trouve ensuite une bobine avec la trace de l’emplacement de la fixation sur le vase (n° 176, non
représenté). Un tronçon de couronne de support
à trois pieds (n° 183) appartient sans doute à
un podanipter archaïque. La portion d’applique
discoïdale à motif de pétales rayonnants n° 184
doit sans doute être rattachée à un récipient de
fabrication grecque, même si l’on ne peut guère
être plus précis (s’agit-il par exemple d’un disque
d’attache d’anse de bassin ?). Deux extrémités
d’anses à charnières proviennent de chaudrons à
attaches d’anses ornées d’une palmette (n° 178179) d’un type bien connu en Grèce, par exemple
à Olympie (Furtwängler 1890, pl. 50, n° 825, 827 ;
Gauer 1991, p. 48-58, pl. 35-46, notamment 36, 38
et 41) et à l’Héraion d’Argos (Waldstein 1905,
p. 292, pl. 122, n° 2177). Le type est attesté depuis
le milieu du VIe s., mais persiste, avec une décoration plus grossière, jusqu’à la fin du Ve s. dans les
Balkans et dans le sud-est de l’Italie (Tarditi 1996,
p. 59-65). Un tout petit fragment (n° 177) creux et
fortement bombé, orné de trois pétales de palmette, pourrait faire partie de l’ornement inférieur
d’une attache d’anse de ce type, semblable par
exemple à celle qui a été mise au jour près de
l’édifice cultuel archaïque du sanctuaire de Santa
Anna près d’Agrigente en Sicile (Fiorentini 1969,
p. 67, note 6, pl. 36, 1-2). Enfin, l’extrémité de branche latérale d’anse de cruchon (n° 137) pourrait
être plutôt grecque qu’étrusque. Il ne s’agit pas de
toute façon d’un fragment d’oenochoé rhodienne
(Schindler 1998, p. 79). Des comparaisons précises
se trouvent sur une anse de cruchon du sanctuaire de Bitalemi à Gela en Sicile et sur une autre
du sanctuaire du Cap Colonne près de Crotone
(Spadea 1996, p. 113, n° 29).
Martin Peter Schindler considère que le fragment n° 182 est la partie centrale d’une anse mobile
de podanipter de taille moyenne. Les exemplaires
de comparaison les plus proches proviennent du
sanctuaire d’Olympie et sont datés par W. Gauer
de la seconde moitié du VIe s. (P9-11 : Gauer 1991,
p. 238, pl. 58). On peut toutefois noter qu’à la différence de l’ornement côtelé qu’ils portent, celui
d’Arbedo n’est pas parfaitement symétrique, ce qui
est curieux, même si l’on suppose une maladresse
de fabrication. Cette particularité s’explique en
revanche parfaitement si l’on interprète le fragment comme un ornement latéral d’anse mobile
de récipient. Il faudrait alors restituer une anse plus
grande, comparable, pour la forme comme pour
les dimensions, à celles du chaudron de la tombe
princière de Hochdorf (Biel 1985, pl. 37 ; Bieg 2002,
fig. 93). Le fragment d’Arbedo devait appartenir à
une anse légèrement plus petite mais, si les proportions étaient les mêmes que sur l’exemplaire trouvé
en Allemagne, sa largeur atteignait environ 24 cm,
au lieu de 26 pour les exemplaires de Hochdorf (ill.
9). La comparaison avec ce vase exceptionnel est
compliquée du fait que ses anses à bobine appartenaient à l’origine à un autre récipient et n’ont
été adaptées au chaudron actuel que dans un
second temps. Quoi qu’il en soit, le dépôt d’Arbedo
contient bien un fragment de très grand vase grec
de la seconde moitié du VIe s., comparable aux plus
importants récipients fabriqués à cette époque.
Ajoutons une importante série de fragments
de fonction ou d’origine indéterminées qui trouvent toutefois de bons parallèles parmi les objets
de la couche 5 du sanctuaire de Bitalemi à Gela,
comme les nombreux fragments de râpes (n° 50113) et les objets n° 1247, 1249, 1 258. On reconnaît
aussi un petit poids de métier à tisser pyramidal
(Schindler 1998, pl. 52, n° 1232) dont la forme évoque celle d’un exemplaire comparable mis au jour
sur l’acropole de Gela.
29
STÉPHANE VERGER
9. Disposition du fragment n°182 d’Arbedo sur une grande anse
à bobine. Ici, d’après Bieg 2002, une des anses du chaudron de
Hochdorf (en arrière plan) réduite aux proportions restituables de
l’exemplaire d’Arbedo (au premier plan, avec le fragment d’Arbedo).
10. Fragments de clous et d’éléments d’ameublement ou de bâtiment grecs du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
30
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
À côté de ces restes, il faut attirer l’attention,
plus clairement que ne l’a fait M. P. Schindler sur
un ensemble exceptionnel d’ornements de meubles grecs archaïques (ill. 10). Le premier fragment
(n° 186) qui peut lui être attribué provient d’une
poignée en bronze qui recouvrait des tiges de
fixation en fer. Elle devait équiper un coffre ou un
meuble de forme indéterminée. Un autre objet très
caractéristique est la grosse tête-de-clou conique
n° 187. Plusieurs exemplaires semblables proviennent de sanctuaires de Grèce (Olympie et Argos :
Furtwängler 1890, pl. 67, n° 1221 ; Waldstein 1905,
p. 326, pl. 134, n° 2749-2 750), mais ils sont surtout
fréquents en Sicile. Ils sont présents dans les sanctuaires : dans celui de la Malophoros à Sélinonte
(Gàbrici 1927, fig. 154, h-i) ; dans la déposition 6 de
Santa Anna à Agrigente (Fiorentini 1969, pl. 35, 2, 4) ;
dans le bothros d’Éole de Lipari, qui en contient
deux exemplaires (Bernabò Brea 1998, p. 48, fig. 12ef). On les trouve aussi dans les nécropoles, comme
l’exemplaire malheureusement erratique de celle
de Buffa à Sélinonte (TR. IX, 6 : Meola 1996, p. 264,
pl. 225) et ceux de la tombe 28 du Fusco à Syracuse
(Orsi 1893, p. 456). Dans cette grande fosse, Paolo
Orsi en mit au jour 24 exemplaires à tige de bronze
répartis sur la longueur de trois des parois (nord,
est et sud). Ils devaient orner la caisse du cercueil,
plutôt qu’un lit funéraire. Ils étaient associés à onze
clous plus petits à tête circulaire bombée et à tige
droite en bronze de 7 cm de long environ, à section
quadrangulaire.
C’est exactement cette forme que présente
le clou à grosse tête (n° 958) et, de manière plus
générale, les exemplaires déformés (n° 959-9641)
et les cabochons fragmentaires en tôle (n° 9991 001 et 1008-1010). L’un d’entre eux (n° 959)
présente une tige deux ou trois fois coudée. Il est
exactement identique aux 36 clous ornementaux
de la tombe M de la nécropole de Rifriscolaro à
Camarina (indication fournie par Paola Pelagatti)
et aux 9 clous de la très riche tombe 1 de la
nécropole du Giardino Spagna à Syracuse (Orsi
1925, p. 186, fig. 12). On peut aussi rapprocher
l’exemplaire (n° 958) d’un grand clou en bronze
mis au jour dans le secteur méridional de l’habitat
de la cité de Mégara Hyblaea (Gras, Tréziny, Broise
2004, p. 214, fig. 250). De nombreux exemplaires
ont, en fait, été inventoriés dans les nécropoles
grecques de Sicile méridionale (Meola 1996, I, p.
264). Compte tenu de la très grande rareté de ce
type d’objet dans le nord de l’Italie, du caractère
relativement peu précis des rares comparaisons
disponibles et de l’association avec un clou grec
à tête “en chapeau de chinois”, il faut se résoudre
à voir dans cette série d’une dizaine de clous en
bronze à grosse tête bombée, des ornements de
meuble ou de cercueil grecs du VIe s. av. J.-C. La
même question doit être posée pour les clous
à tige en fer et grosse tête bombée directement
coulée sur la tige (n° 967-998), pour lesquelles il
existe quelques comparaisons régionales exactes
et plusieurs exemplaires en cours de fabrication
dans le dépôt d’Arbedo même (n° 2032-2 035).
Que dire des grands clous en bronze à petite tête
discoïdale plate, à tige quadrangulaire plusieurs
fois recourbée (n° 1145-1 146) dont il n’existe pas
de parallèles régionaux, mais qui sont tout à fait
identiques aux clous d’architecture grecs qui existent depuis l’époque archaïque ? À titre d'exemple,
plusieurs exemplaires ont été mis au jour dans
l'épave archaïque de Gela, qui a coulé au début du
Ve s. av. J.-C. (Fiorentini 1990, p. 27, pl. 11, 7).
L’auteur de la monographie attribue aux Grecs
un autre petit groupe d’objets qui revient en fait
aux cultures indigènes de l’âge du Fer de la Sicile
(ill. 11). On reconnaît deux fragments certains de
plaques de fixation d’anse de chaudron triangulaires à anneau central, du type de celles du dépôt
du Mendolito à Adrano (n°170-171). Elles sont
simples et sans décor visible. L’exemplaire n° 171
ressemble beaucoup à l’un des fragments présents
dans un dépôt de bronze actuellement conservé
à Sciacca en Sicile sud-occidentale. Il n’est pas
impossible, comme le suggère l’auteur, que le fragment n° 1188 fasse partie de la même série.
Les n° 172 et 173 sont des tronçons de flammes de pointes de lance qui présentent une
nervure centrale hexagonale aplatie ou à facettes.
Elles s’intègrent dans la série des grandes lances
siciliennes du VIIIe s. av. J.-C. qui sont également très
bien représentées au Mendolito. Le degré de fragmentation est très élevé, comme c’est le cas pour
les deux fragments de la couche 5 du sanctuaire
de Bitalemi à Gela (ill. 15, n°3-4). Il n’est pas impossible que certains des fragments de lance moins
caractéristiques, comme les n° 1112-1114, soient
également d’origine sicilienne.
Il faut revoir également l’attribution des fragments de parures annulaires (n° 174-175), qui sont
considérés comme grecs simplement parce qu’ils
ressemblent à des exemplaires des sanctuaires de
Pérachora et de Bitalemi. Comme nous l’avons
montré par ailleurs, ces derniers sont en fait originaires de différentes régions de la Gaule (Verger
2000 ; 2003a), ce qui doit également être le cas
31
STÉPHANE VERGER
11. Fragments d’objets indigènes de Sicile du dépôt d’Arbedo
(d'après Schindler 1998).
12. Fragments de parures annulaires gauloises du dépôt d’Arbedo
(d'après Schindler 1998).
32
des fragments d’Arbedo. Le groupe à considérer
est d’ailleurs plus important, car il faut adjoindre
aux deux pièces mentionnées les n° 1140-1 143
et 1224-1226. Examinons plus en détail ces neuf
objets (ill. 12).
Le plus caractéristique est le n° 1126. Il s’agit
d’un petit bout d’anneau de jambe tubulaire à
groupes de bossettes anguleuses séparés par des
surfaces planes originaire du Massif Central, plus
précisément de l’Auvergne (ill. 13, n° 1 ; ill. 15, n°6;
ill. 17, n°5 ; Milcent 2004, vol. I, p. 173, fig. 84, Jb.25.
XI.a.: groupe de Moissat). Le n° 1225 provient d’un
anneau de jambe à grosses bossettes creuses
arrondies du centre de la France (Milcent 2004, vol.
I, p. 173, fig. 84, Jb.20.XI ; Verger 2003b, p. 534, fig. 7,
1-3). Plusieurs fragments de ce type proviennent
du dépôt de Roque-Courbe à Saint-Saturnin dans
l''Hérault (ill. 17, n°2 ; Garcia 1987, fig. 10, 14-15).
Le fragment n° 175 est orné de bossettes creuses
anguleuses jointives. Il peut s’agir d’un tronçon
d’anneau de jambe à groupes de bossettes creuses anguleuses séparés par des filets, tel qu’il
en existe plusieurs exemplaires dans l’ensemble
conservé à Sciacca, à Bitalemi (ill. 15, n°12 ; voir
aussi un fragment des fouilles d'Orsi : 1906, col. 722,
fig. 555) et dans le dépôt de Roque-Courbe à SaintSaturnin (ill. 17, n° 3 ; Garcia 1987, fig. 10, 12, 15 et
30 par exemple). Le n° 174 présente une extrémité
intacte et porte un décor de bossettes séparées par
des paires de filets, comme un fragment de l’ensemble conservé à Sciacca. Les fragments n° 1140
et 1141 entrent dans la série des anneaux de
jambe pleins à groupes de bossettes anguleuses
séparés respectivement par des groupes de filets
et des surfaces planes. Le n° 1141 peut être comparé, par exemple, à un bracelet de la tombe 2 du
tumulus 21 de Laurie dans le Cantal (ill. 13, n° 2 ;
Milcent 2004, pl. 10, 2) Tous les quatre doivent être
originaires du centre ou du centre-est de la France.
Le n° 1142 est un tronçon d’anneau de jambe
rubané à bossettes basses séparées par des filets
semblables à un fragment de Bitalemi (ill. 15, n°
10) et surtout à la série mise au jour dans la tombe
7 du tumulus de Courtesoult en Haute-Saône (ill.
13, n° 4 ; Piningre 1996, fig. 26, p. 93-94, fig. 100-102 ;
Verger 2003b, p. 538, fig. 5-6, 8). La largeur de l’exemplaire d’Arbedo (1,5 cm) est intermédiaire entre
celle des exemplaires franc-comtois (1,2 cm) et
sicilien (1,7 cm). Il peut être rangé parmi les
anneaux de jambe rubanés de la Bourgogne et de
la Franche-Comté du Hallstatt D1. Le n° 1143 est
un tronçon de parure annulaire à petites bossettes
jointives, sans doute très usé sur les tranches. Enfin
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
13. Quelques pièces de comparaison
pour les fragments de parures annulaires
gauloises du dépôt d’Arbedo. 1. Moissat
(Puy-de-Dôme, d’après Pommerol,
Milcent 2004) ; 2. Laurie (Cantal),
tumulus 21, sépulture 2 (d’après Milcent
2004) ; 3. Ecury-le-Repos (Marne,
d’après Brisson 1941) ; 4. Courtesoult
(Haute-Saône), tombe 7 (d’après
Piningre 1996).
le n° 1224 provient d’un gros anneau de jambe à
bossettes hautes. Il pourrait être originaire de la
Champagne (ill. 13, n° 3 ; ill. 15, n° 9 ; Brisson 1941,
fig. 5 ; Lepage 1989, p. 321-329, fig. 1-4). Toutes ces
parures annulaires gauloises datent du Hallstatt
D1, c’est-à-dire de la fin du VIIe ou des deux premiers tiers du VIe s. Par ailleurs, deux fragments de
tôle épaisse courbée (ill. 12, n°1227, 1479) classés
parmi les non identifiés, pourraient provenir de
haches à douille du type de celles que l'on trouve
dans les dépôts laucaniens du Languedoc. Ils
peuvent être comparés précisément à des débris
du dépôt de Saint-Saturnin (ill. 15, n° 7) et du sanctuaire de Bitalemi (ill. 17, n°1).
C’est à la même époque que l’on peut attribuer
une série de fragments de récipients étrusques de
types généralement attribués à des ateliers l’Étrurie interne des deux premiers tiers du VIe s. av. J.-C.
(ill. 14). L’une des pièces les plus reconnaissables
est un embout de vasque d’infundibulum (n° 153)
auquel on peut associer l’extrémité du manche
d’une passoire de même type (n° 154). Cette forme
particulière de filtre-entonnoir apparaît, sans doute,
dans le deuxième quart du VIe s. et reste en usage
pendant une partie au moins de la seconde moitié
du siècle.
Les n° 130 et 131 sont des fragments d’attaches
de poignée d’un type de bassin généralement
monté sur trépied dont on peut attribuer la fabrication à des ateliers l’Étrurie interne actifs dans
les deux derniers tiers du VIe s. Plusieurs autres
fragments proviennent, peut-être, du même type
de récipient, voire du même exemplaire : une patte
de félin schématisée (n° 132) et une épaisse barre
rectiligne (n° 133), qui pourraient faire partie d’un
support à trois pieds, et une tige coudée (n° 195),
peut-être un angle de poignée.
Deux fragments de petites roues (n° 48-49) ont
été identifiés par M. P. Schindler comme des pièces
de support de brasero. Ce type de récipient doit
avoir à peu près la même datation que les deux
précédents. Il est diffusé avant tout en Étrurie
interne, ce qui suppose vraisemblablement une
fabrication dans cette région, peut-être à Orvieto.
Parmi les fragments de vases non identifiés, on
trouve une série de parties de panses de vases sans
doute tronconiques à carène haute et col oblique
tourné vers l’intérieur, qui s’épaissit régulièrement
jusqu’à la lèvre (n° 1154-1 158). Ils semblent appartenir à deux vases différents au moins. Un fragment
présente une perforation sur le col (n° 1154). On
peut y reconnaître des fragments de situles tronconiques du type de Crossac (sur ce type voir
33
STÉPHANE VERGER
14. Fragments de vases et d’ustensiles de banquet étrusques du
34
VIe
s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
notamment Nortmann 1998 ; Grassi 2003, p. 495, fig.
3b). Cette forme particulière, largement diffusée
au nord des Alpes, est aussi bien présente dans
les nécropoles de l’Étrurie interne et des Abruzzes
dans les deux premiers tiers du VIe s. Il s’agit probablement d’une production l’Étrurie interne.
On compte donc un ensemble chronologiquement et culturellement homogène d’au moins six
vases sans doute fabriqués en Étrurie interne dans
les deux premiers tiers du VIe s. av. J.-C. On pourrait
ajouter au même groupe quelques fragments de
pieds annulaires de vases qui, toutefois, sont trop
fragmentaires et trop simples pour être identifiés
avec certitude (n° 143-152). Une attache d’anse
(n° 23) pourrait provenir soit d’une situle fabriquée en Étrurie padane ou sur la côte adriatique,
soit d’une petite ciste à cordons de type Novilara
ou Ancône, une série fabriquée exclusivement
dans le Picénum. L’objet daterait alors de la fin du
VIIe ou de la première moitié du VIe s. av. J.-C.
Le dépôt d’Arbedo contient donc un ensemble composite de pièces qui, au premier examen,
ne semble présenter aucune cohérence, mais qui,
si on le compare à certaines autres séries, s’avère
avoir été constitué selon une logique complexe.
On y trouve associés des parures annulaires du
Hallstatt D1 du centre de la Gaule également présentes dans les dépôts “launaciens” du Languedoc,
quelques objets caractéristiques des dépôts métalliques de la Sicile interne de la seconde moitié du
VIIIe ou de la première moitié du VIIe s., plusieurs
fragments de vases étrusques probablement fabriqués en Étrurie interne dans les deux premiers
tiers du VIe s., des restes de vases grecs fréquents
dans les sanctuaires grecs, notamment en Sicile
au VIe s. et des clous d’ameublement d’un type
bien attesté dans les habitats, les nécropoles et
les sanctuaires grecs de Sicile au cours du VIe s.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, cet
assemblage improbable n’est pas propre au dépôt
d’Arbedo. On le retrouve en effet dans un petit
nombre de dépôts votifs de Sicile méridionale.
L’ensemble le plus caractéristique de ce point de
vue est le dépôt de bronzes conservé à Sciacca dans
la collection de Primo Veneroso, qui contient plusieurs centaines de tronçons de parures annulaires
du Hallstatt D1 de la Gaule du sud et du centre, divers
fragments d’objets de l’âge du Fer sicilien (plusieurs
grandes lances et de rares fragments d’anses de chaudrons), une extrémité de manche d’infundibulum
étrusque, une série d’éléments de vases métalliques
grecs du VIe s. (anses de bassins, support à pieds en
forme de patte de félin, embouchure d’aryballe) et
une plaque de serrure également grecque. Ajoutons
à cette liste plusieurs fibules a navicella tyrrhéniennes du VIIe s., proches du type du fragment n° 16
d’Arbedo. L’ensemble ne contient pas d’objets certainement postérieurs au troisième quart du VIe siècle.
Dispersés dans les dépôts et parmi les objets isolés de la couche 5 du sanctuaire de Bitalemi à Gela
(Orlandini 1965-1967 ; 1966 ; Verger 2003a, p. 530538, fig. 3-8), on reconnaît de la même manière
plusieurs dizaines de tronçons de bracelets et
d’anneaux de jambe de Gaule du Sud et du Centre,
de petits restes de lances et plusieurs fragments
d’anses de chaudrons indigènes de Sicile (ill. 15),
une olpé haute probablement étrusque du VIe s.
et divers objets grecs du VIe s., parmi lesquels une
anse d’olpé. Le dépôt et l’enfouissement de tous
ces objets ont eu lieu du dernier quart du VIIe au
troisième quart du VIe siècle.
Au centre du bâtiment archaïque principal du
sanctuaire de Santa Anna à Agrigente se trouvait un
grand vase de fabrication indigène − le pithos du
dépôt 6 − qui était rempli de fragments de lingots
de cuivre ou de bronze (Fiorentini 1969, notamment p. 71-76, pl. 35). Parmi les quelques fragments
d’objets associés au métal brut, on peut mentionner plusieurs pièces indigènes de Sicile (comme
des “astragales” décorés), des bouts de vases grecs
(comme une attache d’anse de podanipter) et une
grosse tête de clou moulurée semblable au n° 187
d’Arbedo. On pourrait aussi comparer une douille
à deux appendices courbes au pommeau du poignard hallstattien de la tombe 10 du tumulus 5 de
la nécropole de Chabestan dans les Hautes-Alpes
(Mahieu, Boisseau 2000, fig. 64, 3 ; Verger 2003b,
p. 540).
L’association d’objets, des VIIe et VIe s. mise
en évidence dans le dépôt d’Arbedo, est trop
caractéristique pour que la ressemblance avec les
ensembles de Sicile soit le produit d’une simple
coïncidence. On peut plutôt supposer que l’on a
affaire à un ensemble réuni en Sicile méridionale
dans la seconde moitié du VIe s. Examinons plus en
détail les caractéristiques et l’histoire de ce type de
lots de fragments d’objets de bronze.
Nous avons tenté de restituer la chaîne d’opérations qui a pu conduire à la constitution de
ces ensembles composites de la Sicile méridionale. Résumons ici les résultats de l’enquête, qui
conservent, par bien des aspects, un caractère
hypothétique (ill. 16).
35
STÉPHANE VERGER
16. Essai de restitution des étapes de constitution du lot “sicilien”
du dépôt d’Arbedo dans le contexte des circulations votives entre
la Gaule et la Sicile dans la seconde moitié du VIIe et la première
moitié du VIe s. av. J.-C. (S. Verger).
15. Fragments d’objets indigènes de Sicile et de parures annulaires gauloises du sanctuaire de Bitalemi à Gela (S. Verger).
On peut supposer qu’il existait dans certaines
cités grecques de cette région dans le dernier tiers
du VIIe et les deux premiers tiers du VIe s. deux formes principales de stockage probablement public
du bronze : d’un côté des réserves de fragments de
lingots, de l’autre des dépôts de fragments d’objets
non grecs. On ne peut guère préciser plus le mode
de formation de la première forme, qui est documentée par le pithos 6 de Santa Anna à Agrigente,
faute d’étude morphologique et chimique précise
des lingots. En revanche, diverses observations permettent de restituer la dynamique de formation du
second type de stock, qui est illustré par le dépôt
conservé à Sciacca. Y étaient regroupés des objets
presque exclusivement non grecs apportés soit
36
sous forme d’objets isolés, utilisés sur place par les
Grecs comme objets usuels (les vases étrusques par
exemple), liés à des pratiques spécifiques (comme
les vases originaires du nord du Caucase) ou bien
utilisés comme amulettes (comme les perles et
petites pendeloques de Sicile indigène, de Gaule
du Sud et des Balkans), soit sous forme de lots
constitués. Parmi ces derniers, on peut mentionner
des lots de fragments d’objets indigènes de Sicile,
sans doute rassemblés dans l’intérieur de l’île selon
les mêmes modalités que pour la constitution des
dépôts métalliques indigènes, comme celui du
Mendolito (Albanese Procelli 1993, p. 109-207) et
les lots d’objets gaulois.
Pour ces derniers, la chaîne d’opérations qui a
conduit à leur rassemblement est plus longue. En
effet, les cas connus présentent une composition
très semblable à celle de certains dépôts de bronze
launaciens du Languedoc, en particulier celui
de Roque-Courbe à Saint-Saturnin dans l’Hérault
(Garcia 1987). On y trouve les mêmes catégories
et types d’objets dans des proportions semblables,
mais aussi dans un état de fragmentation identique
(ill. 17). Ces ensembles, eux-mêmes hétérogènes,
sont le fruit du regroupement de pièces originaires
de diverses régions − le Languedoc mais aussi plusieurs zones de la Gaule du centre, du sud du Massif
Central à la Bourgogne et même à la Normandie. Il
faut sans doute imaginer plusieurs étapes dans la
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
réunion et la fragmentation des objets, tout au long
du trajet entre les régions d’origine des pièces et
le Languedoc. Il faut supposer qu’il existait aussi,
dans cette dernière région, des stocks de fragments
de métal qui ont été, pour une part, enfouis sur
place et pour une autre transportés jusqu’en Sicile
méridionale et incorporés là dans les réserves de
bronzes manufacturés non grecs.
Ces réserves de métal n’étaient pas immédiatement enfouies. Elles étaient accessibles et l’on
pouvait en extraire des pièces isolées ou de petits
lots, par exemple pour les besoins de certaines
pratiques cultuelles publiques − comme le montre
l’examen des dépôts mis au jour dans la couche 5
du sanctuaire thesmophorique de Bitalemi à Gela −
ou privées − comme l’indiquent les trouvailles effectuées récemment dans les niveaux les plus anciens
des maisons des abords de l’agora de Sélinonte
(indication fournie par Dieter Mertens et Sophie
Hellas).
Les quelques pièces grecques de vaisselle et
d’ameublement que l’on trouve dans ces réserves de métal semblent dater de la toute dernière
phase de la constitution de celles-ci, c’est-à-dire
du troisième quart du VIe s. Ces fragments d’objets
manufacturés grecs ont modifié la composition
originelle des deux types de réserves de métal
puisqu’ils apparaissent à la fois dans les stocks de
fragments non grecs − dans le dépôt conservé à
Sciacca − et dans les stocks de métal brut − dans le
pithos 6 du sanctuaire de Santa Anna à Agrigente.
Il s’agit peut-être des derniers ajouts effectués
avant l’enfouissement définitif des différentes
réserves de bronze. Cette dernière opération est
documentée dans le cas du pithos 6 de Santa
Anna. Le vase rempli de bronze a été enterré au
centre du bâtiment principal du sanctuaire et l’on
a placé au-dessus une petite tasse et un fragment
de coupelle en céramique ainsi que deux lames
de couteau en fer, possible ustensiles d’une libation et d’un sacrifice effectués à l’occasion de la
clôture définitive du dépôt (Fiorentini 1969, p. 72,
pl. 34.1-3, 9-10).
Le lot “sicilien” du dépôt d’Arbedo peut donc
être rattaché à un phénomène spécifique de
stockage sélectif du bronze tel qu’il apparaît dans
certaines cités grecques de Sicile méridionale,
plus précisément dans le troisième quart du
VIe s. (en raison de la présence des fragments de
vases et de meubles grecs caractéristiques de la
dernière phase de constitution des réserves de
métal). La présence d’un tel lot dans le Tessin
17. Fragments de parures annulaires gauloises du dépôt de
Roque-Courbe à Saint-Saturnin (Hérault), d’après Garcia 1987.
ouvre des perspectives historiques inédites qui
dépassent largement le cadre de la présente étude,
mais dont on peut résumer les termes, simplement
pour montrer ce qu’un ensemble, comme celui
d’Arbedo, peut apporter à la connaissance fine des
réseaux de contacts à longue distance.
Après le milieu du VIe s., on ne décèle plus d’indices de relations maritimes directes entre la Gaule,
et plus particulièrement le Languedoc, et la Sicile
méridionale grecque (Verger 2003b, p. 569-571). Ce
fait est sans doute dû à une transformation des
conditions de navigation qui intervient à l’époque
de la bataille d’Alalia. C'est, en effet, alors que se
mettent en place de grands domaines maritimes
contrôlés par les Phocéens de Massalia au nord et
les Carthaginois au sud, qui laissent peu de place
à d’autres trafics de grande ampleur. C’est précisément de cette époque que l’on peut dater la
constitution de l’ensemble “sicilien” d’Arbedo.
D’autres indices suggèrent que des relations
plus directes s’instaurent dans la seconde moitié
du VIe s. entre la Sicile et le domaine de Golasecca.
Rappelons ainsi qu’une ciste à cordons caractéristique des productions de cette dernière région a
été mise au jour en Sicile orientale, sans doute à
Terravecchia, un centre indigène hellénisé situé
à une trentaine de km à l’ouest de la cité grecque de Leontinoi (Orsi 1915-1918 ; Minozzi 2001 ;
Verger 2003a). Elle est associée à un couvercle
orné d’une frise zoomorphe (ill. 18, n° 1) dont on
trouve les meilleurs parallèles sur les situles en
37
STÉPHANE VERGER
18. Le couvercle de la ciste à cordons de Terravecchia et ses parallèles. 1. Terravecchia ; 2. Trezzo sull’Ada ;
3. Hochdorf (d’après Orsi 1915-1918 ; de Marinis 1974 ; Biel 1985) ; 4. Fliess (d’après Sydow 1995) ;
5. Como, Ca’Morta (d’après Saronio 1968-1969) ; 6. Hallstatt (d’après Kromer). Échelles diverses.
bronze de la tombe Baserga de la Ca’Morta près
de Côme (ill. 18, n° 5 ; Saronio 1968-1969 p. 4961) et de Trezzo sull’Ada (ill. 18, n° 2 ; de Marinis
1974), mais surtout sur la banquette de la tombe
princière hallstattienne de Hochdorf (ill. 18, n° 3 ;
Biel 1985, fig. 54, pl. 25 ; Trésors 1987, p. 174-175).
La construction même du dessin des animaux
se retrouve sur divers types de supports dans la
zone de la culture de Golasecca et dans le Tessin,
comme par exemple la plaque de ceinture de
la tombe 26 de Cerinasca d’Arbedo (de Marinis
2000b, fig. 10) ou le vase en céramique orné de
chevaux d’Osco (Ravaglia 2000, fig. 4). Le rapprochement avec la banquette de Hochdorf suggère
que le vase mis au jour en Sicile peut dater lui
aussi du troisième quart du VIe siècle.
D’autres récipients originaires du nord-ouest
de l’Italie proviennent de sites de Sicile orientale.
Ils sont moins bien datés mais pourraient être plus
récents. Il s’agit d’une part d’une autre ciste à cordons trouvée dans une tombe de Paternò (Rizza
1954, p. 138-141) et surtout d’une situle de type
“rhénano-tessinois” provenant d’une nécropole de
Léontinoi (Orsi 1899 ; de Marinis 2000a, p. 350, fig. 6).
L’objet est intéressant à cause de son origine, mais
38
aussi parce qu’il servait d’urne cinéraire. En outre,
il a été trouvé partiellement démonté : les rivets qui
fixaient les attaches d’anses ont été retirés et l’anse
elle-même n’a pas été déposée. On reconnaît là
le traitement que subissent systématiquement les
situles cinéraires de la région de Côme avant leur
ensevelissement. On a donc affaire à une incinération dans un vase fabriqué en Italie du Nord-Ouest,
d’un type fréquemment utilisé comme ossuaire en
Lombardie et qui a subi les mêmes traitements que
les urnes de cette région. Quoique l’on ne sache
rien du mobilier déposé dans cette sépulture, on
peut tout de même supposer un lien étroit de son
titulaire avec le domaine de Golasecca. L’ensemble,
qui est assez mal daté, peut être attribué au dernier
tiers du VIe ou à la première moitié du Ve siècle.
Nous avons tenté de montrer ailleurs, comment
ces indices de contacts entre la Sicile orientale et
l’Italie du Nord-Ouest pouvaient s’intégrer dans
le contexte plus large d’un vaste réseau de relations aristocratiques de haut niveau qui se met en
place dès le début du VIe s. entre la côte adriatique
et le domaine hallstattien et qui s’étend dans le
troisième quart du siècle à certaines cités de la
Grande-Grèce et de la Sicile orientale (Verger
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
quer de deux manières : soit les vases ont été dans
un premier temps exportés vers la Sicile grecque,
où ils ont été utilisés avant d’être déposés dans une
réserve d’objets de bronze non grecs, de laquelle
ils auraient été extraits en même temps que le
reste des fragments de la série “sicilienne” du dépôt
tessinois ; soit ils ont simplement été exportés vers
l’Italie du Nord-Ouest, comme c’est d’ailleurs le cas
pour quelques vases contemporains attribués aux
ateliers d’Étrurie interne, comme l’olpé d’Albate
par exemple (de Marinis 1988, p. 68, fig. 28) et de là,
intégrés directement dans le dépôt. La deuxième
solution est bien sûr la plus simple mais elle n’est
pas pour cela plus assurée que l’autre.
L’essentiel du dépôt : des objets de la fin du
et de la première moitié du Ve siècle.
VIe
19. Le circuit supposé suivi par les fragments d’objets du lot
“sicilien” d’Arbedo (S. Verger). 1. Agde et le Languedoc (lot
de parures et d’objets gaulois) ; 2. Sicile interne (lot d’objets
indigènes de Sicile) ; 3. Cités grecques de Sicile méridionale ou
orientale (lot de vases et de pièces de mobilier grecs) ; 4. Étrurie
interne (vases étrusques du VIe s. av. J.-C.)
2003a, notamment p. 593-603). Pour certains Grecs
de Sicile, cet itinéraire terrestre oriental vers le
domaine hallstattien, par les Alpes, pourrait s’être
substitué après 540 à la route maritime occidentale qui conduisait directement de la pointe
occidentale de l’île au Languedoc. Le lot “sicilien”
d’Arbedo pourrait documenter le moment précis
où s’effectue le basculement d’une voie vers l’autre
(ill. 19). De ce point de vue, il est remarquable
qu’il contienne à la fois des fragments de parures
annulaires de Gaule du Centre et un fragment
d’anse identique à celle du grand chaudron grec
de Hochdorf, c’est-à-dire à la fois les vestiges de
relations anciennes modestes, à caractère religieux
et le témoin de nouvelles formes de contacts aristocratiques au plus haut niveau.
Les fragments de vases originaires de l’Étrurie
interne tiennent une place particulière dans ce
tableau car d’un côté des exemplaires semblables,
ou au moins de même origine, sont présents dans
les ensembles métalliques siciliens de la fin du VIIe
et de la première moitié du VIe s., comme on l’a vu, et
de l’autre, ils sont largement diffusés dans les deux
premiers tiers du VIe s. par les canaux de distribution
qui longent la côte adriatique et qui se confondent
avec les étapes du réseau de contacts aristocratiques de haut niveau que l’on a mentionné. Leur
présence dans le dépôt d’Arbedo peut donc s’expli-
Le lot de fragments le plus important du dépôt
d’Arbedo est constitué d’objets fabriqués ou utilisés
localement au cours du siècle précédant l’enfouissement. La majorité d’entre eux appartiennent
d’ailleurs à des types encore en usage dans la première moitié du Ve s. Il s’agit avant tout de fibules (ill.
20-21). On en compte près de 550 fragments, presque
toutes de fabrication régionale, à l’exception de sept
fibules de modèle hallstattien datés du Hallstatt D23 (n° 1-7), de trois fibules caractéristiques des Alpes
orientales (n° 11-13), de deux exemplaires originaires du Caput Adriae (n° 10-14) et de neuf fibules
du type Certosa originaires de l’Étrurie padane
(n° 27-35). Ces fibules de types étrangers sont rares
dans la région, mais leur lieu de découverte n’est
pas totalement excentré par rapport à leur zone de
diffusion extrême. Il n’est pas impossible qu’elles
aient été portées dans la région, soit par des femmes
étrangères (sur cette question, Casini 2000, p. 78-86),
soit parce qu’elles accompagnaient des vêtements
importés. Environ 80 autres fragments appartiennent
à des pièces de vêtement ou de parure du Tessin
ou de la culture de Golasecca du VIe ou de la première moitié du Ve s. (ill. 22). Il s’agit de fermoirs de
ceinture, de bracelets et de rares torques, de perles
et de boucles d’oreilles, de pendeloques en panier
et ajourées ainsi que d’instruments de toilette. Les
exemplaires étrangers sont plus rares dans cette
catégorie, mais on compte trois fragments de bracelets valaisans (n° 8-10), d’un type par ailleurs
inconnu dans la région et peut-être deux épingles
originaires de l’Étrurie padane (ill. 25, n° 36-37). Près
d’une cinquantaine de fragments de tôles et de tiges
provient de récipients fabriqués dans la région dans
la seconde moitié du VIe ou la première moitié du
39
STÉPHANE VERGER
20. Fragments de fibules de la fin du
40
VIe
et de la première moitié du
Ve
s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
21. Fragments de fibules de la fin du
VIe
et de la première moitié du
s. av. J.-C. (ill. 23) Ce sont avant tout des situles de
type tessinois (une soixantaine de morceaux), mais
aussi quatre fragments de tasses.
Ve
La grande concentration de fibules, de petits
éléments de vêtement et de parures simples n’est
pas sans évoquer certains contextes votifs transalpins de la première moitié du Ve s., au premier
rang desquels se place le lot mis au jour dans les
sources de la Douix à Châtillon-sur-Seine (Côted'Or), pas très loin de la résidence princière
hallstattienne du Mont Lassois (Coudrot 1996).
Comme à Arbedo, on a affaire à un ensemble
chronologiquement et fonctionnellement cohé-
Ve
s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
rent. Il est bien difficile de préciser comment
de tels lots se sont constitués : ont-ils été réunis
en une seule fois ou bien sont-ils le fruit d’une
accumulation progressive d’objets apportés les
uns après les autres pendant plusieurs décennies ?
Si l’on suppose qu’il s’agit de dépôts votifs − ce
qui ne semble guère faire de doute dans le cas
des sources de la Douix − doit-on imaginer un
unique acte votif massif, à l’occasion d’un événement exceptionnel ou en réponse à une situation
particulièrement critique, ou bien une multitude
de petits actes de dévotion privée, dans le cadre
d’un lieu de culte organisé ? Il n’est pas possible
de trancher dans le cas bourguignon. La série
41
STÉPHANE VERGER
22. Fragments de parures régionales de la fin du
VIe
et de la première moitié du
23. Fragments de vases métalliques régionaux de la fin du
(d'après Schindler 1998).
42
VIe
Ve
s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
et de la première moitié du
Ve
s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
24. Fragments de vases métalliques étrusques et padans de la fin du
(d'après Schindler 1998).
VIe
et de la première moitié du
Ve
s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo
43
STÉPHANE VERGER
25. Fragments d’ustensiles étrusques de la fin du VIe et de la première moitié du Ve s. av. J.-C. du dépôt d’Arbedo
(d'après Schindler 1998).
d’Arbedo pose quant à elle des problèmes supplémentaires sur lesquels nous reviendrons.
Parmi les objets étrangers les plus récents, on
compte un petit groupe de fragments d’ustensiles
de banquet étrusques de la fin du VIe ou de la
première moitié du Ve s. (ill. 24-25). Même si le
décalage chronologique est faible par rapport au
groupe de fragments du vase étrusques du VIe s.précédemment commenté, il s’agit bien de deux lots
indépendants qui sont composés de types d’objets
rarement associés dans les tombes. Ils correspondent à deux étapes successives de la fabrication
de vases de banquet étrusques (le deuxième tiers
du VIe d’un côté, la fin du VIe et la première moitié
du Ve s. pour l’autre), à deux lieux de production
distincts (l’Étrurie interne pour l’un, l’Étrurie méridionale ou l’Étrurie padane pour l’autre) mais
aussi à deux parcours de diffusion indépendants.
La plupart des fragments attribuables au groupe
tardo-archaïque appartiennent à des types bien
connus en Étrurie padane, notamment à Bologne
et à Marzabotto. On compte d’abord une attache
d’anses mobiles de situle stamnoïde (n° 115) et
44
quelques fragments qui pourraient appartenir au
même type de récipient, voire au même objet
(n° 116-118). L’applique n° 115 date de la première moitié du Ve s. et doit avoir été fabriquée
en Étrurie méridionale, à Vulci, ou dans un centre
de l’Étrurie padane comme Bologne. Cette forme
n’est pas connue par ailleurs dans le Tessin, mais
les nécropoles de Lombardie en ont livré plusieurs exemplaires. L’anse de stamnos n° 114 est
un des objets les plus connus du dépôt que Brian
Shefton a choisi comme exemplaire éponyme du
type d’Arbedo qui regroupe sept vases de la fin
du VIe et du début du Ve s. et qui a dû être produit
en Étrurie. Les cistes à cordons sont représentées
par six fragments (n° 123-127, auquel il faut sans
doute ajouter la portion de fond n° 954), qui proviennent de deux récipients au moins. Un tronçon
d’anse horizontale à renflement médian permet
de classer assez certainement l’un des vases dans
le groupe de la Certosa que l’on peut attribuer à
un atelier felsinéen de la seconde moitié du VIe
ou de la première moitié du Ve s. Les autres fragments ne peuvent être classés précisément dans
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
les groupes définis par Berta Stjernqvist, mais rien
n’empêche qu’ils entrent eux aussi dans le groupe
de la Certosa. D’après M. P. Schindler, l’anse n° 122,
que B. Stjernqvist hésitait à identifier comme une
anse de ciste à cordons, n’a aucun parallèle, si ce
n’est la paire de poignées de la banquette de la
tombe princière de Hochdorf.
À côté des vases de présentation de la boisson,
on trouve des fragments d’ustensiles du service. Il
n’y a aucun fragment de Schnabelkanne, ce type
de cruche pourtant si largement diffusé vers le
nord à partir de l’Étrurie. On trouve, en revanche,
une anse d’oenochoé de forme 9 (n° 140), produit
étrusque qui apparaît dans la première moitié du
Ve s., et une attache d’anse d’olpé ornée d’un petit
lion couché (n° 134), un vase étrusque sans doute
produit à Vulci dans la première moitié du Ve s.
Deux têtes d’oiseaux aquatiques (n° 156-157) sont
des extrémités de manches de simpula étrusques
du Ve s. et un manche tubulaire provient d’un puisoir (n° 155) d’un type rare de la même époque.
Il faut sans doute ajouter à ce groupe de vases à
verser étrusques, au moins une attache d’anse de
cruchon cordiforme (n° 135).
Parmi les récipients ouverts, on note la présence d’un grand fragment de bassin à bord perlé
à paroi basse et oblique (n° 129), sans doute du
type d’Imola-Hundersingen, une production l’Étrurie interne de la fin du VIe et de la première moitié du
Ve s. L’équipement de la salle de banquet est illustré
à Arbedo par deux fragments de candélabres étrusques (n° 45-46) dont un est datable du deuxième
quart du Ve s.,et par plusieurs garnitures de sièges
ou de meubles (n° 40-41 ; Jurgeit 1999, p. 205-206,
n° 311-312).
Ces fragments forment un ensemble très homogène, à la fois du point de vue culturel, du point de
vue chronologique et du point de vue fonctionnel.
Ils pourraient d’ailleurs constituer les maigres vestiges d’un unique mobilier métallique étrusque de
la première moitié du Ve s. (ill. 26), tel qu’il devait en
exister dans les plus riches demeures felsinéennes
de l’époque, comparable à ceux qui sont déposés
dans les sépultures les plus riches de la nécropole
de la Certosa, mais surtout dans la grande tombe
du cimetière des Giardini Margherita (vue générale
du mobilier dans Malnati, Manfredi 1991, fig. 38). La
liste minimale des objets rassemblés est éloquente :
un stamnos, une situle stamnoïde, une ou deux
cistes à cordons bolonaises, une oenochoé ou un
grand kyathos, une ou deux olpés, deux simpula, un
bassin à bord perlé, deux candélabres et un siège.
Il manquerait seulement la passoire à manche
26. Restitution du groupe de vases étrusques de la fin du VIe et de
la première moitié du Ve s. av. J.-C. représentés par des fragments
dans le dépôt d’Arbedo (S. Verger).
pour que le service soit complet, à moins que le
fragment n° 159 provienne de la vasque d'un seul
ustensile. Il faut y ajouter à cette série un seul objet,
sans doute grec, l’extrémité d’une anse mobile de
situle (n° 185) que M. P. Schindler date du premier
quart du Ve s. Deux fragments de casques de Negau
(n° 38-39) viennent compléter la série. L’un d’eux
peut être attribué au type de Vetulonia qui n’est
attesté par ailleurs qu’en Italie centrale.
M. P. Schindler a aussi identifié deux petits fragments de lingots bivalves (ill. 28, n° 3753-3 754) qui
pourraient appartenir à la série “à la branche sèche”
et qui ont fait l’objet d’une analyse de composition.
La teneur relativement forte en plomb et l’absence
de fer permettent de les rapprocher d’une des séries
de l’Étrurie padane du Ve s. (San Polo, Servirola et
Poviglio) plutôt que des exemplaires siciliens de
Bitalemi et de Grammichele, qui sont en cuivre presque pur (Pellegrini, Macellari 2002, p. 169).
Par rapport à ceux du VIe s., les fragments de la
première moitié du Ve s. témoignent d’une certaine
restriction de l’amplitude des relations à longue
distance dont le dépôt d’Arbedo porte la trace. Les
objets proviennent de différentes régions de l’arc
alpin et de sa périphérie immédiate ainsi que de
l’Italie septentrionale,jusqu’à l’Étrurie padane et, de
manière indirecte, de l’Étrurie tyrrhénienne méridionale. Les traces de contacts à très longue distance,
avec la Grande-Grèce et la Sicile en particulier, ont
disparu presque totalement et la diversité culturelle
s’est également affaiblie. Mais, dans le même temps,
la présence de vestiges de l’équipement complet
45
STÉPHANE VERGER
d’une salle de banquet étrusque semble suggérer
que, à l’intérieur d’un espace de relations restreint,
les contacts entre communautés sont devenus plus
étroits et intenses. De manière générale, cette double
tendance semble bien caractériser les réseaux de
contacts aristocratiques transalpins qui se mettent
en place dans la première moitié du Ve s. Les différences que l’on peut déceler entre les deux derniers
lots de fragments étrangers du dépôt d’Arbedo sont
comparables à celles que l’on a pu noter entre les
composantes ancienne et récente du mobilier de
la tombe “princière” de Vix (Verger 2003a, p. 592-593,
tableau 1).
LA LOGIQUE DE CONSTITUTION DU DÉPÔT
D’ARBEDO ET SES CONSÉQUENCES SUR
L’ÉTUDE DES DÉPÔTS DE BRONZE
Des vestiges des phases de développement
des contacts transalpins
Les observations effectuées précédemment
confirment l’hypothèse convaincante avancée par
M. P. Schindler selon laquelle les “vieux bronzes” du
dépôt d’Arbedo sont arrivés dans le Tessin sous
forme de lots de fragments.Toutefois, il ne s’agit pas
de simples regroupements aléatoires de fragments
choisis simplement pour leur alliage spécifique ou
pour d’autres raisons techniques dans l’optique
du recyclage. Les différents lots se distinguent par
leur chronologie et par leur origine et, si on les
examine de plus près, on peut remarquer qu’ils ont
été constitués aux différentes époques pendant
lesquelles les contacts transalpins se sont développés de manière particulièrement significative.
La première, qui correspond aux XIe-Xe s., est
marquée, en particulier, par la large diffusion du
cuivre alpin au nord et au sud des Alpes, sous
la forme de pani a piccone et par la constitution
de réseaux de relations à longue distance qui
étaient contrôlés, entre autres, par les villages de
la plaine orientale du Pô et dont l’extension est
documentée par la large diffusion de certains
types d’objets de l’Italie vers le nord, comme les
pinces à épiler du type de celle qui figure dans le
dépôt d’Arbedo.
La deuxième étape correspond à la fin du VIIIe
et la première moitié du VIIe s., c’est-à-dire à la mise
en place des relations entre les grands centres
orientalisants de l’Étrurie septentrionale côtière,
comme Vetulonia et les premières aristocraties
46
hallstattiennes occidentales (de Marinis 1988,
p. 57-59, fig. 20-21 ; von Hase 1989, p. 1050-1 052).
C’est à cette époque par exemple qu’apparaissent
les premiers vases métalliques étrusques dans l’est
de la France (les phiales godronnées de Poiseulla-Ville et d’Appenwihr) et en Allemagne du Sud
(la phiale et la situle à attaches d’anses arquées
de Frankfurt Stadtwald) (Chaume, Feugère 1990,
p. 42-46, fig. 38-41, 44).
La troisième étape − celle qui nous intéresse
plus particulièrement ici − couvre le deuxième
tiers du VIe s. L’ensemble d’objets correspondant
à cette phase est composite et présente exactement les mêmes associations que les dépôts que
l’on a pu examiner en Sicile : fragments d’objets
indigènes de Sicile, de parures gauloises et de
vases l’Étrurie interne. On y trouve aussi de petits
morceaux de vases et des clous d’architecture et
d’ameublement grecs identiques à ceux qui sont
déposés dans les tombes et les sanctuaires de la
Sicile méridionale dans la seconde moitié du VIe s.
L’objet le plus important est sans doute un fragment d’anse mobile décorée, identique à celles
qui ornent le grand chaudron grec de la tombe
princière de Hochdorf. Tout cet ensemble met en
évidence l’existence d’une forme originale de relation entre les cités grecques de Sicile méridionale
ou orientale et le Tessin dans la seconde moitié du
VIe s. L’association caractéristique montre que l’on
a affaire à un ensemble de fragments extrait, au
cours du troisième quart du VIe s., d’une réserve de
bronze constituée progressivement dans une cité
grecque de Sicile méridionale ou orientale depuis
la seconde moitié du VIIe s. Ce lot rend compte, à la
fois des contacts qui existaient entre la Sicile grecque et la Gaule au cours du Hallstatt D1 et d’une
transformation des réseaux de relations à longue
distance au cours du troisième quart du VIe s., au
terme de laquelle, pour une période brève, certaines cités grecques de Sicile constituent l’extrémité
méridionale d’une grande chaîne de contacts
aristocratiques de très haut niveau qui s’étend, à
travers l’Italie centrale adriatique jusqu’aux Alpes
et au domaine hallstattien occidental.
C’est un circuit à peu près identique que semble pouvoir décrire un lot de fragments d’objets
étrangers du dépôt de Fliess en Autriche (Sydow
1995), dans lequel sont associées (ill. 27) : des
parures annulaires du sud de la Gaule, identiques
elles aussi à divers exemplaires mis au jour dans
les dépôts de Sicile méridionale (n° 99, 102, 106-107,
337) ; des fibules à long porte-ardillon à bouton de
type “pré-Certosa” (n° 228, 229, 273, 274-277) caracté-
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
ristiques de l’Italie centrale adriatique et présentes
en Italie du Sud et en Sicile à la fin du VIIe et dans
la première moitié du VIe s.; un fragment de disque
décoré caractéristique de l’intérieur des Abruzzes
(Tomedi 1993) ; un fragment de bassin à large bord
orné de tresses (n° 144), production de l’Étrurie probablement interne de la fin du VIIe ou du VIe s. av. J.-C.
L’ensemble, que nous ne faisons que mentionner
ici, demanderait un commentaire approfondi qui
dépasserait le cadre de la présente étude.
La quatrième phase correspond au développement d’un réseau de relations capillaires et étroites
entre les centres étrusques de la plaine du Pô, la
Lombardie et les groupes aristocratiques de la fin
du premier et du tout début du second âge du
Fer du centre-est de la France, de la Suisse et de la
vallée du Rhin. Elle est marquée par un rétrécissement des horizons des contacts, qui ne s’étendent
pas, au sud, au-delà de l’Étrurie tyrrhénienne, mais
aussi par une intensification des contacts à l’intérieur de cette zone plus limitée.
Le dépôt d’Arbedo, loin de constituer simplement un amas sans logique de fragments récoltés
au hasard ou même de lots de débris à recycler,
se présente donc comme un ensemble complexe
de lots plus ou moins homogènes, véritable conservatoire des vestiges de la mise en place des
divers réseaux d’échanges transalpins qui se sont
succédé et ont pris, pour étape, ce lieu crucial
pour le franchissement des Alpes que constitue le
confluent des vallées du Tessin et du Misox.
L’insertion double dans le processus du
recyclage et dans les circulations votives
La composition du dépôt d’Arbedo conduit
logiquement M. P. Schindler à y reconnaître une
réserve de bronze constituée et conservée pour le
recyclage dans le cadre des activités d’un atelier
de métallurgiste installé dans les environs du lieu
d’enfouissement, dans la première moitié du Ve s.
Le lien étroit du dépôt avec une importante activité
métallurgique et son insertion dans le processus du
recyclage ne fait aucun doute. Toutes les étapes du
cycle du métal sont représentées (ill. 28). On trouve
d’abord du bronze brut sous forme de bouts de lingots qui ont pu servir de moyen d’échange plutôt
que de réserve de métal sous forme standardisée,
comme l'a montré l'interprétation des analyses
de composition de ces pièces (P. Northover in :
Schindler 1998, p. 291). Viennent ensuite tous les
produits bruts de la coulée : coulures en dehors du
moule, remplissages de canaux d’alimentation et
entonnoirs de coulée, objets laissés bruts de coulée pour un défaut ou une rupture. Sont ensuite
représentées les opérations ultérieures comme le
martelage (plaques et tiges en cours de mise en
forme), la découpe (chutes de tôle) et l’assemblage (pièces rapportées non finies, rivets, etc.).
L’ensemble de ces pièces représente 50 % de
la masse totale conservée du dépôt (Schindler
1998, p. 161, tableau 7). L’autre moitié est constituée par les fragments d’objets usagés destinés
à la refonte qui sont en majorité de fabrication
locale et récente, mais qui comprennent aussi les
lots anciens ou étrangers qui ont été commentés précédemment. On peut parfaitement leur
appliquer l'observation que Frauke Stein faisait à
propos des fragments d'objets dans les dépôts de
l'âge du Bronze d'Allemagne du Sud : « des observations sur leur degré d'utilisation, sur le mode
de fragmentation [...] montrent clairement qu'il
s'agit de vieux métal et en aucun cas d'offrandes
rituellement brisées » (Stein 1979, p. 118). Nous
aurions donc là une image fidèle des formes sous
lesquelles le métal circule dans l’atelier qui reflète
les étapes du cycle du bronze. De ce tableau cohérent découle la conclusion logique selon laquelle
on a affaire à « un dépôt de métal rattaché à un
atelier [Giesserdepot], sans doute à l’atelier du
métallurgiste d’Arbedo », ou plus précisément « à
deux ateliers distincts, mais travaillant en étroite
connexion, et procédant chacun d’une spécialisation particulière » (Schindler 1998, p. 267).
M. P. Schindler répond par avance, de manière
convaincante, à plusieurs interrogations concernant cette interprétation strictement technique. Il
faut peut-être en ajouter deux autres, l’une d’ordre
général, l’autre plus spécifiquement liée à l’identification proposée précédemment d’un lot de
fragments constitué en Sicile au VIe siècle.
La première concerne l’existence même du
dépôt. Les pièces qui le composent sont certes
insérées dans le processus cyclique qui conduit
au recyclage du bronze dans le cadre de l’activité
d’un ou de plusieurs ateliers. Mais elles en ont été
extraites à un certain moment pour regagner un
stock de métal ensuite enfoui et abandonné. La
question précise que l’on doit poser concerne bien
les raisons pour lesquelles ces objets ont échappé à
la refonte alors que tout indique qu’ils étaient déjà
insérés dans le processus technique qui devait y
conduire. Les raisons souvent invoquées − mais pas
par l’auteur de la monographie, qui s’abstient prudemment d’aborder la question − sont purement
47
STÉPHANE VERGER
27. Quelques fragments d’objets du dépôt de Fliess (d’après Sydow 1995).
48
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
28. Fragments en relation avec une activité métallurgique du dépôt d’Arbedo (d'après Schindler 1998).
49
STÉPHANE VERGER
circonstancielles. On imagine la mort d’un artisan,
la destruction d’un atelier, la thésaurisation de métal
en période de crise, etc. Ces suppositions reposent
sur une hypothèse très forte selon laquelle, dans un
lieu de passage comme l’est la zone d’Arbedo, à
une époque florissante de l’artisanat du bronze, qui
suppose une récupération systématique du métal
disponible, une si grosse quantité de métal puisse
être perdue ou laissée de côté ; et surtout elles ne
permettent pas d’expliquer le caractère récurrent et
massif du phénomène des dépôts de bronzier, dont
la trouvaille d’Arbedo n’est qu’un exemple − certes
exceptionnel − parmi d’autres. Ce caractère récurrent et massif suggère plutôt que l’enfouissement,
volontaire, ne s’effectuait pas dans l’espoir d’une
récupération ultérieure.
Les fragments qui constituent plus spécifiquement le lot“sicilien”ont effectué un très long voyage
jalonné d’étapes nombreuses, pour certains depuis
le centre de la Gaule jusqu’au Languedoc puis à la
Sicile méridionale, avant même d’être de nouveau
transportés vers les Alpes (ill. 16, 19). L’intérêt strictement économique de ce trafic est sans doute
bien faible. Par ailleurs, en Sicile, ce type de lots
se rencontre, comme on l’a vu, dans des contextes
cultuels, soit dans le cadre domestique, comme à
Sélinonte, soit plus massivement dans des sanctuaires, comme à Gela, à Agrigente ou encore à Licata
(Orlandini 1966, p. 22-23, 1976-1977, II.1, p. 429-430,
fig. 1-4). Dans ces cas, ce sont bien des fragments
d’objets usagés, associés d’ailleurs à des bouts
de lingots, qui ont été offerts dans le contexte
de pratiques votives liées à un culte thesmophorique. Enfin, si l’on examine plus précisément la
répartition de certains types d’objets constituant
le lot, comme les lances et les anses de bassins
originaires de la Sicile indigène, on constate qu’en
dehors de leur région de production, on les trouve
exclusivement dans des contextes cultuels : d’une
part dans les sanctuaires grecs des côtes méridionale et orientale de l’île, à Gela certes, mais aussi
dans l’athénaïon de Syracuse (Orsi 1919, col. 576577, fig. 163) ; d’autre part, dans plusieurs grands
sanctuaires de Grèce propre, comme Delphes,
Olympie, Samos (von Hase 1997, p. 298, fig. 13, 4-5 ;
Baitinger 2001, p. 38-39, pl. 15-17 et 69b) et peut-être
le Ptoïon près de Thèbes (Ducat 1971, p. 430, pl. 150,
n° 276-277).
Le rapprochement proposé précédemment
entre le lot de fibules, de petites parures locales
et le dépôt de fibules mis au jour dans les sources
de la Douix à Châtillon-sur-Seine, pourrait suggérer,
en outre, qu’une partie des objets usagés les plus
50
récents du dépôt sont à mettre en relation avec
des pratiques de dévotion individuelle ou collective, plus spécifiquement féminine.
Dépôt votif ou stock de métal abandonné :
une fausse alternative
Se pose ici avec une grande acuité la question
de l’interprétation des “dépôts de bronzier”. S’agitil de stocks de métal destinés à la refonte, dans le
cadre d’une économie du recyclage gérée par des
ateliers de bronziers ? Ou bien de dépôts votifs pour
lesquels les objets ont été soigneusement sélectionnés et ont ensuite subi un traitement rituel, de
fragmentation, par exemple, dans le cadre de lieux
de culte plus ou moins organisés ? Dans cette formulation traditionnelle, la question est sans doute mal
posée. Elle empêche d’échapper à l’alternative sans
issue − dépôt de bronzier/dépôt votif − qui marque
depuis le XIXe s. l’étude de ce type d’ensembles.
Toutes les observations précédentes conduisent à la conclusion selon laquelle l’interprétation
du dépôt d’Arbedo doit au contraire nécessairement prendre en compte trois dimensions
complémentaires, sans en privilégier une seule :
– la dimension technique : l’ensemble reflète la
pratique du recyclage du métal dans le cadre
de la fabrication des petits objets de bronze par
des ateliers métallurgiques locaux spécialisés ;
– la dimension historique : l’association de différents lots d’objets que constitue le dépôt
conserve le souvenir précis de plusieurs phases
successives de mise en place de réseaux de
contacts transalpins dans lesquels le secteur
d’Arbedo occupe une place stratégique, du XIIe
au Ve s. av. J.-C. ;
– la dimension cultuelle : la présence de certaines
pièces étrangères rares trouve son explication
dans les phénomènes de circulation votive
à très grande distance qui sont documentés,
par ailleurs, en Méditerranée occidentale ; la
présence d’une abondante série de petites
parures locales, particulièrement de fibules,
trouve des échos dans les pratiques votives
féminines qui se développent dans la première
moitié du Ve s. au nord des Alpes.
L’explication qui pourrait concilier ces diverses
dimensions consisterait à reconnaître dans le dépôt
d’Arbedo une décharge votive contenant les restes
de la part de métal offerte aux divinités présidant
d’une part, au bon fonctionnement du cycle du
bronze à proximité d’un centre artisanal local florissant, d’autre part au bon déroulement du voyage
A PROPOS DES VIEUX BRONZES DU DÉPÔT D’ARBEDO (ITALIE) : ESSAI DE SÉQUENÇAGE D’UN ENSEMBLE COMPLEXE
périlleux à travers les cols alpins, à l’endroit exact
où commence le parcours montagneux, enfin à la
protection du cycle de l’existence humaine, plus
spécifiquement féminine, qui requiert le don périodique de petits effets personnels. Cette association
spécifique de composantes cultuelles distinctes
n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle que l’on peut
reconnaître, grâce à l’examen des séries d’offrandes métalliques, dans les thesmophoria archaïques
des cités grecques de Sicile méridionale, dont le
sanctuaire de Bitalemi à Gela est actuellement
l’exemple de loin le mieux documenté.
Le séquençage des dépôts de bronze
En deçà de l’interprétation du dépôt qui ne
peut donner lieu ici qu’à des hypothèses difficiles
à vérifier, le cas d’Arbedo montre bien l’exigence
dans laquelle on se trouve face à un ensemble
métallique complexe de procéder à une opération préalable que l’on pourrait appeler le
séquençage par analogie avec d’autres disciplines.
Il s’agit bien d’identifier, à l’intérieur de l’ensemble, des lots cohérents qui peuvent être identifiés
en fonction de critères variés et qui peuvent
correspondre à diverses formes de regroupements d’objets plus ou moins complexes : séries
de pièces identiques, éléments d’un équipement
individuel complet ou partiel, lots apparemment
hétérogènes extraits manifestement en bloc d’un
autre ensemble (comme le lot “sicilien” d’Arbedo),
etc. Un même ensemble peut d’ailleurs contenir
une ou plusieurs formes de lots. C’est sans doute
le cas de celui d’Arbedo, dans lequel on peut
reconnaître, entre autres, une série de fibules et de
petites parures locales, les fragments d’un équipement de salle de banquet étrusque et un lot extrait
d’une réserve de métal composite conservée dans
une cité grecque de Sicile.
Le séquençage ne peut être une opération
strictement mécanique, car la reconnaissance de
lots de natures et de compositions variées requiert
une connaissance globale précise de tous les types
possibles de regroupements d’objets métalliques,
dans un contexte chronologique et géographique
qui peut être relativement étroit, certes, mais qui
peut aussi être extrêmement étendu comme c’est
le cas à Arbedo. Le caractère fragmentaire de
la documentation disponible dans ce domaine
empêche d’arriver à une restitution complète
des lots qui constituent un ensemble. Dans le cas
qui nous occupe ici, par exemple, le problème
de l’identification de chaque fragment se double, sans doute, d’une méconnaissance partielle
des formes d’associations d’objets susceptibles
d’être représentées dans le dépôt, de sorte qu’une
grande partie de l’ensemble demeure pour nous
un regroupement de fragments apparemment
aléatoire. C’est ce qui arrive également lorsque
l’on est dans l’impossibilité pratique de distinguer
des lots. C’est le cas du dépôt du Petit Villatte,
étudié par P.-Y. Milcent (1998). Ce dernier a pu identifier quelques équipements personnels étrangers,
parce que les pièces qui les constituent se distinguent typologiquement de tout le reste du dépôt.
Mais que dire justement de la grande masse des
objets locaux ? Sont-ils un regroupement aléatoire
de pièces isolées ou bien constituent-ils les vestiges aujourd’hui mélangés et indissociables d’une
série d’équipements personnels tous semblables
ou de lots d'une autre nature (comme semblerait
l'indiquer la présence d'un groupe de six objets
présentant une patine spécifique : Milcent 1998,
p. 65, fig. 6) ? En un mot, les dépôts, apparemment
sans ordre, le sont-ils vraiment ou bien ont-ils été
constitués selon une logique complexe que l’on a
pas encore su ou pu mettre en évidence ?
Quoi qu’il en soit, le travail de séquençage est
un préalable nécessaire à toute forme d’interprétation d’un dépôt. Ainsi, le comptage brut des pièces
se révèle bien souvent inutile dès que l’on a pris
conscience de l’existence de lots différenciés : il
est par exemple inutile de compter huit torques
et cinquante bracelets − pour conclure à une
surreprésentation de la parure de bras − là où l’on
a affaire à une série de colliers emboîtables et à
deux séries de vingt-cinq bracelets de tailles croissantes − c’est-à-dire aux éléments d’une unique
riche parure féminine. Autre exemple d’interprétation hâtive, celle que l’on ferait à partir d’un simple
pointage sur une carte des origines des objets
constituant le lot “sicilien” d’Arbedo, qui consisterait à supposer des relations entre le Tessin et
diverses régions de la Gaule, la Sicile indigène, les
cités grecques de la Sicile méridionale et l’Étrurie
interne, quand l’opération de séquençage révèle
une situation historique à la fois plus simple et
plus compliquée qui n'a, en tout cas, rien à voir
avec l'image que fournit la carte brute. Nous
pourrions multiplier les exemples d’erreurs d’interprétation dues à l’absence ou à l’insuffisance
du séquençage préalable des dépôts étudiés.
51
STÉPHANE VERGER
Étudier un dépôt − comme étudier une
tombe − est une tâche complexe qui passe par une
série d’opérations préalables dont certaines sont
évidentes − l’identification fonctionnelle et typologique de chacune des pièces qui le constituent −
et d’autres moins couramment effectuées, comme
la reconnaissance de divers types de connexions
entre certains des objets qui constituent l’ensemble. De la même manière que l’analyse des objets
requiert l’utilisation de typologies de référence,
la reconnaissance des lots doit s’appuyer sur
une typologie des ensembles d’objets, qui reste
en grande partie à construire. Prendre comme
ensemble-test le dépôt d’Arbedo, qui est un plus
complexes connus, se révèle sans doute bien
imprudent. Quoi qu’il en soit, l’enquête montre
qu’il ne faut jamais s’arrêter devant le manque
de logique apparent d’un regroupement d’objets,
car le désordre devant lequel on croit se trouver
est bien souvent le produit d’un processus de
constitution particulièrement complexe, dont il
nous revient de déceler certaines étapes, sans prétendre en rendre compte de manière exhaustive
et définitive.
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55
Observations sur quelques dépôts
du premier âge du Fer
dans le quart nord-est de la France
Sébastien CHEVRIER
Cette contribution s'insère dans une suite
de travaux dont le thème principal est consacré aux dépôts du second âge du Fer. En
guise de préambule, nous souhaitions donc
présenter rapidement une petite série de
dépôts du premier âge du Fer recensée dans
le quart nord-est de la France, afin de faire le
lien entre l'extrême fin du Bronze final et le
début de La Tène.
Pris en considération depuis peu, les
ensembles mobiliers non funéraires hallstattiens évoquent de nombreux actes culturels.
Ceux-ci sont tantôt inspirés des traditions
de l'âge du Bronze, tantôt révélateurs de
nouvelles formes d'expressions culturelles
en relation directe avec de nouvelles contingences sociales et de nouveaux réseaux de
contacts à moyenne et longue distance.
Nous profitons donc de cette occasion pour
proposer un inventaire préliminaire des dépôts du
premier âge du Fer du quart nord-est du territoire
national. À partir de cette base, et avec l'aide d'une
documentation de plus en plus importante au sujet
des dépôts recensés sur une grande part du territoire français (France centrale, centre-ouest, nord
et France Méridionale), nous procéderons ensuite
à l'examen rapide des caractéristiques principales
de ces ensembles dans la perspective de les insérer
dans un phénomène évolutif.
Au cours du premier âge du Fer, les dépôts
métalliques présentent des contextes ou des formes
d'organisation diversifiés, évoluant à première vue
dans une acception plus chronologique que spatiale.
Cette communication est une présentation globale
des prochaines études sur les enjeux culturels de ces
ensembles non funéraires. Ces dernières permettront
probablement de nuancer ces propos.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne- : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 57-74 (Bibracte ; 11).
SÉBASTIEN CHEVRIER
RÉPARTITION DES DÉPÔTS
Exception faite pour la phase moyenne du premier âge du Fer, le faible corpus recensé à ce jour
ne permet pas d'observations particulières sur la
répartition des dépôts.
Au Hallstatt D1, une concentration marquée
des sites apparaît dans la moyenne vallée de la
Seine et dans la basse vallée de l'Yonne. Le dépôt
d'Aulnizeux (Marne) se situe quant à lui au cœur
des marais de Saint-Gond (Yonne). Il faut noter
l'extrême proximité des dépôts de Périgny-la-Rose
et de Crancey (Aube), situés à quelques centaines
de mètres l'un de l'autre, de part et d'autre de la
Seine. Un peu plus en retrait par rapport à la vallée
de la Seine, les dépôts de Mortery et de Saint-Brice
(Seine-et-Marne) ne sont distants que de quelques
kilomètres (ill. 1). Nous verrons d'ailleurs plus
1. Carte de répartition des dépôts du premier âge du Fer dans le quart nord-est de la France.. A : Compiègne
(Blanchet 1984, p. 387) ; B : Saint-Martin-de-Bossenay (Villes 1995, p. 128-129). 1 : Crancey (Villes 1995, p. 130131) ; 2 : Périgny-la-Rose (Piette 1989, p. 235-241) ; 3 : Crancot (Millotte, Vignard 1962, p. 9-10, pl. 2, n° 1, 3
et 16) ; 4 : Aulnizeux (Lepage 1989) ; 5 : Chelles (Bulard 1977, p. 43-52) ; 6 : Mortery (Bourquelot 1858, p. 97-98
et Félix 2004) ; 7 : St-Brice (Göetz 1966 et Félix 2004) ; 8 : Cheny (Baray 2002, p. 52) ; 9 : Dixmont (Félix 2004) ;
10 : Paron (Hure 1931, p. 64-65) ; 11 : Châtillon-sur-Seine (Buvot 1998, p. 26-33) ; 12 : Clamecy (Adam 1999, p. 5).
58
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
loin les similarités entre ces différents groupes
rapprochés de dépôts. À ce jour, nous n'avons pas
recensé de dépôt de l'âge du Fer ni en Alsace, ni
en Lorraine.
LIEUX DE DÉPOSITION
Fleuves et épées hallstattiennes en bronze
Dans la continuité de phénomènes observés dès
le début du Bronze final (Boulud 1998, p. 103-114),
nous trouvons encore des épées déposées dans les
fleuves au Hallstatt C, mais on observe que seuls les
exemplaires en bronze sont “sélectionnés” pour être
offerts à la rivière. On remarque cette pratique dans
l’est de la France grâce aux découvertes effectuées
dans le Rhône ou la Saône (ill. 2a et b). On note un
phénomène similaire dans le nord ouest du pays
avec les trouvailles provenant de la Seine (Bichet,
Millotte 1992, p. 96-97, fig. 73).
Les épées hallstattiennes en fer proviennent
essentiellement de dépôts terrestres, correspondant à des ensembles clos funéraires. Sauf cas exceptionnel, aucune épée du Hallstatt C en fer ne
provient de contexte humide de manière générale
(Chevrier 2003).
Doit-on envisager que cette absence d'épées
en fer déposées en contextes humides ne soit due
en fait qu'à une mauvaise conservation des objets
en fer élaborés au cours du Hallstatt C ? Cette hypothèse semble peu probable au regard des objets en
fer des périodes postérieures trouvés par exemple
dans le lit de la Saône.
Malgré l’apparition d’épées en fer dans des
contextes anciens du Hallstatt C, voire dès le Hallstatt B3, doit-on considérer que seule la distinction
métallique guide les contingences des dépôts en
milieu humide au cours du Hallstatt C ?
Enfin, est-il possible d’avancer une particularité chronologique, à savoir que, dans leur ensemble,
2a. Carte de répartition des épées hallstattiennes en bronze d'après Bichet, Millotte 1992, p. 96-97, fig. 73.
59
SÉBASTIEN CHEVRIER
2b. Carte de répartition des épées hallstattiennes en fer d'après Bichet, Millotte1992, p. 98-99, fig. 74.
les épées hallstattiennes en bronze seraient plus
anciennes que celles en fer, et que ce type de dépôts pourrait s'inscrire dans la continuité des pratiques du Hallstatt B3 ?
Des parures annulaires
en contextes terrestres au Hallstatt D1 (ill. 1)
Au cours du VIe s. av. J.-C., un ensemble de dépôts, caractérisé par la présence marquée et systématique de parures annulaires en bronze, émerge
dans le Bassin parisien. Ces dépôts proviennent
tous de contextes terrestres.Toutefois, ils sont situés
dans leur grande majorité en fond de vallées importantes, parfois sur les premières terrasses (Pérignyla-Rose et Crancey dans l'Aube). Situés de part et
d'autre de la Seine, à quelques centaines de mètres
seulement, ces deux dépôts nogentais s'organisent
naturellement autour de l'axe fluvial. L'existence
d'un passage à gué à cet endroit n'est évidemment
pas à exclure. Le dépôt incertain d'Aulnizeux (Marne) provient du secteur des Marais de Saint-Gond.
60
Celui de Crançot dans le Jura n'est pas éloigné de
la source de la Seille.
Les découvertes fluviales de parures annulaires du premier âge du Fer sont rares, voire exceptionnelles. Issus de découvertes anciennes ou fortuites, les structures internes et l'environnement
proche de ces lots d'objets ne nous sont globalement pas connus. Il est donc impossible pour
l'heure de savoir si ces ensembles se trouvaient à
proximité d'habitats ou de zones funéraires, s'ils
intègrent un groupe de dépôts, etc.
Notons toutefois dès le VIe s. av. J.-C., de manière
encore restreinte, que la source de la Douix (Côted'Or) devient un lieu privilégié de déposition de
fibules.
Variété des milieux
au Hallstatt D2-3/La Tène A
L'inventaire présenté en annexe doit évidemment être approfondi. Manifestement, on note vers
la fin du IVe et le début du Ve s. av.J.-C. l'appropriation
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
3. Dépôts de fibules dans différents contextes du Hallstatt D23/La Tène A. a : Châtillon-sur-Seine, Côte-d’Or (Labeaune 2003,
p. 43) ; b : Clamecy, Nièvre (Adam 1999, p. 5).
de nouveaux contextes. L'ensemble des fibules de
la Douix (Côte-d'Or) est à ce titre caractéristique
(ill.3a). Malgré l'absence de publication, il semble,
d'après les quelques présentations globales,que ce
lieu naturel exceptionnel était fréquenté de façon
plus ou moins marquée tout au long du VIe s. et du
Ve s. av. J.-C. L'essentiel des objets appartient toutefois au Hallstatt D2/3 - La Tène A. C'est d'ailleurs au
cours de cette période que le site est fréquenté de
manière importante (Buvot 1998).
La présence de dépôts regroupant de nouveaux types d'objets (bien qu'ils intègrent toujours la catégorie des parures) dans de nouveaux
contextes, peut, dans certains cas isolés, être mis
en relation avec des actes symboliques marqués.
C'est le cas sur le site de hauteur fortifié de Sembert, commune de Clamecy (Nièvre), où trois fibules du Hallstatt D3 semblent avoir été découvertes
dans le rempart (ill. 3b). Il est envisageable de reconnaître ici un acte symbolique effectué lors de
la fondation ou de la reconstruction de cet ouvrage défensif.
Sauf exception, il existe d'une part un type de
dépôt dans lequel seule une catégorie fonctionnelle est enfouie et, d'autre part, un second type
marqué par la présence de catégories fonctionnelles nombreuses. Ces dépôts ont des formes
variées. Le Hallstatt C est caractérisé par des
dépôts d'épées en bronze, déposées en milieu
humide ainsi que le dépôt de phalères de SaintMartin-de-Bossenay (ill. 4). La fin du premier âge
du Fer et le début de La Tène A est marquée par
le dépôt collectif de la Douix à Châtillon-sur-Seine
en Côte-d'Or (ill. 3a).
Hormis le dépôt de Saint-Martin-de-Bossenay
(Aube), il est évident de constater que tous ces
dépôts simples revêtent un caractère personnel :
épée en bronze pour l'équipement du guerrier
jetée dans la Saône, lot de parure annulaire féminin du VIe s. av. J.-C enfouies dans la vallée de la
Seine, fibules offerts à la Douix.
Le VIe s. av. J.-C. est marqué par l'apparition de
dépôts de parures annulaires en bronze, souvent
agencés selon des règles communes. Ces ensembles ne regroupent que des parures de bras ou
de jambe, rarement des torques. Les assemblages
de ces dépôts simples sont élaborés à partir d'un
nombre réduit de modèles typologiques (un, voire
deux types). Ces ensembles constituent cependant
des lots comprenant de nombreux objets.
AGENCEMENT DES DÉPÔTS
Dépôts simples et ensembles complexes
Des dépôts simples, mais variés, durant
toute la période du premier âge du Fer
Cette appellation regroupe les dépôts dont le
nombre de catégories fonctionnelles représentées
est inférieur ou égal à deux. En ce qui concerne
le premier âge du Fer, leur identification est aisée.
4. Hallstatt C. Saint-Martin-de-Bossenay, Aube
(Villes 1995, p. 128-129), Sans échelle.
61
SÉBASTIEN CHEVRIER
Une nuance doit être apportée au terme de
“dépôts simples”. En effet, ces ensembles réunissant une seule catégorie fonctionnelle sont,
dans certains cas, composés d'un lot d'objets
entiers, n'ayant probablement jamais servi, et
d'un lot généralement plus important d'objets
fragmentés. L'exemple le plus frappant est celui
des dépôts voisins de Mortery et Saint-Brice en
Seine-et-Marne (ill. 5a et b ; Félix 2004). Non seulement ces dépôts ne sont distants que de quelques
kilomètres, mais encore la typologie des anneaux
à godrons contenus dans les deux ensembles est
identique. Enfin le rapport entre objets entiers et
objets fragmentés est assez proche pour les deux
assemblages. Certaines de ces observations sont
également valables pour les deux dépôts complexes de l'Aube de Périgny-la-Rose et de Crancey.
Les dépôts complexes au Hallstatt D1
Après une période de raréfaction au Hallstatt C,
les dépôts complexes réapparaissent au Hallstatt D1.
Les dépôts de Périgny-la-Rose (ill. 6 à 7) et de Crancey
(Aube) situés non loin l'un de l'autre, constituent les
ensembles complexes de cette contribution.
Ces nouveaux assemblages permettent diverses
approches. Ces dépôts présentent des associations de
mobilier et des influences culturelles intégrées dans
la dynamique des cultures matérielles de la phase
moyenne du premier âge du Fer. La parure annulaire
constitue la catégorie fonctionnelle de loin la plus représentée.Bien que la documentation sur les pratiques
et les assemblages funéraires de la phase moyenne du
premier âge du Fer dans la moyenne vallée de la Seine soit encore mince, des liens avec les assemblages
matériels retrouvés en contextes funéraires sont donc
évidents (Lepage 1989). De nouveaux types d'objets,
rares et réservés normalement à des assemblages
funéraires privilégiés, intègrent ces dépôts (un manche de poignard à antennes à Périgny-la-Rose). Ces
ensembles reflètent les courants culturels dominants à cette période : objets provenant du centre
ou du sud de la Gaule pour le dépôt de Crançot,
dans le Jura ; objets provenant de l'est de la Gaule
pour les dépôts de Périgny-la-Rose (récipient métallique) et de Crancey dans l'Aube.
D'un autre côté, ces nouveaux assemblages du
s. av. J.-C. s'inscrivent, par leurs caractères généraux, dans une tradition héritée de l'âge du Bronze,
VIe
62
s'assimilant aux dépôts de type Bülh-Briod identifiés
par S.Verger (1992). Le lot d'objets “manufacturés”
est donc ici constitué par les parures annulaires. Les
assemblages individuels sont constitués quant à
eux d'armes, d'éléments de ceinture et de vaisselle
métallique comme à Périgny-la-Rose.
CATÉGORIES FONCTIONNELLES
REPRÉSENTÉES
La parure
Elle constitue la catégorie prédominante des
dépôts à partir du Hallstatt D1. Nous l'avons vu, les
parures annulaires de type bracelets ou anneaux
de jambes sont les objets les plus fréquents des
dépôts du Hallstatt D1. À l'unité ou dans des proportions beaucoup moins importantes, nous remarquons également la présence de fragments de
torques, d'épingles, d'éléments décoratifs de ceinture (boutons) ou encore d'éléments pendentifs
(pendeloques, appliques).
Même s'il semble possible d'identifier un fragment de fibule à l'intérieur du dépôt nogentais de
Crancey, ce type d'objet ne se développe pourtant
dans les dépôts qu'au cours de la phase récente
du premier âge du Fer. Malgré un corpus à compléter pour le nord-est de la Gaule, ces objets semblent alors prendre une place cruciale au sein des
pratiques de déposition telles que l'on peut les envisager dans le cadre de cette table ronde.
L'armement
Cette catégorie est très nettement représentée
au Hallstatt C grâce aux dépôts unitaires d'épées
en bronze, en rivière. Cette pratique débute dès le
Bronze final (Boulud 1998). Nous l'avons vu, au
Hallstatt C, les modèles d'épées fabriqués en fer
ne participent quant à eux quasiment jamais à ce
type de pratiques. Pour la zone qui nous concerne,
l'armement n'apparaît plus en contexte de dépôt
à la fin du Hallstatt C.
Ces observations s'intègrent évidemment dans
le courant général de mutations progressives des
catégories fonctionnelles dominantes entre le
Hallstatt C et D1. De manière exceptionnelle toutefois, un manche de poignard à antennes constitue
l'un des éléments d'une panoplie individuelle dans
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
5. Hallstatt D1. A : dépôt de Mortery, Seine-et-Marne (Félix 2004, pl. 23 bis et 24, inédit) B : dépôt de Saint-Brice
“Saint-Martin-des-Champs”, Seine-et-Marne (Félix 2004, pl. 24, inédit).
63
SÉBASTIEN CHEVRIER
6. Hallstatt D1. Périgny-la-Rose (Aube), parures annulaires massives (Piette 1989, p. 229-241).
64
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
7. Hallstatt D1. Périgny-la-Rose (Aube), a : parures unitaires et équipement personnel (Piette 1989, p. 229-241) ; b : objets
fragmentaires et lingots (Piette 1989, p. 229-241).
8. Hallstatt D1. Dépôt de Crançot (Jura).
D'après Millotte, Vignard 1962, p. 9-10.
65
SÉBASTIEN CHEVRIER
donc supposer l'existence d'un stock important
de métal brut. Les lingots étaient contenus dans
le récipient métallique. La description mentionne la présence d'un lingot plus important que les
autres qui servait de couvercle.
À partir du Hallstatt D1, ces produits intègrent
uniquement les dépôts complexes. Il serait intéressant de connaître le poids de chaque fragment. Pour
l'instant, les observations se cantonnent à un stade
plus que primaire.Quelques fragments renvoient aux
formes caractéristiques des lingots plano-convexes.
9. Dépôt de Compiègne, Oise (Blanchet 1984, p. 387).
Sans échelle.
le dépôt de Périgny-la-Rose (ill. 7a). Une pointe de
flèche en bronze complète l'armement offensif de
cet ensemble particulier.
REPÉRAGE DES STRUCTURES
LIÉES AU DÉPÔT
Peu d'informations permettent de discuter
de la présence et du rôle joué par d'éventuelles
structures archéologiques liées à l'environnement
immédiat des dépôts.
L'outillage
Structures englobantes
Seul le petit ciseau du dépôt de Crancey (Aube)
intègre cette catégorie.
La vaisselle métallique
La datation du chaudron de Compiègne est
difficile à préciser (ill. 9). Nous savons que l'utilisation et la circulation de ces objets couvrent une
longue période chronologique et, en l'absence
d'élément typo-chronologique complémentaire,
nous maintiendrons une large attribution entre le
Hallstatt B ou C. Ce chaudron se caractérise par
des attaches d'anses cruciformes et anses torsadées, un fond plat et une panse carénée. L'objet
n'est pas décoré.
Il faut encore noter l'existence d'un récipient
en métal à Périgny-la-Rose (Aube). Cet objet a
malheureusement été perdu et nous n'avons
aucune information à son sujet. Rappelons la présence de récipients métalliques dans le dépôt de
La Mouleyre à Saint-Pierre-Eynac en Haute-Loire. Ces objets correspondent à deux bassins à
rebord perlé, importés, et un petit vase de fabrication probablement nord alpine (Milcent 2004).
Les restes d'activité métallurgique
Cette catégorie est matérialisée par des lingots et quelques fragments de métal refondu. Malgré une documentation ancienne et succincte au
sujet du chaudron de Compiègne, nous pouvons
66
Le dépôt de Crançot, dans le Jura, était recouvert d'une pierre. Rien n'indique la nature du contenant. Les observations effectuées sur la nécropole de Cheny, dans l'Yonne, permettent de replacer
le petit dépôt dans une structure correspondant à
une fosse de faibles dimensions.
Les contenants céramiques
Les vingt et une phalères de Saint-Martin-deBossenay (Aube) étaient stockées dans un récipient en céramique. À Mortery (Seine-et-Marne),
c'est dans une poterie rougeâtre qu'était déposé
le lot de parures annulaires.
Les contenants métalliques
Le stock de lingots de Compiègne était contenu
dans un chaudron à attaches d'anses cruciformes
et anses torsadées. À l'instar de certains dépôts métalliques du Bronze final, un récipient en métal accompagnait l'ensemble de Périgny-la-Rose (Aube).
Si nous comparons ce dépôt avec l'ensemble
contemporain de La Mouleyre à Saint-Pierre-Eynac,
en Haute-Loire (Milcent 2004, p. 187), nous pouvons
donc proposer d'attribuer au récipient métallique
de Périgny-la-Rose la fonction de contenant. L'objet
ayant disparu, il n'est pas possible d'affirmer son
origine. Toutefois, une provenance méditerranéenne reste évidemment privilégiée.
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
DATATION DES DÉPÔTS
La longue période d'utilisation des chaudrons
à attaches d'anses cruciformes ne permet pas
d'attribuer le dépôt de Compiègne au Hallstatt C
de manière évidente. Nous le proposons dans l'inventaire dans une démarche d'information.
Le Hallstatt C
Nous ne reviendrons pas sur le cas des dépôts
d'épées en bronze en contexte fluvial. Leur attribution au Hallstatt C est parfaitement bien appuyée
par les découvertes funéraires. L'origine atlantique
de certains de ces objets, évolués de modèles du
Bronze final (Milcent 2004), semble constituer un
argument pour identifier ces pratiques en continuité avec la période précédente.
Les phalères à calotte hémisphérique de forme conique semblent être caractéristiques du
Hallstatt B final. Toutefois, B. Chaume et M. Feugère proposent de ranger ces objets présentant une
rupture marquée entre le rebord plat et la calotte
centrale bombée, au Hallstatt C. Le décor permet
également d’opérer une distinction chronologique puisque les nervures concentriques placées
indifféremment sur les objets du Bronze final ou
du Hallstatt C sont, néanmoins, restreintes au rebord plat de la phalère dans la phase ancienne
du premier âge du Fer (Chaume, Feugère 1990,
p. 28-29). Selon ces auteurs, la carte de répartition
des phalères du Hallstatt C montre une concentration importante en Bavière (Chaume, Feugère
1990, p. 29, fig. 26), à la différence de la période
précédente qui voit une concentration plus marquée des objets sur la zone des palafittes.
Les observations menées sur le dépôt de
Saint-Martin-de-Bossenay (Aube) permettent de
remarquer que l'ensemble de ces objets intègre
le corpus typologique des phalères du Hallstatt C
(ill. 4).
Le Hallstatt D1
La plupart des dépôts du Hallstatt D1 doivent
leur attribution chronologique à la présence de
parures annulaires massives. À propos des dépôts
situés dans le Bassin parisien, une très large majorité des anneaux présentent un jonc creux, ouvert,
ainsi qu'un décor plastique composé d'oves volumineux. La forme générale de ces objets renvoie
aux parures massives découvertes dans les sépul-
10. Hallstatt D1. Dépôts de parures annulaires de
l'Yonne. 1 : Cheny (Baray 2002, p. 52) ; 2 : Dixmont
(cliché : C. Félix 2004, p. 41). Sans échelle.
tures de Champagne, de Lorraine et de Bourgogne,
datées du Hallstatt D1 (Lepage 1989).
De la même manière, les dépôts de Cheny
(Yonne) et de Crançot (Jura) doivent pouvoir être
calés au Hallstatt D1 grâce à la présence de bracelets ou anneaux à bossettes et de parures dont
le jonc est décoré de plages incisées. Il convient
toutefois de reprendre les dessins du dépôt jurassien afin d'affiner ces informations.
Les dépôts nogentais de Crancey et de Périgny-la-Rose présentent divers objets qui permettent de confirmer une attribution au Hallstatt
D1. Nous pouvons donc renforcer le calage de
ces dépôts simples dont nous venons de discuter. Le poignard à antennes, l'agrafe de ceinture
quadrangulaire décoré au trémolo et les pendeloques triangulaires à anneaux de Périgny-la-Rose
sont également de bons indicateurs chronologiques (ill. 6). À Crancey (Aube), la présence d'une
paire de brassards-tonnelets constitue un élément
de datation appréciable.
Malgré l'absence de publication, les traits
généraux avancés lors de présentations rapides
sur le dépôt collectif à caractère cultuel de la
Douix permettent de mettre en évidence la présence d'une proportion dominante de fibules de
la fin du premier âge du Fer, et du début du second
67
SÉBASTIEN CHEVRIER
âge du Fer. L'essentiel de ces objets semble pouvoir être calé au Hallstatt D final-La Tène A. La
présence de fibules à arc serpentiforme plaide
toutefois en faveur d'une fréquentation discrète
du site dès le Hallstatt D1.
Le Hallstatt D2-3/La Tène A
Les trois fibules découvertes vraisemblablement
dans le rempart du site de hauteur hallstattien de
Sembert-le-Haut à Clamecy (Nièvre) appartiennent
au Hallstatt D3 (ill. 3b). La fibule à arc cranté et pied
circulaire décoré d'une croix ainsi que la fibule
à timbale conique et pied vasiforme de type dP1,
trouvent des similitudes dans un groupe de fibules
découvertes dans le tumulus à char “de Morgan”
(Pininre, Ganard 2004).
La grande majorité des fibules découvertes
dans la source de la Douix renvoie à des modèles
caractéristiques du Hallstatt D2-3/La Tène A (cf. inventaire).
ÉVOLUTION DES DÉPÔTS ENTRE LE IXe
ET LE Ve S. AV. J.-C.
Si les grands dépôts terrestres caractéristiques
du Hallstatt B3 parsèment une large zone du territoire national, le Hallstatt C est marqué par une nette récession de ce phénomène, voire une absence
complète d'ensembles de ce type dans la plupart
des régions françaises. Seules les épées hallstattiennes en bronze continuent d'être déposées dans
les fleuves, selon une tradition issue de l'âge du
Bronze final.
À partir du Hallstatt D1, on observe un nouveau développement des dépôts terrestres. À la différence du Hallstatt C, cette période est marquée
11. Hallstatt D1. Aulnizeux (Marne), dépôts de parures
annulaires (Lepage 1989).
68
par un développement important des dépôts à
parures annulaires majoritaires. Ces derniers s'organisent selon deux modèles distincts. On remarque d'une part l'émergence de dépôts simples,
constitués exclusivement de parures annulaires
massives. Au sein de ces dépôts, une part minoritaire est constituée d'éléments entiers. On identifie d'autre part la présence de dépôts complexes,
à parures annulaires également dominantes, dont
la majeure partie des catégories fonctionnelles
est commune. Le mode de sélection des objets
permet également de reconnaître dans les dépôts
nogentais de Crancey et de Périgny-la-Rose la présence de lots manufacturés (les parures annulaires) accompagnés de panoplies individuelles.
Ces dépôts de type Bülh-Briod, décryptés par
S.Verger (1992), s'inscrivent dans une tradition
héritée de l'âge du Bronze. L'identification de lots
manufacturés, l'existence de panoplies individuelles et, dans certains cas, la présence d'un récipient
métallique renvoient directement à des modèles
de la fin du Bronze final avec le dépôt de Venareyles-Laumes, en Côte-d'Or (Nicolardot,Verger 1998).
Hors de notre sphère d'investigation, le dépôt de
la Mouleyre à Saint-Pierre-Eynac (Haute-Loire) entre dans cette dynamique (Milcent 2004). Lorsque
la documentation sera disponible, il sera certainement possible de proposer une lecture détaillée
du dépôt de Crancey (Aube). Cet ensemble intègre selon toute vraisemblance les dépôts à panoplies mixtes et lots manufactuées, mis en évidence
par P.-Y. Milcent (1998 ; 2004).
Les relations entre la “Celtique” et le monde méditerranéen transparaissent également à travers la
lecture des dépôts complexes, dont certains sont
accompagnés d'un récipient métallique importé
(Périgny-la-Rose, Saint-Pierre-Eynac). L'analyse du
mobilier contenu dans ces ensembles permet de
mettre en évidence une disparition de ces dépôts
composés majoritairement de parures annulaires,
vers la fin du VIe s. av. J.-C.
Aux périodes suivantes, Hallstatt D2-3/LaTène
A, la composition des dépôts se modifie sous l'action de mutations profondes et généralisées du
costume vestimentaire. Le phénomène d'adoption
progressive et la présence croissante des fibules
découvertes dans les différents contextes archéologiques du Hallstatt D2-3 (habitat, funéraire) accentuent les manifestations en genèse au Hallstatt
D1. Présentes de manière sporadique et selon des
schémas typologiques récurrents au Hallstatt D1,
les fibules subissent à la période suivante une dis-
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
CONCLUSION
12. Hallstatt D1. Chelles (Seine-et-Marne), dépôts de
parures annulaires (Bulard 1977).
persion typologique et géographique. Les dépôts
permettent de lire ces événements. Le cas de la résurgence de la Douix à Châtillon-sur-Seine (Côted'Or) est à ce titre éloquent. Timides au cours du
Hallstatt D1, les fibules du Hallstatt D2-3 et de La
Tène A se trouvent sureprésentées.
La nature des dépôts se transforme également.
Que ce soit à Châtillon-sur-Seine (Côte-d'Or) ou à
Clamecy (Nièvre), un seul type d'objet est représenté en petite ou grande quantité. La parure disparaît au profit des fibules. À la fois individuelle et
collective, l'action de“donner”, trahi à nos yeux et à
cette période, la mise en scène de nouveaux lieux.
Le cas des sources de la Douix n'est pas isolé, P.-Y.
Milcent rapproche cette découverte avec celle effectuée à Artonne, La Mothe dans le Puy-de-Dôme.
Une fibule à timbale et ressort en arbalète court, et
une autre sans timbale, ont été trouvées dans un
captage de source (Milcent 2004, vol. 2, p. 577).
D'après les informations de l'archéologue local, la découverte de trois fibules dans la masse du
rempart de Sembert, à Clamecy (Nièvre), est plus
ardue à déchiffrer. Geste collectif ou individuel, cet
ensemble clos pourrait s'inscrire dans un acte de
fondation ou de reconstruction des structures défensives du site.
La prise en compte progressive des dépôts non
funéraires du premier âge du Fer permet maintenant
de mettre le doigt sur une série de phénomènes tout
à fait particuliers. Le caractère original des dépôts du
premier âge du Fer, exposé rapidement dans cette
contribution, se développe selon des traits variés
dans une dynamique d'ordre essentiellement chronologique.
À la différence des dépôts de l'âge du Bronze
et des ensembles métalliques non funéraires, l'intégralité des catégories fonctionnelles représentées dans les dépôts du Hallstatt entrent, par leurs
compositions matérielles, dans la sphère des assemblages caractéristiques du domaine funéraire.
Excepté peut-être le ciseau de Crancey (Aube), la
lecture de ces ensembles ne nous permet pas d'apprécier la variété des autres catégories fonctionnelles en usage à ces périodes (notre connaissance de
l'outillage hallstattien est limitée si l'on met de côté
le phénomène particulier, mais néanmoins marqué,
des haches hallstattiennes).
L'armement en bronze du Hallstatt C prend une
place spécifique au sein de la catégorie dite des dépôts. Probablement à partir de la fin du VIIe, dans
tous les cas,au cours du VIe s. av. J.-C., la parure en
bronze devient le dénominateur commun. Le dépôt
héraultais de Roque-Courbe, commune de Saint-Saturnin, est à ce titre symptomatique.
Fragmentées ou intactes, les parures annulaires massives du Hallstatt D1 constituent d'ailleurs
le type d'objet récurrent dans les lots de produits
manufacturés des dépôts de type Bülh-Briod de
cette période dans le quart nord-est de la France.
Une analyse rapide des ensembles non funéraires
de cette période permet également de remarquer
que le fer est absent des dépôts métalliques jusqu'à
l'extrême fin du premier âge du Fer. D'une manière
générale, excepté au Hallstatt C, le fer ne prend une
importance quantitative dans les assemblages funéraires et non funéraires qu'à partir du début du
second âge du Fer. Ce trait de caractère semble particulièrement caractéristique des régions situées à
l'ouest de l'arc alpin.
Cette première présentation doit évidemment
être complétée par un travail de reprise générale de
la documentation (dessins, comptages). Les phénomènes issus de l'analyse du taux de fragmentation
des ensembles, l'étude de l'origine“culturelle”des objets devraient permettre, prochainement, de préciser
et de développer ces observations préliminaires.
69
SÉBASTIEN CHEVRIER
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INVENTAIRE DU MOBILIER
Premier âge du Fer
Compiègne, Les Arzilliers “Vieux-Moulin” (Oise)
Bibliographie : Blanchet 1984, p. 387.
Contexte de découverte : Découverte fortuite en 1828 au
cours de travaux forestiers en forêt de Compiègne (ill. 9).
Inventaire et caractéristiques :
− un chaudron à attaches d'anses cruciformes, anses torsadées, fond plat et panse carénée.
Inventaire et caractéristiques :
− débris de lingot en cuivre dont un, plus gros, recouvrait
l'ouverture.
Datation : Par comparaison avec l'exemplaire de Poiseul-laVille, La Perrière (Côte-d’Or) : Hallstatt B3 ou Hallstatt C. On
doit toutefois prendre en compte l'utilisation prolongée de
ce type de récipient, ainsi que leur lente évolution morphologique.
Lieu de conservation : MAN.
Hallstatt C
St-Martin-de-Bossenay, “Les Vignes” (Aube)
Bibliographie : Ballet 1963, p. 64-68 ; Villes 1995, p. 128-129.
Contexte de découverte : Au XIXe s. par M. Massey de Saint-Loup
de Buffigny. Compte rendu effectué par le Dr Ballet en 1963.
Les phalères semblent avoir été regroupées à l'intérieur d'un
contenant en céramique (ill. 4). Après la découverte, les objets
ont été dispersés à travers trois lots, quinze exemplaires au
MAN (dont une partie déposée à Nogent-sur-Seine), cinq
exemplaires au musée d'archéologie et des Beaux-arts de
Troyes, enfin un exemplaire au British Museum de Londres.
Inventaire et caractéristiques : Le dépôt des Vignes de SaintMartin-de-Bossenay a livré vingt et une phalères de deux
types différents. Le premier type correspond à un modèle
de grand diamètre (14 à 17 cm), le second type présente un
diamètre de 12 cm en moyenne. Les deux catégories d’objets
intègrent le corpus typologique définit par G. Von Merhart et
B. Chaume, M. Feugère.
Datation : Hallstatt C
Analyse : Si les phalères à calotte hémisphérique de forme
conique semblent être caractéristiques du Hallstatt B final,
B. Chaume et M. Feugère proposent de ranger les objets
présentant une rupture marquée entre le rebord plat et la
calotte centrale bombée, au Hallstatt C Le décor permet
également d’opérer une distinction chronologique puisque les
nervures concentriques placées indifféremment sur les objets
du Bronze final ou du Hallstatt C sont toutefois restreintes au
rebord plat de la phalère, dans la phase ancienne du premier
âge du Fer. Selon ces auteurs, la carte de répartition des phalères du Hallstatt C montre une concentration importante en
Bavière (Chaume, Feugère 1990, p. 29, fig. 26), à la différence
de la période précédente qui voit une concentration plus marquée des objets sur la zone des palafittes (Chaume, Feugère
1990, p. 28-29).
71
SÉBASTIEN CHEVRIER
Datation : En fonction de ces diverses observations, il semble
possible d’apporter une distinction typo-chronologique au
sujet des phalères du Hallstatt C. Les objets en association
avec un assemblage mobilier “ancien’’ (Chavéria) trouvent
des parallèles avec les productions métalliques de la phase
chronologique précédente sur le site lacustre d’Auvernier. Par
contre, les exemplaires associés à des objets potentiellement
plus récents (épée en fer de Saulces-Champenoises, assemblage à épée en fer/rasoir en bronze à Poiseul) présentent
des caractéristiques typologiques et décoratives sensiblement
différentes. C’est à ce dernier groupe que nous attribuerions
les 21 phalères du dépôt de Saint-Martin-de-Bossenay dans
l’Aube.
Lieu de conservation : 3 lots répartis au MAN, musée de Troyes
et le British Museum.
Hallstatt C1
Crancey (Aube)
Bibliographie : Villes 1995, p. 130-131.
Contexte de découverte : Fouille clandestine au détecteur en
contrebas de la basse terrasse bordant le lit majeur de la
Seine, en terrain alluvionnaire plat, humide et inondable.
Aucune information sur la disposition des objets ou sur la
présence d'un éventuel contenant. Certains bracelets ont
subi une altération lors de la découverte.
Inventaire et caractéristiques :
– une paire de brassards-tonnelets,
– un bracelet godronné massif et fermé,
– deux paires de bracelets ouverts et massifs, à godrons
arrondis,
– quatre paires de bracelets ouverts, moins massifs, à
godrons carénés
– un bracelet ouvert, également moins massif, à godrons
arrondis,
– une paire d'anneaux plus petits, fermés, à godrons sphéroïdaux,
– un anneau rubané, à extrémités ornées en double spirale ;
– divers fragments de parure : torque tubulaire non décoré,
bracelet à petites nodosités, disque de fibule de type
italique, anneau à “engrenage”, bracelets à jonc mince et
plein, dont un décoré d'incisions transversales, fragment
éventuel de manche ajouré de rasoir, anneau en ruban
frangé d'un décor incisé,
– un petit ciseau à deux tranchants opposés, sur mince tige
ronde,
– une applique rectangulaire à double bélière,
– un petit disque régulier, sans décor, à perforation centrale ;
– une applique de forme trapézoïdale, perforée à l'extrémité étroite et pourvue de deux anneaux sur le bord
opposé, pour la suspension de grelots ou de pendeloques,
– un mince fil de bronze très tordu,
– deux lingots plano-convexes de petite taille, dont un
constitué d'un amalgame de petits fragments partiellement refondus.
Datation : Hallstatt D1
Analyse : Ce dépôt présente près des deux tiers de ses articles en commun avec celui de Périgny-la-Rose. Les éléments
originaux sont le disque de pied de fibule de type italique, le
bracelet rubané à extrémités terminées en double spirale et
deux brassards-tonnelets non décorés.
Bibliographie : malgré l'existence de plusieurs mentions bibliographiques, l'autorisation d'étudier et de publier cet ensemble
72
ne nous a pas été accordée.
Lieu de conservation : musée de Nogent-sur-Seine (Aube).
Périgny-la-Rose, “Les Usages” (Aube)
Bibliographie : Piette 1989, p. 229-241 ; Piette 1995, p. 132-133.
Contexte de découverte : découverte effectuée en 1981
par M. Renon lors de travaux de labours. il découvrit un
récipient en bronze dans lequel se trouvaient des éléments
d'équipement personnel et diverses parures. Le récipient a
été perdu.
Inventaire et caractéristiques (ill. 6-7) :
– un brassard fermé à godrons et motif ternaire constitué
de quatre godrons obliques (D : 108 ; H : 55 à 60 mm),
– un bracelet fermé à huit godrons (D : 65 ; H : 47 mm),
– un bracelet fermé à dix godrons (D : 60 ; H : 45 mm),
– deux bracelets fermés à onze godrons (D. : 62 ; H :
35 mm),
– deux bracelets ouverts ornés de quinze godrons (D :
95 mm ; H : 45 mm),
– six bracelets de forme ovale, fermés constitués de vingtquatre demi-olives jointives (L : 103 ; l : 78 ; H : 18 mm),
– un bracelet rubané ouvert décoré d'un motif de triangles
hachurés (D : 58 ; H : 35 à 39 mm),
– un fragment de bracelet à bossettes,
– un fragment de torque tubulaire,
– un fragment de bracelet rubané au décor gravé très
estompé,
– un vase en bronze,
– une agrafe de ceinture décorée au trémolo,
– une applique en tôle de bronze,
– deux pendeloques triangulaires à anneaux de suspension,
– un lot de 86 boutons à bélière,
– une épingle à tête enroulée ou un bracelet filiforme,
– une armature de flèche en bronze,
– un manche de poignard à antennes en bronze (L :
108 mm),
– un fil de bronze à section circulaire,
– des fragments de lingots plano-convexes.
Datation : Hallstatt D1
Analyse : S. Verger propose une lecture compartimentée de
cet ensemble (Verger 1992) :
Équipement masculin :
– un manche de poignard à antennes,
– un fermoir et des ornements de ceinture,
– une pointe de flèche,
– un petit bracelet filiforme,
– divers boutons,
– un vase en bronze.
La série d'objets manufacturés :
– une série de parures annulaires (une vingtaine de bracelets, anneaux de jambes et torques),
– des éléments de métal brut.
Lieu de conservation : musée de Nogent-sur-Seine (Aube)
Crancot (Jura)
Bibliographie : Annuaire du Jura 1855, p. 121 ; Millotte, Vignard
1962, p. 9-10 ; Millotte 1963, p. 287, pl. 53, n° 12-14.
Contexte de découverte : “Cachette” découverte en 1852 dans
un champ labouré sur le territoire de cette commune, sous
une pierre.
Inventaire et caractéristiques (ill. 8) : 16 bracelets en bronze
dont :
– un bracelet en bronze ouvert aux extrémités proches.
Surface extérieure constituée de godrons. (gd diam. :
68/pt diam. : 55 mm),
– un bracelet semblable au précédent,
OBSERVATIONS SUR QUELQUES DÉPÔTS DU PREMIER ÂGE DU FER DANS LE QUART NORD-EST DE LA FRANCE
–
un bracelet en bronze ouvert. Surface extérieure ornée de
godrons, en deux fragments. (gd diam : 70 mm/petit diam :
57 mm),
– un bracelet massif à extrémités proches. La surface extérieure est constituée de godrons. (gd diam : 62 mm/petit
diam : 52 mm),
– un fragment de bracelet semblable,
– un fragment de bracelet semblable dont la patine a disparu,
– un bracelet en bronze ouvert, intérieur plat, face extérieure bombée. Décor de zones rectangulaires garnies
d'incisions horizontales ou obliques. (gd diam : 70mm/
petit diam : 60 mm),
– un bracelet identique au précédent ;
– un bracelet en bronze ouvert, avec de légers tampons
aux extrémités et précédés de cannelures transversales.
Décor de bandes obliques incisées. (gd diam : 70/pt diam :
60 mm),
– un bracelet semblable au précédent ;
– un bracelet fragmenté identique au précédent,
– un bracelet fragmenté identique au précédent,
– un bracelet fragmenté identique au précédent,
– un bracelet fragmenté identique au précédent,
– un bracelet en bronze ouvert orné de cannelures
obliques au centre du jonc. On relève des cannelures
perpendiculaires et des incisions fines en chevrons aux
extrémités. (gd diam : 67 mm/petit diam : 65 mm),
– une extrémité d'un bracelet identique au précédent.
Datation : Hallstatt D1.
Lieu de conservation : Musée de Lons-le-Saunier (Jura).
Aulnizeux (Marne)
Bibliographie : Lepage 1989, p. 322-323.
Contexte de découverte : incertaines. Les anneaux seraient liés
à une sépulture creusée dans la tourbe, à la naissance des
Marais de Saint-Gond.
Inventaire et caractéristiques (ill. 11) :
– un bracelet fermé à oves massifs ; séparés par des surfaces plates et lisses ;
– deux anneaux à godrons (respectivement treize et quatorze godrons) ;
– deux fragments d'anneaux à godrons identiques aux
précédents ;
– un torque à figurines humaines (?).
Datation : Hallstatt D1 pour les anneaux et bracelets.
Analyse : dépôt incertain.
Lieu de conservation : MAN, n° inventaire 6835/68436/68438.
Chelles (Seine-et-Marne)
Bibliographie : Bulard 1977.
Contexte de découverte : découverte effectuée en 1848 sur la
commune de Chelles, “sur la rive droite de la Marne, à l'emplacement du canal, au niveau de l'actuelle zone industrielle et
à la base du méandre recoupé ceinturant le site antique de
Chelles”, dans des circonstances inconnues.
Inventaire et caractéristiques (ill. 12) :
– six gros anneaux en bronze ornés de décors incisés ;
– des fragments d'anneaux à godrons en bronze.
Datation : Hallstatt D1.
Lieu de conservation : Cabinet des Médailles et Antiques de
la Bibliothèque Nationale de France (BNF) à Paris.
Mortery, “Grisy” (Seine-et-Marne)
Bibliographie : Bourquelot 1858, p. 97-98 ; Félix 2004, pl. 17, 23 bis.
Contexte de découverte : découverte effectuée par un bûcheron,
sous le tronc d'un vieux chêne, à deux ou trois pieds sous
terre. « Un ensemble d'une trentaine d'objets était déposé
dans un grand vase en poterie rouge », dans un champs du
territoire de Grisy, à Mortery. Ce dépôt a été présenté en 1858
à la Société des Antiquaires de France.
Inventaire et caractéristiques (ill. 6):
– des épingles à tête globuleuse décorée de cercles concentriques,
Pour la parure du premier âge du Fer :
– quatre anneaux à godrons en bronze ainsi que des fragments,
– trois anneaux fragmentés ouverts à jonc circulaire
simple.
Datation : âge du Bronze et Hallstatt D1.
Analyse : une partie de ce dépôt correspond à des objets
caractéristiques de l'âge du Bronze final (épingles proches des
modèles de Villethierry dans l'Yonne). L'autre partie comprend
des éléments de parure du premier âge du Fer.
Parmi les anneaux, deux portent les traces de perforations
circulaires liées probablement à un assemblage. F. Bourquelot
d'ailleurs avait remarqué la présence d'un “goupillon” métallique qui doit vraisemblablement correspondre à une barrette
d'assemblage.
Lieu de conservation : Cabinet des Médailles et Antiques de
la Bibliothèque Nationale de France, (Paris) MAN, musée de
Provins (Seine-et-Marne).
Saint-Brice, “La ferme de Saint-Martin-des-Champs”
(Seine-et-Marne)
Bibliographie : Göetz 1966 ; Félix 2004, pl. 24.
Contexte de découverte : trouvé en 1867, dans le champ de
la ferme d'un particulier à Saint-Brice au cours de travaux
agricoles.
Inventaire et caractéristiques (ill. 5) :
– un anneau fermé à vingt-et-un godrons (D int. : 92 x
104 mm ; D. ext. : 140 x 152 mm ; ép. : 27 mm ; poids :
445 gr.),
– un anneau fermé à vingt-et-un godrons (D int. : 96 x
107 mm ; D. ext. : 139 x 152 mm ; ép. : 27 mm ; poids :
427 gr.),
– des fragments d'anneau à godrons : (deux fragments
comprennent douze godrons, deux autres en comportent
cinq, un fragment en compte quatre tandis qu'un dernier
en porte seulement deux).
Datation : Hallstatt D1.
Lieu de conservation : musée de Provins (Seine-et-Marne),
n° inventaire MP 338/339/1947.1/1947.2/1947.3/1947.4/1947.5.
Cheny, “Les Groseillers” ou “Les Mardelles” (Yonne)
Bibliographie : Baray 2002, p. 52.
Contexte de découverte : fouilles effectuées par R. Lapert,
de 1945 à 1959. Le site correspond à une vaste nécropole
composée d'enclos circulaires et quadrangulaires. Outre des
sépultures laténiennes et hallstattiennes, un petit dépôt constitué de quatre anneaux en bronze fut repéré dans un petit
trou, à proximité des enclos.
Inventaire et caractéristiques (ill. 10) :
– quatre anneaux en bronze, ouverts, à jonc plein. Le corps
de chaque objet présente une alternance régulière de
bossettes et d'espaces incisés.
Datation : Hallstatt D1.
Lieu de conservation : musée d'Auxerre (Yonne).
73
SÉBASTIEN CHEVRIER
–
La Tène A : vingt et un exemplaires de fibules à timbale
hypertrophiée (type de Weidach) et arc décoré/une fibule
de type Marzabotto à ressort à quatre spires et corde
externe/une fibule à tête d'oiseau et arc renflé…),
– aucun objet de La Tène B1 (type pré-Dux ou Dux),
– certains objets plaident en faveur d'une fréquentation
dès le Hallstatt D1 : fibules à arc serpentiforme et disque
d'arrêt, S5 de Mansfeld,
– des témoins discrets incitent cependant à voir ce lieu
fréquenté dès la Hallstatt C, voire au Hallstatt B final
(céramique du Hallstatt B final/épingle à col de cygne).
Datation : Hallstatt D2-D3/La Tène A.
Analyse : l'origine de la fréquentation de ce lieu pourrait donc
remonter au Bronze final ; il est intéressant de noter que les
fibules de La Tène A, présentes dans l'ensemble de la Douix,
sont, pour le moment, absentes des recherches menées sur
le Mont-Lassois. Concernant les fibules hallstattiennes retrouvées en contexte de dépôt collectif en milieu humide, il faut
noter la présence de pratiques similaires en Suisse, sur le site
même de La Tène (Kaenel 1990, p. 305 ; Milcent 2004).
Lieu de conservation : musée de Châtillon-sur-Seine (Côte-d'Or).
Dixmont (Yonne)
Bibliographie : dossiers communaux du MAN, Félix 2004.
Inventaire et caractéristiques (ill. 10),
– dix anneaux à godrons carénés en bronze, ouverts (on
compte seize godrons par unité),
– deux anneaux à godrons carénés en bronze, fermés.
Datation : Hallstatt D1.
Analyse : tous les anneaux ouverts de ce dépôt présentent la
même déformation, une légère torsion du jonc qui provoque
un décalage entre chaque extrémité. De plus, la totalité des
anneaux montre des traces d'usures de part et d'autre du
jonc.
Lieu de conservation : MAN, n° inventaire 36.006/10 ; 36.006.1
et 5/12.
Paron, “Saint-Bond” (Yonne)
Bibliographie : Salmon 1878 p. 5-15 ; Hure 1931, p. 64-65. Félix
2004.
Contexte de découverte : inconnu. “Au bas de la colline de
Saint-Bond”, au bord de la voie romaine de Sens à Orléans.
Inventaire et caractéristiques :
– deux grands bracelets en bronze à grosses perles creuses,
– un fragment d'un autre bracelet perlé,
– des fragments de tube creux,
– deux fragments d'une tige pleine en bronze (bracelet ou
torque ?),
Datation : Hallstatt D1.
Analyse : dépôt incertain.
Lieu de conservation : MAN, n° inventaire 20.838 et 20.840.
Clamecy, “Sembert” (Nièvre)
Bibliographie : Adam 1999, p. 5, fig. 1.
Contexte de découverte : découverte de trois fibules, dans la
masse du rempart. Malgré une description imprécise, il semble
qu'il s'agisse d'un lot.
Inventaire et caractéristiques (ill. 3b) :
– une fibule à timbale en forme de cône décoré de lignes
parallèles et concentriques. Le pied est vasiforme, le ressort court à corde interne,
– une fibule à arc cranté et pied circulaire à motif cruciforme
incrusté,
– une fibule à arc cintré losangique. Le dessin ne permet
pas plus de précision. Le pied, dans le prolongement du
porte ardillon est en forme de croix à trois branches. Sa
forme et la présence de petits rivets semblent pouvoir
identifier ce pied à un socle, dont l'élément rapporté a
disparu.
Datation : Hallstatt D2-3.
Analyse : La fibule 2 correspond au type dP1 de Mansfeld. La
timbale est en forme de cône sur lequel s'organise un décor
de lignes parallèles et concentriques. Le pied est vasiforme,
le ressort court à corde interne. Cette fibule est identique à
un exemplaire découvert selon toute vraisemblance dans le
contexte de la tombe à char du tumulus “de Morgan” dans la
forêt des Moidons (Piningre, Ganard 2004, p. 115, fig. 62, n° 4),
attribuée au Hallstatt D3.
Lieu de conservation : musée de Clamecy (Nièvre).
Hallstatt D2-3/La Tène A
Châtillon-sur-Seine, “La Source de la Douix”
(Côte-d’Or)
Bibliographie : Buvot 1998, p. 26-33 ; Labeaune 2003, p. 43.
Contexte de découverte : découverte effectuée en 1996, lors
de sondages spéléologiques pratiqués à l'intérieur même
d'une résurgence naturelle ayant vraisemblablement subi
des aménagements anthropiques. Outre la découverte de
monnaies et ex-voto antiques, un lot d'environ 300 fibules et
fragments a été découvert dans la source. Cette découverte
n'est pas publiée.
Inventaire et caractéristiques (ill. 3a) :
– un lot important de fibules (entre 200 et 300 à déterminer),
– d'après les premières analyses, 90 % des objets sont
en fer (à la différence des fibules trouvées sur le MontLassois dont la majorité est en bronze),
– l'essentiel du matériel peut être calé au Hallstatt D final/
La Tène A type à timbale simple, F4 de Mansfeld/type à
pied droit mouluré, F2 E de Mansfeld/type Golfe du Lion
à pied droit et bouton conique,
74
Dépôts métalliques du second âge du Fer
dans les grottes du centre-ouest de la France
José GOMEZ de SOTO
Dans les régions karstiques, l’utilisation des grottes est restée intense tout au long de la Protohistoire.
La nature de cette utilisation fut des plus diverses,
habitat ou annexe d’habitat et lieu de sépulture
sont les modalités les plus courantes, ou plutôt
les plus couramment admises. La réalité des lieux
de culte ou des dépôts d’offrandes est moins aisément perçue. Qu’en est-il dans le centre-ouest de
la Gaule ?
Pour les quelques exemples présentés ci-dessous, le terme “dépôt” sera entendu, non dans
l’acception usuelle et restrictive de “regroupement
d’objets”, mais dans celle “d’objets retirés de la
circulation”, échappant ainsi à leur usage habituel
pour un autre de nature différente.
PRINCIPAUX SITES KARSTIQUES
DU CENTRE-OUEST DE LA FRANCE
AYANT LIVRÉ DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES
Grotte de La Roche Noire à Mérigny (Indre)
Située aux confins nord-occidentaux de la
région considérée, la grotte de La Roche Noire se
présente comme un réseau karstique dans lequel
coule une rivière souterraine. Les dépôts de restes
humains (une vingtaine d’individus), de faune
domestique et de mobilier avaient été réalisés
sur ses rives, mais quelques artefacts proviennent
cependant de son lit (Cordier 1978). La nature
sépulcrale du site, affirmée dans la publication
princeps, a depuis été discutée (Gomez de Soto,
Milcent 2003)
Le mobilier comporte une série notable de
céramiques et des éléments métalliques : fibules à
faux ressort sur le pied, pointe de lance, couteau,
ainsi qu’un agglomérat d’objets parmi lesquels
une paire de fibules en bronze, une fibule et un
bracelet de fer. Les fibules à faux ressort sur le
pied assurent une datation des dépôts au début
de la Tène
Grotte du Quéroy à Chazelles (Charente)
La grotte du Quéroy est riche d’une stratigraphie
s’étendant du Würm IV à la Tène ancienne (Gomez
de Soto 1978). Lors de La Tène B, l’ouverture du site
était déjà très largement colmatée et l’accessibilité
des lieux particulièrement malaisée. À ce moment,
un petit nombre d’artefacts furent introduits dans
la grotte, quelques vases et deux outils en fer : un
marteau et une serpette (ill. 1).
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 75-81 (Bibracte ; 11).
JOSÉ GOMEZ DE SOTO
1. Grotte du Quéroy à Chazelles (Charente). Serpette
et marteau en fer (dessins J. Gomez de Soto).
Grotte des Perrats à Agris (Charente)
Grotte de Rancogne (Charente)
Les sondages à courte distance dans le talweg
dans l’environnement de la grotte révèlent que la
fréquentation du site pendant le second âge du
Fer ne s’étendait probablement pas à l’extérieur
de la cavité, ou fort peu (Gomez de Soto, Boulestin
1996, p. 89 sq., 124 sq.).
L’hypothèse qui considérait la grotte de
Rancogne comme un lieu funéraire et cultuel de
l’âge du Bronze final (Guillien 1968) ne peut plus
être retenue sans discussion.
Des restes humains y furent découverts à
diverses occasions depuis le XVIIIe s. Sur la série
issue des fouilles conduites de 1961 à 1970 dans
une salle relativement éloignée de l’entrée, l’information est assez sommaire dans l’ouvrage
consacré au site (Gruet et al., 1997, cf. p. 35 en particulier), mais l’association de restes humains et
de pièces métalliques est affirmée dans le rapport
de fouilles de 1966.
Outre une fibule de La Tène D, furent recueillis
des bracelets en fer et une pointe de lance, ainsi
que des éléments de fer non identifiables, même
après radiographie, et une pièce tubulaire en
bronze enserrant une barre de fer.
Les dépôts laténiens dans la grotte débutent
au IVe s., avec des céramiques et quelques objets
métalliques, fibule du type de Dux, demi-anneau
creux de suspension d’épée. Si on ne peut assurer
que le casque “d’apparat”, qui fut réalisé pendant
ce siècle, fut bien enfoui à ce moment, cette hypothèse reste vraisemblable.
C’est au cours de la période La Tène C2/D1 que
la fréquentation est la plus importante. Les dépôts
de céramique comportent plusieurs centaines de
récipients parmi lesquels, avec environ 10 % du
total, une proportion anormalement élevée de
vases balustres (Ducongé 2003).
Les dépôts métalliques se composent majoritairement d’outils : houe, couteaux, hache, etc.
(Thonont 2001), d’ustensiles divers, dont un rasoir
et un anneau de suspension de baquet, de quelques
rares parures, dont deux bracelets et une fibule de
La Tène II en bronze, et de rares pièces d’armement,
deux pointes de flèches, l’extrémité d’une sorte de
pilum (ill. 2a et b). Un dé à jouer en os ou bois de
cerf est encore à noter (Gomez de Soto, Boulestin
1996, fig. 61).
76
Aven du Trou de la Coupe à Touvre
(Charente)
Partiellement fouillé, l’aven du Trou de la
Coupe contenait les restes d’au moins douze
sujets, huit adultes et quatre immatures (Germain,
2002) et des restes de faune, dont des suidés et
des chevaux.
Deux vases avaient, semble-t-il, été déposés
sur une corniche, un bracelet de fer fut recueilli à
l’aplomb de celle-ci.
DÉPÔTS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LES GROTTES DU CENTRE-OUEST DE LA FRANCE
2a. Grotte des Perrats à Agris (Charente). Armes, outillage et objets divers en fer de La Tène C2/D1 (dessins J. Gomez de Soto).
77
JOSÉ GOMEZ DE SOTO
2b. Grotte des Perrats à Agris (Charente). Armes, outillage et objets divers en fer de La Tène C2/D1 (dessins J. Gomez de Soto).
78
DÉPÔTS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LES GROTTES DU CENTRE-OUEST DE LA FRANCE
Quelques grottes du Périgord
Des vestiges laténiens ont été signalés dans
la grotte des Ormes à Javerlhac (Chevillot 1978),
dans un aven près de La Calévie (Chevillot et
al.1977), dans la grotte Rouffignac (Barrière 1974),
ou encore dans la cavité à ruisseau souterrain
de La Fontanguillère à Rouffignac-de-Sigoulès
(Chevillot 1989). De concert avec les artefacts,
des restes humains incinérés ou non ont été
mentionnés, sans que leur contemporanéité avec
ces derniers fût bien toujours solidement établie,
sauf probablement à Rouffignac. Pour cette grotte,
l’hypothèse funéraire n’a guère été contestée
(Gaillard, Girardy-Caillat 1996 p. 210), bien que la
découverte dans l’environnement immédiat des
supposées sépultures de divers menus objets et
surtout d’un dépôt de onze monnaies (Barrière,
op. cit., p. 197) ne soit pas sans poser question.
LES MÉTAUX DANS LES GROTTES :
DÉPÔTS DU QUOTIDIEN, DÉPÔTS
FUNÉRAIRES, OU PRATIQUES CULTUELLES ?
Topographie et environnement des cavités
La plupart des cavités présentées offrent des
conditions d’accès malaisées : entrée malcommode comme au Quéroy ou à La Roche Noire,
cheminements plus ou moins longs à Rancogne,
Rouffignac et La Fontanguillère, descente dans
un aven au Trou de la Coupe. De telles conditions
d’accès ou de circulation excluent une utilisation
aisée et, quand ce n’était pas le cas, les hommes
négligèrent les facilités offertes par l’environnement immédiat : la grotte des Perrats n’oppose
aucune difficulté d’accès, mais sa fréquentation
paraît limitée à sa seule salle principale sans
débordement notable à l’extérieur. Contrairement
à ce qui se produisit pendant ses phases d’occupation comme habitat ou annexe d’habitat pendant
l’âge du Bronze, seule la cavité elle-même intéressait les hommes du second âge du Fer.
Que ces cavités fussent utilisées pour un habitat, même temporaire, paraît peu probable ; il faut
donc envisager une fonction particulière.
2.2. Les restes humains : quelle signification ?
La présence de restes humains en milieu
souterrain est encore presque systématiquement
comprise en termes funéraires. Les avancées de
l’anthropologie funéraire ont appris que l’équation “restes humains = sépulture” n’est pas toujours
valable. Les traces d’intervention que portent
certains ossements indiquent dans certains cas
un traitement funéraire particulier du corps, mais,
dans bien d’autres, les traces sont conséquences
de la manipulation du cadavre à des fins non
funéraires (cf. Ribemont-sur-Ancre) voire de pratiques sacrificielles.
Dans la région concernée, ces traces, parfois
discrètes, ne furent pas toujours systématiquement recherchées, ou les études anthropologiques
furent réalisées à une époque où on ne savait pas
encore bien discerner − ou ne cherchait pas −
les moins visibles. Seuls les ossements du Trou
de la Coupe ont bénéficié d’une étude complète menée selon les normes actuelles (Germain
2002). Divers stigmates d’interventions, traces de
découpe et de fracturation, ont été reconnus. Les
corps ont donc subi des manipulations, qui, pas
davantage que leur dépôt dans un aven, ne paraissent relever de pratiques funéraires telles qu’on
les connaît dans le monde laténien, mais invitent
à chercher des rapprochements avec ces autres
corps déposés, complets ou partiels, dans divers
types de milieux souterrains, des silos en particulier (Arcelin, Brunaux 2003). Des exemples sont
attestés en Gaule du Centre, près de la limite nordoccidentale de la région ici considérée (Gomez
de Soto et al. 2003). Par voie de conséquence, il
paraît clair que les dépôts accompagnant de tels
restes ne peuvent apparaître comme des mobiliers funéraires stricto sensu.
Pour la grotte de Rouffignac, la découverte
dans l’environnement immédiat des sépultures
supposées d’un dépôt monétaire et de quelques
menus objets n’est pas sans évoquer le cas de la
grotte de Chenoves en Saône-et-Loire (Guillard
1934 ; Fischer 1982). Dans cette cavité furent mis
au jour des squelettes humains et divers objets
avec, là aussi, un dépôt monétaire. Des dépôts non
funéraires laténiens de restes humains associés à
des dépôts de nature variée, dont des pièces de
fer en quantité appréciable, sont attestés dans un
certain nombre de cavités souterraines pendant la
période laténienne. Un exemple particulièrement
significatif est celui de la grotte du Trou de l’Ambre à Eprave, province de Namur, en Belgique. Il
s’y trouvait entre autre un dépôt de currency bars
disposé en étoile (Mariën 1970).
79
JOSÉ GOMEZ DE SOTO
une clé pour comprendre la présence de ces restes − de certains d’entre eux tout au moins – et
des objets qui les accompagnent dans les milieux
souterrains. À une époque où la pratique de la
sépulture en grotte a généralement disparu, les
restes humains apparaissent plutôt comme traces
de ces pratiques sacrificielles mentionnées par
les sources littéraires et attestées par l’archéologie
en divers lieux de l’Europe celtique, et les objets
métalliques comme offrandes ou mobiliers votifs
destinés aux entités du monde chthonien.
Le nombre important des outils témoigne,
comme ceux des dépôts des établissements
ruraux, de pratiques cultuelles liées à des préoccupations agricoles ou plus généralement de
production, et d’une religiosité populaire qui,
par ses procédures de destruction, se rapprochait des pratiques aristocratiques des sanctuaires
de plein air à dépôts d’armes (dont, d’ailleurs,
l’outillage n’est pas absent, comme par exemple à
Muron en Saintonge : Gomez de Soto 1989 ; 1991).
L’importance numérique des objets en fer rappelle les propos d’Isidore de Séville, qui pour une
période postérieure constatait qu’on honorait les
dieux infernaux par des offrandes de fer.
Ces dépôts à caractère sacré, considérés sur
la longue durée, ne marquent qu’une étape au
sein d’une tradition pluriséculaire initiée dans la
région dès le Bronze moyen au moins (Gomez de
Soto 1995, p. 244) pour ne s’éteindre que pendant
la période gallo-romaine.
Dépôts en grotte et dépôts
dans les sanctuaires de plein air
Le nombre des outils appelle des rapprochements avec les sanctuaires laténiens de Gaule du
centre-ouest où, à côté des armes, les outils apparaissent en nombre appréciable (Gomez de Soto,
Lejars 1991 ; Gomez de Soto et al. 2003). Les dépôts
à caractère sacré des établissements ruraux privilégient parfois les armes, mais surtout les outils
(Guillaumet, Nillesse 2000), comme à Barbezieux en
Charente (Gomez de Soto 2000). La fragmentation
de beaucoup d’objets de la grotte des Perrats peut
probablement être rapprochée du bris et autres
processus de destruction des armes des sanctuaires
de plein air. Dans le même site, une procédure de
semblable nature avait été appliquée au casque
d’apparat du IVe s..
CONCLUSION
Les abandons d’objets métalliques dans les
grottes et autres cavités dans le centre-ouest de la
Gaule et les régions voisines ne relève visiblement
pas, pour l’essentiel des cas du moins, de processus
triviaux.
Les objets de métal peuvent être associés à des
restes humains. La composition comparable des
dépôts des grottes de Rouffignac et de Chenoves,
qu’on peut rapprocher de ceux, en Gaule Belgique,
du Trou de l’Ambre, ou encore de Sinsin, fournit
BIBLIOGRAPHIE
Arcelin, Brunaux 2003 : ARCELIN (P.), BRUNAUX (J.-L.)
dir. — Dossier Cultes et sanctuaires en France à l’âge du Fer.
Paris : CNRS, 2003, p. 107-138 (Gallia ; 60).
Chevillot 1989 : CHEVILLOT (C.). — Sites et cultures
de l’âge du Bronze en Périgord. Périgueux : Vesuna
(Archéologies ; 3).
Barrière 1974 : BARRIERE (C.). — Rouffignac.
L’Archéologie. Toulouse : Mémoires de l’Institut d’Art
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81
Ausgewählte latènezeitliche Eisendepotfunde
aus Österreich
Otto-H. URBAN
(Résumé en français, p. 97, 98)
In dem Kurzbeitrag sollen die bekannten latènezeitlichen Depotfunde mit eisernen Werkzeugen
aus Salzburg (Szbg.), Oberösterreich (OÖ.) und
Niederösterreich (NÖ.) (siehe Abb. 12) zusammengestellt werden. Nicht aufgenommen wurden
die so genannten Schmiedegräber, wie beispielsweise Grab 13 aus Au am Leithagebirge (NÖ.)
(Nebehay 1973, Taf. 11), ein Latène B1-zeitlicher
Grabkomplex mit unter anderem zwei Meißeln,
einem Setzhammer und einem flachen Amboss,
oder das seit langem in der Literatur bekannte
mittellatènezeitliche Feinschmiedegrab von St.
Georgen am Steinfeld (NÖ.) 1.
EISENDEPOTFUND VOM NIKOLAUSBERG BEI
GOLLING (SZBG.)
Rund 30 km südlich der Stadt Salzburg, nahe
dem Pass Lueg, wurde von Fritz Moosleitner
1982 im Zuge einer systematischen Grabung auf
einer fast 10 m über den Talboden herausragenden Felshöhe die Werkzeugausstattung eines
Grobschmiedes entdeckt (Moosleitner, Urbanek
1991, 63 ; Moosleitner 1998-1999, 500). In nur 35 cm
Tiefe lagen in einer natürlichen Felsaushöhlung
mit etwa 1 m Durchmesser ein Amboss und ein
Setzhammer. Rund 30 cm daneben lagen eine
Herdschaufel und zwei große Zangen sowie ein
gefaltetes Bandeisen sorgfältig zusammengelegt.
Die Langwerkzeuge dürften mit Hilfe eines kleinen Eisenringes zu einem Bündel verschnürt
nieder gelegt worden sein.
Der 14 bis 15 cm große, pyramidenstumpfförmige Amboss ist 11,4 kg schwer 2. Der ein 3⁄4 kg
schwere und 10 cm lange Setzhammer hat ein
schmalrechteckiges Schäftungsloch. Die annähernd
quadratische Schlagfläche kragt allseitig über ; der
Hammerkopf weist asymmetrisch eine schmale Rille
auf und auf einer Seitenfläche findet sich eine kleine,
kreisrunde Vertiefung. Die beiden Schmiedezangen,
Spitzzangen, mit etwas unterschiedlich geformten
Griffenden sind 55 bzw. 82 cm lang. Sie wurden
gegenständig orientiert und gemeinsam mit der
70 cm langen Herdschaufel und einem gefalteten,
etwa 4 cm breiten und 60 cm langen Bandeisen,
niedergelegt. Die Herdschaufel weist ein breitovales
Schaufelblatt auf, der Griff ist tordiert, im Ösenende
hängt ein Eisenring (Abb. 1).
Im näheren Umfeld des Eisendepots fanden sich neben zahlreichen fladenförmigen
Schmiedeschlacken ein schwerer Eisenhaken
sowie ein Durchschlag und eine Feile. Die
Zugehörigkeit zum Werkzeugdepot erscheint Fritz
Moosleitner jedoch „wenig wahrscheinlich“. Der
Depotfund wird nach Latène B datiert, wobei „ein
mittel- bis spätlatènezeitliches Alter [...] jedoch
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir. : Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F.-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 83-99 (Bibracte ; 11).
OTTO-H. URBAN
nicht gänzlich auszuschließen“ ist (Moosleitner,
Urbanek 1991, 71 und 76). Der Gesamtbefund deutet auf eine Schmiedewerkstätte auf der Felshöhe,
in dessen unmittelbarer Nähe das gebrauchsfertige Werkzeug vergraben, verborgen, jedoch nicht
mehr gehoben werden konnte.
EISENDEPOTFUND VON HAINBACH (SZBG.)
Hainbach, ein Weiler in der Gemeinde Nußdorf
am Haunsberg, liegt im Oichental, östlich von
Oberndorf im Salzburger Flachgau. Der Altfund,
welcher 1894 in das Salzburger Landesmuseum
Carolina Augusteum gelangte, wurde wohl bei
Rodungsarbeiten im Wald entdeckt. Er umfasst
insgesamt drei Sensen, ein Pflugmesser, eine schmale Pflugschar und ein Beil (Abb. 2).
Die Sensen, deren Spitzen jeweils abgebrochen
sind, weisen eine leicht spitzwinkelig angesetzte
Griffplatte mit L-förmig hochgebogenem Dorn
auf. Zum Griff des mit einer Länge von 44 cm
größten Sensenblattes gehört ein bandförmiger
Sensenring 3. Das kräftige Pflugmesser ist 35,9 cm
lang, die kurze, schmale Pflugschar mit Lappen
dagegen nur 16,7 lang und 3,7 cm breit. Sie diente
als Spitze eines Hakenpfluges und weist starke
Abnützungsspuren auf. Das Pflugmesser gehört
dagegen zu einem anderen Pflugtyp. In dem
Pflugbalken ritzt das Pflugmesser die Scholle auf
und eine dahinter angebrachte Pflugschar mit
breitem Blatt reißt die Scholle breit auf.Von einem
eigentlichen Wendepflug kann allerdings noch
nicht gesprochen werden. Das Beil mit breit geschwungener Schneide weist eine rechtwinkelig
geschmiedete Tülle auf. Zumeist werden diese
Beile als Holzbearbeitungsgerät interpretiert. Eine
Verwendung beim Schlachten und Zerlegen von
Haustieren ist aber auch nicht auszuschließen
(Moosleitner 1998-1999, 503 ff.).
Der Depotfund, welcher in erster Linie landwirtschaftliche Gerätschaften umfasst, kann
meines Erachtens in die Spätlatènezeit datiert
werden ; nicht wenige Kollegen datieren dagegen
diesen Typ der langen Sense bereits in die römische Kaiserzeit. Fritz Moosleitner sucht daher
den Kompromiss und datiert den Depotfund
von Hainbach „an das Ende der Stufe Latène D
bzw. an den Übergang zur römischen Epoche“
(Moosleitner 1998-1999, 506 ff.). Zum weiteren
archäologischen Kontext der Fundstelle ist nichts
Näheres bekannt.
84
EISENDEPOTFUND VON KAISERBRUNN AM
ATTERSEE (SZBG.)
Der Altfund, welcher um 1900 in die Sammlung
M. Much gelangte,stammt vom Südufer desAttersees.
Er dürfte im Zuge von Steinbrucharbeiten entdeckt
worden sein. Noch heute ist der direkt neben
der Uferstraße liegende Steinbruch im Gelände
gut erkennbar. Das Depot (Abb. 3) umfasst eine
Sense mit 87 cm langem Blatt und abgesetztem,
langen Blatt und Hakenende, einer breiten und
einer schmalen Pflugschar mit Schäftungslappen
– auch sie weisen auf zwei unterschiedliche
Pflugtypen, wie im Depot von Hainbach, einen
Löffelbohrer und einen mehrteiligen Kesselhaken
mit einer Gesamtlänge von 155 cm sowie einem
alt geflickten Schöpflöffel. Außerdem zählen ein
Hakenschlüssel und eine Klammer, die an einer
Seite aufgebogen ist, zum Depot (Amberger 1927,
206 ; Moosleitner 1998-1999, 506 ff.). Das Depot,
an einer prominenten Stelle am Südufer des
Attersees niedergelegt, umfasst gebrauchsfähige
Gerätschaften der Landwirtschaft, des Handwerks
und des gehobenen Hausrates. Sie können grosso
modo in die Spätlatènezeit datiert werden. Auch
hier gilt ähnliches, wie bereits beim Depot von
Hainbach, gesagt.
EISENDEPOTFUNDE VOM LINZER
GRÜNDBERG (OÖ.)
Die vier Eisendepotfunde aus dem
Befestigungswerk der spätlatènezeitlichen
Höhensiedlung vom Gründberg, welche 1997
im Zuge des Forschungsprojektes „Keltische
Höhensiedlungen an der mittleren Donau“ vom
E. M. Ruprechtsberger und O. H. Urban entdeckt
worden sind, wurden bereits mehrfach der interessierten Fachwelt und Öffentlichkeit vorgestellt.
Zuerst, im Oktober 1997, beim Treffen der Forscher
in Bibracte, danach – im Original - im Rahmen
einer im Oktober 1998 im Linzer Stadtmuseum
Nordico durchgeführten Fachtagung „… und sie
formten das Eisen“ sowie in der vom Dezember
1998 bis Ende Februar 1999 organisierten
Sonderausstellung „Berge – Beile – Keltenschatz“.
Die metallurgische Untersuchung der Eisenfunde
wurde durch den österreichischen Fonds zur
Förderung wissenschaftlicher Erforschungen
FWF dankenswerterweise gefördert (Projekt P
13 898-SPR - Preßlinger, Mayr 2001, 283-290) ; ein
notwendiges Nachfolgeprojekt jedoch leider nicht.
Erst 2004 konnten diese notwendigen Arbeiten
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
durch das persönliche Engagement Dozent Hubert
Presslinger durchgeführt werden (Preßlinger, Mayr
2001). Einer monographischen Vorlage, wohl im
Rahmen der Linzer Archäologischen Forschungen,
steht daher nichts mehr im Wege. In diesem
Rahmen sollen nun erstmals alle vier Depots
vollständig als Foto vorgestellt werden. Sie sind
bereits seit längerem im science. orf. at allgemein
zugänglich.
Drei der vier Depots wurden in situ im südlichen
Befestigungswerkes des Gründberges entdeckt,
Depot 4 fand sich in Sturzlage am Fuße des Walles.
Die über 30 Hektar große Anlage erstreckt
sich auf einem annähernd Nord-Süd-verlaufenden, 1,5 km langen und bis zu 400 m breiten
Höhenrücken der an drei Stellen durch Steilabfälle
natürlich geschützt ist. Auf der leicht zugänglichen
Nordseite wurde er durch zwei Abschnittswälle
(Nord- und Südwall) gesichert. Erstmals wurde
die Anlage 1911 durch Ludwig Benesch topographisch genau beschrieben ; er fertigte auch einen
Übersichtsplan an (Benesch 1911, 184-187). Erste
Ausgrabungen wurden 1937 durch Franz Stroh
und Leonhard Franz durchgeführt (Franz, Stroh
1940, 216-238, Taf. 1-8). 1994 bis 1998 fanden dann
unsere Untersuchungen auf dem Gründberg statt.
Im Zuge der systematischen Erforschung begannen 1996 die Untersuchungen des Südwalles.
Erstmals konnten gut stratifizierte Funde der jüngeren Latènezeit, darunter bemalte Tonware, an
der Basis der Wallaufschüttung sowie im Versturz
der Blendmauer festgestellt werden. 1997 wurde
dann die Nordseite des Walles flächig untersucht
und dabei die drei Eisendepots in situ sowie ein
mit der Blendmauer verstürztes Depot entdeckt
werden. Es konnten Reste einer zum Großteil
verstürzten, trocken gesetzten Bruchsteinmauer
freigelegt werden, die an der Innenseite – jeweils
im Abstand von rund 2,5 m – 40 cm breite
Nischen für eine mit Steinsetzungen gestützten
Holzkonstruktion aufwies.
Diese Holzkonstruktion dürfte ursprünglich
die Blendmauer gestützt haben und wohl auch
einen Wehrgang getragen haben. Auf Grund des
verstürzten Baumaterials hatte die Mauer eine ursprüngliche Höhe von zumindest 3 m und stand an
der Vorderfront der Erdrampe (Ruprechtsberger,
Urban 1998, 48-63).
Im Depot 1 fanden sich insgesamt 16
Gegenstände mit einem Gesamtgewicht von ursprünglich fast 20 kg Eisen, darunter ein großer
Hakenschlüssel, fünf aufwendig profilierte
Nabenringe, fünf Hämmer, ein Hakenamboss und
ein Barrenfragment (Abb. 4).
Im Depot 2 lagen zwölf Gegenstände.
Zwischen den verbogenen Resten eines bandförmigen Radreifens befanden sich unter anderem
ein Schwert mit Scheide, eine antik verbogene
Schwertklinge, ein Herdsatz bestehend aus einem
Bratspieß, einer Aschenschaufel und einer
Fleischgabel, sowie ein weiterer Hammer und ein
Beil. Das Gesamtgewicht betrug fast 10 kg Eisen
(Abb. 5).
Depot 3 besteht aus 13 Gegenständen und ist
mit 21,2 kg Eisen am schwersten. Auch hier fanden sich zwischen einem alt verbogenen und alt
gebrochenen Radreifen diverse Utensilien, darunter zwei Kesselhaken, ein Radnabenpaar, ein Beil,
ein Schmiedehammer sowie eine Schmiedezange.
Ein großer Dreizack sowie ein Spieß könnte zum
Fangen von großen Donaufischen bzw. zur Jagd
gedient haben (Abb. 6).
Im Depot 4, welches mit der Blendmauer verstürzt ist, fanden sich zwei Barren (Abb. 7).
Die Zusammensetzung der Depots ist auffallend
reichhaltig und vielfältig. Neben den Werkzeugen
und Radbeschlägen sind insbesondere die Waffen
herausragend. Die Werkzeuge zeigen ein breites
Spektrum, besonders bei den Hämmern finden
sich die unterschiedlichsten Formen : schwere
und leichte Treib- bzw. Schmiedehämmer sowie
Hämmer mit hoch- bzw. quergestellter Finne. An
Holzbearbeitungsgeräten sind Querbeile sowie
Lochäxte nachgewiesen. Zum Großteil handelt
es sich um Werkzeuge, die zu einer Schmiede
gehören. Neben der Schmiedezange zählen
auch die Eisenbarrenstücke zu dieser Gruppe. An
Wagenbestandteilen sind die beiden Radreifen,
die für Speichenräder mit einem Durchmesser von
etwa 1 Meter gedient haben, und die zahlreichen
profilierten Nabenringe zu nennen. Zu den Waffen
sind die beiden Schwerter, der Lanzenschuh sowie
der Dreispieß zu zählen.Die weiteren Gerätschaften
gehörten zum Hausrat : Kesselhaken, Bratspieß und
Fleischgabel. Auch die Aschenschaufel wird wohl
ihren Dienst beim Herd versehen haben. Viele
Stücke tragen deutliche Gebrauchsspuren.
Die Gerätschaften bieten einen guten Einblick
in die Technik einer keltischen Schmiede, einerseits
durch die Barren und Schmiedewerkzeuge und
andererseits durch die damit gefertigten Produkte.
Besonders bemerkenswert erscheint dabei die große
85
OTTO-H. URBAN
1. Depotfund von Nikolausberg (aus
Moosleitner, Urbanek1991, Abb. 1-3).
86
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
2. Depotfund von Hainbach (aus Moosleitner 1998-1999, Abb. 4-5 ; Graphik : F. Krois).
87
OTTO-H. URBAN
3. Depotfund von Kaiserbrunn (Foto : G. Gattinger, IUF).
4. Depot 1 vom Gründberg (Foto : O. Chrstos, IUF).
88
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
5. Depot 2 vom Gründberg (Foto : O. Chrstos, IUF).
89
OTTO-H. URBAN
6. Depot 3 vom Gründberg (Foto : O. Chrstos, IUF).
90
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
7. Depot 4 vom Gründberg
(Foto : O. Chrstos, IUF).
91
OTTO-H. URBAN
8. Auswahl an Hämmer aus den Depots vom Gründberg (Foto : O. Chrstos, IUF).
Palette verschieden Hämmer (Abb.8).Metallurgische
Analysen zeigen, dass das verwendete Eisen von den
Schmieden gekonnt aus verschiedenen Qualitäten
zusammengefügt worden war und die Produkte
einen hohen technischen Standard aufweisen
(Preßlinger, Mayr 2001).
Über die Gründe, die zur Deponierung führten,
gibt es naturgemäß nur Hypothesen. Die Lage
der Depots direkt hinter der Blendmauer eines
Befestigungswerkes lässt im ersten Moment an
ein Bauopfer denken. Es fällt aber auch die Nähe
der Depots zu einer heute als Brunnen gefassten
Quelle auf (Ruprechtsberger, Urban 1998, 63).
entdeckte Tüpfelplatte belegt außerdem eine
Münzprägestätte auf dem Gründberg (Moser
2001) 4.
Die im Großraum Linz nachgewiesenen
keltischen Münzen zeigen einerseits direkte
Beziehungen zum nördlich gelegenen boischen
Gebiet im 2. Jahrhundert, andererseits Kontakte
zum süddeutschen Raum im 1. Jahrhundert.
Intensive Belege nach Osten sowie nach Süden, in
das Gebiet des Regnum Noricum, fehlen dagegen
(Prokisch 1993 ; Urban 2000a).
EISENDEPOTFUND VON FALKENSTEIN (NÖ.)
Die reichen Eisenfunde vom Gründberg
belegen die wirtschaftliche Bedeutung der
Höhensiedlungen als Handelsplatz wie als
Produktionsstätte während der späten Latènezeit.
Die Datierung der Gesamtstruktur auf Grund
bemalter spätlatènezeitlicher Keramik erfolgte
bereits ein Jahr vor Auffindung der Depots. Es
besteht kein Anlass, diese Rahmendatierung in die
späte Latènezeit zu modifizieren. Eine kürzlich im
Depot des Oberösterreichischen Landesmuseum
92
1994 wurde von Johannes-Wolfgang
Neugebauer (Bundesdenkmalamt) im Zuge
einer archäologischen Untersuchung der Ruine
Falkenstein im Weinviertel ein kleines, mittel- bis
spätlatènezeitliches Eisendepot geborgen. Unter
anderem befanden sich in diesem Fundkomplex
(Abb. 9) neben wenigen Gefäßfragmenten ein
Tüllenbeil, drei Messer, zwei davon mit Hakengriff
und eines mit Ringgriff sowie zwei Klammern und
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
9. Depotfund von Falkenstein (Urban 2000b; Foto : O. Chrstos, IUF).
93
OTTO-H. URBAN
zwei nicht näher bestimmbare Eisenfragmente.
Im Zuge der Ausgrabungen wurden keine
weiteren aussagekräftigen mittel- bis spätlatènezeitlichen Funde festgestellt – eine weiterführende
Interpretation des Befundes auf Grund des archäologischen Kontextes erscheint daher nicht möglich
(Urban 2000b).
Schwertscheiden datieren typologisch in die Phase
La Tène B2 ; die Rüstungsteile dürften aber zuerst
in einem Heiligtum oder Trophaeum aufgestellt
gewesen sein und erst sekundär, ähnlich wie die
bekannten Bronzehelme des Negauer Depots, in
einer Grube vergraben und versteckt worden sein
(Gleirscher, im druck).
EISENDEPOTFUND VOM BRAUNSBERG (NÖ.)
Zusammenfassend können daher in Österreich
folgende Eisendepots unterschieden werden :
− Eisendepots an spezifischen topographischen
bzw. architektonischen Situationen, wie in
Kaiserbrunn am Attersee bzw. im Südwall des
Gründberges in Linz, aus wahrscheinlich primär rituellen Gründen.
− Waffen, wie jene aus Förk, welche ursprünglich
in einem Heiligtum oder einem Trophaeum
ausgestellt waren und aus rituellen Gründen
oder des Schutzes wegen vergraben wurden.
− Werkzeugdepots, welche im Bereich einer
Werkstätte versteckt worden sind, wie das
Depot vom Nikolausberg. Auch das Depot von
Hainbach mit vorwiegend landwirtschaftlichem Gerät soll hinzugerechnet werden, auch
wenn die eigentliche Arbeitsstätte nicht unmittelbar bestimmt werden kann.
− Werkzeugsätze in Gräbern, welche im Kontext
eines Grabes in die Erde gelangt sind. Beispiele
dieser Fundkomplexen, es handelt sich dabei
terminologisch natürlich nicht um Depotfunde,
sondern Grabfunde, fanden sich in St. Georgen
am Steinfeld und in Au am Leithagebirge
(Grab 16).
− Depots diverser Gerätschaften innerhalb einer
Siedlung,wie auf dem Braunsberg,in Falkenstein
und vermutlich auch in Schwarzenbach.
1996 wurde bei den Siedlungsgrabungen auf
dem Braunsberg bei Hainburg an der Donau,
nahe der Porta Hungarica, neben einer in den
Hang eingetieften Hütte mit Stampflehmboden
und Feuerstelle ein kleines Eisendepot entdeckt
(Abb. 10). Es umfasst ein Ringgriffmesser, eine
Lanzenspitze, ein Schwerklingenfragment, ein
Bandeisen sowie drei Beschläge eines Holzgefäßes
und einen Eisenbuckel mit kreuzförmig angebrachter Dellenzier unbekannter Funktion. Das
Ringgriffmesser macht es wahrscheinlich, dass
der Befund entsprechend der daneben liegenden
Siedlungsstruktur in die jüngere Latènezeit datiert
(Urban u. a. 1994 ; 2000b, Abb. 7)
ZUSAMMENFASSUNG
Neben diesen Altfunden bzw. im Zuge
von Rettungsgrabungen bzw. systematischen
Siedlungsforschungen geborgen Eisendepotfunde
gibt es eine kaum zu überblickende Anzahl von
Metalldepots,welche von Raubgräbern entdeckt und
meist erst nach Umwegen der Fachwelt bzw. deren
Institutionen bekannt gemacht wurden. Als Beispiel
für viele seien die Eisenfunde von Schwarzenbach
in der Buckligen Welt, im südlichen NÖ., erwähnt.
Hier liegen mehrere Eisenwerkzeuge, Beile, ein
schwerer Hammer, Ringgriffmesser, Lanzenspitzen
etc. vor. Der ursprüngliche Kontext ist nicht mehr
feststellbar (Adler 1989). Gleiches gilt auch für
die interessanten Bronzefunde, die in der Nähe
des Eingangsbereiches der Pfostenschlitzmauer
von Schwarzenbach gefunden worden sein sollen
(Urban 1998 ; Löcker u. a. 1992).
Auch der Waffendepotfund von Förk
(Ktn.) konnte nur durch mühevolle detektivische Nachforschungen rekonstruiert werden. 14
Helme, 14 Lanzenspitzen, zehn Schwerter, zwölf
Schwertscheiden sowie mehrere Schwerketten
und Schildbuckel erhalten bzw. dokumentiert
(Abb. 11). Insgesamt dürften daher auf dem Förker
Laas-Riegel 14 Rüstungen in einer Grube deponiert worden sein. Der Dekor auf den Helmen und
94
Chronologisch gesehen nehmen die
Eisendepots von der Frühlatènezeit zur
Spätlatènezeit hindurch deutlich zu. Im Vergleich
mit den Nachbarstaaten fällt das Fehlen von
Massenfunden, Wasser- bzw. Moorfunden und
Barrendepots auf. Eisendepots wurden auch
nicht, wenn der Forschungsstand nicht trügt, an
Pässen und Gebirgsübergängen niedergelegt worden sein.
Die geringe Anzahl der Depots lässt über die
Verbreitung der jeweiligen Depotsitte keine überzeugende Aussagen zu, in eine derartige Studie
müssten außerdem alle anderen zeitgleichen
Deponierungssitten mitberücksichtigt werden, also
zum Beispiel die Brandopferplätze, Münzdepots,
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
10. Depotfund vom Braunsberg bei Hainburg (Urban u. a. 1994; Foto : G. Gattinger, IUF).
95
OTTO-H. URBAN
11. Waffendepotfund von Förk (Foto : RGZM Mainz, 1991, 22).
der Schildbeschläge und Eisenschwerter stellt
allerdings noch ein Desiderat dar.
Fibel- und Bronzedepots etc. Es stellt sich letztendlich überhaupt die Frage, ob es so etwas wie
eine Depotsitte oder Deponierungssitten in der
Laténezeit gegeben hat und in welchem Bereich.
Jedes der vorgestellten Einzeldepots hat eine
spezielle Zusammenstellung, einen speziellen
archäologischen Kontext und wohl auch eine
spezielle Ursache. Sitten folgen dagegen ebenso
wie rituellen Handlungen Regeln. Am ehesten
können Deponierungssitten in Zusammenhang
mit Waffen, mit wohl im Kampf erbeutete Waffen,
gesehen werden. Sie kommen in Österreich nur
selten vor – eine systematische Zusammenstellung
Die Eisendepots sind aber auch eine
wichtige Quelle für den technischen Fortschritt
in der Latènezeit, sei es in der Metallurgie, der
Schmiedetechnik, oder am Beispiel landwirtschaftlicher Geräte, der Pflüge und Sensen. Der
Fortschritt in der Eisengewinnung und -verarbeitung bildete die wirtschaftliche Basis für die
Entwicklung und Entstehung der so genannten
Oppida-Kultur in der jüngeren Latènezeit (Urban
2002).
ANMERKUNGEN
1. Das Grab wurde ursprünglich in die Spätlatènezeit gehört, gehört allerdings meines Erachtens auf Grund der Eisenfibel in die Mittellaténezeit.
F. Moosleitner ordnet dagegen den Grabkomplex bereits in die Frühlatènezeit.
2. Im Zuge der Restaurierung der Gründberger Depots (siehe aben) konnte eine deutliche Gewichtsabnahme dokumentiert werden.
3. Ein gut erhaltenes Vergleichsstück stammt aus den Altgrabungen vom Oberleiserberg bei Ernstbrunn (NÖ.) (Nischer-Falkenhof, MitschaMärheim 1937, Taf. 4). Die Zugehörigkeit zur spätlatènezeitlichen Siedlung ist wahrscheinlich, ein gesicherter archäologischer Kontext ist allerdings nicht dokumentiert.
4. Zu Werkstättenkreise und Beziehungen vgl. auch Trebsche (2003).
96
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
12. Verbreitung latènezeitlicher Horte/Deponierungen mit Eisengegenständen Österreich (O.-H. Urban).
Résumé
Cet article présente les dépôts d’objets en fer laténiens
trouvés à Salzbourg, en Haute-Autriche et en Basse-Autriche.
Il ne tient pas compte des tombes dites de forgeron, comme
la tombe n° 13 de Au am Leithagebirge (nord-est) datable
de La Tène B1, qui contenait deux ciseaux, une masse et une
enclume plate, ou la tombe d’un orfèvre de St. Georgen am
Steinfeld (nord-est), datable de La Tène moyenne (Nebehay
1973, taf. 11 ; cf. note 1).
Le dépôt d’objets en fer du Nikolausberg près de Golling
(Salzbourg) daté de La Tène B comprend une enclume, un
marteau, une pelle de forgeron, deux grandes tenailles ainsi
qu’une bande de fer déformée. Les outils longs étaient soigneusement pliés et probablement ficelés (ill. 1). Les environs
de cette cachette ont livré de nombreuses scories de forge,
un lourd crochet en fer ainsi qu’un poinçon et une lime. Cette
découverte indique la présence d’un atelier de forgeron sur
ce rocher. Un forgeron avait caché son outillage à proximité immédiate de son atelier sans avoir pu le récupérer
(Moosleitner, Urbanek 1991 ; Moosleitener 1998-1999).
Le dépôt d’objets en fer de Hainbach, dans la commune
de Nußdorf am Hausberg (Salzbourg), dans le Flachgau, est
une découverte ancienne datée de La Tène D. Elle comprend
trois faux, un grand coutre et un soc d’araire étroit fortement
usé qui avait été intégré dans un araire. En revanche, le coutre
fait partie d’un autre type d’araire. Placé sur le dental, le soc
étroit gratte la glèbe, un soc plus large fixé derrière, brise les
mottes sans pour autant vraiment retourner la terre. Ces outils
sont attestés dans le dépôt d’objets en fer de Kaiserbrunn. Une
hache à tranchant courbé, trouvée également dans le dépôt
de Kaiserbrunn, pouvait servir à travailler le bois, à abattre et à
dépecer des animaux. (ill. 2 - Moosleitener 1998-1999).
Le dépôt d’objets en fer de Kaiserbrunn am Attersee
(Salzbourg), dégagé sur la rive sud de ce lac, à un endroit
proéminent, fut probablement découvert lors de travaux dans
une carrière. Ce dépôt (ill. 3) comprend une crémaillère de
155 cm de long, une louche réparée et une faux avec une
lame de 87 cm de longueur. Un soc large et un soc mince à
douilles attestent l’existence de deux types d’araire différents,
comme c’est le cas dans le dépôt de Hainbach. Ce dépôt
daté de La Tène D, comprend des outils en parfait état de
fonctionnement destinés à l’agriculture, l’artisanat et à l'usage
domestique (Amberger 1927 ; Moosleitener 1998-1999).
Les quatre dépôts d’objets en fer de Linz-Gründberg
proviennent des remparts d’un habitat de hauteur de La Tène
finale. Trois des quatre dépôts ont été découverts in situ dans
la partie méridionale des fortifications ; le quatrième dépôt
dans les déblais du rempart. Le dépôt n° 1 contient au total
seize objets, dont une grande clé en forme de crochet, cinq
frettes de moyeu, cinq marteaux, une enclume bigorne et un
fragment de lopin. Le dépôt n° 2 a révélé douze objets : entre
97
OTTO-H. URBAN
les restes déformés d’un bandage de roue se trouvaient deux
épées, une broche à rôtir, une pelle à cendres, une grande
fourchette à viande ainsi qu’un marteau et une hache. Le
dépôt n° 3 se compose de treize objets d’un poids total de
21,2 kg ; c’est le plus “lourds” de tous les dépôts. Entre un
bandage de roue anciennement déformé étaient placés deux
crémaillères, une paire de moyeux, une hache, un marteau de
forgeron et des tenailles. Un grand foëne ainsi qu’une broche
auraient pu servir à la pêche des grands poissons du Danube,
ou à la chasse (ill. 4-7). Le dépôt n° 4 caché dans les déblais
des parements a livré deux lopins de fer. La composition des
dépôts est extrêmement variée. À côté des bandages de roue
et des outils on remarque surtout les armes. La gamme des
outils est assez large ; ce sont avant tout des marteaux de formes très variées (ill. 8). La majeure partie des outils appartient
à une forge : l’enclume bigorne, les tenailles et les lopins de
fer. De nombreux objets de ce dépôt daté de La Tène finale,
présentent des traces d’usure marquées. Les raisons de ces
dépôts sont hypothétiques. Leurs lieux de déposition directement derrière les parements du rempart laissent penser à
des offrandes en relation avec la construction de la fortification
(Amberger 1927 ; Moosleitener 1998-1999 ; Preßlinger, Mayr
2001). La proximité d’une source transformée actuellement
en fontaine pourrait également jouer un certain rôle.
Le dépôt d’objets en fer de Falkenstein (nord-est) datant
de La Tène moyenne à La Tène finale a été découvert dans une
ruine médiévale. Il comprend entre autre une hache à douille,
trois couteaux et deux crampons (ill. 9- Urban 2000b).
En 1996 les fouilles d’un habitat sur le Braunsberg près
de Hainburg an der Donau (nord-est) ont livré un petit dépôt
d’objets en fer de La Tène finale. Il contient un couteau à
manche plat terminé par enroulement, une pointe de lance, un
fragment d’une lame d’épée, une bande en fer ainsi que trois
attaches d’un récipient en bois et une calotte en fer. Ces objets
étaient placés à côté d’une cabane excavée dans la pente
avec un sol en torchis et un foyer (ill.10 - Urban et al. 1994).
À côté de ces découvertes anciennes de dépôts mis au
jour dans le cadre de fouilles archéologiques programmées, on
connaît un nombre important de dépôts d’objets métalliques
découverts par des clandestins, comme par exemple les objets
en fer de Schwarzenbach in der Buckligen Welt (nord-est),
dont on ignore totalement le contexte (Adler 1989). Le dépôt
d’armes de Förk (Ktn.) n'a pu être reconstitué qu’à la suite
d’une enquête quasi-policière (ill. 11). Le dépôt sur le Förker
Laas-Riegel contenait probablement 14 panoplies de La Tène
B2 comprenant des casques, des fers de lance, des épées et
des boucliers. Les objets étaient déposés dans une fosse après
avoir été exposés pendant un certain temps dans un sanctuaire ou un trophaeum (Gleirscher, en préparation).
En Autriche on distingue donc différents types de dépôt
d’objets en fer :
− Les dépôts d’objets en fer enfouis probablement pour
des raisons rituelles dans des lieux spécifiques, soit par
leur topographie, soit par leur architecture : Kaiserbrunn,
Gründberg.
− Les armes d’un sanctuaire ou d’un trophaeum enfouis
pour des raisons rituelles ou pour obtenir une protection :
Förk.
− dépôts d’outils enfouis à proximité d’un atelier :
Nikolausberg, Hainbach.
− Les ensembles d’outils dans des tombes dans un contexte funéraire : St. Georgen am Steinfeld et Au am
Leithagebirge.
− Les dépôts d’outils variés à l’intérieur d’un habitat : Braunsberg,
Falkenstein et probablement aussi Schwarzenbach (?).
Du point de vue chronologique, les dépôts d’objets en fer
augmentent nettement entre La Tène ancienne et La Tène
finale. Si l’on compare la situation en Autriche avec celle des
pays voisins, on constate l’absence de dépôts contenant beaucoup d’objets, mais aussi l'absence de dépôts dans l’eau ou
dans des marais et l'absence de dépôts de lopins de fer.
Le faible nombre de dépôts ne permet pas de porter
de jugement sur la répartition des coutumes de dépositions
particulières. Une telle étude devrait tenir compte de tous
autres types de dépôt contemporains, comme les sanctuaires
à sacrifices, les dépôts de monnaies, de fibules, de bronze,
etc. Finalement se pose la question de savoir si, à l’époque
laténienne, les dépôts ou les dépositions étaient courants et
dans quel domaine. Chacun des dépôts décrits se caractérise
par une composition particulière, selon un contexte archéologique spécial et probablement selon une raison de déposition
distincte. Comme les actes rituels, les coutumes sont soumises
à des règles. C’est avant tout en relation avec les armes, c'està-dire les armes comme butins de guerre qu’on pourrait parler
de rites de déposition, mais les dépôts d’armes sont rares en
Autriche.
Les dépôts d’objets en fer constituent une source importante d’information sur le progrès technologique de La Tène,
que ce soit en matière de métallurgie et de technologie des
forgerons ou d’outils agricoles comme les araires et les faux.
Le progrès en matière de l’extraction et de transformation du
fer forme la base économique du développement et la génèse
de la soi-disant culture des oppida pendant la phase récente
de La Tène.
Traduction : Anneliese Pleyer
98
AUSGEWÄHLTE LATÈNEZEITLICHE EISENDEPOTFUNDE AUS ÖSTERREICH
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99
Les dépôts métalliques
de Bohême et de Moravie
Pavel SANKOT
INTRODUCTION
La mise intentionnelle d'objets en soi-disant
dépôts constitue un phénomène commun à toute
l'évolution de la société. Les premières manifestations de dépôts intentionnels datent de la fin
du Paléolithique (Pion, dans ce volume). Comme
le mentionne l'Encyclopédie d'archéologie de
B. Novotný (1986, p. 190-191), les découvertes massives de produits finis et de matières premières
provenant des civilisations du Néolithique existent aussi en Europe centrale. Pour le début de
l'âge du Bronze, les dépôts de cuivre et de bronze
sont composés de lingots. Au Bronze moyen, on
dépose des produits en bronze et des vases céramiques tandis qu'au Bronze récent, les dépôts
sont composés d'un grand nombre de fragments.
Pour la période romaine, des dépôts d'objets
en métal, monnaies et produits en fer, sont connus.
Ces derniers existent aussi aux périodes de la
Migration et du haut Moyen Âge (Michálek 1999,
p. 29-30 ; Bartošková 1986).
La période de l'âge du Fer est caractérisée par une grande diversité dans les types de
dépôts. Tout en ignorant les ensembles de céramique déposés aux sommets des tumuli réutilisés
(Michálek 1999, p. 30), les objets confectionnés
en terre cuite (Dubský 1949, p. 205-217), ceux en
pierre comme les meules (Waldhauser 1981), les
objets en matière organique ne sont pas attestés
sur notre territoire. Nous nous attachons donc
seulement aux dépôts d'objets métalliques. Nous
connaissons pour l'âge du Fer, en Bohême et en
Moravie, des dépôts de monnaies, de parures,
d'armes, d'outils, de produits et de matériel lié à
la construction de la maison, la vie domestique, la
production artisanale, la production agricole et le
transport.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir. : Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F.-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 101-108 (Bibracte ; 11).
PAVEL SANKOT
LA COMPOSITION DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES
Par les nombreux types d’objets et d'outils
dans le contexte d’un site d’habitat ouvert, le
dépôt de Kolín en Bohême centrale (Rybová,
Motyková 1983) daté de l'époque des oppida, est
le plus souvent le seul cité pour la région de la
Bohême. Cependant, pour la compréhension des
questions concernant les dépôts métalliques et
de leurs causes historiques, il nous faut étendre la
réflexion sur d'autres périodes de l'époque laténienne, sur d'autres types d'ensembles et sur les
modalités de leur déposition.
Les dépôts métalliques du
Ve
s. av. J.-C.
Ce n’est que récemment que des découvertes
de cette période furent identifiées dans les rivières en Bohême (Beneš, Sankot 1994a). Sur le site
de Vlkov (commune de Veselí n. Lužnicí, district
de Tábor) en attente d'une fouille systématique,
la découverte récente d'un dépôt regroupe une
série d’objets individuels de caractère luxueux,
provenant de la transition entre la période hallstattienne finale et la période laténienne. La
déposition d'objets sélectionnés, sur un temps
long, est démontrée par la coexistence de céramique hallstattienne tardive, d'une situle en bronze
et d'une plaque avers d'un fourreau d’épée richement ornée et rituellement déformée de La Tène
A (Beneš, Sankot 1994b).
On peut rapprocher ces gestes à celui qui a
consisté à la déposition d’un objet isolé de caractère symbolique dans la structure du site d’habitat
n° 64 de la période La Tène A à Tuchomėʼnice (district Prague-ouest ; fouille de l'auteur). Dans le
remplissage de la structure furent découverts des
fragments de parures (bracelets, boucles de ceintures) et d'outils spécialisés (compas métallique,
lime minuscule), ce qui nous permet de supposer l’existence d'un l’atelier de bijoutier. Pour
cette activité, un bloc de pierre en silex noir soigneusement choisi, devait servir d’enclume. C'est
au-dessous que fut découvert une pointe de lance
en fer déposée avant la mise en place de l’enclume.
Malheureusement, à cause de sa corrosion avancée, la pointe n'a pas put être sauvée.
Une contribution importante à la connaissance des pratiques de la déposition pendant le
début de la période laténienne est fournie par
le dépôt situé dans la structure d’habitat 21/82 à
LibĀice-Chýnov (Sankot, Vojtėchovská 1986 ; 2001).
102
Avec un seul anneau en bronze, il contient une
soixantaine d’objets fabriqués en fer. La présence
d'outils le rend proche des dépôts de la période
plus récente des oppida. Il est constitué d'outils
agricoles (faux), d'outillage du travail des métaux
(marteaux, limes) et du bois (ciseau). Les formes
spécialisées des outils découverts, particulièrement les marteaux de petite taille et les limes,
tout comme la présence d’autres outils – petites
scies, série de produits finis (pointes de lances et
flèches) et stocks du matériel pour la réutilisation
(fragments des fourreaux d’épée cassés) –, me font
penser que ce dépôt est lié à l’équipement de l’atelier d’un artisan spécialisé. Une partie importante
de son métier est la production de parures, y compris en matière osseuse. Celle-ci est représentée par
des poignées d’outils produites à partir de bois de
cerfs et par une poignée de couteau décorée de
motifs animaliers dans une côte de vache (Sankot
2002). Mêlées à ces produits, des pointes de flèches
sont sans doute destinées aux clients provenant de
l’élite sociale. Une nécropole tumulaire éloignée
de quelques centaines de mètres seulement comporte de somptueuses parures (Sankot 2001).
Nous avons recueillis des données précises sur
la modalité du stockage. L'ensemble se trouvait
dans un récipient de 47 cm de haut. La découverte de LibĀice-Chýnov démontre l'importance
de la structure des dépôts et surtout de leur contexte pour la compréhension de ce phénomène.
Ce dépôt se trouve sous le plancher d'une structure de forme standard appartenant à la période
finale de l’habitat. Ces habitats qui apparaissent à
l’âge du Bronze moyen disparaissent brutalement
vers la fin de La Tène A. Cela veut dire 1 000 ans
plus tard, comme le rite funéraire de l’incinération
sous tumulus. Peu après, au cours de la période
pré-Duchcov, une nouvelle nécropole plate à inhumation fut fondée non loin de la précédente sur
la commune de Letky (Waldhauser 1987, p. 89 et
suiv.). Compte tenu des circonstances, nous considérons l'implantation du dépôt de LibĀice-Chýnov
dans un lieu caché ou intentionnellement inaccessible sous le plancher d'une structure d’habitat
standard comme l’expression d’une situation de
crise (Sankot 2001, p. 308) découlant des changements sociaux, culturels ou historiques profonds.
Cette situation de crise de la fin de La Tène
A, avec parfois incendie de la fortification, se
retrouve dans un autre dépôt, à Ježkovice-ÿernov
composés d'outils artisanaux et agricoles et d'un
élément de costume. Découvert en Moravie par
LES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DE BOHÊME ET DE MORAVIE
M. ÿižmáʼn (1993, p. 385-386, ill. 254), l'ensemble
de dix-neuf objets en fer regroupe un outil du
forgeron (marteau à douille), des outils liés au
travail du bois (haches, ciseau), de l’équipement
domestique (couteaux, coutelas, pincette, clé) et
de la quincaillerie de construction (crampon).
Dans une des structures situées dans l’enceinte
intérieure de ce site fortifié, fut découvert un
second dépôt d'objets en fer, deux haches et deux
faucilles.
Dans un autre cas, une analyse critique de
la série de douze disques en bronze décorés,
trouvés à Jaromėʼn (district Hradec Králové) et
déposés l'un sur l'autre dans un paquet lié par un
fil métallique, a permis de les identifier comme
appartenant à un dépôt de la période de La Tène
A récente, dans une nécropole tumulaire d'origine
hallstattienne située sur la voie de communication entre la Bohême du Nord-Est et la Silésie, situé
à proximité d'un gué, sur le fleuve Labe (Vokolek,
Sankot 2001).
Les dépôts métalliques du IVe et IIIe s. av. J.-C.
La déposition “non pratique” d'objets ou de
catégories individuelles comme les armes et les
bijoux dont l’importance symbolique est attestée
par leur rôle standard dans le mobilier des tombes,
sont matérialisés par des exemples moins frappants
au cours de la période du IVe-IIIe s. av. J.-C., c'est-à-dire
pendant une période relativement stable, représentée surtout par l’ensemble des soi-disant nécropoles
plates à inhumation et cela, non seulement au sein
des nécropoles, mais aussi à l’extérieur de celles-ci.
Dans les nécropoles, il s’agit de dépôts d'éléments
de l’équipement en position non-fonctionnelle (par
exemple, le torque dans le bassin de la tombe n° 39
et d’autres exemples identifiés lors de la fouille
récente de la nécropole de Kutná Hora-Karlov :
Sankot, Valentová 2002, p. 387, ill. 8-10). En dehors
des nécropoles, des dépôts de parures ou d'armes
sont déposés aux abords des voies de communications ou dans les endroits humides. C'est le cas de
l’ensemble des bracelets des différentes périodes
de La Tène découverts à Klatovy (Sankot 2003,
p. 179, ill. 2) passage montagneux entre la Bohême
et la Bavière. Pour la région voisine de la Slovaquie
centrale, on peut citer pour plusieurs phases de La
Tène, le dépôt d'armes déformées de Detva situé
vraisemblablement sur la voie de communication
interrégionale (Sankot 2005). La source thermale
“Obʼní pramen” (Source de géant) près de Duchcov
est un endroit dont l’importance symbolique est
incontestable. Il y a été trouvé une collection de
milliers d’objets déposés sans doute d’une manière
rituelle dans un chaudron en bronze, de seulement
trois types d’objets : fibules, bracelets et bagues
(Kruta 1971). Il est prouvé que ce lieu était fréquenté
pendant une longue période (Müller 1993, p. 186)
En revanche, aucun dépôt d'objets d'outillage
n'est connu pour cette période.
Les dépôts métalliques de La Tène finale
La situation change totalement à La Tène
finale. Dans le dépôt de Kolín, se trouvent des
produits liés à la vie domestique – récipients en
métal et outils utilisés pour le service du foyer
(crémaillère, pelle à feu), l'outillage du travail des
métaux (marteau, burin) ainsi que des fragments
de matériel en fer et éléments liés au travail du
bois (haches, herminette à douille, ciseaux à bois,
plane ou racloir de tanneur, mèche à cuillère).
En dehors des outils domestiques (clé, couteaux,
forces), on retrouve les pièces d'un char (clavette,
bandages de roue), des éléments d'harnachement
(mors, anneau de guide) ainsi que des outils agricoles (soc d'araire, faux, faucille, houe, couteau à
greffage ou serpe). Les fragments d'armes en petit
nombre datent d'une période antérieure et sont
pour un retraitement futur. Les parures font complètement défaut.
Par sa composition et par sa datation, le dépôt
de Kolín s’intègre dans la vague importante des
dépôts de l’époque des oppida, comme il en
découle de la synthèse de Rybová et Motyková
(1983, p. 150, tableau 1). Ce dépôt est dans une
agglomération à caractère de centre administratif,
de production et de commerce, situé à proximité
du fleuve Labe (Elbe). Cependant, il manque
des données plus précises sur l'emplacement du
dépôt (Rybová, Motyková 1983, p. 166-167).
Ce qui s’avère intéressant, c’est la comparaison
du dépôt de Kolín avec une découverte récente : le
dépôt de Bezdėdovice près de Blatná en Bohême
du Sud (Michálek 1999). Les quelques dizaines
d’objets de cet ensemble proviennent vraisemblablement du site d’habitat agraire avoisinant et les
outils agricoles y prévalent (croc à arracher, pelles,
houe à douille, viroles de faux). Les objets relatifs
à d’autres activités exercées dans la ferme agricole
y sont représentés comme le transport (cerclages
de moyeux de roue, mors de chevaux, anneau
passe-guide), l'outillage du forgeron servant la
réparation des objets en métal (marteau, pelle
103
PAVEL SANKOT
à feu, lime), l’outillage pour la préparation des
objets en bois (haches) et les ustensiles domestiques (couteaux, ciseaux, haches, crampons, piton,
clés). Contrairement au dépôt de Kolín les outils
du foyer, les récipients en métal et les fragments
d'armes sont absents.
mune de Podmokly, district Rokycany ; Voigt 1971),
on a découvert en milieu non-humide, un dépôt
comprenant environ 7 000 monnaies plutôt considérées comme la thésauration de la richesse d'une
élite sociale ou d'une communauté au moment de
la fin de la civilisation des oppida.
D'une importance quantitative moindre, un
autre dépôt de Bohême centrale dans l’ensemble de Lipany (commune de Vitice, district de
Kolín) comporte une hache, deux coutelas, un soc
d'araire et une fourchette à chaudron (Rybová,
Motyková 1983, p. 145, ill. 25). Le contexte précis
n’est pas connu. Tout comme à Kolín, malgré un
nombre restreint d'objets, seuls deux catégories
sont représentées, les outils artisanaux et agricoles
et les instruments pour le service du foyer.
Dans une vaste fouille du site d’habitat de
Sobėsuky, (district de Chomutov) on mentionne
la découverte de deux clés et un coutelas dans la
petite fosse n° 2001/87 en dehors des structures
d'habitats (Holodļák 1991, p. 432).
À l’intérieur de la fortification de l’oppidum de
Stradonice (district de Beroun) on a découvert au
début des années quatre-vingt-dix − malheureusement sans conditions précises − un dépôt de
douze outils agricoles en fer complets et de nombreux fragments de ceux-ci : hache/curette, objets
en forme de tige, dont une broche (?), soc d'araire,
coutres et faux (Waldhauser 1995).
LOCALISATION DES DÉPÔTS
Un type différent de dépôts d'objets en fer
provient, quant à lui, de l’oppidum d'Hostýn en
Moravie. Celui-ci comportait exclusivement une
douzaine de faux en fer (Ludikovský 1986). D’après
les connaissances actuelles, le site d'Hostýn n’est
pas un centre de production important, mais a
plutôt joué un rôle majeur sur la communication
commerciale reliant le nord de l’Europe avec la
Méditerranée, par la “Porte morave” (ÿižmáʼn 1993,
p. 406-407). Le dépôt de Ptení (district de Prostėjov)
est aussi sur cet axe de communication. Les objets
métalliques sont, dans cet ensemble, accompagnés
de produits provenant des régions situées au sud
et au sud-est des Alpes (ÿižmáʼn 2002).
Finalement, on doit mentionner les dépôts
monétaires dont malheureusement les conditions
de découverte précises manquent le plus souvent.
Le dépôt de vingt sept monnaies à Leskovice, (district Pelhʼnimov) fut découvert dans une source
(Militký 1995, p. 35). En revanche, à une vingtaine de
kilomètres de l'oppidum de Stradonice (sur la com-
104
Dépôts d'armes et de parures
En tant qu'exemple jusqu’ici exceptionnel, nous avons mentionné la déposition d’une
pointe de lance au fond d’une structure d’habitat,
probablement avant l’installation de l’atelier à
Tuchomėʼnice. Les autres objets de ce type sont toujours attestés en Bohême dans les endroits situés
à l’extérieur des sites d’habitats. La découverte de
la plaque avers du fourreau d’épée de Veselí nad
Lužnicí, a été constaté dans un fleuve. Les disques
en bronze de Jaromėʼn (district Hradec Králové)
ont été déposés dans une nécropole tumulaire à
proximité d'un gué, sur le fleuve Labe.
En dehors des sites d’habitat, se trouve le dépôt
de parures constitué de 2 000 à 2 500 fibules, bracelets et bagues laténiens, placés dans un chaudron
hallstattien en bronze à Duchcov-Lahošt. Il se situe
à 6 m de profondeur dans une cavité du rocher de
la source thermale (Kruta 1971, pl. 2).
Il nous manque des informations sur l’ensemble
de bracelets de Klatovy. La présence de ces catégories d’objets dans cette région, caractérisée par
l’absence de tombes, nous permet de proposer une
possible liaison avec le trafic sur la voie de communication, à travers la chaîne de montagnes entre le
bassin de la Bohême centrale, densément peuplé,
et la région de la Bavière (Sankot 2003). L'ensemble
d’armes déformées de Detva en Slovaquie est dans
une situation analogue (Sankot 2005).
Contrairement à l’éventail standard des objets
des IVe-IIIe s. av. J.-C., une idée claire du mobilier des
tombes de l’époque du IIe-Ier s. av. J.-C. nous manque
suite à l’absence actuelle de nécropoles de cette
époque. De profonds changements sont constatés
dans le domaine spirituel pour la civilisation laténienne en général (Bataille 2004) et la déposition
d'armes et de parures diminue en faveur d'autres
catégories, comme les outils, monnaies, etc. Sur la
base de comparaisons interrégionales de la civilisation laténienne, il serait intéressant d'étudier
LES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DE BOHÊME ET DE MORAVIE
les rares découvertes de monnaies isolées, outils,
ustensiles (hache, clé) et fragments de céramique, déposés dans les tombes de cette époque,
par exemple en Bavière (Krämer 1952), avec des
objets identiques en Bohême découverts soit sur
le sommet ou la surface des tumulus préhistoriques, soit en haut des collines. Ces objets, déjà
décrits par L. Jansová (1962, p. 329-330), sont identifiés comme des cadeaux votifs ou des objets liés
aux pratiques cultuelles.
Dépôts de mobilier liés aux activités
artisanales et à la vie domestique
En ce qui concerne le dépôt de Kolín, le lieu
de découverte serait situé sur le bord ouest du
territoire de la ville actuelle, dans le Faubourg praguois, sur la rive gauche de la rivière Elbe. Même
si nous ne pouvons pas exclure une certaine relation avec le milieu humide, voir fluvial (Rybová,
Motyková 1983, p. 98, ill. 1), des traces d'habitats de
cette époque, existent sur tout le site.
Les dépôts découverts à LibĀice-Chýnov, à
Sobėsuky, près de la fortification, à ÿernov et sur
le lieu le plus élevé de l'interieur de l'oppidum à
Stradonice sont situés directement dans l’aire du
site d’habitat. À moins de 500 m de Bezdėdovice, un
ensemble d'objets est déposé sur le versant ouest
de la colline, à 487 m d’altitude, dans le voisinage
d’une très grande roche bien visible et “tape-à-l’œil”
(Michálek 1999). Compte tenu de l’absence de
traces d'activités rituelles, J. Michálek prend surtout
en considération le motif pratique « une bonne
orientation pour le cas d’une reprise éventuelle des
objets déposés » (Michálek 1999, p. 31).
Les preuves évidentes de gestes rituels nous
manquent dans tous ces exemples comme pour
les dépôts à caractère plutôt commercial (Hostýn,
Ptení). De plus, dans les exemples où les conditions
de la découverte sont connues, nous remarquons
qu'il s'agit d'une concentration marquée d'objets
formant le dépôt, soit dans un récipient (LibĀiceChýnov : Sankot,Vojtėchovská 2001, p. 312, ill. 18.1),
soit dans un espace limité comme à Stradonice
(Waldhauser 1995, p. 420, ill. 1) ou à Bezdėdovice
(Michálek 1999, ill. 5). Cette concentration reflète
la déposition obligatoire d'outils dépourvus de
leurs manches à la différence des objets utilisés
dans un milieu rituel où ils sont exposés dans leur
intégralité, ainsi que l'a montré F. Müller (Müller,
Koënig 1990).
La déposition d’une large gamme d’objets provenant de structures de sites d’habitat ou d'ateliers
au moment d'une situation critique, est supposée
pour le dépôt de Kolín (Rybová, Motyková 1983,
p. 168) et de Bezdėdovice (Michálek 1999, p. 55).
Elle est en liaison avec un changement brusque
de la situation politique. Cela ne contredit pas
une possible liaison avec des activités religieuses
qui ne devraient pas être, dans tous ces exemples,
à caractère sacrificiel, mais peut-être investies
de mission protectrice. La présence d’un objet
ancien rare, du type amulette sans doute, une
hache en pierre néolithique dans le dépôt de
LibĀice-Chýnov (Sankot, Vojtėchovská 2001, p. 321,
ill. 18.7.14) est, selon mon opinion, un tel cas, car
celui-ci ne révèle aucune trace de pratique secondaire (par exemple en tant que pierre à aiguiser).
Pour d'autres dépôts (Kolín : Rybová, Motyková
1983, p. 153 et suiv.) ce rôle protecteur est attribué
à un type de mobilier peu habituel comme, par
exemple, les chaudrons ou leurs composants.
Une telle interprétation comme moyens de protection peut être admise pour les bijoux comme
les torques ou les bracelets qui accompagnent le
lot de monnaies dans le dépôt de Podmokly (ill. 1),
district de Rokycany (Voigt 1971). Cela correspond
aux conclusions de Furger-Gunti (1982).
CONCLUSION
Les ensembles étudiés traduisent le caractère
des dépôts provenant de Bohême et de Moravie,
et permettent de tirer les conclusions suivantes : la
déposition intentionnelle de différents types d'objets avait sans doute une importance irremplaçable
dans le monde spirituel de la population laténienne
des régions mentionnées. Toutefois, sur la base des
découvertes locales, les modes de déposition et
les différentes structures des dépôts nous signalent
deux pratiques complètement différentes.
Pour la période de la stabilité − non seulement au cours de la période de la formation
de la civilisation laténienne au Ve s. av. J.-C. en
tant que point culminant de l’évolution antérieure de longue durée, mais aussi, pendant la
période ultérieure avec une prédominance des
soi-disant sépultures plates à inhumation aux
Ve-IIIe s. av. J.-C. −, la pratique de la déposition est
liée au critère “qualitatif”. La déposition d'objets
individuels ou même d'un plus grand nombre
105
PAVEL SANKOT
1. Découverte du dépôt de Podmokly d'après M. A. Voigt (1971). Sans échelle.
106
LES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DE BOHÊME ET DE MORAVIE
d’objets de la même catégorie, dont l’importance symbolique est majeure, nous démontre
le caractère correspondant au mobilier symbolique déposé dans les tombes (céramique,
armes, parures : Veselí, Tuchomėʼnice, Duchcov,
Klatovy, Detva, éventuellement pour la période
laténienne finale, les découvertes de monnaies
et d'outils ou d'armes isolés).
Contrairement à l’interprétation rituelle des
dépôts composés de différentes catégories de
produits représentant une gamme d’activités de
travail proposée par Rybová et Motyková (1983,
p. 144 et suiv.) et Waldhauser (1995, p. 424), les
dépôts d’outils et de mobilier de la vie quotidienne, connus jusqu'à aujourd'hui en Bohême et
en Moravie, reflètent souvent − à la différence de
régions d'Europe occidentale −, une atmosphère
découlant de situations de crise de caractères
historique ou politique. Ces bouleversements sont
liés à l’achèvement de l’évolution locale à la
charnière de La Tène A et B et plus tard, à la fin de
l’évolution de la période laténienne et au début de
la colonisation germanique.
Pour assurer les survivances et l’assurance pratique des moyens d’existence,ces dépôts comportent
non seulement des outils, mais en plus, d’autres
équipements de l’atelier, des produits finis et du
matériel pour la fabrication à venir. Néanmoins ce
besoin de la protection du bien déposé, n’exclut
nullement des pratiques ou des actes rituels de
protection, liés directement à la culture spirituelle
de la population laténienne.
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108
Ein spätlatènezeitlicher Werkzeug- und Gerätehort
aus dem ostkeltischen Gebiet
Martin SCHÖNFELDER
Im Jahre 1998 erwarb das Römisch-Germanische
Zentralmuseum für seine Sammlungen einen
Hortfund eiserner Werkzeuge im unrestaurierten
Zustand (Inv. Nr. O.42053/1-21). Er war von einem
auf Waffen spezialisierten Auktionshaus als neuzeitlich klassifiziert angeboten worden (vgl. Jahrbuch
RGZM 46, 1999, 530f. Abb. 45). Es handelt sich um
ein Ensemble von 21 Gegenständen mit einem
Gesamtgewicht von ca. 22,8 kg. Als Herkunft wurde
das „Donaugebiet” angegeben, wobei der Hortfund
den Eindruck eines zumindest weitgehend geschlossenen Ensembles erweckt, was durch den
gleichmäßigen Erhaltungszustand gestützt wird.
Der Hortfund umfasst drei Funktionsgruppen :
Schmiedegerät, landwirtschaftliches Gerät und
Werkzeuge zur Holzbearbeitung (Abb. 1). Es handelt sich um folgende Stücke (Nummerierung
entsprechend der Inventarisierung) :
2. Flachzange
L. 42,7 cm ; größte Br. 4,3 cm ; G. 632 g
Lange Schenkel mit rundem Querschnitt ;
bogenförmige, im Querschnitt rechteckige
Backen ; leichte Beschädigung an einer Backe ;
das Auge ist noch beweglich, und die Zange lässt
sich öffnen und schließen.
3. Schmiedehammer
L. 17,1 cm ; größte Br. 4,8 cm ; G. 1 253 g
Ovales Auge ; die im Querschnitt rechteckige
Bahnseite ist gut erhalten, die Finne ist stark abgenutzt
und besitzt einen so genannten „Bart”.
4. Setzhammer
L. 16,7 cm ; größte Br. 8,8 cm ; G. 3 393 g
Gerader Nacken, darunter das große, runde
Auge ; der Hammer verjüngt sich zur Bahn ; die
Bahn besitzt einen leichten „Bart”.
Schmiedegerät
1. Flachzange
L. 50,1 cm ; größte Br. 6,3 cm ; G. 1 071 g
Lange Schenkel mit rundem Querschnitt ;
bogenförmige, im Querschnitt rechteckige Backen ;
das Auge ist noch beweglich, und die Zange lässt
sich öffnen und schließen.
5. Schöpfkelle
L. 27,4 cm ; Dm. 13,6 cm ; G. 368 g
Leicht beschädigte Schöpfkelle aus dickem
Eisenblech ; kalottenförmige Schale, deren Boden
durch ein aufgenietetes langrechteckiges Eisenblech
verstärkt wurde ; aus dem Rand wächst an einer
Stelle ein pfannenartiger Stiel, der abgebrochen ist.
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MARTIN SCHÖNFELDER
Landwirtschaftliches Gerät
6. große Pflugschar
L.28,5 cm ; Br. (Lappenbereich) 13 cm ; G.3 145 g
Große, gedrungene Pflugschar mit kurzen
umgebogenen Schaftlappen und einer leicht
gerundeten Sohle (Spitze) ; unter dem oberen
Rand in der Mitte ein kreisrundes Loch.
7. kleine Pflugschar
L. 19,6 cm ; größte Br. 7,5 cm ; G. 669 g
Kleine Pflugschar mit langen Schaftlappen ;
die Schar verbreitert sich unter den Schaftlappen,
um leicht gerundet zur Sohle (Spitze) zu laufen.
8. schlanke Pflugschar
L. 27,9 cm ; Br. 4,4 cm ; G. 803 g
Schlanke Pflugschar mit einer doppelten
Schäftungsvorrichtung ; kurze Schaftlappen finden sich oben am Rand sowie auf der anderen
Seite der Schar nahe der Spitze.
9. Pflugmesser
L. 43,9 cm ; Br. 8,75 cm ; G. 2 854 g
Schweres Pflugmesser ; oben sitzt der im
Querschnitt rechteckige Schäftungszapfen,
unten das breite, abgeknickte Messer ; der
Schäftungszapfen ist zum Messer um 90° verdreht.
10-11. ein Paar Sensen
L. 66,2 cm bzw. 64,9 cm ; G. 916 g bzw. 899 g
Zwei durch D-förmige Schäftungsringe (25
u. 38 g) antik zusammengesteckte Sensen ; die
Blätter besitzen ein weitausbiegendes Blatt ; das
längere Exemplar ist stärker gebogen als das kürzere ; beide mit rechteckiger Befestigungszunge mit
einem im rechten Winkel abbiegenden Dorn.
Geräte zur Holzbearbeitung
12. große Tüllenaxt/-dechsel
L. 17,2 cm ; Br. (Schneide) 16 cm ; G. 1 779 g
Tülle aus zwei rechteckig umgebogenen
Lappen mit deutlicher, offener Naht ; rechteckiger
Tüllenquerschnitt, stark verbreitertes Blatt.
13. große Tüllenaxt/-dechsel
L. 17,5 cm ; Br. (Schneide) 15 cm ; G. 1 659 g
Tülle aus zwei rechteckig umgebogenen
Lappen mit deutlicher, offener Naht ; rechteckiger
Tüllenquerschnitt, stark verbreitertes Blatt.
110
14. kleines Tüllenbeil
L. 11,8 cm ; Br. (Schneide) 12,2 cm ; G.455 g
Tülle aus zwei rechteckig umgebogenen
Lappen mit Naht ; rechteckiger Tüllenquerschnitt,
stark verbreitertes Blatt, schartige Schneide.
15. kleines Tüllenbeil
L. 11 cm ; Br. (Schneide) 10,6 cm ; G. 364 g
Tülle ohne Naht ; rechteckiger Tüllenquerschnitt,
stark verbreitertes Blatt, schartige Schneide.
16. schlankes Tüllenbeil
L. 15,2 cm ; Br. (Schneide) 5,8 cm ; G. 704 g
Tülle ohne Naht ; ovaler Tüllenquerschnitt ;
am Tüllenrand ein Schnitt ; schmales Blatt, leicht
schartige Schneide.
17. schlankes Tüllenbeil
L. 15 cm ; Br. (Schneide) 5,8 cm ; G. 575 g
Tülle ohne Naht ; ovaler Tüllenquerschnitt ;
Tüllenmund leicht geschwungen ; am Tüllenrand
ein kurzer Schnitt ; schmales Blatt, schartige
Schneide.
18. Klinge von einem Gerät
L. 25,5 cm ; Br. (Schneide) 5,7 cm ; G. 547 g
Lange, leicht taillierte Klinge ; der Schäftungsteil
ist wie bei einem Ärmchenbeil durch Schulterbildung
abgesetzt ; die aus der Schulter wachsenden, beschädigten „Ärmchen” sind im rechten Winkel
umgebogen, und auch die beiden oberen Ecken
der Klinge sind entsprechend gebogen.
19. langer Tüllenmeißel
L. 24,1 cm ; Dm. (Tülle) 2,35 cm ; G. 208 g
Lange, sich leicht konisch erweiternde
Tülle mit rundem Querschnitt, Tüllennaht noch
erkennbar ; drei umlaufende Linien unter dem
Tüllenrand nur noch schwach sichtbar ; langer,
im Querschnitt rechteckiger Schaft. Die schmale
Schneide ist ebenso wie der Tüllenrand teilweise
ausgebrochen.
20. kurzer Tüllenmeißel
L. 18,7 cm ; Br. (Tülle) 2,9 cm ; G. 188 g
Eiserner, komplett erhaltener Tüllenmeißel ;
kurze, sich konisch erweiternde Tülle mit rechteckigem Querschnitt ; kräftiger, im Querschnitt
rechteckiger Schaft ; schmale Schneide. Tüllenrand
teilweise ausgebrochen.
21. Löffelbohrer
L. 26,1 cm ; Br. (Löffel) 2,65 cm ; G. 220 g
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
Leicht verjüngende Schäftungszapfen mit
rechteckigem Querschnitt ; Schaft mit ovalem
Querschnitt ; die löffelartige Bohrerspitze ist an
den Schneiden vielfach ausgebrochen.
Vermutlich waren die Objekte ohne ihre hölzernen Schäftungen niedergelegt worden : Die beiden
Sensenblätter waren durch zwei Sensenringe
zusammengesteckt, was beweist, dass sie beim
Zeitpunkt der Deponierung nicht in Funktion
waren. Auch ansonsten ist zu vermuten, dass etwa
die umfangreiche Holzkonstruktion der Pflüge bei
einer Deponierung nicht mehr vorhanden war.
In den Schäftungslappen der Geräte und in den
Augen der Hämmer konnten ebenfalls keine organischen Reste festgestellt werden.
BEMERKUNGEN ZU DEN GERÄTEN
Das Schmiedegerät setzt sich aus Hammer,
Setzhammer und zwei Zangen zusammen. Im
Kontext mit den anderen Werkzeugen können
sie Schmiedehammer und -zangen genannt werden. Dieser funktionalen Gruppe soll hier die mit
einem Blech geflickte Schöpfkelle (Nr. 5) angeschlossen werden, da sie zur Holzverarbeitung
entbehrlich und aufgrund des Materials als für
die Landwirtschaft zu hochwertig scheint – hier
hätte es ein hölzerner Schöpfer auch getan. Die
geflickte Schöpfkelle könnte als Herdschaufel bzw.
für Flüssigkeiten zum Löschen, Abschrecken oder
Härten gedient haben. Für andere Fundkontexte
mag diese funktionale Zuweisung nicht gelten – eiserne Schöpfkellen mit unterschiedlich
gestalteten Stielen sind in der Spätlatène- und
frühen Kaiserzeit zahlreich : z.B. im Grab 2 283 von
Wederath (Cordie-Hackenberg, Haffner 1997, 102
Taf. 629-631) u.a. mit Bronzegefäßen, Hiebmesser
und Fleischhaken oder im Grab 5 von Idrija
pri Baci mit Bronzekessel und zahlreichen
Bronzegefäßen (Gustin 1991, Taf. 4-9), die aber
keine Schmiedewerkzeuge enthalten.
Die hier wie in mehreren anderen Depots auftretende Kombination von zwei unterschiedlich
langen Zangen (Nr. 1, 2) verdient eine besondere Aufmerksamkeit. Andere Beispiele sind das
Depot von Schmiedegerät vom „Nikolausberg” bei
Golling (Land Salzburg) (Moosleitner, Urbanek
1991) und das von Kappel (Kr. Biberach; Fischer
1959,Taf. 14, 43-44). Ein Spannring zur Fixierung der
Greifbewegung, wie er im neuzeitlichen Handwerk
Verwendung findet, fehlt aus latènezeitlichen
Fundkontexten. Auch die hohe Differenzierung der
Zangen je nach Materialstärke und Form des zu
greifenden Gegenstandes, wie sie aus der Neuzeit
bekannt ist, scheint in der Latènezeit nicht erreicht.
In der Regel gibt eine Zange bei paralleler Stellung
der Schenkel die optimal zu greifende Stärke an
den Backen wieder. Zangen für feine Gegenstände
haben bei paralleler Schenkelstellung geschlossene, solche für größere Materialstärken geöffnete
Backen. So wurde die große Zange aus Golling
für stärkere Objekte verwendet als die kleine
(Moosleitner, Urbanek 1991, 68, Abb. 3-4). Die
beiden Zangen aus dem hier vorzustellenden
Depotfund waren beide nicht für besonders starke
Objekte geeignet – obwohl die größere der beiden
Zangen 1,07 kg wiegt (!).
Der Schmiede- wie der Setzhammer (r. 34) sind beide oft benutzt worden – ein „Bart”
zeugt von ihrem Einsatz bzw. von einem relativ weichen Eisen. Setzhämmer werden zum
Glätten von größeren Oberflächen und zum
Erzeugen von („abgesetzten”) Kanten verwendet, nicht zum eigentlichen Schmieden. In der
Latènezeit waren besonders ab der Stufe Latène
B bei der Waffenproduktion (Bandschildbuckel,
Schwertscheiden, Schwertklingen und breite
Blätter von Lanzenspitzen) derartige Werkzeuge
notwendig ; trotzdem soll keine Zuweisung
zum Werkzeugbestand eines spezifischen
„Waffenschmiedes” erfolgen.
Pflüge mit der Kombination breite Pflugschar/
Pflugmesser (Nr. 6, 9) stammen ebenfalls aus den
Gräbern 5 und 18 von Idrija pri Baci sowie aus
weiteren Fundstellen Sloweniens (Gustin 1991,
60-61 ; 1975 ; Gabrovec 1955). Breite symmetrische
Pflugschare sind aus verschiedenen Depot- und
Siedlungsfunden ab der späten Latènezeit bekannt
und im gesamten Gebiet der Oppidakultur verbreitet
(Gustin 1991, 60-61 ; Jacobi 1974, 67-70 ; Spehr 1992 ;
Fries 1995,Taf.15-17),jedoch lässt sich die Verbreitung
der 37-47 cm langen, scharfen Pflugmesser mit
rechteckigem Befestigungsteil in der Latènezeit auf
das Gebiet des heutigen Slowenien eingrenzen ; in
der Römischen Kaiserzeit wird dieser Zusatz zum
Pflug dann allgemein gebräuchlich (Pohanka 1986,
9-56). Das hier vorgelegte Exemplar ist besonders
breit und massiv.
Es wäre weiter zu fragen, ob die kleine, herzförmige Pflugschar (Nr. 7), die ebenfalls in Idrija pri
Baci eine Parallele findet (Gustin 1991, Taf. 28,
14), mit dem Gegenstand, der hier als „schlanke
111
MARTIN SCHÖNFELDER
1. Hortfund aus dem „Donaugebiet”. Übersicht (Foto : I. Feddersen, RGZM).
112
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
2. Hortfund aus dem „Donaugebiet”. n°1-5 Schmiedegerät (Zeichnung M. Weber, RGZM).
113
MARTIN SCHÖNFELDER
114
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
3. Hortfund aus dem „Donaugebiet”. n°6-9 Landwirtschaftliches Gerät (Zeichnung M. Weber, RGZM).
4. Hortfund aus dem „Donaugebiet”. n° 10-11 Landwirtschaftliches Gerät : Sensen (Zeichnung M. Weber, RGZM).
Pflugschar” (Nr. 8) bezeichnet wird, gemeinsam an
einem zweiten Pflug verwendet wurde und letztere dabei als Pflugmesser diente, oder ob beide
an getrennten Geräten, aber doch in bewusster
Kombination verwendet wurden.
Die doppelte Befestigungsmöglichkeit
des schlanken Stücks weist auf eine andere
Verwendung/Schäftung, als es für eine Pflugschar
mit vier gleichseitigen Lappen (Fries 1995, Typ. 2b)
notwendig ist. Der Hortfund von Kaiserbrunn am
Attersee (Land Salzburg) besitzt eine Kombination
von breiter Pflugschar und einer unverhältnismäßig langen Pflugschar mit Lappenschäftung
(Amberger 1927,206 [„Haue”] Abb.1,8 ;Moosleitner
1998-1999, 506-510).
Auch im Hortfund von Kolín (Bez. Kolín)
treten breite Pflugschar und sechähnlicher
Gegenstand mit doppelten Schäftungslappen
gemeinsam auf (Rybová, Motyková 1983, Abb.
13, 4 ; Abb. 16, 3). R. Spehr möchte die schlanken Pflugschare mit doppelter Schäftung als
entwickelte Variante der älteren, schlanken
Pflugschare betrachten (Spehr 1992) ; für das
auf beiden Seiten mit Schäftungslappen versehene Stück aus dem „Donaugebiet” kann jedoch
sein Rekonstruktionsvorschlag nicht funktionieren. Man könnte, vor allem in der Kombination
mit der herzförmigen Pflugschar, an eine ähnliche Kombination wie bei Pflugschar/Pflugmesser
denken. In jedem Fall sind sie aber (auch)
zeitgleich mit den typischen breiten Pflugscharen
der Spätlatènezeit. Wären diese Überlegungen
zutreffend, dann würde es sich hier um die
Eisenbestandteile von zwei typologisch und wohl
auch funktional unterschiedlichen Pflügen handeln.
Zur Chronologie des Sechs ist noch anzumerken, dass das schlanke Exemplar aus dem 1995
von J. Waldhauser aus Stradonice stammenden
Hortfund zusammen mit einer breiten Pflugschar
(Waldhauser 1995, Abb. 2, 9-19) wohl in die Stufe
Latène D1/D2a datiert, womit für andere ähnliche
Exemplare von mehrperiodigen Fundplätzen diese
Datierung nicht ausgeschlossen werden kann (vgl.
z.B. Jacobi 1977, 48, Taf. 19, 21 – angeblich mit
der schlanken Pflugschar Taf. 18, 3 zusammen
von einem Sondengänger gefunden). Ein Sech
und eine einfache, schlanke Pflugschar stammen
auch aus dem 1894 erstmals erwähnten Hort
von Hainbach (Gem. Nußdorf am Haunsberg)
(Moosleitner 1998-99, 503-506). R. Pohanka schlägt
aufgrund neuzeitlicher Analogien ein eigenes Gerät
mit einem Pflugmesser zum Aufreißen der Erde vor,
dem dann in einem zweiten Arbeitsgang der Pflug
dann folgt (Pohanka 1986, 11 mit Abb. 1-3).
115
MARTIN SCHÖNFELDER
Die beiden demontierten Sensenblätter, die mit
zwei steigbügelförmigen Sensenringen zusammengesteckt waren (Nr. 10-11 ; Abb. 1,4), stellen mit über
60 cm Länge große Vertreter ihrer Gattung dar, womit
sie in Anbetracht der Formentwicklung als relativ spät
in der Spätlatènezeit (d.h. eher nach Latène D2) einzuordnen sind. Sie finden ebenfalls in den Gräbern
von Idrija pri Baci Parallelen ; in der Kombination mit
einer Pflugschar gibt es ein Gegenstück im Hortfund
vom Attersee (Amberger 1927). Bei diesen Stücken
handelte es sich vermutlich um richtige Sensen
im modernen Sinn mit langem „Baum” und nicht
um „Hausensen”, wie sie in der Mittel- und auch
noch in der Spätlatènezeit üblich waren (Jacobi
1974, 76-78 ; Pohanka 1986, 147-149). Die Verbindung
zweier Sensenblätter mit einem Sensenring ist beispielsweise an einem Fund aus dem Oppidum von
Gallis-Lovatschka in der Ukraine zu beobachten
(Lehóczky 1901, 203, Abb. 2).
Die Tüllenbeile und -äxte aus dem Hortfund
(Nr. 12-15) entsprechen gut dem aus der Zeit der
oppida bekannten Spektrum (Jacobi 1974,2832). Ihre Funktion als Waffe, Schlachtgerät oder
Werkzeug zur Holzbearbeitung ist in Gräbern, in
denen sie als einziges Gerät vorkommen, umstritten (Schumacher 1989 ; Schönfelder 2002, 318) ;
im Zusammenhang mit dem Löffelbohrer und
den beiden unterschiedlich langen Meißeln (Nr.
19-21), die ebenfalls der Holzbearbeitung dienen,
ist eine primäre Verwendung als handwerkliches
Alltagsgerät jedoch unstrittig. Eine Unterscheidung
in schwere, beidhändig geführte (Nr. 12-13) und
leichte, einhändig geführte Werkzeuge (Nr. 1415) ist generell sehr schwierig, im vorliegenden
Ensemble jedoch aufgrund der deutlichen Größenund Gewichtsunterschiede leicht möglich. Nach
den Untersuchungen von J.-P. Guillaumet (2003,
71) wären die beiden schweren Geräte (Abb.
12-13) aufgrund der asymmetrischen Schneiden
(Grundform : rechtwinkliges Dreieck) als quer
geschäftete Dechseln anzusprechen, wohl als
grobe Geräte zum Entrinden und zum Glätten
von Balken (Axt/Beil – Grundform : gleichschenkeliges Dreieck).
Die Breite der Schneiden wird zu einem gewissen Maße mit dem nachträglichen Schärfen und
Nachschmieden der Klingen zusammenhängen.
Vereinzelt auftretende Tüllenbeile mit geschlossener Tülle (Nr. 15) kommen beispielsweise auch im
Hort von Kolín vor, in denen neben zwölf „offenen”
Tüllenbeilen, -äxten und -dechseln unterschie-
116
dlichster Ausprägung ein Beil mit geschlossener
Tülle vorhanden ist (Rybová, Motyková 1983, Abb.
9, 3) ; auch im Hort von Kappel sind unterschiedliche Möglichkeiten der Schäftung (Loch ; Lappen ;
geschlossene Tülle) bei Äxten und Beilen vertreten (Fischer 1959, 49-50 ; 54-55).
Die beiden schlanken Tüllenbeile (Nr.1617) sind von besonderem Interesse, da sich für
sie im Bereich der Oppidakultur nur sehr selten Parallelen finden. Vergleichsstücke aus dem
Bereich der Osthallstattkultur sind älter und waren
als Waffen in Gebrauch (Stary 1982, p. 38-39 ; Egg
1996, p. 151-155). Einzelne Exemplare stammen
in Idrija pri Baci auch noch aus Gräbern mit
Certosafibeln der Frühlatènezeit (Gustin 1991, Taf.
24-26 : grab 34, 37). Der leichte Schwung im oberen
Abschluss der Exemplare aus dem „Donaugebiet”
entspricht dieser osthallstättischen Tradition ; eine
Befestigungsöse fehlt allerdings. Ein Tüllenbeil mit
einer glatten Oberkante stammt als Einzelfund
vom Dünsberg in Hessen (Jacobi 1977, p. 22, Taf.
15, 10), nach G. Jacobi gehört es „vermutlich der
frühen [La Tène B] Besiedlungsphase” an.
Gleichwohl sind die beiden Exemplare aus
dem „Donaugebiet” gedrungener und nicht so
lang und schlank wie die älteren Stücke. Aus
Nottonville (Eure-et-Loire) stammen zwei
Hortfunde mit ausschließlich eisernen Beilen ähnlicher Form, allerdings mit eher rechteckiger Tülle ;
ein nicht näher datierbarer doppelpyramidenförmiger Eisenbarren wurde in ihrer Nachbarschaft
gefunden (Lelong 1991). Für eines der Depots
ist überliefert, dass es sich um ein „organisiertes”
Depot in einer Grube handelt, wie es auch für die
Spätbronzezeit im Nordwesten typisch ist ; eine
klare Datierung ergibt sich jedoch nicht.
Von unklarer Funktion ist ein Gerät, was an
ein hallstattzeitliches Ärmchenbeil erinnert ; seine
lange, gerade Klinge und seine Schäftung mittels zweier, an einem Absatz im rechten Winkel
ausbiegende „Ärmchen” sowie zweier feiner
Schäftungslappen am oberen Rand sprechen
nicht für ein Werkzeug, das mit einer im rechten
Winkel abknickenden Schäftung in Gebrauch war ;
einfache Dechseln besäßen eine der üblichen
Tüllenschäftungen oder ein Schaftloch (Jacobi
1974, 34f.). Die taillierten Seiten der Klinge und
die symmetrische, gebogene Schneide wären an
einem Hobel undenkbar (Bach 1999 ; Gaitzsch,
Mattäus 1981).
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
5. Hortfund aus dem „Donaugebiet”. n°12-17 Werkzeug zur Holzbearbeitung : Äxte und Beile (Zeichnung
M. Weber, RGZM).
117
MARTIN SCHÖNFELDER
6. Hortfund aus dem „Donaugebiet”. n°18-21 Werkzeug zur Holzbearbeitung (Zeichnung M. Weber, RGZM).
Aus neuzeitlichen Analogien wäre noch an
ein Werkzeug zum Entrinden von Stämmen zu
denken, ohne dass eindeutige Parallelen vorliegen. In jedem Fall ist jedoch an ein Werkzeug
zur Holzbearbeitung zu denken.
sind. Diese Werkzeugtypen sind jedoch in den
süddeutschen Oppida der Stufe Latène D1 bis auf
die breite Pflugschar (noch) nicht vertreten ; somit
kann eine Datierung in die Stufe Latène D2 als am
Wahrscheinlichsten angenommen werden (Kurz
1995, p. 27).
DATIERUNG
Eine Datierung von Werkzeugen ist aufgrund
der funktionalen und meist zeitunabhängigen
Formbestimmung ein problematisches Unterfangen.
Jedoch lassen sich in einer größeren Gruppe
von Gegenständen dennoch Hinweise für eine
Zeitstellung finden. Die Tüllenbeile und -äxte/dechseln mit breiter Klinge sind mit Sicherheit
Erzeugnisse der vorrömischen Eisenzeit, die in der
Römischen Kaiserzeit vollständig durch Geräte mit
Lochschäftung ersetzt werden (Pohanka 1986, 228263 ; Dolenz 1998, 146-150). Auch für die schmalen
Tüllenbeile auf osthallstättischer Grundlage – die
sich aber dennoch eindeutig von den älteren Stücken
unterscheiden – könnte man sich kaum eine
Datierung in die Kaiserzeit vorstellen.
Auf der anderen Seite ist ein Pflug mit breiter
Schar und Sech vorhanden sowie zwei Sensen –
Geräte, wie sie erst aus der Spätlatènezeit bekannt
118
Der überwiegende Teil (Zangen, Hämmer,
Bohrer,Tüllenmeißel) lässt sich nicht näher zeitlich
einordnen, jedoch sind die Typen in spätlatènezeitlichen Kontexten gut vertreten.
HERKUNFT
Die Fundortangabe „Donaugebiet” für den
hier vorgelegten Hortfund ist nur als sehr unsicher
zu betrachten ; sogar eine dadurch verschleierte
süddeutsche oder französische Abkunft wären theoretisch möglich, da spätlatènezeitliche Werkzeuge
sich selten regional unterscheiden lassen.
Anzumerken ist jedoch, dass typische Werkzeuge
aus dem heute rumänischen oder bulgarischen
(dakischen oder thrakischen) Bereich im Hort
nicht vertreten sind (vgl. Iaroslavschi 1997). Hier
sind vor allem für diesen Bereich charakteristische Hämmer, Hacken und Äxte zu nennen, die
durchweg ein rundes bzw. ovales Auge mit einem
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
verdickten Bereich aufweisen und nicht mehr
auf der altertümlichen Tüllenschäftung basieren.
Es sind auch keine oberständigen Lappenbeile
vorhanden, wie sie sogar in der Spätlatènezeit
zumindest für die Gegend um Idrija pri Baci, dem
Tal des Flusses Soca bzw. dem Posocje genannten
Gebiet charakteristisch sind (Gustin 1991).
Jedoch erinnern die beiden schlanken
Tüllenbeile im Hortfund an osthallstättische
Tüllenbeile, die sich im westlichen Bereich kaum
belegen lassen und damit den Fundort des
Hortes näher eingrenzen. Eine Kartierung
der hallstattzeitlichen Exemplare ergibt als
Verbreitungsschwerpunkt das Gebiet um Novo
mesto, das mittlere Save-Tal und das Tal der
Krka (Stary 1982, 39, Abb. 4). Das Sech und die
kleine herzförmige Pflugschar verweisen ebenfalls auf das Gebiet des heutigen Slowenien bzw.
Kroatien.
ZUR ZUSAMMENSETZUNG
Der Hortfund setzt sich aus drei klar abgetrennten Funktionsgruppen zusammen : Schmiedegerät,
landwirtschaftliches Gerät und Werkzeuge zur
Holzbearbeitung. Rohmaterial, Halbfabrikate
oder Kleingeräte wie feine Meißel, Feilen,
Punzen oder Ahlen fehlen beispielsweise. Auch
Herdgeräte und Wagenteile, die ansonsten
häufig in Werkzeughorten auftauchen, sind anscheinend nicht vorhanden. Natürlich kann die
Zusammensetzung auch durch die Zwischenstufe
des Antiquitätenhandels beeinflusst sein, jedoch
wirkt dies bei derart klaren Abgrenzung eher
unwahrscheinlich.
Im Inventar des Hortes aus dem „Donaugebiet”
lassen sich auch keine Hinweise auf einen besonders hervorgehobenen Status der(s) (ehemaligen)
Besitzer(s) erkennen. Andere Hortfunde wie die
von Kappel, Kolín oder aus dem Wauwilermoos
(Kt. Luzern) beinhalten noch dazu Herdgeräte
(Feuerböcke), Kesselbestandteile und z.T. auch
Elemente vom Wagen (Fischer 1959 ; Wieland
1996, 68-70 ; Müller, Koënig 1990, 171, Abb. 76). Für
diese Gruppe schlägt G. Wieland eine rituell motivierte Niederlegung, evtl. als (Selbst-) Ausstattung
für einen Toten, vor. Bei dem Hort von Kappel und
dem aus dem Wauwilermoos, aber auch dem von
Lozna (RO) kommt hinzu, dass sie aus einem als
naturheilig deutbaren Platz stammen ; Kappel und
Wauwilermoos wurden allerdings in mehreren
Gruppen aufgefunden.
Jedoch tut man sich auch schwer, beispielsweise Kappel und Lozna einer einzigen Gruppe
zuzuordnen, da Kappel sich durch seine zahlreichen prestigeträchtigen Gegenstände wie die
Bronzegefäße, die Bestandteile eines vierrädrigen Wagens und das Helmfragment (Bozic 1997)
vom Hort von Lozna unterscheidet, der eher
den Eindruck eines „profanen Werkzeugdepots”
der Mittellatènezeit macht. Fast vom Gipfel
eines Felsen, der später eine mittelalterliche
Burg trug, stammt der Hort von Falkenstein
in Niederösterreich (Urban 2000) ; jedoch lässt
ihn die unspektakuläre Zusammensetzung
(Tüllenbeil, drei Messer, Bauklammern) schwerlich mit anderen Horten vergleichen, obwohl eine
rituelle Deponierung aufgrund der Topographie
gut denkbar wäre.
Bezüglich der Zusammensetzung ist mit
dem Hort aus dem „Donaugebiet” ein Hort aus
Stradonice vergleichbar, ein Detektorfund, angeblich aus dem Wallkörper vom höchsten Punkt des
Oppidum : Pflugschar und Sech, drei Sensen, ein
Löffelbohrer, ein Tüllenbeil und zwei eiserne Stifte
(Waldhauser 1995). Hier sind zwar nur die Bereiche
Landwirtschaft und Holzbearbeitung abgedeckt, es
handelt sich jedoch auch um vollständige Geräte
aus dem alltäglichen Arbeitsumfeld. Ein Depot
mit starker Betonung des landwirtschaftlichen
Sektors (vier doppellappige, schlanke Pflugschare,
sechs Sicheln/Sensen sowie Zähne einer Egge)
stammt aus einem Bereich nahe des Walls der
Höhensiedlung Liptovská Mara, die der PúchovKultur zugewiesen wird (Pieta 2000).
Die Tatsache, dass Metalldepots im
Wallkörper von Höhensiedlungen auftreten können, wird durch die vier Depots vom
Gründberg bei Linz angezeigt (Ruprechtsberger
1998 ; Urban, Ruprechtsberger 1998 ; Guichard
2003, 16-18). Diese Depots mit einem breit
gefächerten Bestand an Waffen, Geräten und
auch Rohmaterial (in Form von Barren und
Radreifen), niedergelegt unter besonders sorgfältigen Steinlagen, können wohl eindeutig als
Bauopfer gewertet werden – jedenfalls nicht als
Versteckfund eines Metallhandwerkers.Eventuell
wäre der Hortfund aus dem „Donaugebiet”
an diese Gruppe anzuschließen, obwohl seine
Zusammensetzung nicht zwangsweise einen
rituellen Hintergrund für die Deponierung
erkennen lässt ; genauere Aussagen verhindert
die fehlende Fundüberlieferung.
119
MARTIN SCHÖNFELDER
7. Idrija pri Baci (Slovénie). Geräte aus Grab 5 (nach Gustin 1991).
120
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
8. Idrija pri Baci, (Slovénie). Geräte aus Grab 18 (Auswahl) (nach Gustin 1991).
121
MARTIN SCHÖNFELDER
Auch Depots von Metallhandwerkern scheint es
jedoch gegeben zu haben – jedenfalls möchte man
so wohl den sog. Leisenhart-Fund (Witz 1910-13)
aus dem Oppidum von Manching, der hauptsächlich aus Bronzen und Schrott besteht, erklären.
Ein ähnlicher Fund soll aus dem HeidetränkOppidum in Hessen stammen (Kurz 1995, 169,
612A). Die Äquivalente zu den urnenfelderzeitlichen Brucherzhorten mit einer hohen Stückzahl
auch kleinteiliger, teilweise bewusst zerkleinerter
Gegenstände (Clausing 2004) sind allerdings eher
selten. Auch die Schmiedeausstattung von Golling
– versteckt innerhalb eines Siedlungsareals – ließe
sich plausibel als Versteckfund eines Handwerkers
interpretieren (Moosleitner 1998-99, 510). Das
Depot aus einer Grube in der mittellatènezeitlichen
Siedlung von Sajópetri im Norden der ungarischen
Tiefebene (Guichard 2003, 21) wurde vielleicht
ebenfalls aus profanen Gründen verborgen. Auch
andere Depots mit Anteilen von Rohmaterial wie
etwa Radreifen oder Barren ließen sich in diese
Richtung deuten, wenngleich auch in einem der
„Bauopfer” vom Gründberg Rohmaterial enthalten
ist.
Die Ursache für die Überlieferung als Hortfund
– ob er aus rituellen oder der Not gehorchenden
Gründen nicht mehr geborgen wurde – kann in
den meisten Fällen allerdings nicht eindeutig
bestimmt werden. Die Zusammensetzung allein
gibt darauf nicht immer eindeutige Hinweise, wie
die aufgeführten Beispiele zeigen – entscheidend
ist, welche Hinweise der Kontext liefert. Auf alle
Fälle ist aber anzunehmen, dass es „Schatzfunde”
– versteckt und aufgrund persönlichen Schicksals
in Notzeiten nicht mehr geborgen – ebenfalls
gegeben haben muss.
Bei den Eisengerätedepots ist es notwendig, weitere Präzisierungen vorzunehmen
(vgl. Fundliste). Im Folgenden werden als
Eisengerätedepots nur solche bezeichnet,bei denen
Gerätetypen aus mehreren Handwerksbereichen
vorliegen, die Gegenstände eng zusammengepackt
sind und sie sich außer Funktion (d.h. ohne
Schäftung) befinden. Gelegentlich kann auch
Rohmetall, etwa in Form von Radreifenabschnitten
oder einzelnen Barren Bestandteil sein oder eine
einzelne Waffe.
Nach den Fundumständen lassen sich drei
grobe Kategorien von Depotfunden bilden : Depot
im Siedlungskontext/öffentlichen Raum (Wall
etc.), Depot im Siedlungskontext/privaten Bereich
und Depot im Kontext eines naturheiligen Ortes
(Gewässer : Moor, Quelle ; Passsituation). Für die
erste und letzte Kategorie an Fundkonzentrationen
ist eine rituell motivierte Niederlegung ernstlich in
Erwägung zu ziehen.Auch private religiös bedingte
Deponierungen mag es gegeben haben, jedoch
fällt hier die Entscheidung schwer, wenn beispielsweise wie in Golling ein Fund funktionsfähiger
Schmiedewerkzeuge in einem Siedlungsbefund
mit Schlackenresten vorliegt.
9 Entwurf einer Verbreitungskarte zu jüngerlatènezeitlichen Eisengerätedepots (Kriterien: Gerätetypen aus mehreren Handwerks bereichen,
Gegenstände eng zusammengepackt und außer Funktion, zusätzlich evtl. Rohmetall oder Waffe).
1: Sorel-Moussel, Fort-Harouard; 2: Aesch/Klaffenbrunnen ; 3: Altdorf ; 4: Wauwil, Wauwilermoos ; 5 : Brehmen ; 6: Frickhofen, Dornburg ;
7: Guntendorf ; 8 : Haiger, Kalteiche ; 9: Heidelberg, Heiligenberg ; 10: Kelheim ; 11: Neuenbürg, Schlossberg ; 12: Oberehe ; 13: Sättelstädt ;
14: Staffelstein, Staffelberg ; 15: Attersee/Kaiserbrunn ; 16: Hainbach ; 17: Linz/Gründberg ; 18: Kolín ; 19: Lipany ; 20: Stradonice, Hradiste ;
21: Besenov ; 22: Gajary ; 23: Liptovská Mara ; 24: Plavecké Podhradé, Pohanská ; 25: Wyciaze ; 26: Petneháza. Nachweis vgl. Fundliste.
122
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
Auffallend ist die starke Konzentration
derartiger Eisengerätedepots im Gebiet östlich
des Rheins bis hin zu den Karpaten (Abb. 9) ;
eine Unterteilung nach den unterschiedlichen
Fundumständen ist allerdings selten möglich,
exakte Datierungen sind ebenfalls schwierig (vgl.
Liste für den Mitteldonauraum bei Pieta 2000,
143), womit die Liste und die Karte nur einen
Arbeitsstand anzeigen können. Ihre Gesamtzahl
ist im Vergleich zu der etwa spätbronzezeitlicher
Horte als gering zu bewerten ; jedoch war ihre
Zahl in der Hallstatt- und Frühlatènezeit noch
kleiner. Der ehemals in einer Kiste verpackte
Werkzeug- und Gerätehortfund aus dem Oppidum
von Fort-Harrouard bei Sorel-Moussel (Eure-etLoire) (Philippe 1936, 582-583,Abb. 44) ist einer der
wenigen spätlatènezeitlichen Gerätehorte westlich
des Rheins, der den zahlreichen im Osten entspricht. Werkzeuge und Geräte aus Heiligtümern
wie Gournay-sur-Aronde, Vienne Sainte-Blandine
oder naturheiligen Orten (Larina „La Chuire”)
sowie kleinere Ansammlungen von Geräten in
Siedlungsbefunden sollen hier nicht mit einbezogen werden. Für sie müsste im Einzelfall anhand
möglicher Regelhaftigkeiten diskutiert werden, ob
es sich um Weihungen oder Gegenstände aus dem
Alltagsbetrieb handelt.
Die vielen Eisendepots der Spätlatènezeit
sind sicher nicht als einheitliche Erscheinung zu
betrachten – diese weit gefächerten Interpretations
möglichkeiten wurden sowohl in der älteren (Pauli
1985) als auch in der jüngsten Hortfunddebatte
(Geißlinger 2002 ; Clausing 2004) betont, monokausale Interpretationsansätze (profan : Kurz 1995,
121 ; kultisch : Hänsel 1997) werden der Vielfalt der
prähistorischen Wirklichkeit wohl nicht gerecht.
Sind diese Unterschiede in der Verbreitung der
Werkzeug- und Gerätedepots pur als kulturelles
oder auch als politisches Phänomen zu erklären ?
Derartige starke großregionale Unterschiede in
der Zusammensetzung der Depots begegnen
bereits in der Urnenfelderzeit (Clausing 2004),
wo Brucherzhorte typisch für den Osten sind, im
Westen hingegen andere Typen von Hortfunden
vorkommen. Für die Römische Kaiserzeit können
den Eisengerätedepots ähnliche Deponierungen
in einer Verbreitung zwischen Polen, Mittel- und
Südwestdeutschland als rituelle Opfer gedeutet
werden (Rieckhoff 1998 gegen Henning 1985).
In jedem Fall ist festzuhalten, dass im Westen
der spätlatènezeitlichen Welt auch die sicher als
rituell bestimmbaren Eisengerätedepots fehlen ;
damit liegt zumindest ein Unterschied im kulturellen Verhalten zu Grunde, ohne dass Bedrohungen
von außen (Germanen- und Dakereinfälle, Kimbern
und Teutonen) zur Interpretation herangezogen
werden müssen. Derartige Unterschiede manifestieren sich auch in anderen Bereichen, wie z.B.
der Verbreitungsdichte von Heiligtümern „nordgallischen Typs”, wenngleich in Manching (Sievers
1991), in Rosldorf „Sandberg” (Holzer 2003) und
auf dem Frauenberg bei Leibnitz in der Steiermark
(Tiefengraber 1997) Heiligtümer vorhanden sind,
die den französischen entsprechen.
Den vielen Gerätedepots der jüngeren Latènezeit
ist sicher die zu dieser Zeit gewandelte wirtschaftliche Grundlage gemeinsam : Es ist mehr
Eisen im Umlauf als in den vorangegangenen
Epochen. Dieser Schub geht mit dem Auftreten
der Oppida einher, mit einer sicher verstärkten und
wohl auch verbesserten Eisenmetallurgie, mit der
Münzwirtschaft und auch mit der Notwendigkeit,
mehr Personen als vorher (mit einer verbesserten
Landwirtschaft) zu ernähren.
FUNDLISTE
Jüngerlatènezeitliche Eisengerätedepots
(Gerätetypen aus mehreren Handwerksbereichen,
Gegenstände eng zusammengepackt und außer
Funktion, zusätzlich evtl. Rohmetall oder Waffe)
Frankreich
1. Sorel-Moussel, Fort-Harouard, (Eure-et-Loire):
Hortfund mit 16 Gegenständen : Werkzeugen zur
Holzbearbeitung, Geräten für die Landwirtschaft
(schlanke Pflugschare z.T. ineinandergesteckt.
(Philippe 1936, 582-583, Abb. 44).
Schweiz
2. Aesch/Klaffenbrunnen,Kt.Baselland :Hortfund
mit 2 Gegenständen :Werkzeug zur Holzbearbeitung,
Gerät für die Landwirtschaft. (Müller, Koënig 1990,
171, Abb. 75).
3.Altdorf, Kt. Uri : Hortfund mit 12 Gegenständen :
Werkzeuge zur Holzbearbeitung, Geräte für die
Landwirtschaft und den Haushalt. (Müller, Koënig
1990, 169-171, Abb. 74).
4. Wauwil, Wauwilermoos, Kt. Luzern : Hort (?)
in einem Moor (11 Gegenstände) sowie einem
Feuerbock (separat aufgefunden ? ; freundl. Mitt.
P. Jud) : Herdgerät, Werkzeuge zur Metall- und
123
MARTIN SCHÖNFELDER
Holzbearbeitung, Geräte für die Landwirtschaft und
den Haushalt, Wagenteile. (Müller, Koënig 1990).
Geräten für den Haushalt,Wagenteilen (?). (Unpubl.;
Kurz 1995, 186, 183).
Deutschland
Österreich
5. Brehmen, Kr. Tauberbischofsheim : 2 Depots
im Bereich zwischen 2 Viereckschanzen. Depot
I mit Herdgerät, Werkzeugen zur Metall- und
Holzbearbeitung ;Depot II mit Herdgerät,Werkzeugen
zur Holzbearbeitung, Geräten für den Haushalt.
(Kurz 1995, 133).
15. Attersee/Kaiserbrunn, Land Salzburg :
Hortfund mit 8 Gegenständen nahe einer Quelle :
Herdgerät,Werkzeug zur Holzbearbeitung, Geräte für
die Landwirtschaft und den Haushalt. (Moosleitner
1998-99, 506-510).
6. Frickhofen, Dornburg, Kr. Limburg-Weilburg :
Depotfund am Fuße der Dornburg mit Werkzeugen
zur Holzbearbeitung, Geräten für die Landwirtschaft.
(Behaghel 1943, Taf. 40).
7. Guntendorf, Lkr. Landshut : Hortfund (?) bei
der Bachregulierung, u.a. Tüllenaxt, Hiebmesser,
Radbestandteile. (Kurz 1995, 149, 366).
8. Haiger, Kalteiche, Lahn-Dill-Kreis : Hortfund (?)
mit Schwertbarren,Werkzeugen zur Holzbearbeitung,
Geräten für die Landwirtschaft und den Haushalt,
Wagenteile, Pferdegeschirr. (Behaghel 1943, Taf. 3940).
9. Heidelberg, Heiligenberg : Hortfund in der
befestigten Höhensiedlung, u.a. mit Geräten für die
Landwirtschaft, Wagenteilen. (Unpubl.; Kurz 1995,
150).
10. Kelheim, Lkr. Kelheim : Hortfund in einer
Siedlungsgrube des Oppidum mit Werkzeugen zur
Holz- und/oder Steinbearbeitung, Geräten für den
Haushalt. (Kurz 1995, 154, 425).
11. Neuenbürg, Enzkreis : Hortfund (FLt ?)
am Hang des Schlossberges mit Werkzeug zur
Holzbearbeitung, Geräten für die Landwirtschaft.
(Kurz 1995, 167, 586).
12. Oberehe, Kr. Daun : Hortfund aus 3 unterschiedlichen Beil-/Dechselklingen,eine mit abgestumpfter
Schneide. (Trierer Zeitschr. 52, 1989, 441-442, Abb. 6,
1-3).
13. Sättelstädt, Kr. Eisenach : Hortfund aus 5
Gegenständen verschiedener Funktionsgruppen.
(Eisenach 1963).
14. Staffelstein, Staffelberg, Lkr. Lichtenfels :
Hortfund (?) aus der Höhensiedlung mit Herdgerät
(?), Waffen, Werkzeugen zur Holzbearbeitung,
124
16. Hainbach, Land Salzburg : Hortfund mit
7 Gegenständen : Werkzeug zur Holzbearbeitung,
Geräte für die Landwirtschaft. (Moosleitner 199899, 503-506).
17. Linz/Gründberg, Oberösterreich : Hortfunde
im Wallbereich ; Hort 1 mit 16 Gegenständen (ca.
20 kg) : Werkzeuge zur Metall- und Holzbearbeitung,
Geräte für den Haushalt, Wagenteile ; Hort 2 mit 12
Gegenständen (fast 10 kg) :Herdgerät,Waffe,Wagenteil,
Werkzeuge zur Metall- und Holzbearbeitung ; Hort
3 mit 13 Gegenständen (21,2 kg) ; [Hort 4 mit 2
Barrenfragmenten]. (Urban, Ruprechtsberger 1998).
Tschechische Republik
18. Kolín, okr. Kolín : Hortfund mit 68
Gegenständen (ca. 15 kg) : Herdgerät, Metallgefäß,
Waffen,Werkzeuge zur Metall- und Holzbearbeitung,
Geräte für die Landwirtschaft und den Haushalt,
Wagenteile, Pferdegeschirr. (Rybová, Motyková
1983).
19.Lipany,okr.Kolín :Hortfund mit 5 Gegenständen
aus einer Siedlung: Herdgerät, Werkzeug zur
Holzbearbeitung, Geräte für die Landwirtschaft und
den Haushalt. (Rybová, Motyková 1983, 145, Abb. 25).
20. Stradonice, Hradiste, okr. Beroun Hortfund mit
12 Gegenständen aus dem Wall auf dem höchsten
Punkt des Oppidum :Werkzeug zur Holzbearbeitung ;
Geräte für die Landwirtschaft. (Waldhauser 1995).
Slowakei
21. Besenov, okr. Nové Zámky : Hortfund mit
Eisenschüssel (?) überdeckt :(8 Gegenstände) :Geräte
für die Landwirtschaft und die Holzbearbeitung,
Wagen (?), Waffe. (Paulík 1970, 46-48, Abb. 14).
22. Gajary, okr. Bratislava-vidiek : Hortfund (11
Gegenstände) mit Geräten zur Landwirtschaft und
Holzbearbeitung, Trense ; Kontext gilt als problematisch. (Paulík 1970, 48-52, Abb. 16-17).
EIN SPÄTLATÈNEZEITLICHER WERKZEUG- UND GERÄTEHORT AUS DEM OSTKELTISCHEN GEBIET
Ungarn
23. Liptovská Mara, okr. Liptovská Sielnica:
Hortfund I mit 30 Gegenständen aus einer Siedlung :
Werkzeug zur Holzbearbeitung, Geräte für die
Landwirtschaft und den Haushalt. (Pieta 2000).
26. Petneháza : Hortfund mit Werkzeugen zur
Metallbearbeitung, Geräte für die Landwirtschaft.
(Müller 1983).
24. Plavecké Podhradé, Pohanská, okr. Senica :
Hortfund I/68 (16 Gegenstände) auf dem
Gipfel der Höhensiedlung : Herdgerät, Geräte
für die Holzbearbeitung, den Haushalt und die
Landwirtschaft, Wagen (?), Waffe ; Hortfund II/68
(5 Gegenstände) aus dem Eingangsbereich zur
Akropolis : Herdgerät, Werkzeug zur Metall- und
Holzbearbeitung. (Paulík 1970).
DANK
Ein herzlicher Dank geht an die Kollegen, mit
denen die Aspekte dieses Hortfundes diskutiert
werden konnten, besonders an die Restauratoren
S. Felten, F. Hummel und R. Lehnert sowie an die
Archäologen Ch. Clausing, M. Egg und Th. Schmidts
vom Römisch-Germanischen Zentralmuseum ;
M. Weber und H. Jung beschäftigten sich dankenswerterweise mit den Abbildungsvorlagen,
E. Bott mit dem Text. M. Berranger (Dijon) und
D. Bozic (Ljubljana) danke ich für Ratschläge und
die Beschaffung von Literatur, P. Jud (Bern) und
O.-H. Urban (Wien) für verschiedene Hinweise.
Polen
25. Wyciaze, pow. Krakow : Hortfund (5
Gegenstände) aus einer Latène-Siedlung mit :
Werkzeug zur Holzbearbeitung, Gerät für die
Landwirtschaft. (Rybová, Motyková 1983, 131).
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127
Les dépôts d'objets métalliques
aux âges du Fer en Suisse
Guerriers, femmes et artisans
Peter JUD
ÉTAT DE LA RECHERCHE
Pour le deuxième âge du Fer nous disposons d’un nombre plus important de dépôts.
L’inventaire de l’archéologue allemande Gabriele
Kurz (1995) contient environs 80 dépôts suisses, mais cette recherche exhaustive dans la
littérature archéologique doit être complétée par
une autre recherche systématique dans les réserves des musées ainsi que dans les archives des
services archéologiques. Pour la période de La
Tène nous recensons également les sites suivants :
Weesen (Schindler 1996), Basel-Gasfabrik Grube
217 (Furrer 1975), Basel-Gasfabrik Grube 284
(Spichtig 1995),Yverdon-les-Bains (Brunetti 2001),
Wauwil-Céramiques (Wyss 1984).
L’état de la recherche sur les dépôts métalliques en Suisse est très inégal pour les deux
périodes de l’âge du Fer. Pour l’époque hallstattienne nous ne disposons pas encore d’un
travail synthétique ou d’un inventaire systématique. Ces dépôts sont sans doute beaucoup plus
rares qu’à l’âge du Bronze, et il s’agit souvent
d’objets isolés. La moitié des poignards hallstattiens connus proviennent de lacs et de fleuves
(Sievers 1982), apparemment déposés volontairement. L'important dépôt d'Arbedo (Tessin)
du deuxième quart du Ve s. av. J.-C. annonce déjà
la transition Hallstatt final-La Tène ancienne.
(Schindler 1998).
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Âctes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne- : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 129-133 (Bibracte- ; 11).
PETER JUD
LES DÉPÔTS
UNE CONCEPTION D'ANTIQUAIRES
G. Kurz ne remet pas en question la conception
traditionnelle des dépôts, créée par les administrateurs des collections archéologiques c'est-à-dire :
une série d’objets, enfouit ou submergé ensemble
de façon intentionnelle. Selon Kurz (1995, p. 11)
même les objets isolés trouvés dans une situation
topographique remarquable (dans les eaux, sur
des cols, etc.) peuvent être considérés comme des
dépôts.
Cette notion traditionnelle des dépôts ne tient
pas compte de la nature des intentions qui se trouvent à l’origine des dépositions. Toutefois, le débat
sur l'intentionnalité de ces dépôts me semble
incontournable, et doit être intégré dans la définition des dépôts. Si ces intentions sont les mêmes
pour tous les dépôts, il est important de les décrire.
Si au contraire ces intentions sont multiples, il
faudrait développer des instruments scientifiques
pour séparer les différentes catégories de dépôts.
F. Müller (1993) a proposé une stratégie pour
identifier les manifestations religieuses en archéologie afin d’établir une “phénoménologie du
sacré”.
À partir de contextes sacrés incontestables
(sanctuaires gaulois avec continuité gallo-romaine)
il faudrait définir les similitudes topographiques et
les compositions de dépôts, en partant des sites
et dépôts connus pour arriver à ceux qui le sont
moins.
À peu près la moitié des dépôts suisse enregistrés par Kurz provient de lacs, de fleuves, de
sources ou de marais. Pour la plupart de ces
dépôts une récupération des objets immergés était
impossible, il ne s’agit donc pas de “cachettes”,
mais plus vraisemblablement de dépôts votifs, liés
à des cultes en rapport avec l'eau.
La situation topographique des dépôts terrestres est moins évidente, et pour beaucoup d'entre
eux elle reste énigmatique. Pour compléter nos
connaissances sur cette question il nous faut travailler encore plus en détail sur ces dépôts.
Toutefois, l'emplacement de certains dépôts
terrestres laisse peu de doutes sur l’intention
votive : sur le col de Splügen (Grisons) nous
avons découvert un lingot de fer dans un petit lac
de montagne, situé 200 m en dessus de la route
du col, à près de 2 300 m d’altitude (ASSPA 46,
1957, 115).
130
1. Les catégories d’objets dans les dépôts simples et complexes.
(P. Jud).
En ce qui concerne les objets et leur assemblage, nous ne distinguons pas de différences
entre les dépôts terrestres et ceux provenant des
eaux – à l’exception des Massenfunde, dont nous
parlerons par la suite.
Manifestement les dépôts ont des caractéristiques particulières, et regroupent un assemblage
identique d’objets (voir les catégories ill. 1). Plus de
90 % des dépôts découverts en Suisse ne contiennent que des objets métalliques, et très souvent
exclusivement fabriqués à partir d'un même métal.
Nous pouvons décrire ces ensembles comme des
“dépôts simples”.
Cependant, il faut être prudent, car la composition des dépôts peut également révéler l’effet
normatif des classifications archéologiques. Dans le
petit marais de Wauwil (Lucerne) fut trouvé à partir
de 1882 toute une série de dépôts (Wyss 1984) :
– deux monnaies en or en 1884, suivies de quelques-unes les années d'après ;
– une série d’objets en fer (ill. 2) en 1896 ;
– deux parties latérales d’un chenet (ill. 3) en 1904.
– quelques céramiques (ill. 4) en 1932 et 1952.
Parmi ces objets, seulement ceux en fer sont
souvent mentionnés dans la littérature archéologique comme le dépôt de Wauwil. Les autres
objets, surtout ceux en céramique, sont considérés comme des découvertes isolées. Le “dépôt”
d'objets en fer qui a été découverten 1896 par les
ouvriers de la tourbière, puis acheté par l’archéologue Heierli et enfin vendu au Musée national,
regroupe deux catégories d’objets : les outils ou
instruments et les restes de plusieurs chaudrons.
Notons que cette combinaison d'objets est assez
rare et peu donc paraître douteuse.
LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES AUX ÂGES DU FER EN SUISSE : GUERRIERS, FEMMES ET ARTISANS
2. Dépôt de Wauwil (LU). Objets en fer trouvé en 1896. (D'après Wyss 1984).
Les Massenfunde
Les Massenfunde, expression inventée au
milieu du XIXe s. pour décrire le dépôt de BernTiefenau, se distinguent des “dépôts simples” par
leur complexité. Nous les appelons donc des
“dépôts complexes”. Selon Kurz (1995, p. 87) les
dépôts de Bern-Tiefenau, de La Tène, de Port (Wyss,
Rey, Müller 2002), et de Brügg appartiennent à
cette catégorie. On peut y ajouter les ensembles
d’Arbedo (Tessin) et de Cornaux (Neuchâtel).
Felix Müller a concentré ses recherches sur les
Massenfunde qui regroupent une grande majorité
d’armes (Müller, Köenig 1990). Ce dernier a pu
démontrer qu’il s’agit de dépôts votifs, rassemblés
dans les environs des sanctuaires (Müller, Köenig
1990, 76 ff.). La présence d’armes détermine l'interprétation sociale des dépôts qui font partie « d’un
monde d'hommes de guerre et d'artisanat. Nous ne
rencontrons pratiquement aucune parure féminine
comparable à celles des sépultures contemporaines :
pas de bracelets en verre, de chaînes de ceinture, de
bagues » (Lüscher, Kaenel, Müller 1999, p. 275).
Cette interprétation exige que les centaines
de fibules trouvées sur le site de La Tène et dans
d’autres Massenfunde appartiennent exclusivement à des porteurs masculins, une hypothèse qui
ne nous semble peu convaiquante. De plus, ces
grands dépôts sont caractéristiques de l'apanage
féminin (Jud, à paraître). Par conséquent, il vaut
mieux examiner attentivement toutes les catégories d’objets, et pas seulement les armes.
En ce qui concerne la composition complexe
des Massenfunde, notons qu'ils ne contiennent
pas seulement un mélange de différentes catégories d’objets, mais aussi, de façon régulière, des
objets non-métalliques, cas rarissime pour les
“dépôts simples”. Nous nous demandons alors si
cette complexité peut être expliquée par la masse
d'objets réunie. Selon Zimmermann (1970, p. 74)
les Massenfunde sont composés d’une série de
petits “dépôts simples”, comme par exemple les
dépôts d’outils découverts à La Tène, enveloppée
dans un sac de cuir (Maier 1991, p. 416-417). Cette
simple explication demande à être validée (ill. 1).
Néanmoins, on voit très vite que la supposition de
Zimmermann est erronée : les “d épôts complexes”
regroupent des catégories d’objets qui ne forment
jamais, ou très rarement, des “dépôts simples”.
131
PETER JUD
4. Dépôt de Wauwil (Lucerne). Dépôt de céramique
(1932-1952). D'après Wyss 1984.
ments, les restes d’un chaudron, des fusaïoles, des
fragments de meules et de la céramique.
3. Dépôt de Wauwil (Lucerne). Chenet (1904).
D'après Wyss 1984.
Sanctuaires et Massenfunde
Suivons donc la piste des “sanctuaires”, proposée par Müller, sans nous limiter aux sanctuaires
avec beaucoup d’armes.
Le petit sanctuaire rural de WaldenburgGerstelfluh se trouve proche d’un col important
dans le Jura bâlois (Berger, Müller 1981). Parmi
les objets de La Tène finale on remarque des fibules (parfois cassées volontairement), des parures
féminines, des fragments d’armes, des outils/instru-
132
Le sanctuaire de Gütenberg-Balzers dans le
Lichtenstein, utilisé pendant toute l’époque de La
Tène, est plus connu que le précédent (Hild, von
Merhart 1933). Le caractère votif du mobilier est
confirmé par la présence de statuettes en bronze
et de tôles de cliquetis typiques. Ces objets étaient
déposés ensemble accompagnés de fibules, de parures en verre, de parures annuaires, et de céramique.
Les parallèles entre les ensembles d’objets
provenant de ces sanctuaires et des Massenfunde
sont évidentes : il y a tout d'abord la variété des
catégories, dont celles que nous ne trouvons pas
dans les “dépôts simples”, mais aussi l’assemblage
des objets métalliques et non-métalliques, et enfin
la présence indéniable d'objets faisant partie de
l'apanage féminin.
LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES AUX ÂGES DU FER EN SUISSE : GUERRIERS, FEMMES ET ARTISANS
cifiques, nous pourrions même constater que l’on
trouve dans les sanctuaires des groupes sociaux
qui n’étaient pas concernés par les rites des “dépôts
simples”. Cette observation et surtout valable pour
le groupe des femmes qui a laissé très peu de traces
dans les “dépôts simples”. En revanche, les objets
caractéristiques de l'apanage féminin, toujours présents dans les “dépôts complexes”, attestent qu'elles
fréquentaient ces sanctuaires, tout en contredisant
l'interprétation selon laquelle les sanctuaires étaient
réservés aux “rites des guerriers”.
Il est donc probable que les Massenfunde sont
des ensembles de mobilier votifs issus de sanctuaires laténiens, et qu’ils appartiennent à une
tradition différente que celle des “dépôts simples”,
plus ancienne. La diversité de compostion de ces
deux types de dépôts traduit manifestement un
changement de croyances, de rites, mais aussi probablement de divinités.
Si nous identifions les différentes catégories
d’offrandes avec des groupes de sacrificateurs spé-
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133
Dépôts d'objets métalliques du second âge du Fer
dans le nord-est de l'Italie et les Alpes orientales
Anne-Marie ADAM
Dans la partie alpine de l’Italie nord orientale,
et les régions environnantes, on n’a plus guère,
pour le second âge du Fer, d’attestation de dépôts
métalliques isolés, comme on en rencontre presque partout au cours des époques précédentes,
et encore dans certains autres secteurs à la phase
récente de l’âge du Fer.
La question du dépôt isolé peut être posée
seulement pour un nombre restreint de cas où les
éléments dominants du dépôt sont, en général, des
pièces d’armement, associées à des parures en
moindre quantité. Ainsi à Wenns, dans le Tyrol, ont
été retrouvés ensemble quatre objets dépourvus
de tout contexte : l’association d’une épée, d’un
bouclier, d’une hache-hallebarde et d’une fibule
évoque la composition d’une panoplie personnelle, correspondant à un individu (Zemmer-Planck
1992 ; Egg 2002, p. 970, fig. 4). La conservation d’éléments organiques adhérents aux fragments d’orle
du bouclier indique que les objets n’ont pas subi
l’action du feu.
Ce détail distingue la déposition de Wenns
d’une autre trouvaille, effectuée fortuitement
à Förk, Förker Laas, dans la vallée du Gail en
Carinthie. Pourtant la composition de ce dernier
ensemble pourrait évoquer à nouveau les panoplies personnelles, correspondant à un certain
nombre d’individus (au moins douze, d’après le
nombre d’objets découverts : casques, épées avec
leur système de fixation, pointes de lance, boucliers,
quelques fibules), et l’homogénéité chronologique
de la plus grande partie de ces objets (attribuables
à La Tène B2) semblerait confirmer la réalité d’un
dépôt effectué collectivement, et en une unique
occasion, par un groupe de guerriers. Des fouilles
effectuées a posteriori sur les lieux et dans l’environnement de cette découverte clandestine, n’ont,
en effet, livré aucun indice se rapportant à un éventuel contexte aménagé (Fuchs 1991), ce qui devrait
indiquer le dépôt isolé, plutôt que la déposition
effectuée au sein d’un sanctuaire.
Pourtant la plupart de ces objets portent la trace
d’un contact avec la flamme, et donc les stigmates d’un probable “sacrifice” par le feu (Egg 2002,
p. 968) qui les rapprocheraient plutôt des restes
trouvés dans les dépôts des aires cultuelles (infra).
L’interprétation la plus souvent avancée est donc
celle d’un dépôt secondaire (une sorte de favissa ?)
attenante à un sanctuaire (Gleirscher 2001, p. 216).
En bordure de la zone alpine, dans l’extrême
nord-est de l’Italie, d’autres découvertes récentes
d’armes laténiennes plus ou moins erratiques ont
été attribuées également à des épanchements de
mobilier votif, à partir de zones cultuelles englobées
dans des habitats, mais dont l’emplacement n’a
pas été retrouvé : le meilleur exemple est celui du
Monte Sorantri, à Raveo dans le Frioul (Villa 2001 ;
Righi 2001).
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p.135-145 (Bibracte ; 11).
ANNE-MARIE ADAM
LES BRANDOPFERPLÄTZE (“BÛCHER VOTIF”)
La notion centrale de notre réflexion est
donc celle de Brandopferplätze (“bûcher votif”) :
cette notion, qui ne recouvre d’ailleurs pas une
réalité complètement homogène, définit la forme
la plus courante d’espace religieux dans les
régions alpines à l’âge du Fer. C’est une aire
cultuelle dont le vestige essentiel consiste en
une couche (épaisse de plusieurs dizaines de
centimètres) de cendres et charbons de bois,
mêlés à des céramiques très fragmentées, des
ossements animaux et humains, des éléments
métalliques, entiers ou fragmentaires ; l’ensemble
de ce mobilier porte les traces d’un passage au
feu ou au moins de proximité avec une flamme.
Au-delà de cette définition globale, le contexte
dans lequel s’inscrivent ces pratiques est variable : le “bûcher votif” peut être installé dans un
lieu isolé, et souvent en un point remarquable
du paysage, comme au sommet d’une hauteur,
ou au contraire se trouver contigu à un habitat.
Beaucoup de ces lieux de culte ont en commun
l’absence (du moins apparente, en l’état actuel
de la recherche) de structures construites, mais
ce caractère n’est pas généralisable non plus, car
des vestiges de bâtiments semblent accompagner
certaines de ces zones de cendres et charbons. La
distinction entre le “bûcher votif” et le sanctuaire
(dans un sens plus architectural du terme) n’est
donc pas toujours facile à opérer.
Sur le plan culturel, l’aire d’extension géographique du phénomène correspond principalement
aux limites de diffusion de la culture rhétique, identifiables, au second âge du Fer, à celles du “Groupe
de Fritzens-Sanzeno”, entre le cours supérieur du
Rhin, les Pré-alpes bavaroises et la haute vallée
de l’Inn, au nord, et les confins de l’aire culturelle
Vénète au sud et à l’est, en Italie nord orientale
(Gleirscher 1991). Mais, plus largement, des manifestations religieuses de cette nature sont connues
dans l’ensemble de la zone alpine centrale et
orientale, ainsi que sur les marges du massif.
Différentes catégories d'objets
Les ensembles mobiliers provenant de ces
zones de bûcher se caractérisent eux aussi par
leur extrême variabilité : les dépôts ne comportent
pas exclusivement des objets métalliques, puisque
la céramique est très présente également (le plus
souvent en très petits fragments), mais des quantités importantes de métal ont néanmoins été
136
déposées, et toutes les catégories fonctionnelles
sont représentées. Il s’agit alors d’offrandes “par
destination”, parmi lesquelles les objets de parure
(perles et anneaux, bracelets, fibules) constituent
souvent les séries les plus nombreuses, à côté des
outils et des armes, eux-mêmes présents en proportion variable, et recouvrant, pour ce qui est des
outils un large éventail de fonctions (couteaux,
instruments pour le feu et la cuisson, outillage agricole, outils de métallurgistes, etc..) (exemple de
Ortisei, Col de Flam, dans le Haut-Adige : PrinothFornwagner 1993). Outils et armes peuvent être
brûlés, mais de façon moins systématique que
dans le cas des parures, et ils sont souvent aussi
moins fragmentés.
Les objets à usage exclusivement votif, ou offrandes “par nature”, sont également de nature variée :
plaquettes anthropomorphes, armes miniatures,
notamment des “boucliers” votifs en tôle de bronze
(voir par exemple le mobilier, récemment présenté,
qui provient du sanctuaire du Piller Sattel, à Fließ,
près de Landeck, dans le Tyrol : Tschurtschenthaler,
Wein 2002, p. 657-659, fig. 10).
La longue durée de fréquentation de ces aires
sacrées introduit un facteur de variabilité supplémentaire, car la nature des offrandes n’est pas
identique d’une période à l’autre : la principale
innovation de l’époque romaine, pour les bûchers
votifs, dont beaucoup perdurent après la conquête,
comme pour les autres types de sanctuaires, est
l’introduction massive des offrandes monétaires
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, p. 196). Le
dépôt des fibules demeure aussi une pratique courante, en revanche les autres objets métalliques
(armes et outils) apparaissent beaucoup moins
fréquemment après la fin de l’âge du Fer.
La récente publication d’une fouille conduite
entre 1984 et 1986 sur le Rungger Egg, à Seis-Siusi,
dans le Haut-Adige, nous permet des considérations
d’ordre statistique, compte tenu de l’exhaustivité du
travail de terrain. Beaucoup d’autres ensembles, en
effet, comme celui de Ortisei, Col de Flam, déjà cité,
résultent plus de ramassages déjà anciens, que de
véritables fouilles systématiques, et ne permettent
donc pas de raisonner précisément à partir des
proportions respectives des différentes catégories
d’objets déposés.
Le tableau suivant (ill. 1) recense les résultats
d’un comptage rapide, effectué à partir du
catalogue présenté par P. Gleirscher (Gleirscher,
DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LE NORD-EST DE L'ITALIE ET LES ALPES ORIENTALES
Nothdurfter, Schubert 2002, p. 36-92) : il réunit les
objets métalliques (bronze et fer),ainsi que d’autres
éléments de parure, non métalliques (perles en
verre), et les “amulettes”: vingt-sept astragales de
différents animaux, et éventuellement les outils
et éclats de silex (pour un total de vingt-quatre
pièces), peut-être récupérés et recyclés comme
amulettes, selon un usage fréquemment attesté,
de l’âge du Fer au début de l’époque médiévale
(mais plutôt, il est vrai, dans des sépultures).
Enfin, le recensement inclut quelque quarantecinq poids de métier à tisser en terre cuite (les
fusaïoles, en revanche, ne sont pas présentes sur
le site). Il faut, bien entendu, garder à l’esprit que
les chiffres ici rassemblés ne résultent pas d’un
comptage précis, mais sont extraits des indications
(parfois imprécises sur ce point) fournies par
la publication. Nous pensons toutefois qu’ils
reflètent les proportions respectives des différentes
catégories d’objets, et qu’ils restent donc utilisables
pour une réflexion de type statistique sur les
pratiques de déposition (ill. 2).
Le reste des dépôts est constitué de céramique
très fragmentaire et pour laquelle aucune indication de NMI n’est fournie. Ce mobilier céramique
représente un poids total de 1900 kg environ
et réunit les principaux types caractéristiques
du groupe “Fritzens-Sanzeno”, avec une prédominance des coupes (coupes profondes à profil
droit de “type Fritzens” et coupes à profil en “S” de
“type Sanzeno”) et des gobelets à anse, déclinés en
plusieurs séries typologiques (Gleirscher, Nothdurfter,
Schubert 2002, p. 111-119). Ces catégories réunies
constituent environ les deux tiers de la céramique retrouvée lors des fouilles et reflètent donc
une spécialisation fonctionnelle marquée, en
relation avec les pratiques de consommation de
boisson et/ou les libations sur le lieu sacré.
Enfin, en dehors des artefacts dont les fragments
ont été retrouvés dans et autour du bûcher, il faut
signaler la présence de quelque 18 kg d’ossements
calcinés, dont les vestiges de faune ne constituent
pas l’essentiel (pour certains prélèvements, pas plus
de 10 % de la masse totale des ossements), mais sont
largement devancés par les restes humains, ce qui
ne contribue évidemment pas à éclaircir la nature
des rituels, certainement complexes et ambivalents,
qui étaient pratiqués là.
1. Tableau de comptage des principales catégories d'objets
présentes dans le “bûcher votif” de Rungger Egg, Seis/Siusi
(Haut-Adige).
2. Répartition en pourcentages des principales
catégories d'objets présentes dans le “bûcher votif”
de Rungger Egg, Seis/Siusi (Haut-Adige).
137
ANNE-MARIE ADAM
S’il est donc tout à fait hasardeux de prétendre
caractériser ces cultes, l’inventaire des catégories
d’objets présentes à Rungger Egg paraît mettre en
évidence, tous matériaux confondus, une prédominance numérique des dépôts qui se rattachent
à la “sphère féminine”: objets de parure, ustensiles
liés aux activités textiles (aiguilles à chas et poids
de métier), et peut-être également une partie, au
moins, des couteaux (que l’on peut interpréter
comme des ustensiles de la vie domestique,
mais aussi, il est vrai, comme les instruments
de pratiques sacrificielles : Gleirscher, Nothdurfter,
Schubert 2002, p. 86 ; et infra).
La fragmentation des objets
L’étude des objets métalliques a mis en évidence, comme pour les récipients, un fort taux
de fragmentation pour certaines catégories de
parures, notamment les bracelets et les fibules.
Compte tenu de leur petite taille, cette notion de
fragmentation n’est sans doute pas pertinente
pour d’autres types de parures, très abondamment
représentées ici, comme les anneaux. En revanche,
certaines séries d’ustensiles, comme les poinçons
et alênes, ainsi que l’armement, paraissent moins
fragmentés. La catégorie des couteaux est représentée par quelques exemplaires entiers et un
certain nombre de fragments, qui pourraient résulter, au moins en partie, de cassures volontaires.
Ce processus de cassure volontaire est bien
attesté, en tout cas, pour les fibules, souvent privées de leur ressort, ou brisées au niveau du pied,
voire des deux côtés à la fois. Pour les fibules
“Certosa” notamment, la cassure est parfois visible
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, p. 45-46)
et le nombre de pieds ou d’arcs retrouvés isolés
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, pl. 22-24)
n’est pas lié uniquement aux points de fragilité
naturels de ce type d’objets. Pour les autres catégories de fibules, les modes de destruction sont
plus variés, mais on peut noter aussi la répétition
de certains gestes : par exemple, sur un groupe
de fibules de “schéma La Tène moyenne”, toutes privées de leur pied (Gleirscher, Nothdurfter,
Schubert 2002, pl. 28). De même, des modules
récurrents apparaissent pour les restes de chaînettes (Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, pl.
30-31), tout comme pour les tronçons de bracelets
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, pl. 38 et 40,
par exemple).
138
Stratigraphie horizontale
Les différences de traitement suggèrent que
tous les objets présents dans le dépôt ne jouaient
certainement pas le même rôle dans le rituel. La
prise en compte de la stratigraphie horizontale
du gisement de Rungger Egg permet d’étudier la
position de ces différentes catégories, par rapport
aux limites de l’épandage de cendres et charbons
qui marque le cœur du dispositif cultuel. L’analyse
comparative met en évidence plusieurs cas de
répartition spatiale (ill. 3) :
− la céramique et les os calcinés sont présents
sur l’ensemble du “bûcher”, même si la concentration particulière des fragments de récipients
dans la partie méridionale de celui-ci, et non
au cœur de la zone charbonneuse, distingue
un peu les deux catégories et témoigne sans
doute de gestes spécifiques, liés à l’emploi
de la céramique dans les pratiques rituelles
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, p. 125126).
− les objets de parure (les anneaux surtout, mais
aussi les fibules) sont présents également dans
la partie centrale de l’épandage, et répartis de
façon relativement régulière.
− parmi l’instrumentum, les objets touchant à ce
que nous avons appelé la “sphère féminine”,
c’est-à-dire ici le travail textile (poids de métier
et aiguilles), se caractérisent par une moindre
densité et un éparpillement plus important,
mais limité également à la zone charbonneuse,
avec une distribution plus ou moins régulière.
− en revanche, les armes témoignent d’une
répartition totalement différente : absentes du
cœur de l’épandage charbonneux, elles sont
regroupées sur sa périphérie sud et ouest, et
présentes aussi à l’extérieur de cette zone, vers
l’ouest et le nord.
Les couteaux semblent caractérisés par une
distribution intermédiaire entre les deux dernières catégories : analogue, pour l’essentiel, à
la distribution des aiguilles, elle s’en démarque
toutefois par la présence de plusieurs exemplaires
en dehors de la zone de “bûcher”, vers le nord.
Faut-il voir dans cette répartition, à la fois interne
et externe à l’épandage charbonneux, le signe
d’une ambivalence fonctionnelle des couteaux,
qui peuvent être, selon leur type, liés à la sphère
domestique et quotidienne, à celle de la chasse
(et donc de l’armement), ou encore du sacrifice
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, p. 92) ?
DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LE NORD-EST DE L'ITALIE ET LES ALPES ORIENTALES
3. Schéma de répartition spatiale de quelques catégories d'objets à Rungger Egg (d'après Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, p. 46,
66, 79, 80, 82, 126) - a : Céramique ; b : ossements calcinés ; c et d : objets liés à la parure (c : anneaux en bronze/d : fibules Certosa) ; e :
poids de métier à tisser ; f : aiguilles à chas ; g : armes ; h : couteaux.
139
ANNE-MARIE ADAM
La disposition particulière des armes, le fait
qu’elles apparaissent en quantité limitée, par rapport à toutes les autres catégories, pourrait inciter
à leur attribuer une fonction particulière dans
l’aire cultuelle, autour de laquelle elles montaient
peut-être “la garde”, pour en assurer symboliquement la protection (Gleirscher, Nothdurfter,
Schubert 2002, p. 92).
LE CAS PARTICULIER DE SANZENO
INTERPRÉTATIONS
Si l’extrême diversité des situations, en terme
de structures et de dépôts, rend, nous l’avons vue,
la caractérisation de certains gisements difficile,
il est quelques cas dont l’interprétation est plus
ardue encore, et en tout premier lieu celui des
découvertes effectuées en abondance, depuis plus
d’un siècle, sur le plateau de Sanzeno, dans la
Val di Non (Trentin). Les conditions particulières
de l’exploration de ce site contribuent pour une
large part à expliquer les difficultés que nous
rencontrons à comprendre la nature même de ces
découvertes.
La pointe nord de la terrasse (secteur des
Casalini) a connu, dès la fin du XIXe s., une intense
activité de ramassage, les paysans qui exploitaient
ce secteur vendant, principalement au musée
d’Innsbruck, le fruit de leurs découvertes fortuites,
et identifiant du même coup un certain nombre
de bâtiments à murs de pierres, que F.-H.Von Wieser,
alors directeur du Museum Ferdinandeum, fit figurer
entre 1899 et 1901 sur un plan schématique du secteur des H Casalini (Nothdurfter 1979, p. 6, fig. 2).
À la suite des brefs sondages qu’il réalisa, des
fouilles régulières et plus longues, menées de
façon discontinue, en 1926 par E. Ghislanzoni, puis
entre 1950 et 1955 par G. Fogolari (Fogolari 1960),
permirent de dresser les plans de quelques grands
bâtiments, et de conforter l’idée d’une agglomération organisée et, au moins dans le secteur des
Casalini, plutôt dense (Adam 2004, p. 45-47).
Dans les intervalles, entre la fin du XIXe et le
milieu du XXe s., un certain nombre de découvertes
sporadiques affluèrent aussi dans diverses collections et, de là, au Musée de Trente. Au cours des
vingt dernières années, plusieurs opérations liées
à des travaux de construction ont touché surtout
la partie centrale de la terrasse, et non plus les
Casalini, et, si elles ont permis de confirmer l’éten-
140
due de l’habitat, organisé dès le second âge du
Fer selon un schéma urbanistique, elles sont loin
d’avoir livré les quantités de matériels, en particulier métalliques, produites depuis des décennies
par le secteur nord, et tout à fait inhabituelles pour
une zone d’habitat.
La publication des objets en fer de Sanzeno
par H. Nothdurfter (Nothdurfter 1979) fournit un
inventaire de 1 448 pièces, où toutes les catégories
d’outils et d’ustensiles sont représentées, et qui
servira principalement de base à notre réflexion. Il
faut y ajouter plusieurs centaines de fibules, dont
la typo-chronologie couvre une longue période,
du Hallstatt à l’époque romaine, d’autres parures
et divers objets en bronze, dont des récipients, des
ex-voto zoomorphes et anthropomorphes (avec
inscriptions) et plusieurs statuettes en bronze. Une
fraction au moins de cet abondant mobilier est
donc incontestablement de nature cultuelle, ce
qui a conduit certains auteurs à conclure à une
fonction sacrée de tout ou partie des bâtiments
des Casalini, et plus particulièrement au cours des
dernières années, à mesure que progressait la connaissance des aires cultuelles en milieu alpin.
Malgré une organisation totalement différente
(notamment la présence d’un grand nombre de
constructions), ce secteur de l’agglomération, par
les pratiques religieuses qui s’y déroulaient, offrirait
donc de fortes parentés avec les Brandopferplätze
déjà évoqués, à travers l’abondance et la variété
des dépôts d’objets métalliques, et également le
fait que beaucoup d’entre eux présentent les stigmates d’une intense exposition au feu (Gleirscher,
Nothdurfter, Schubert 2002, p. 192 et 251 ; Egg 2002,
p. 970 ; Nothdurfter 2002, p. 1131-1 136). Par rapport
aux “bûchers votifs”, on note toutefois deux différences qui peuvent avoir leur importance : d’une
part, les traces d’exposition au feu sur les objets
métalliques ne sont pas systématiques ; elles concernent surtout certains lots d’objets en bronze et
de façon plus occasionnelle l’instrumentum en fer.
D’autre part, la quantité de céramiques retrouvées
au cours des fouilles est faible, selon les relations
publiées.
Pour toutes les découvertes anciennes, les
données nous manquent, quant à d’éventuels
regroupements d’objets, et quant à leur situation à
l’intérieur ou éventuellement à l’extérieur de bâtiments. Mais il n’apparaît pas, en tout cas, d’après
les sources dont nous pouvons disposer (et qui ont
été à plusieurs reprises relues par H. Nothdurfter :
DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LE NORD-EST DE L'ITALIE ET LES ALPES ORIENTALES
Nothdurfter 1979, p. 4-7 et 2002, p. 1132), que la
grosse masse des objets découverts ait concerné
seulement des endroits précis, que l’on pourrait
considérer comme des lieux de culte à l’intérieur
d’un habitat. On a plutôt l’impression que cette
abondance de matériels se trouvait assez largement répartie dans les vingt-neuf bâtiments repérés
depuis la fin du XIXe ., et que, par exemple, les quatre
pièces contiguës, fouillées dans les années 1950
étaient toutes richement pourvues.
En revanche, il semble que le lot des ex-voto
inscrits, trouvés de façon fortuite à plusieurs reprises entre 1947 et 1949, provienne, lui, d’un seul
et même endroit, qui se situe un peu au nord
des grandes maisons fouillées par G. Fogolari, et
où cette dernière propose de localiser un petit
sanctuaire (Fogolari 1960, p. 297-303 ; Fogolari 1975,
p. 150-151).
Les fouilles de G. Fogolari ont fait l’objet d’une
description en apparence plus précise que les
interventions antérieures. Malheureusement, l’interprétation des stratigraphies présentées est difficile
et ne permet pas de résoudre la question de la
fonction des pièces ou du rôle des objets qui y ont
été découverts partout en grand nombre.
Pour la partie nord de la zone de fouille (bâtiments A, C, D, ill. 4), sont décrits trois niveaux, entre
l’humus et le sol en argile battue : immédiatement
sous l’humus, une couche de destruction de l’habitat (avec décombres de murs et poutres calcinées),
puis un niveau de terre plus noire qui comporte
l’essentiel du mobilier, enfin une fine couche
“brûlée”. Dans la pièce H (ill. 4), ont été repérés
deux niveaux de terre noire, riches en mobilier
métallique, séparés par un remblai ou couche de
destruction. La liste détaillée du matériel provenant
de chaque espace, avec l’indication précise de sa
localisation sur le plan général (ill. 4), n'est pas d’un
grand secours pour comprendre le fonctionnement
de ces pièces, même si on remarque que certains
groupes d’objets semblent avoir été trouvés le long
des parois. Dans l’angle méridional de l’espace C,
ont été retrouvées des quantités importantes de
céréales carbonisées.
4. Sanzeno (Trentin), Casalini : Plan de fouilles de G. Fogolari, avec emplacement du mobilier (d'après Fogolari 1960, ta. A).
141
ANNE-MARIE ADAM
Lors des fouilles précédentes (dans un secteur
immédiatement adjacent, côté sud), E. Ghislanzoni
signale, quant à lui, quelques indices d’activité
métallurgique (Ghislanzoni 1931, p. 469).
À la lecture de ces comptes rendus de fouilles,
rien ne permet donc d’aller au-delà de l’interprétation proposée successivement par les responsables
des fouilles : celle d’un habitat d’une richesse inusitée, dont les maisons, conformes par leur aspect
à ce que l’on connaît, par ailleurs, de l’architecture
domestique en milieu rhétique (sur ce point, également : Migliavacca 1993), ont connu deux, voire
trois phases de (re)construction, à la suite d’une
destruction violente par le feu.
Un mobilier varié
Il est donc plus prudent de reconnaître que
nous sommes, à propos de ce site, dans une
impasse et que nous devons prendre acte du
caractère exceptionnel de ces découvertes métalliques, sans pouvoir expliquer de façon totalement
satisfaisante leur présence.
L’échantillonnage des outils correspond à tous
les types d’activité : on trouve ainsi des instruments
divers pour le travail de la pierre, du cuir, du bois
(environ quatre-vingt pièces), des métaux (environ cinquante), une centaine d’outils agricoles,
des pièces de harnachement et de charronnerie,
des ustensiles pour la cuisson et le feu (vingt-quatre broches à rôtir, sept fourchettes, etc.), et toutes
sortes d’éléments de quincaillerie.
En dehors du problème posé par leur nombre,
tous ces objets trouvent naturellement leur place
dans une agglomération. Ils résultent certainement, pour une grande partie d’entre eux, d’une
production régionale, voire locale (Nothdurfter
1979, p. 98-103 ; Gleirscher, Nothdurfter 1992), mais
il est vrai que cela n’indique rien quant à leur destination finale, dans le cadre d’un habitat ou d’un
ensemble cultuel.
Le nombre important des pièces d’armement
est, certes, plus troublant, puisque le site a fourni
35 pointes, de lance ou pilum, et 20 talons, 6 épées
laténiennes au minimum et un gladius romain,
une dizaine de casques de type Negau et à bouton,
et trois fragments de boucliers (dont un umbo de
“type Mokronog”).
142
Parmi les casques, un exemplaire à bouton a
conservé, fixé dans son couvre-nuque, un clou de
suspension (Nothdurfter 1979, n° 1275, pl. 76) : il a
probablement terminé accroché à une paroi, et on
a proposé de le placer dans la catégorie des “trophées”. Mais, même dans ce cas, l’appartenance
finale à un sanctuaire n’est peut-être pas la seule
hypothèse envisageable (Egg 2002, p. 970-971).
Plusieurs entraves (et serrures d’entraves)
constituent aussi des objets rares dans un habitat ordinaire (Nothdurfter 1979, n° 1282-1289, pl.
77-78). Pourtant, elles ne sont pas totalement
inconnues dans des fermes ou des agglomérations, par exemple en Gaule, à la fin de l’âge du
Fer, et ne paraissent pas non plus entretenir une
relation privilégiée avec des zones cultuelles.
Enfin, une catégorie bien représentée parmi
ce mobilier est celle des grandes clés en arc de
cercle, que l’on dénomme justement “clés de
type Sanzeno” (ill. 5). Quarante-deux exemplaires ont été retrouvés sur le site, dont cinq en
bronze et un modèle réduit, en bronze également.
La fonction cultuelle, ou du moins symbolique,
de ces clés a été reconnue par la plupart des
auteurs et réexaminée en détail par H. Nothdurfter
(Nothdurfter 2002), qui propose d’associer aux
clés elles-mêmes de courtes tiges en bois de cerf,
légèrement arquées et souvent gravées d’une
inscription, considérées comme des imitations de
poignées de clé (ill. 6).
Ces pièces en bois de cervidé, dont une
dizaine a été trouvée à Sanzeno, se rapprochent,
en tout cas, par leur forme, de certaines poignées
métalliques (ill. 5a) et des garnitures en os (ou
bois) qui complétaient les clés métalliques et qui
sont parfois conservées (ill. 5b et d).
L'exemple de Montesei di Serso
L’association entre clés de métal et bois de cerf
inscrits se retrouve sur d’autres sites de la région,
par exemple dans l’habitat de hauteur de Montesei
di Serso (commune de Pergine Valsugana, à l’est
de Trente). Dans l’une des maisons de la terrasse
supérieure, a été découvert une dizaine de ces
ex-voto et deux clés, mais aussi une série d’autres
objets métalliques (une épée, une houe, un chenet,
plusieurs poignées en fer et des fibules), ainsi que
des galets gravés de signes, auxquels on attribue
un usage divinatoire (Perini 1978, p. 58-59 et 71-80).
DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LE NORD-EST DE L'ITALIE ET LES ALPES ORIENTALES
5. Clés de “type Sanzeno” (d'après Nothdurfter 1979, pl. 54 et 59 et Preistoria Alpina, 17, 1981, p. 40). a : Clé à poignée tubulaire métallique
(de Sanzeno) ; b : poignée de clé en os (de Sanzeno) ; c et d : Clés à poignée rapportée, os ou bois de cerf de Sanzeno et Rotzo.
143
ANNE-MARIE ADAM
p. 245 ; Nothdurfter 2002, p. 1139). On constate
en tout cas que, sur le plan architectural, elle se
démarque des bâtiments voisins, par sa taille et la
complexité de son plan.
Nature du site des Casalini ?
Ces parallèles ont incité H. Nothdurfter
(Nothdurfter 2002, p. 1136 et 1143), après plusieurs
autres, à affirmer le caractère sacré des bâtiments
de Sanzeno (alors qu’il avait interprété les vestiges des Casalini comme ceux d’un habitat, dans
sa publication de 1979). Il nous propose ainsi
la vision d’une succession de lieux de culte ou
“trésors” (Schatzhäuser), alternant avec d’autres
constructions, vouées aux services du sanctuaire,
notamment des ateliers où l’on fabriquait les
ex-voto. Faut-il retenir cette image quelque peu “delphienne” du fonctionnement d’un site, qui aurait
comporté aussi, de toute façon, une agglomération,
contiguë à la zone sacrée, comme l’ont montré les
fouilles des autres secteurs de la terrasse ?
6. Ex-voto inscrits en bois de cervidé (symbolisant des poignées
de clé ?). Provenance : Magrè ; d'après Fogolari 1975, pl. 96, sans
échelle).
Compte tenu de l’aspect architectural de la
zone des Casalini,de l’intégration de ces bâtiments,
par leur orientation, dans la trame de l’habitat, il
est sans doute préférable de ne pas dénier tout à
fait à ce quartier une fonction résidentielle. Mais
on peut supposer que l’habitat y était réservé à
une certaine couche de la population, qui exerçait là des prérogatives économiques, politiques
(et sans doute religieuses), en accord avec son
statut aristocratique. La “consommation”, réelle
et symbolique, d’abondantes quantités de métal
trouve parfaitement sa place dans ce cadre.
À l’extérieur de ce bâtiment, une zone de cendres et charbons de bois, riche en fragments de
céramique, évoque des célébrations rituelles proches de celles pratiquées sur les Brandopferplätze.
La “maison 2” de Montesei est donc le plus
souvent interprétée comme un bâtiment à fonction particulière, communautaire et/ou cultuelle
(Gleirscher, Nothdurfter, Schubert 2002, n° 126,
144
DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER DANS LE NORD-EST DE L'ITALIE ET LES ALPES ORIENTALES
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145
Iron deposition and its significance
in pre-Roman Britain
Colin HASELGROVE, Richard HINGLEY
This paper will reassess and review the overall
character and significance of iron deposition in
pre-Roman Britain, building on previous studies
that have examined specific aspects of the topic.
It has long been apparent that the surviving
assemblage of British Iron Age ironwork is highly
selective and conditioned by the infrequency with
which iron entered the record during much of the
period (Manning 1981).
Paradoxically, whilst the onset of the Iron
Age is marked by the abrupt cessation of largescale bronze hoarding in the decades just before
and after 800 BC and by concomitant changes
in the settlement pattern and material culture
(Needham 2005), these developments do not
coincide with the commencement of large-scale
iron deposition. Indeed, but for a certain number of late Hallstatt and early La Tène weapons
found in the Thames and other rivers in eastern
England and the occurrence of smithing slag
on settlement sites, there is remarkably little evidence for the introduction of the new metal for
another five centuries.
The chronological focus of our study reflects
this ; almost all the material with which we are
concerned here belongs to the later Iron Age, as
the period from the 4th or 3rd century BC to the
mid 1st century AD is usually termed, although we
will also include a small number of large ironwork
hoards deposited in southern Scotland after the
Romans had permanently occupied southern
Britain. Ironwork deposition continues during
the early Roman period in Britain, although the
contexts in which objects were deposited often
differed from those used during the Iron Age
(Hingley forthcoming).
In keeping with recent research on Iron Age
Britain, we subscribe to the idea that much of the
Iron Age metalwork found on settlements and
elsewhere was deliberately deposited for what we
might loosely call ritual or religious motives ; the
proportion lost accidentally was possibly quite
small (Gwilt, Haselgrove 1997 ; Haselgrove et al.
2001 ; Hill 1995 ; Hingley 1990). This is apparent
both from the contexts in which the material is
found, and from the structured character of the
individual deposits. It follows that demonstrating
that objects of a specific type or made in a particular raw material – in this case, iron – were treated
in broadly equivalent ways over a wide area may
bring us closer to uncovering the structuring
principles underlying such depositional practices,
whilst the exact nature of the similarities and differences that existed between regional communities
may well provide us with further insights into the
existence of any core religious beliefs or ideology
uniting different Iron Age societies.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 147-163 (Bibracte ; 11).
COLIN HASELGROVE, RICHARD HINGLEY
In this paper, we will focus first on the hoarding of iron “currency bars” as this has recently
been the subject of a comprehensive study by
one of us (Hingley 1990 ; 2005). We will then
examine other types of ironwork deposit in more
detail, not just those recognised as hoards but
groups of iron objects of any kind found together
in a particular archaeological context. We will
also consider individual and small-scale finds of
iron on settlements, as these seem us an integral
part of the overall picture (see Hingley forthcoming for additional discussion).
The paper concludes with a discussion of the
significance of iron deposition in Iron Age Britain,
and what this suggests about the underlying meaning and significance of this metal to its users.
First, however, we need to explain the methodology that we have followed.
METHODOLOGY
We should emphasise that the information
used in this study is partial. It has been collected
from both published and unpublished sources,
both by us and by others, and at least in some cases
in the course of research directed to other ends. In
the case of larger collections of Iron Age ironwork,
we believe that our data set is fairly comprehensive,
and we have directed our systematic analysis primarily to that material in the expectation that the
patterns thus uncovered will be reasonably robust.
We have not attempted to deal with single finds or
small deposits in the same way, as there is simply
too much material. In order to circumvent this issue
and as a convenient cut-off for the purposes of this
paper, we have therefore adopted a minimum of
five associated iron objects to qualify as a “group”.
This raises a series of conceptual and practical
problems. As several authors point out, the distinction between a single object and larger groups of
finds is often entirely arbitrary (Fitzpatrick 1984 ;
Haselgrove 1987 ; Hingley 1990). For instance, both
in Britain and on the Continent, it is clear that
many single gold coins, or groups of two or three
coins, display the same depositional patterns as the
much larger collections of coins for which the term
“hoard” is habitually reserved (Haselgrove 1987).
Rather, these form a continuum, in which – as
we might expect – small groups and single coins
148
far outnumber larger deposits, which are altogether
less common. An individual object may represent a
“hoard” then, just as much as a group of similar
objects, depending on the context and the motives
behind their deposition ; and this evidently applies
as much to other potentially valuable items such as
torcs or iron currency bars, swords or ploughshares,
as it does to coins. Size is relevant only inasmuch as
the larger deposits, unsurprisingly, are more variable
in composition, and tend to be selected for special
attention in a way that smaller finds are not.
A further difficulty arises that, whilst with some
“closed” groups and “hoards” we can be fairly sure
of their original size and composition (e.g. objects
placed in a cauldron or coins in a hollow flint),
this is usually not the case. Much of our material
derives from older excavations and casual finds
that were, at best, indifferently recorded, leaving
open the possibility that further objects were
missed, or their stratigraphic context (if any)
misunderstood. How in the absence of detailed
records, for instance, do we distinguish a deposit
of five objects placed together in a pit from a
group of five artefacts that have become accidentally associated, or be certain whether a stray find
of three objects is complete or came from a larger
group of which the rest was not recovered ? Even
in the case of well-recorded information, post
depositional factors may also have led objects to
become scattered and disassociated. As we shall
see below, the fact that many single finds and
small deposits of iron objects display the same
tendencies as larger deposits provides our best
justification for arbitrarily adopting a minimum
group size for systematic study as a way of reducing what would otherwise be an enormous data
set to manageable proportions.
As an extreme example of the difficulties
posed by the poor quality of much older data,
we can contrast the large ironwork collections
recovered in uncontrolled XIXth century investigations at hillforts like Bigberry (Kent) or Hunsbury
(Northamptonshire) with the equally substantial
assemblage of ironwork recovered through the
controlled excavation of just over half the interior
of the hillfort at Danebury (Hampshire). At the
first two sites, we do not know what was found
together, but the quality and quantity of material
has led most scholars to assume that the majority of objects came from one or more hoards.
However at Danebury, a significant proportion of
the ironwork was actually found singly, although
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
there are also some larger deposits (Cunliffe,
Poole 1991 ; note 1). Despite most of the Danebury
objects occurring singly, the artefacts themselves
appear to be highly structured to certain areas
of the sites and particular types of features (see
below).
Both for this reason, and because for many
people the term “hoard” encompasses ideas of
concealment for safekeeping and eventual recovery that may well be inappropriate to the Iron Age,
we will avoid using the word here. The context of
many Iron Age metalwork ‘hoards’ (e.g. bogs, rivers,
storage pits) and/or treatment meted out to them
before burial (e.g. deliberate breakage, bending,
cut marks) strongly suggests that they were never
intended to be recovered, although in other cases
there is greater ambiguity (from an Anglophone
perspective, the French word ‘depot’ seems much
less value-laden with regard to the motivation of
the depositor(s) and thus much better suited to
Iron Age studies, although in practice it often has
the same overtones as “hoard”).
In a similar vein, we need to be aware that
some such deposits of ironwork were evidently
formed at a single point in time, whilst others
may represent collections that accumulated over
longer periods as a result of repeated acts of
deposition. Equally, groups deposited at a specific
point in time can include curated objects of some
antiquity, although few can compete with the find
of more than 500 bronze objects covering the
whole of the Bronze Age and much of the Iron
Age (including many miniature shields and cauldrons) placed in the top of a later Iron Age storage
pit at Netherhampton, near Salisbury (Stead 1998).
In all cases, what seems to us most important is
where similar groups of objects, however formed,
display a clear tendency to occur at certain types
of site or in particular locations within them or
within the wider landscape.
In this paper, we will generally use the term “multiple deposit” for instances of five or more pieces of
Iron Age ironwork found together, as this seems to
us better to encompass a variety of formation processes.Two further caveats are nevertheless required.
Genuine hoards may sometimes have been deliberately dispersed when buried, or after burial, making
them difficult or impossible now to reconstruct as
such. Conversely, even where detailed records exist,
some supposed “groups” of objects may owe more
to the perspective of the modern analyst than to any
past reality, particularly in the case of finds dispersed
through different layers of the same pit. It is also
conceivable that some antiquarian discoveries were
embellished or even assembled by collectors using
artefacts from a variety of sources. We do not however believe that such problems are likely to apply in
enough cases to distort the more general patterns
adduced here, particularly where iron is concerned.
Any collections where there is serious doubt over
the integrity of the material have been excluded
from consideration
Finally, we may note one potentially significant
category of evidence not specifically discussed
here : the presence of iron in burials.Accompanied
burials are rare in Iron Age Britain, and those that
do occur are almost all of later Iron Age date and
largely confined to East Yorkshire and southern
England (Whimster 1981). This lack of burials
dating between the 8th and 5th centuries BC provides one of the main reasons why there is so little
evidence for early iron objects in Britain compared to many areas of continental Europe.
A mere 64 Iron Age burials are known containing weapons (Hunter 2005) and even fewer
British burials have substantial inventories of iron
objects. Nevertheless, the occasional presence of
iron grave goods should not to be overlooked, if
for no other reason that in certain regions and
periods of European prehistory, it seems likely
that the deposition of valuable objects in burials
functioned as an alternative to their ritual consumption in hoards or watery places (e.g. Bradley
1991 ; Dieepeveen-Jansen 2005 ; Fontijn, Fokkens
2005).
CURRENCY BARS
Over the past forty years, there have been a
number of studies of British Iron Age “currency
bars” (Allen 1967 ; Crew 1994 ; 1995 ; Hingley 1990 ;
2005). The British examples are part of a wider
European phenomenon, with other kinds of bars
being found in several other countries including France, Germany and Greece (Berranger this
volume ; Mangin 1994 ; Orengo 2003). We suspect,
however, that the surviving distribution of these
objects in time and space, which is relatively uneven, actually indicates when and where Iron Age
cultural practices favoured the incorporation of
whole or cut iron bars in the record ; similar bars
were probably used just as extensively in many
regions where there are few or no archaeological
149
COLIN HASELGROVE, RICHARD HINGLEY
finds (see the discussion by Hingley 1990 of the
evidence for gaps in the distribution in Britain).
The function of such bars has been extensively
debated, previous suggestions ranging from a form
of primitive currency to standardised ingots for
metalworking.
Current opinion in Britain favours their interpretation as one kind of trade iron alongside other
forms such as hooked billets (Crew 1994 ; 1995),
but for simplicity we will retain the established
term ‘currency bar’ here.
In Britain,iron currency bars occur primarily in an
arc running from Wessex up into the Severn-Cotswolds
region and across to the south-east Midlands, with a
thin scatter of finds around the margins of this zone
and in the rest of south-east England (ill.1). Further
to the north and west, there have been hardly any
finds : one from Wales ; one from northern England ;
and none in Scotland. All told, a total of 69 deposits
containing bars are known from 56 separate locations,
amounting to at least 1579 bars (Hingley 2005, p. 191
; note 2). Although the records do not always permit
certainty, a majority of these appear to have been
small deposits containing less than five bars (60,1 %) ;
conversely only five finds (7,3 %) contained more
than 100 bars.These larger finds are all in the SevernCotswold region. The majority of deposits seem to
date between the 3rd and 1st centuries BC, but a few
are apparently later, perhaps even of Roman date
(Hingley 2005, p. 185-186 ; forthcoming).
Allen’s (1967) fourfold classification of the
British series into sword-shaped, spit-shaped,
ploughshare and leaf-shaped types now appears
a considerable over-simplification. Crew (1994)
has distinguished at least 20 different varieties
of bar, which he argues were the product of
different regional workshops, a view supported
by the limited chemical and metallographic analysis that has been undertaken (Hedges, Salter
1979). The wide variety of forms and weights
also militates against the older view that the
bars operated as part of a single, unified system.
It remains true however that most varieties of
“currency bar” were based on one of two main
models – the sword and the plough. In the case
of the first group, which are slightly tapered and
have a tang, the use of the sword as a model was
essentially symbolic (Hingley 1997). The form of
the latter group derives from the standard Iron
1. The distribution of Iron Age currency bar hoards in Britain (after Hingley 2005).
150
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
Age plough-share, but whilst some plough-share
bars are certainly too long to have been effective
for ploughing and must have been purely representational (Hingley 1990), the distinction is not
a hard and fast one ; some bars may even have
been mistaken for actual plough-shares in the
past (Allen 1967). Each main group thus displays
a conceptual link to activities that were potentially central to the ideology and beliefs of Iron
Age peoples – agriculture and warfare – a theme
to which we will return below.
An examination of the depositional context of
the British bars reveals two separate distributions
(Hingley 1990 ; 2005). In the first of these geographical zones, which effectively corresponds to
Wessex and the Severn-Cotswolds region, most of
the finds of “currency bars” are from settlements
(ill.1). This zone also has the densest concentration of finds, and, as we have seen, includes all the
largest hoards. With one exception, the settlement
finds from this region are from enclosed sites,
most coming from the large elevated enclosures
generally known as hillforts, including Danebury
and other major examples such as Bredon Hill
(Hereford and Worcestershire), Cadbury Castle
and Ham Hill (both Somerset) and Hod Hill
(Dorset). Around this “core” zone, currency bars
tend to occur in a wider variety of locations,
but now including a few settlements and with a
certain emphasis on wet places, especially eastflowing rivers like the Thames and the Witham
known for their many finds of Iron Age weaponry
and martial equipment (Fitzpatrick 1984 ; Bradley
1991).
This division between the core zone and
elsewhere is apparent in the frequencies of finds
in different types of context (ill. 2). All finds of
currency bars are shown, but if the histogram were
limited to groups of five or more objects, the overall frequencies would be hardly affected. Hillforts
are easily the commonest type of findspot, and
represent an even higher proportion by number
of bars. This is particularly evident when they are
compared to the smaller settlements, where the
individual deposits are typically smaller.
Outside the core zone,apart from rivers,the provenances include other kinds of “natural” location
such as rocky clefts, caves and a former lake (Llyn
Cerrig Bach, Anglesey), but also culturally significant contexts such as a burial (Winster, Derbyshire) ;
a burial mound (Crawley, Hampshire) ; and a
pit-alignment (Gretton, Northamptonshire). Given
the abundant evidence we possess for natural
locations having had a religious significance for
Iron Age societies, we may reasonably conclude
that in this second zone, “currency bars” were
mostly votive offerings at sacred sites of one form
or another. Formal temples appear in Britain only
at the very end of the Iron Age and the fact that
the only definite find of a currency bar from a
cult site is from the same zone – comprising fragments of two bars from the late Iron Age shrine at
Hayling Island (Hampshire), which is itself highly
unusual on account of its early date and strong
Continental affinities – should almost certainly be
seen as the exception that proves the rule.
Whilst the currency bars from the core zone
are virtually all from enclosed settlements, a closer
look at the contexts of the individual deposits suggests that they, too, were mostly ritually deposited.
Where the detailed provenance is known, the vast
majority of settlement finds are actually from the
immediate vicinity of the enclosing earthworks,
whether within the ditch, from a pit in the bank, or
simply near the boundary (Hingley 1990).
The symbolic and ritual significance of boundaries is well known, whether natural features like
bogs and caves and rivers, or cultural ones such
as ramparts and ditches. This being so, votive acts
connected with the well-being of a community
would seem to provide the simplest explanation
for the repeated deposition of valuable and symbolically-charged objects like currency bars on or
near settlement boundaries. There is nothing to
suggest that deposits were meant to be recovered
and it may be relevant that the only currency bars
from settlements outside the core zone are also
from boundary ditches (Hingley 2005, p. 191).
OTHER LARGER GROUPS OF IRONWORK
Having argued that currency bar deposits in
Iron Age Britain were predominantly of a votive
character, albeit where the exact nature of the
rituals in which they were incorporated differs
depending on the region, we will now examine
large finds of other kinds of ironwork. Unlike
currency bars, these have not been not been systemically studied for some decades.
The most recent inventory is that of Manning
(1972), who lists nine ironwork “hoards” of Iron
Age date, plus three belonging to Conquest period,
151
COLIN HASELGROVE, RICHARD HINGLEY
2. Percentage of Iron Age currency bar hoards found in different types of context (a) by number of deposits and (b) by number of bars
(C. Haselgrove).
3. The distribution of large Iron Age
ironwork deposits in Britain.
(For key to sites, see Appendix).
(Map C. Haselgrove).
152
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
and three early Roman Iron Age deposits from
southern Scotland, which contain both native and
Roman ironwork, giving a total of 15. Manning
(1981) favoured a Roman origin for these Scottish
hoards, linked to the presence of the Roman army
in the region, but recent opinion sees them as more
probably deposited by the indigenous inhabitants
(Hunter 1997, p. 116, n° 7), on which basis we have
included them here.
All told, 52 multiple deposits of Iron Age
ironwork can now listed from Britain, a more than
threefold increase (note 3). The primary reason
for this has been the increased number and scale
of excavations over the last 30 years, but three
other factors have contributed. One is metal detecting. Another is the lower size threshold we have
adopted, since – although Manning (1972) does
not actually define his use of the term “hoard”
– he was essentially concerned with larger groups.
Third but not least, adopting a more general definition has inclined us to retain a number of finds
that Manning excluded, such as the so-called
“massacre” deposits found at hillforts like Bredon
Hill (Hencken 1938), Cadbury Castle (Barrett et
al. 2000) or Spettisbury, Wiltshire (Gresham 1939),
where quantities of weaponry and personal artefacts are mixed with human remains. A full list
of larger ironwork deposits may be found in the
Appendix, along with references.
All told, we appear to have a full inventory
of two-fifths of the relevant finds (40,4 %), and a
potentially complete one for another ten deposits
(19,2 %). Unfortunately, whereas we know that currency bars were often buried in bundles (Hingley
2005), we are poorly informed about how the
artefacts in most ironwork finds were deposited in
relation to one another,even those that were contained in cauldrons, as at Santon Downham, Norfolk,
or Blackburn Mill, Borders, and Carlingwark Loch,
Dumfries and Galloway. A wide variety of objects
are represented, especially weapons, tools and
domestic objects, as we will see from the more
detailed analysis presented below. As a rule, deposits – even quite small ones – contain more than
one category of ironwork (84,6 %), whilst at least
three-fifths included objects made from other
materials (59,6 %), particularly bronze. As with
currency bar hoards (Hingley 2005), some groups
include items that had clearly been deliberately
damaged before burial, whilst many more are
broken ; indeed, where deposits are more or less
intact and detailed studies have been conducted,
it is not unheard of for a majority of artefacts to be
broken, as in the three southern Scottish hoards
(Hunter 1997, fig. 12.4). In other cases, however, the
objects were in good condition when buried and
not obviously worn.
The overall distribution of Iron Age ironwork
deposits is shown in Figure 3 (ill.3). As can be
seen, there are close similarities to the distribution
of currency bars. All told, the 52 deposits derive
from 39 different locations, but finds once again
concentrate in Wessex and the Severn-Cotswolds,
with a lesser scatter to either side of this region.
The main difference is that this time there are finds
north of the Humber, an extension that is chronological as well as geographical. Many of the key
trends are already apparent on the maps plotted
by Manning (1972, fig. 2-3), who noted how Iron
Age and Conquest period ironwork hoards focus
on southern England, whereas those of later first
to mid 2nd century AD date are in north central
Britain, a phenomenon which seems to be partly
– although, as we have already seen, probably not
entirely – connected with Roman military activity.
The similarity in the depositional treatment
meted out to different forms of Iron Age ironwork
becomes even clearer when we look at the types
of findspot are considered. Almost all of the finds
from Wessex and the Severn-Cotswolds are from
enclosed settlements - hillforts and, in smaller
numbers, less substantial enclosed settlements.
Of the remainder, two are from caves, whilst one
is from a ditch that predates the Roman temple
at Uley (Gloucestershire) and encloses a possible late Iron Age shrine. Outside the core zone,
finds from naturally significant locations predominate, particularly rivers and lakes or bogs (ill.
4), and deposits come from a wider variety of
locations, including the pre-Roman shrines at
Harlow (Essex) and Hayling Island, whilst finds at
enclosed settlements outnumber those at hillforts.
Multiple deposits are restricted to hillforts, which
weights the overall pattern even more towards the
core zone (although in this respect, we should
remember that the two hillforts outside the core
region, Bigberry and Hunsbury, probably both possessed multiple deposits which are only counted
once in the overall histogram, owing to lack of
information). As Figure 4 shows, there are some
minor differences from currency bars, notably the
greater proportion of finds from enclosed settlements – which reflects the greater chronological
153
COLIN HASELGROVE, RICHARD HINGLEY
4. Percentage of Iron Age ironwork deposits found in different types of context (a) by number of sites and (b) by number of
deposits (C. Haselgrove).
and geographical spread of other ironwork finds
– and an avoidance of certain types of location
used for depositing currency bars, such as rocks
and pit alignments, but not others such as caves,
which is not so easy to explain.
Whether inside or outside the core zone, a
majority of site finds come from liminal contexts,
implying that many of them were ritually motivated deposits. Pits represent the commonest
provenance, whether specially dug or reused from
some other purpose ; they are followed some way
behind by ironwork from ditches and from layers
that formed in various places (ill. 5a). A similar
trend is apparent with regard to the location of
iron-rich contexts within sites (ill. 5b). A majority
of the larger ironwork finds come from settlement
boundaries or entrances, or, as in the case of
Danebury, from pits within structures that stood
just behind the ramparts.
Within the overall pattern, however, there are
indications of a degree of change through time. A
majority of the finds in pits were buried in the 3rd or
2nd centuries BC, reflecting the central role of structured deposition on hillforts at this period (Cunliffe
1995 ; Hill 1995 ; Hamilton 1998).In the 1st centuries BC
and AD, the emphasis on liminal contexts continued,
but more finds now come from enclosure ditches
and from specific areas of the site, such as entrances.
154
A similar phenomenon is apparent at the pre-Roman
shrines of Harlow, Hayling Island, and Uley, where offerings of ironwork and other items are concentrated in
front of and to the left of the cult focus (Haselgrove
2005 ; King, Soffe 2001). The finds of weaponry and
other objects on sites L and Q at Maiden Castle,Dorset
(Wheeler 1943) may well represent another example
of this practice, lying as they do over a Neolithic burial
mound, and to the south-east of a circular building
of unknown function and the later Romano-Celtic
temple (note 4).
The dichotomy between the core zone and
other areas extends to the overall chronology of
ironwork deposits (ill. 6). Where deposits are longlived, the likely terminal date has been used, whilst
many groups can only be approximately dated due
to a lack of diagnostic artefacts and/or uncertainties about the original composition. Even so, it is
apparent that in the core zone, the main period of
deposition was between the 3rd and early 1st centuries BC, with numbers falling away quite sharply
in the final century of the Iron Age. This coincides
with the end of the intensive hillfort occupation in
Wessex and the Severn-Cotswolds, although some
sites clearly remained a focus for certain kinds of
activity, often including metalworking, especially
Maiden Castle (Sharples 1991, p. 243, n° 4). Around
the mid 1st century AD, however, the number of
deposits increases again, reflecting a resurgence
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
5. The contexts of Iron Age ironwork finds on settlements A. by feature type B. by location within site (C. Haselgrove).
of ironwork deposition in hillforts. As we have
already seen, these new multiple deposits tend to
be quite different in character from before ; rather
than being discrete deposits of largely intact items,
many of them probably accumulated over a period
of time and much of the material is damaged and/
or deliberately broken. Most complex of all are the
weapon-rich deposits from the gateways to hillforts like Cadbury Castle and Maiden Castle. These
undoubtedly reflect a range of formation processes and their precise character consequently
differs from site to site, but certainly included the
deliberate deposition of weapons (Barrett et al.
2000, p. 105-132).
Outside the core zone, however, we see a gradual increase in iron deposition over time. The
6. Percentage of large Iron Age ironwork deposits in
Britain by chronological period (a) in the core zone and
(b) elsewhere (C. Haselgrove).
earliest deposits – earlier than any of those in the
core zone – are from around the edges of the Fens
in eastern England, at Fiskerton, Lincolnshire, and
Flag Fen, Cambridgeshire. Along with a later find
from Orton Meadow, Cambridgeshire, these relatively small deposits are probably little more than
a variant on the existing tradition of late Hallstatt
and early La Tène weapon offerings in the major
rivers of eastern England (Fitzpatrick 1984). Similar
practices may already have existed in others areas
as well, since radiocarbon dates on animal bone
associated with the famous metalwork find at Llyn
Cerrig Bach in Anglesey imply that deposition in the
lake started in the mid first millennium BC (Hedges
et al. 1998) even though the bulk of the objects
belong to the final centuries of the Iron Age.
The iron finds from the outlying hillforts at
Bigberry and Hunsbury seem to be broadly contemporary with the main Wessex hillforts, although at
both sites they include elements that might relate
to a secondary phase of deposition in the 1st century AD, analogous to that seen in the core zone.
From the 1st century BC onwards, ironwork is
deposited on a wider range of sites, including the
shrines at Harlow and Hayling Island, and another
possible cult site at Essendon, Hertfordshire. These
three sites have all produced large numbers of
Iron Age coins, which were now regularly used as
offerings in south-east England and – from a slight
later date – throughout the former core zone of
iron deposition (Haselgrove 2005).
As in Wessex, the latest ironwork deposits in
south-east England appear to belong to the period
just after the Roman invasion, at which point they
disappear for a couple of centuries, only to resume
again in the later Roman period (Manning 1972).
155
COLIN HASELGROVE, RICHARD HINGLEY
Sizeable ironwork deposits do not seem occur
north of the River Humber until the 1st century
AD, probably initially in northern England, as at
Embleton, Cumbria, or South Cave, Humberside ;
and then slightly later in southern Scotland. In
both areas, the relevant finds are best seen as a
development of an existing regional traditions
of object deposition which can be traced back
at least a century before the Roman invasion of
southern Britain, if not longer (Hunter 1997). Thus
in northern England, there is a strong emphasis
on weaponry and – apart from the major XIXth
century find at Melsonby, North Yorkshire, close to
the “oppidum” of Stanwick – deposits are generally
small and display a relatively limited range of
associations, whereas in southern Scotland, larger
deposits are more common and finds usually
contain a wider range of object types, more of
which tend to be of non-local origin.
Finally, we can examine the types of iron objects
represented in these finds in terms of broad functional categories.Figure 7 shows the number of deposits
with one or more objects in each category ; given the
variable quality of the records, we have not attempted to quantify the individual objects represented,
which can range from a single item to a substantial
number (ill.7). Only weapons and domestic objects
are present in more than half the finds. This latter
is a somewhat diverse category, including knives as
well as more obvious items such as latch-lifters, keys
and hearth furniture, although if knives were removed, numbers would only fall slightly. Agricultural
tools are the next best-represented category, then
general-purpose tools, cart and harness fittings, and
metalworking tools. One-third of the deposits include
currency bars and/or iron billets.
Rarer objects include parts of iron vessels or
their suspension chains (bronze bowls or cauldrons are present in a further six hoards) and
shackles and gang-chains. Personal objects and
ornaments are conspicuous by their absence,
although six finds include bronze – as opposed
to iron – brooches or finger-rings. Human bone
or sometimes bodies were present is as many
as twelve deposits. As we indicated above, relatively few deposits have only a single identifiable
category of object (15.3 %), usually weapons, but
in two cases, metalworking tools. At Gussage All
Saints, Dorset, the tools and a quantity of scrap
iron were buried in a pit on the opposite side of
the entrance to another pit containing further
iron metalworking tools and other implements as
well as a large amount of bronze casting debris
(Wainwright 1979 ; Fell 1990). At Weelsby Avenue,
Humberside – another settlement with large quantities of bronze metalworking debris (Foster 1996)
– the tools were found scattered in the enclosure
ditch and an adjacent partition (Fell 1990).
7. Numbers of Iron Age ironwork deposits containing iron objects belonging to different functional categories
(C. Haselgrove).
156
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
If we compare the content of ironwork deposits from the core zone with those elsewhere,
various differences emerge. In Wessex and the
Severn-Cotswolds, domestic objects (54,8 %) and
agricultural implements (51,6 %) occur in over half
the deposits, whereas weapons are present in rather
less than half of them (41,9 %). Everywhere else,
however, martial equipment predominates, with
over four-fifths of finds containing weapons (81 %).
Items relating to transport are also significantly better represented outside the core zone (present in
52,4 % of finds as against 29 %), as are metalworking
tools (47.6 % against 29 %) and bronze and iron
vessels (38,1 % against 22,6 %). Agricultural tools,
however, are less common (42,9 %). Currency bars,
by definition, occur more often in the core zone
(since the area is defined by the regular occurrence of these), as does human bone, although the
difference in the proportion of deposits in each
zone containing human remains is less marked
(25,8 % to 19 %).Almost certainly, these variations in
the composition of deposits will have held meaning
for the inhabitants of the different regions, a question to which we shall return below.
SINGLE OBJECTS/SMALL GROUPS
It is possible that single items and small groups
of iron that occur outside the regions discussed
above may have performed comparable roles
to the larger collections of objects. A number of
potentially significant objects will be considered here, although a full survey is not possible.
In Wales, at Capel Garmon, a highly ornate iron
firedog was found in a bog, weighted down with
stones (Savory 1976, pl. 6). Aldhouse-Green (2002,
11) has suggested that this elaborate object might
have taken three years of a smith’s life to complete.
At Lydney, a remarkable late Iron Age bowl, decorated with three knob-horned bulls’ heads was
found at a site associated with iron working, which
later became a Roman temple (Wheeler, Wheeler
1932, n° 9, fig. 11 ; Aldhouse-Green 2002, p. 12). In
northern and western Scotland and islands, a
digging tool was found in the ditch surrounding
one of the substantial roundhouses at Aldclune
(Perth and Kinross ; Hingley et al. 1997), while at
A’Cheardach Bheag (South Uist, Western Isles) an
iron plough share was found in the peripheral
area of a wheelhouse (Fairhurst 1971 ; Hingley
1992, p. 23). Such finds may indicate the use of
single ornate, or alternatively fairly mundane iron
objects, to make significant offerings.
Comparable evidence from Danebury (note 1)
illustrates that single iron objects may also have
performed similar roles in the regions in which
multiple deposits of iron objects are more common.
As with the larger ironwork deposits, finds of single
iron objects seem to be concentrated around the
periphery of the hillfort, especially to the left and
right of the east-facing entrance (Osgood 1995a,
p. 192-193). At the Caburn (East Sussex), a wide
variety of single iron objects were buried in pits
in the interior of the site along with human or animal bone and artefacts in other materials in some
cases after first being put deliberately beyond use.
The pits containing these deposits are predominantly situated on either side of the entrance, and
in the centre of the site, where there is a basin-like
depression, which – although poorly dated – could
well have had a ritual function (Hamilton 1998,
p. 32-35). There is also evidence from a number of
sites indicating that the total number of iron (and
bronze) objects deposited at hillforts and on other
enclosed settlements rose sharply in the 3rd and
2nd centuries BC (Sharples 1991, p. 242-244 ; Osgood
1995b, p. 204 n° 5), precisely the period when currency bar hoards and other large ironwork deposits
also became common.
DISCUSSION
The highly structured character of the information reviewed in this paper may be explained
through reference to the potential significance of
iron and iron working in Iron Age society. In many
cultures, iron working has been viewed as a mystical and highly charged process (Aldhouse-Green
2002 ; Gillies 1981 ; Herbert 1993, Hingley 1997). In
pre-modern and non-western societies,the exact character of the process whereby iron ore is transformed
into metal items is not understood in terms of the
chemical reactions. Often, as a result, iron production
is imbued with beliefs about the social and ritual
meaning of the act of production. In this context,
several authors have argued that iron production
in the past cannot have been an entirely pragmatic
industrial process (Budd, Taylor 1995 ; Hingley 1997 ;
Aldhouse-Green 2002). Smithing, and particularly
smelting, are impressive and dangerous processes
that transform raw materials into cultural items. The
production of iron often involves recycling, as old
iron artefacts can be reworked (Manning 1972) ; iron
was required to create iron. The temperature achieved in smelting and smithing required implements
that would not melt, and iron was used for many
157
COLIN HASELGROVE, RICHARD HINGLEY
of the tools that were employed in the processes
of industrial production – hammers, files, axes and
anvils (Leach 1962 ; Manning 1972).
In the context of Iron Age Britain, we have good
reasons to suspect that iron was a highly significant metal. This is indicated by the form of the
currency bars, which drew upon the symbolism of
agricultural production and the offensive/defensive power of weapons (Hingley 1990 ; 1997). The
significance of iron to Iron Age communities may
also be indicated by the writings of Herodian
of Antioch, a 3rd century author. Writing about
Septimius Severus’ preparations for the invasion
of areas of free Britain that now lie in Scotland,
Herodian remarked :
Strangers to clothing, the Britons wear ornaments of iron at their waists and throats ;considering
iron a symbol of wealth, they value this metal as
other barbarians value gold. (Herodian, History 3,
XIV, 7).
Herodian was writing about a later society that
had been subject to Roman invasion and interference for well over 100 years and was also under
immediate threat of invasion by Rome. Such considerations might have placed a particular premium
on iron, while he was evidently also concerned
to emphasise the savagery and warlike character
of the Britons. His comments may, however, have
some relevance to the significance of iron to earlier peoples in Briton.
Iron was used to produce powerful weapons –
swords, spearheads and axes – vital to communities
both for defence and to attack others (Hingley 1997,
13-4). Such objects are found in deposits derived
from the whole of period considered in this study.
Iron was also used to create highly effective agricultural tools, providing flexible but strong shares
for the ploughs and ards essential for agricultural
production (Rees 1979, p. 48 ; Hingley 1997).
The deposition of items connected with the
agricultural cycle – including scythes and sickles,
in addition to plough and ard shares, could have
drawn upon their symbolic association through
a reference to the fertility of the soil through the
creation of agricultural surplus (Hingley 1990 ;
1997 ; 2005). In fact, one of us has suggested that
the process of iron production during the middle
Iron Age may have drawn upon the idea of the
cycle of life (Hingley 1997) and the agricultural
cycle (Barrett 1989). Iron ore may often have been
158
gathered from the fields, smelted and smithed in
a manner that drew upon associations with the
cycle of agricultural production.
The arable cycle appears to have been particularly significant for many of the communities of the
densely occupied south of Britain, including the
core area of currency bar distribution,and people at
this time may have drawn upon strong associations
with the arable cycle in their ritual actions (Barrett
1989 ; Hingley 1997). In particular, the actions of the
creation of “special deposits” in grain storage pits
may have drawn upon such an association, while
the use of iron deposits to reinforce the boundaries
of communities may have drawn upon comparable concerns about the identity and perpetuation
of the community into the future. The creation of
currency bars that drew upon the symbolism of the
sword and the plough, therefore, reflect the significance of the metaphor of the agricultural cycle in
the lives of Iron Age people.
CONCLUSION
We have summarized evidence for structuring
in the deposition of later Iron Age iron objects
across Britain. Two broad zones have been distinguished, based mainly on the evidence for
currency bar distribution. In the core area, the
largest hoards occur and these are often focused
upon boundary context, particularly upon the
ramparts, banks and ditches surrounding enclosed
settlements. Outside this core area, hoards are
generally rarer and appear more common in
naturally related features. There are suggestions
that the tradition of hoarding iron objects may
have commenced rather later across much of this
peripheral area, particularly over the central areas
of northern England and southern Scotland.
The power of iron as a highly symbolic and
valuable material may be the reason for the strong
pattern in the distribution of the objects.The assessment of the contexts of individual iron finds may
point to comparable conclusions, although the
material considered in this paper requires to be
followed up by a far fuller examination than has
proved possible in this context (Hingley forthcoming). Further research to analyse the detailed
character of deposition within the two regions
defined above would also provide a fuller picture
of the complexity of depositional traditions across
Britain at this time.
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
AUTEUR ANCIEN CITÉ
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NOTES
1. Cunliffe and Poole (1991, p. 354) note that 60 of 173 distinctive iron objects (34.7%) from the second decade of excavations at Danebury
(1979-1988) are from hoards or structured deposits in storage pits. At Bigberry, at least six groups of ironwork were discovered between 1861-1895
during gravel quarrying on the south side of the hillfort (Boyd-Dawkins 1902). In the 1978-80 excavations there, an iron ploughshare was found
buried point downwards in the gully of a circular structure, whilst elsewhere an iron anvil was revealed set in the natural clay (Thompson 1983,
p. 246, 251) indicating that at this site, too, both individual and multiple deposits were involved.
2. To the finds listed in Hingley (2005), we can add a hoard of sword-shaped currency bars excavated in 2002 at Totterdown Lane, Horcott,
Gloucestershire (Pine, Preston 2004, p. 45,69).The hoard was found in a scoop outside a later boundary ditch and just to the north of a substantial
later Iron Age Enclosure. Due to the condition of the iron, it is uncertain how many bars were present.
3.We have not included the Somerset lake villages at Glastonbury and Meare East and West in our analysis, despite all three of these sites having
yielded large collections of ironwork. A glance at the records indicates that numerous building mounds produced groups of five or more iron
objects, albeit often apparently distributed through several levels (Coles 1987; Coles, Minnitt 1995), but quite apart from the work that would be
needed to reconstruct all possible groups, we felt that including these sites here would bias the numerical analysis too much to one particular
category. We concur with the view that these Lake Villages cannot be regarded as unproblematic settlements (Coles, Minnitt 1995, p. 206-209),
and with Field and Parker Pearson’s suggestion (2003, 188) that some of the occupants of Glastonbury may have been ritual specialists, so that
in a general sense, at least, the plentiful ironwork finds from these watery places should certainly be seen as another facet of the depositional
practices under discussion here.
4. At Cadbury Castle, the sizeable assemblage of ironwork from the central plateau area was initially interpreted as special deposits relating to
the nearby 1st century AD shrine (Building N5). The final report, however, introduces an alternative – that the material relates to a metalworking
area situated to the east of the shrine (Barrett et al. 2000, p. 300-301). It may however be wrong to see these possibilities as mutually exclusive, given
the widespread evidence that exists for metalworking taking place in a religious context. Equally relevant is the new interpretation of a nearby
robbed-out cruciform stone structure as a Roman temple, which provides evidence for the religious significance of this area of the plateau at a
not much later date.
162
IRON DEPOSITION AND ITS SIGNIFICANCE IN PRE-ROMAN BRITAIN
Appendix : Significant ironwork groups from Iron Age Britain. (C. Haselgrove).
W : weapons ; A : agricultural tools ; T : transport ; M. : metalworking tools ; G : general purpose tools ; V : vessel ;
D : domestic items (including knives) ; P : personal ; O : other significant objects ; B : billet or currency bar ; U : Uncertain.
163
L’état des recherches
sur les dépôts d’objets métalliques
du second âge du Fer en Pologne
Tomasz BOCHNAK
LE CADRE CULTUREL DANS LE BASSIN DE
LA VISTULE AU SECOND ÂGE DU FER
Les Celtes viennent sur les territoires actuellement polonais à partir de La Tène B, en traversant
les cols des Carpathes. À l’époque, les territoires du
bassin de la Vistule et de l’Oder sont occupés par
des populations indigènes de la culture lusacienne,
une des grandes cultures de cercle des champs
d’urnes et de la culture dite “de Poméranie”. Une
culture dite “des tumulus des Baltes occidentaux” se développent dans la partie nord-est de
la Pologne. Des éléments de la culture de Jastorf
sont visibles dans une large zone allant de l’Oder
et la Grande Pologne (Wielkopolska), en passant
par la Kouïavie (Kujawy), la Mazovie orientale
(Mazowsze), la Podlasie, le Plateau de Lublin. Cette
région est considérée par des chercheurs comme
une zone de migration, des Bastarnes et des Skires
qui s’étaient finalement établis dans le bassin du
Prout et du Siret, en créant une culture dite de
“Poieneüti-Lukaševka”. Leur présence est confirmée
par les sources écrites.
Le modèle économique de la culture de
Poméranie et celui de la culture “des tumulus des
Baltes occidentaux” n’étaient pas différents des
caractéristiques propres à l’âge du Bronze et au
premier âge du Fer ; le bronze restait le métal dominant tandis que le fer n’était utilisé que rarement.
La question des dépôts métalliques de la culture
de Poméranie ne sera pas traitée dans cet article.
On peut supposer, que l’expansion de la population de la culture de Jastorf ait contribué à
l’affaiblissement des structures de la culture de
Poméranie, bien qu’à présent, nous ne puissions
rien dire sur la nature des éventuels contacts entre
ces deux cultures.
Les représentants de la culture de La Tène
ont gardé une certaine autonomie culturelle, en
formant des îlots celtiques sur les terres occupées
par les populations indigènes. Ainsi, pouvonsnous, avec beaucoup de précision, tracer une
limite entre la colonisation celtique et les habitats
locaux, de culture de Poméranie et, parfois, des
éléments lusaciens.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 165-182 (Bibracte ; 11).
TOMASZ BOCHNAK
L’apparition de nouvelles influences culturelles a radicalement modifié la situation sur
les actuelles terres polonaises. À partir de La
Tène C1, la culture de Poméranie, soumise auparavant aux incursions de la culture de Jastorf,
s’est rapidement éteinte. Deux cultures tout à
fait différentes ont surgi à sa place. Ces cultures, nommées de Przeworsk et d’Oksywie sont
d’excellents exemples des structures nées sous
l’influence de la “latènisation”, où l’impact celtique se manifeste, entre autres, dans la production
locale du fer, son usage, dans l’assimilation d'éléments de costume et d'armement celtique, ainsi
que dans le rite funéraire. L’introduction sur les
terres polonaises, vers la fin du IIIe et début du IIe s.
av. J.-C., de la destruction rituelle d’équipement
funéraire, consistant à plier et à casser des outils
et des armes en métal, est considérée comme
une imitation du rite connu aussi dans les nécropoles du type de Ponđtovice en République
Tchèque (Meduna 1962). L’adaptation de telles
pratiques funéraires est liée vraisemblablement
aux changements du système de croyances des
populations des terres polonaises. Ce modèle
de rite funéraire n’a pas connu de changements
essentiels jusqu’au début de la période des
Grandes Migrations, alors qu'à La Tène D, sur
les vastes terres d’Europe des Celtes, apparaît le
rite funéraire, qui ne se laisse pas découvrir par
les méthodes archéologiques actuelles. C’est
justement sur les terres de l'actuelle Pologne,
que la crémation se maintient, alors que dans
les tombes on trouve des importations celtiques,
notamment des armes, accompagnés d'éléments
locaux,
Vu ce qui précède, il faut prendre en considération aussi bien des dépôts de la culture
celtique proprement dite, que des trouvailles,
que l’on peut rattacher à la culture de Przeworsk,
dont on dit que c'est la plus “celtisée” des cultures non celtiques (Dćbrowska 1988a, p. 105 ;
2003, p. 153). Dans la culture d’Oksywie, les
influences celtiques sont beaucoup moins
marquées et actuellement, nous ne connaissons pas de dépôts d’objets métalliques qui
appartiendraient à cette culture. Pour compléter
l’image des dépôts sur le territoire polonais, je
présenterai brièvement des trouvailles prises
généralement pour les dépôts de la culture de
Jastorf ou bien liée aux influences venant du
bassin de Prout et Siret.
166
LA CULTURE CELTIQUE
Comme il est admis, la colonisation celtique
dans le bassin de la Vistule et de l’Oder se limite
aux enclaves situées dans la partie méridionale de
la Pologne (ill.1). Un de ces îlots est constitué par
la région de la Basse Silesie, ou fonctionnait entre
autres un lieu de culte au mont Ŋlĕŧa, caractérisé
par un certain nombre de statues considérées
comme typique pour l’art celtique. Les habitats
celtiques dans cette région se développaient de
La Tène B1 à La Tène C1 (Jahn 1931 ; Woťniak
1970, p. 40-84).
Une autre région de la colonisation celtique est le plateau du Głubczyce (de La Tène
B1 à La Tène C) (Woťniak 1970, p. 85-104 ; Gedl
1972 ; 1978) et le sud est de la Pologne (Ginalski,
Muzyczuk 1999), où la culture de La Tène
se développe à La Tène C (Gebhard 1989,
p. 118-127). Dans la Petite Pologne (Małopolska)
occidentale, dans la région de Cracovie, à partir
de La Tène C1, il existait un groupe mixte “celtoPrzeworsk”, dit “groupe de Tyniec” (Woťniak
1970, p. 105-149 ; 1990 ; Poleska 1995). Le développement du groupe de Tyniec est précédé
par une courte période de la culture celtique
“pure” de La Tène B2. Dans le milieu du groupe
de Tyniec, dans une phase finale, on observe
l'apparition d'éléments de la culture de Puchov
de la Slovaquie septentrionale. Le groupe de
Tyniec a probablement disparu vers le début du
Ier s. ap. J-C., mais certains de ses traits caractéristiques se sont maintenus dans la région encore à
l’époque des influences romaines.D’indubitables
éléments typiques de la culture celtique (entre
autres les trouvailles de monnaies, de céramique celtique et d'un atelier de production de
meules rotatives) ont été trouvés en Kouïavie, et
les influences du groupe de Tyniec s’étendent
jusqu’au Plateau de Sandomierz (Woťniak 1970,
p. 166 ; 1994, p. 133-137).
Nous connaissons trois trésors de monnaies
d’or, un dépôt d’outils métalliques ainsi que
deux trouvailles sorties de rivières, peut être de
caractère votif. Tous ces objets proviennent des
régions de la culture celtique où de ses zones
d'influences.
Je ne tiens pas compte ici de trouvailles singulières de monnaies celtiques, dont une partie,
dite les statères de Cracovie, vient des émissions
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
1. Territoire de la Pologne entre La Tène B2 et C2 (représentation uniquement de quelques cultures ou phénomènes choisis).
(Carte T. Bochnak.)
Culture celtique
1. Brzezinka Ŋredzka, com. Miĕkinia. Dépôts de monnaies (Jahn 1931, p. 85, 88-90, 93, 95 ; Woťniak 1967, p. 206-207, 223 ; 1970, 282).
2. Gorzów, com. Chełmek. Dépôts de monnaies (Demetrykiewicz 1898, p. 101-103 ; Woťniak 1967, p. 320 ; 1970, p. 320).
3. Inowrocław, com. Inowrocław, Dépôts de monnaies (Zakrzewski 1925-27 ; p. 217-218 ; Woťniak 1967, p. 205, 208-209, 223, 225 ; 1970, p. 347).
4. Kraków (Cracovie) Nowa Huta-Wycićŧe, com. Kraków (Cracovie). Dépôt d'outils (Buratyĸski 1951-1952).
5. Radymno, com. Radymno, dans la rivière San. Une tête de bovidé en argent. (Hadaczek 1909, p. 13, 18, fig. 5 ; Antoniewicz 1954 ;
Głosik 1973).
6. Rembielin, com. Chorzele. Dépôt de parures et d'outils (?), (Waluŋ 1992).
7. Rzeszów, com. Rzeszów, dans la rivière Wisłok : une épée dans son fourreau. (Kunysz 1959 ; Woťniak 1970, p. 341).
Culture de Jastorf : les matériaux du type de Pikule
16. Kluczewo, com. Ostroróg. Collier en bronze en forme de couronne, trouvé dans le marais (Demetrykiewicz 1900, Kostrzewski 1919, p. 75-78, 277).
Wichrowska, Wichrowski 2002).
18. Synogaþ, com. Wierzbinek. Collier en bronze en forme de couronne, trouvé dans le marais (Zielonka 1970, p. 15).
19. Ulvivok, Ukraine. Collier en bronze en forme de couronne, trouvé dans la rivière Boug, (Pasternak 1944).
locales (Castelin 1966, p. 168 ; 1976 ; Woťniak 1967,
p. 207-208 ; 1978 ; 1984, p. 30-32 ; 1984a ; Kaczanowski
1996 ; 1997, p. 88-89). Les trésors des monnaies d’or
connus de nos jours proviennent de Gorzów en
Petite Pologne, de Brzezinka Ŋredzka en Silesie et
d’Inowrocław en Kouïavie. Les monnaies celtiques
de Pologne montrent avec certitude, que ces terres
se trouvent dans le champ d’influences du monnayage dit Boïens.
Le trésor de Gorzów contenait peut-être jusqu’à cent monnaies, dont on a identifié seulement
trente-deux : quatre statères de la série 2a selon
Castelin (pièces plus légères que la moyenne),
dix-sept monnaies d’un tiers de statère, trois d’un
huitième de statère et une pièce de 1/24 de statère
(ill. 2). D’après K. Castelin, ces monnaies appartiennent à la série Alkis I-III et elles sont caractéristiques
de la première phase du monnayage celtique
167
TOMASZ BOCHNAK
séries Alkis IX de la 4e phase de la monnaie celtique en République Tchèque ou des émissions
des statères dites “vindeliques” ou rhénans. La
trouvaille d’Inowrocław est datée à la première
moitié du Ier s. av. J.-C. Ce qui est très important,
c’est que le dépôt en question a été trouvé sur le
terrain non celtique, mais occupé par la population de la culture de Przeworsk.
2. Les monnaies du dépôt de Gorzów. Collection du musée
national de Cracovie, cabinet de numismatique. n° 1 : MNK
VII A 3 797 ; n° 2 : MNK VII A 3 801 ; n° 3 : MNK VII A 3 800 ;
n° 4 : MNK VII A 3 799 ; n° 5 : MNK VII A 3 798 ; n° 6 : MNK VII
A3 582 (photo J. Bodzek).
en République Tchèque. On peut donc supposer,
qu’elles sont frappées avant le milieu du IIe s. av.
J.-C. Les monnaies du type Atena Alkis (Alkidemos)
sont considérées comme imitations de monnaies
celtiques d’Italie. Elles-mêmes copient à l'avers de
didrachmes romains du type Romano et au revers,
de tetradrachmes macédoniens de Philippe II.
(Morawiecki 1980 ; 1986, p. 44-45).
Le trésor de Gorzów trouvé sur le terrain où
nous n’avons pas de traces de la colonisation de
cette période, se trouve sur une voie de marchandises menant de la Moravie vers la Petite Pologne.
Ce trésor aurait pu y être déposé par les membres
de la population de la culture celtique ou de
la culture de Przeworsk. Pour la même période,
c’est-à-dire la première phase de la frappe de la
monnaie en République Tchèque, est datée une
trouvaille de Brzezinka Ŋredzka. On y a trouvé
une trentaine de pièces de monnaies environ,
dont on connaît seulement trois exemplaires,
c’est-à-dire 1/3 de statère, du type Alkis II ou III,
1/8e du type Alkis II et 1/24e du type Alkis II.
La plus récente découverte de monnaies
celtiques provient d’Inowrocław. Le dépôt est
constitué par quatre monnaies de la même valeur,
mais avec les représentations un peu différentes.
Les deux connus actuellement ont un poids inférieur à celui d'un tiers de statère, mais supérieur
au poids moyen d'un quart de statère. Sur l’avers,
on voit un motif arqué, ressemblant un peu à un
torques connu des émissions postérieures des
168
À Rzeszów, ville située au nord de l’enclave
celtique, en 1957 on a dragué dans la rivière Wisłok,
une épée celtique dans son fourreau (ill. 3). À présent, le fourreau est conservé dans un état très
fragmentaire, qui rend impossible toute analyse
typologique. À partir d’un dessin exécuté avant
la restauration, Izabela Tomaszewska a prétendu,
que l’ornement de fourreau, aujourd’hui effacé
ressemblait beaucoup au motif dit “de paires de
dragons”, très répandu dans le milieu celtique.
Ce décor montrait des animaux fantastiques en
représentation héraldique, dans la partie supérieure du fourreau (Tomaszewska 1997, p. 147).
L’ornement de ce type constitue un des motifs
caractéristiques, de l’art celtique. Les fourreaux
décorés avec les représentations des “paires des
dragons” sont connus aussi bien dans le bassin du
Danube qu’en France, en Suisse et en Italie septentrionale, aussi l’ornement en question ne peut
pas servir comme indice dans l’établissement de
l’origine de l’épée de Rzeszów (de Navarro 1972,
p. 65, 216, 238 ; Bulard 1982 ; Frey 1986, p. 87-88,
Abb. 3 ; Megaw, Megaw 1990 ; Szabó, Petres 1992,
p. 29-36). Cet objet constitue une trouvaille particulière, isolée, et nous ne pouvons pas dire, s’il
s’était trouvé au fond de la rivière en tant qu’une
offrande destinée à une divinité, ou bien acciden-
4. n° 1 : tête de bovidé en argent de San à Radymno ; n° 2 : cruche
en argent de Kołokolin (Ukraine) ; sans échelle (planche T. Bochnak,
d'après Glosik 1973 et Ŋmiszko 1935).
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
tellement. Il faut pourtant signaler que cette arme
ne porte aucune trace de l’action du feu, donc
elle ne faisait pas partie d’un équipement d’une
tombe à incinération. La forme et les proportions
de cette arme sont proches d’exemplaires celtiques de La Tène B2 et La Tène C1.
Un autre objet, très intéressant, malheureusement à présent disparu, a été trouvé en 1819
dans la rivière San près de Radymno au sud-est
de la Pologne. Des pécheurs ont dragué une tête
de bovidé faite en argent (ill. 4, n° 1). La tête
portait des fraîches traces d’arrachement, ce qui
laissait supposer, qu’elle faisait partie d’un objet
plus grand, enfoncé dans le lit de la rivière. Le
dessin de cette trouvaille, sans dimensions, n’a
été publié qu’en 1909, c’est-à-dire à 90 ans après
la découverte (Hadaczek 1909, p. 13-18, fig. 5).
Dans les études postérieures, on a admis, à tort,
que le dessin présentait les dimensions naturelles
de l’objet et on l’a interprété comme une partie métallique d’un cor à boire, une hypothèse,
trouvant d’ailleurs des confirmations dans les
trouvailles scandinaves (Antoniewicz 1954). En
effet, sur le territoire de la Péninsule de Jutland et
des îles danoises, on observe une concentration
des trouvailles de ce type (Hachmann 1991, p. 857958 ; Abb. 59). Une recherche, menée par J. Głosik
au début des années soixante-dix, dans la presse
quotidienne datant de l’époque contemporaine
(Gazeta Warszawska, le 17 juin 1826, nr 113, 1707)
à la découverte de San à Radymno démontré, que
la tête en question (après la conversion des unités de distance et de poids au système métrique)
mesurait environ 22 cm de largeur, la longueur
des cornes atteignait 29,7-36,4 cm et le poids 1 350
grammes (Głosik 1973, p. 59). Malheureusement,
comme on a déjà remarqué, la trouvaille de la
rivière San à Radymno a disparu et, à présent,
nous ne disposons que du dessin de 1909. Sur ce
dessin on peut néanmoins observer des détails
qui permettent de relier cette représentation de la
tête du bovidé avec l’art celtique. Nous pensons
ici surtout aux boules, se trouvant à l’extrémité des
cornes (Vial 2001,p. 31-32).Des représentations des
bovidés avec les cornes bouletées ont été entre
autres découvertes à Jasseines (Aube), à Vienne
(Isère), à Altenburg et à Mörslingen (Allemagne)
(Déchelette 1927, p. 1018-1019,; fig. 691 ; Bittel 1981,
p. 104-105, Abb. 40 ; Seitz 1988).
Le motif de tête de bovidé avec les boules à l’extrémité des cornes est aussi connu
comme un détail de chenets ou de cadres en
fer de Stradonice (République Tchèque), Wauwil
3. Épée de Rzeszów et son fourreau. Collection du
muzeum Okrégowe de Rzeszów. (musée régional).
n° 1 : épée en fer ; n°2a : fourreau en fer (cliché T. Bochnak).
169
TOMASZ BOCHNAK
(Suisse), Kappel (Allemagne) de Welwyn (tombes
A et B) (Angleterre), de St. Bernard, de Vienne ou
du couple de chenets de fer d’une riche tombe
de La Mailleraye-sur-Seine (France) (Stead 1967,
p. 53, 55, 57-58 ; Gallay, Huber 1972, p. 318-326 ; pl.
11-13 ; Kimmig 1981, p. 200, Abb. 111-112 ; Feugère
1982 ; Lequoy 1993, p. 126-127, fig. 9, n° 6-7). On
peut observer des détails semblables aussi sur
un couteau de Heppenheim (Hesse) ou bien
sur une figurine en bronze, probablement un
pendentif provenant de Manching en Bavière
(Allemagne) (Déchelette 1927, p. 568 n° 6 ; v. Endert 1991, p. 55-56 ; Taf. 13 : 244). On connaît aussi
des représentations pareilles au Mont Beuvray
(Bulliot 1899, p. 202-203 ; Thiollier 1899, pl. 49, n° 24 ; Teegen 2004). Les découvertes de ce type sont
datées généralement à La Tène finale.
Les boules sont aussi aux extrémités des cornes rehaussant des casques, comme on peut
l'observer sur l’exemplaire dragué dans la Tamise
à Londres ou sur les plaques du chaudron de
Gundestrup (Botheroyd, Botheroyd 1998, p. 334,
335). La manière de fixer des cornes à la tête observable sur le dessin de la tête de San à Radymno, est
proche de l’assemblage du masque chevalin en
bronze provenant de Torrs (Écosse).
Il faut pourtant remarquer que les analogies du
monde celtique mentionné ci-dessus sont représentées par des objets de petite taille, exécutés en
bronze ou en fer (chenets). Je ne connais qu’un
objet en argent, orné avec un motif de cornes
bouletées. Je pense à une trouvaille partiellement
conservée (probablement une cruche) provenant
d’un tumulus détruit à Kołokolin (Ukraine) (ill. 4,
n° 2) (Ŋmiszko 1935, p. 156-159, fig. 43, n° 1-5, fig. 45
n° 3). En se référant aux monuments qui l’accompagnaient, entre autres les fibules du type 44 selon
O. Almgren, la découverte de Kołokolin est datée
du début du Ier s. ap. J.-C. L’utilisation de l’argent
dans la toréuthique est un fait plutôt rare dans le
milieu celtique, mais ce métal est typique pour
la culture thrace et géto-thrace. Sur le territoire
thrace on connaît des représentations animalières
en ronde-bosse, surtout en forme de pythons. Il
faut remarquer que dans la littérature on soulignait l’existence des liens entre les Celtes et les
Traques, les Gétes et les Daces (Woťniak 1974 ;
1975 ; Sulimirski 1976 ; Iaroslavschi 2000 ; Megaw,
Megaw, Theodossiev, Torbov 2000 p. 37-41).
On connaît des objets d’art possédant aussi
bien les traits caractéristiques de la culture celti-
170
que et des cultures géto-daces ou thraces. Il s’agit
par exemple du chaudron de Gundestrup ou du
torque de Trichtingen (Kimmig 1981, p. 193-195 ;
Eichhorn et. al. 1987 ; Hachmann 1990). Il n’est pas
exclu qu’il faille y ajouter la tête de bovidé de San
à Radymno et la vaisselle en argent de Kołokolin,
mais cette question mérite d'être approfondie.
Le dépôt suivant provient d’un habitat occupé
par la population du groupe de Tyniec, une unité
syncrétique d’une culture réunissant des éléments
de la culture celtique (tels que la céramique tournée, les objets métalliques, le monnayage, et le
rite funéraire, qui ne se laisse pas découvrir par
les méthodes archéologiques actuelles) et de la
culture de Przeworsk (la céramique non tournée
dont la présence augmente systématiquement
dans les phases successives). Sur le site archéologique de Cracovie-Nowa Huta-Wycićŧe, on a
entre autre découvert un fourneau sidérurgique
laténien dans une structure contenant de la céramique graphitée et à proximité d'un dépôt d'outils
en fer (ill. 5). Le dépôt se composait de trois
haches à douille rectangulaire, de deux ciseaux
et d’une faux (Buratyĸski 1951-1952). Ces outils
trouvent de bonnes analogies dans les matériaux
celtiques, entre autres à Stradonice et à Manching
(Déchelette 1927, p. 864-867 ; fig. 595 ; Jacobi 1974,
p. 28-32, 35-37 ; Taf. 9, 13-15). Il est impossible
de présenter une interprétation définitive de la
trouvaille de Cracovie-Nowa Huta-Wycićŧe, mais
il faut remarquer, qu’elle est constituée par des
outils de charpentier et un outil agricole, donc
par des objets répondant aux activités humaines
différentes.
D'autres dépôts contenant des objets celtiques
sont à Rembielin, dans la région de la Mazovie
septentrionale (Waluŋ 1992) à la phase contemporaine de La Tène B et de La Tène C1. C’était une
zone limitrophe entre la culture de Poméranie
et de la culture “des tumulus des Baltes occidentaux”, c’est-à-dire d’une culture qui s’étendait
sur les terrains du nord-est de la Pologne, de la
Lithuanie et de la région de Kaliningrad. Ces deux
cultures appartiennent au premier âge du Fer, et
leurs racines remontent à l’âge du Bronze. Il est
dont évident, que la découverte des trouvailles
celtiques dans ce contexte-là était une grande surprise. Le site a été très dévasté et publié en partie,
mais on y a trouvé, entre autres, une série d'objets
celtiques typiques pour La Tène B2.
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
5. Le dépôt de Kraków Nowa Huta-Wycićŧe. n° 1-3 : haches à douille en fer ; n° 4, 5 : ciseaux en fer ; 6 : faux en fer
(d'après Buratyĸski 1951-1952).
171
TOMASZ BOCHNAK
6. Quelques objets provenant du dépôt de Rembielin (Mazovie septentrionale) - n° 1-5 : les fibules (n° 1 en bronze ;
n° 2-5 en fer) ; n° 6 : fragment de torque en bronze ; n° 7 - 11 : bracelets en bronze (d'après Waluŋ 1992).
172
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
À Rembielin, on a identifié un ensemble de
sites d’habitat et de nécropoles, mais l’homogénéité des inventaires est souvent douteuse. On a
trouvé, près l’un de l’autre, deux bracelets intacts,
quatre fragmentés et un élément d’un torque en
bronze. À côté des bracelets on a rencontré des
fibules du type Duchcov, dont l’une en fer porte un
petit disque sur l’aiguille (ill. 6). Des constructions
semblables sont rares, d’après Adam Waluŋ, elles
peuvent trouver une analogie dans certaines fibules d’Ornavasso (Graue 1974, p. 41-42,Abb. 4, n° 2,Taf.
17, n° 1, p. 54, n° 7 ; Waluŋ 1992, p. 92). À Rembielin,
on a découvert aussi une hache en fer et un ciseau.
Il est difficile de dire, si ces outils doivent être reliés
avec les parures celtiques, mais sans aucun doute
ils ne sont pas typiques pour les cultures indigènes.
Sur le terrain du site à Rembielin on a recueilli en
plus de petits fragments d’objets non identifiés en
bronze, vraisemblablement rassemblés pour être
refondus. Le contexte archéologique des trouvailles
en question n’est pas net. On ne peut pas préciser
exactement à laquelle des cultures indigènes il faut
relier le dépôt. Selon les dernières conceptions, le
site pourrait être rattaché à la culture de Poméranie
(Woťniak 1995, p. 206). Vraisemblablement il s’agit
d’un dépôt d'objets celtiques enfoncé dans un
tumulus aplati, mais on ne peut pas exclure que les
importations celtiques aient fait partie de l’équipement d’une ou de plusieurs tombes. Il paraîtrait
que la présence d'objets celtiques si éloignés de
terrains occupés par des Celtes trouve ses racines
dans le commerce de l’ambre. On sait, que les
Celtes ont été intéressés par cette substance, obtenue au bord de la mer Baltique. La participation
des Celtes dans ce commerce est attestée aussi
par les stocks d’ambre, entre autres à WrocławPartynice, où on a trouvé à peu près 1 500 kilos de
cette matière première, dont le plus grand morceau
pesait 500 g. (Godłowski 1978), où à Stare Hradisko
en Moravie. Les influences celtiques sont aussi visibles sur la Péninsule de Sambia, où l’on observe
une certaine quantité des importations celtiques
(Pozarzycka-Urbaĸska 1978).
LA CULTURE DE PRZEWORSK
La culture suivante présente sur les terres
polonaises, où on observe des dépôts d’objets
métalliques est la culture de Przeworsk. Comme
on a déjà mentionné, cette culture est considérée
comme la plus celtisée parmi toutes les cultures
non-celtiques. La majorité des parures métalli-
ques, des éléments de costumes, de l’armement
(surtout des épées et des éléments de ceinture
d’épée) trouvaient des analogies précises sur les
territoires celtiques et pratiquement elle ne diffère
pas d’objets celtiques. Malgré les constatations d’E.
Blume et de J. Kostrzewski (Blume 1912, p. 178-180 ;
Kostrzewski 1919, p. 243), qui ont démontré la présence des dépôts particuliers au caractère votif,
il est admis de croire que les dépôts votifs, aussi
bien d’objets métalliques (sauf ceux de monnaies
romaines) que d’autres, n’étaient pas connus
sur les terrains polonais au second âge du Fer et
durant la période des influences romaines. Cette
opinion se trouve modifiée avec les travaux de
T. Dćbrowska qui a assemblé des découvertes votives de la période préromaine précoce, et avec ceux
de T. Makiewicz qui s’est occupé de la problématique des dépôts d’armes en Kouïavie (Dćbrowska
1988a, p. 202-204 ; Makiewicz 1992 ; 1995). Nous ne
connaissons pas de trouvailles des dépôts massifs
d’objets métalliques (ni autre, d’ailleurs) qui pourraient être attribués avec certitude à la culture de
Przeworsk, mais dans le centre de la Pologne, en
Kouïavie, on observe très nettement une région
abondante en découvertes d'épées provenant des
rivières et des lacs (ill. 7).
La concentration de trouvailles de ce type
permet pratiquement d’écarter les suppositions
que les armes se soient trouvées dans l’eau par
hasard. Il faut pourtant remarquer, que l’état de
recherches sur ce terrain dépend en partie de
l’exploitation intense, dans le passé, de la tourbe.
Nous tenons à souligner, que nous ne disposons
pas de trouvailles d'âge du bronze, du premier âge
du Fer et de Moyen Âge provenant de cette région.
D'autre part, la zone, où nous avons découvert ces
dépôts d’armes, n’est pas intensivement occupée à
la période préromaine précoce et à la période des
influences romaines. En plus, dans d’autres rivières de la région, nous n'avons pas trouvé d’objets
militaires, malgré la même intensité des travaux
d’exploitation de la tourbe. Les trouvailles en
question ne peuvent pas être considérées comme
des éléments d’équipement des tombes lavées
par la rivière, parce que les armes ne portent pas
de traces d’action du feu, ce qui est un trait caractéristique pour les offrandes funéraires de cette
époque-là. En plus, la population de la culture de
Przeworsk fondait généralement ses nécropoles
le long de petits cours d’eau ou à une certaine
distance de la rivière.
173
TOMASZ BOCHNAK
7. Territoire de la Pologne à La Tène D (représentation uniquement de quelques cultures ou phénomènes choisis). (Carte T. Bochnak.)
Culture de Przeworsk
8. Babimost, com. Babimost, dans le cours d’eau. Pointe de lance (Lewczuk 1997, p. 83).
9. Białoŋliwie, com. Białoŋliwie, dans la rivière Noteþ. Deux épées et deux fourreaux ; (Kostrzewski 1919, p. 89, 91, 94 ; Abb. 72a ;
Makiewicz 1992, p. 113 ; ryc. 4, n° 2-4).
10. Biskupin, Pointe de lance (Maciejewski 1962, p. 221).
11. Chmielniki Bydgoskie, com. Nowa Wieŋ Wielka dans le lac. Une épée ; (Naumowiczówna 1963, s. 383).
12. Inowrocław Mćtwy com. Inowrocław, dans la rivière Noteþ. Une épée (Kostrzewski 1919, p. 90 ; ryc 75a ; Petersen 1940, p. 33 ;
Zielonka 1970, p. 197 ; Makiewicz 1992 ; Łuczkiewicz 1997, p. 200).
13. Kunersdorf, Kr. Bad Freienwalde, Allemagne, (Lewczuk 1997, p. 100, 101 ; tableau 11, n° 9).
14. Nowa Wieŋ Ujska, com. Ujŋcie, dans la rivière Noteþ ou sur ses rives. Deux - trois épées. (Piaszykówna 1956, p. 191 ; Makiewicz 1992, p. 113 ;
ryc. 5, n° 1-2 ; Gałĕzowska 1996, s. 168 ; ryc. 7 ; Łuczkiewicz 1997, p. 202, 203 ; ryc. 5, n° 4 ; 2000, p. 359, 421).
15. Ŧurawia, com. Kcynia, dans le marais. (Kostrzewski 1919, p. 85, 279, Abb. 65 ; Makiewicz 1992, p. 112 ; ryc. 3, n° 1 ; Łuczkiewicz 1997, p. 207).
Culture de Jastorf : les matériaux du type de Pikule
17. Pikule com. Janów Lubelski. Dépôt d'armes et d'outils (Garbacz 1991 ; 1994 ; Wichrowski 1997 ; 1998 ; Kokowski, Łuczkiewicz 2002 ;
Wichrowska, Wichrowski 2002).
À présent, nous connaissons cinq épées du
second âge du Fer sorties du lit de la rivière Noteþ
(ill.8). Deux autres épées sont trouvées respectivement dans un lac et un marécage. Il est remarquable
que les trouvailles des épées de Kouïavie montrent
de fortes influences celtiques. Toutes ces épées
sont des exemplaires à deux tranchants, alors que
la population de la culture de Przeworsk utilise
des armes à un seul tranchant. La proportion du
174
nombre des épées à deux tranchants, importations
celtiques ou imitations, par rapport au nombre de
glaives à un seul tranchant est de 4 pour 1.
Les découvertes de Noteþ sont souvent des
exemplaires somptueux, sans aucun doute de
grande valeur. Deux d’entre eux possèdent des
marques de forgeron. Une épée, (malheureusement non conservée) draguée dans la rivière
Noteþ à Białoŋliwie, avait une lame fabriquée
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
8. Épées et fourreaux en fer de la culture de
Przeworsk (Pologne). n° 1 : épée de la rivière
Noteþ à Białoŋliwie (1a : photo provenant de la
documentation privée de J. Kostrzewski ; 1b : dessin
de J. Kostrzewski) ; n° 2 : épée de la rivière Noteþ
à Inowrocław-Mćtwy (dessin de S. Jasnosz publié
par T. Makiewicz avec plusieurs versions du dessin
de la marque, dont celle placée en haut, jusqu’à
présent inédite, provient de la documentation
privée de J. Kostrzewski) ; n° 3 : épée de la rivière
Noteþ à Nowa Wieŋ Ujska ; n° 4 : épée du marais
à Ŧurawia ; n° 5 et 6 : fourreaux de la rivière
Noteþ à Białoŋliwie (5 : dessin de J. Kostrzewski) ;
n°1b - 8 : sans échelle.
175
TOMASZ BOCHNAK
par assemblage de plusieurs barres de métal. La
marque frappée sur l’exemplaire en question
(une demi-lune) (ill. 8, n°1a) et celle sur l’autre
épée, draguée dans la rivière Noteþ à InowrocławMćtwy (une tête humaine ?) (ill. 8, n° 2) ont des
analogies proches avec les marques celtiques
déjà répertoriées (Drack 1954, p. 55).
L’une des deux épées de Białoŋliwie possédait
vraisemblablement un fourreau chagriné (ill. 8,
n° 6). Ce dernier exemplaire ne s’est pas non plus
conservé, mais la façon dont le dessinateur avait
rendu le décor du fourreau est analogique à celle
du dessin du fourreau d’une épée de Skalice en
Silésie, qui sans aucun doute était chagriné. La
plupart des épées de Noteþ, dont on peut préciser
la chronologie, sont datées à la phase A2 du développement de la culture de Przeworsk, c’est-à-dire
à La Tène D1. Il s’agit de longues et lourdes épées
aux estocs arrondis, destinés à trancher. Leur longueur atteint à peu près 100 cm et la largeur de la
lame dépasse 5 cm.
Une épée de Ujŋcie est connue seulement
d’une photographie publiée par Alina Gałĕzowska.
La qualité de cette photo ne permet pas, à mon
avis, d’établir avec certitude, si l’arme représentée
est une épée de La Tène moyenne (suggestion
de P. Łuczkiewicz), ou plutôt un glaive romain,
caractéristique pour le Haut Empire (selon
A. Gałĕzowska). (Gałĕzowska 1996, p. 168-170, ryc.
7 ; Łuczkiewicz 2000, p. 359, 421).
D'autres trouvailles d'armes de Kouïavie proviennent des tourbes de Ŧurawia et de Biskupin.
À Ŧurawia, on a découvert une longue épée (ill.
8, n° 4), et à Biskupin - une pointe de lance. La
coutume de déposer des armes dans un milieu
humide se maintient, en Kouïavie, à la période des
influences romaines. À cette époque-là, on donne
en offrandes, aussi des glaives à un tranchant
et des pointes de lances. En dehors la région
de la Kouïavie, dans la culture de Przeworsk, la
tradition, d’offrir de l’armement est rare dans le
moyen bassin de l’Oder. À Babimost, on a découvert une pointe de lance, et à Kunersdorf, (Kr.
Bad Freienwalde en Allemagne) on a trouvé une
épée dans son fourreau, un chaudron en bronze
de type Eggers 4/5 et une bague en bronze. Selon
J. Lewczuk, la trouvaille mentionnée doit être
identifiée comme un ensemble de la culture de
Przeworsk (Lewczuk 1997, p. 100-101 ; fig. 11, n° 9).
Le plus souvent, les trouvailles provenant
d’un milieu humide sont interprétées comme
176
des offrandes ou des dons, destinés à une divinité. Il faut néanmoins rappeler qu’une tradition
particulière observée à Athènes antique permet
d’admettre que les dépôts d’armes dans l’eau
pouvaient avoir un autre caractère que celui
d’offrande. Dans le cadre du rite dit Bouphonia,
on sacrifiait sur un autel dédié à Zeus Polieus
un taureau, et ensuite on cherchait à établir le
coupable de la mort de cet animal. On accusait,
successivement, des femmes, qui ont apporté
de l’eau pour laver les outils de sacrifice, des
hommes, qui aiguisaient le couteau et la hache,
et enfin des mageiroi, qui ont tué le taureau.
Le procès se terminait par une sentence disant
que le seul coupable était le couteau, qui, de
ce fait, devait être éliminé et jeté dans la mer
(Frazer 1978, p. 351-352 ; Lengauer 1994, p. 84-85).
Évidemment, nous ne pouvons rien dire sur les
racines de la tradition de déposer l’arme dans
un milieu humide en Kouïavie, mais je crois, qu’à
côté des interprétations les plus simples il faut
aussi montrer la possibilité d’autres explications.
Les éléments de la culture de Jastorf
et des cultures apparentées
On ne peut pas préciser si la déposition des
armes dans un cours d’eau ou dans la tourbe
présente dans la culture de Przeworsk doit être
interprétée comme un élément des influences
celtiques, ou plutôt comme le témoignage des
contacts avec des populations de l’Europe du
nord, où les pratiques pareilles sont largement
répandues. Sans doute, les dépôts de colliers en
forme de couronne dentelée, trouvés dans les
rivières ou dans les tourbières doivent être interprétés comme un élément de la culture de Jastorf
(ill. 9) (Kostrzewski 1926 ; Woťniak 1977, p. 276 ;
Dćbrowska 1988a, p. 182-184 ; 1994 ; Domaĸski
1995). Du territoire polonais proviennent neuf
colliers de ce type dont deux ont été trouvés séparément dans un milieu humide. Les trouvailles en
question, selon la chronologie de la période de
La Tène, doivent être datées vraisemblablement à
La Tène C.
Un dépôt d'armes et d'outils découverts à
Pikule, au sud-est de la Pologne, au début des
années quatre-vingt-dix se caractérise par sa qualité unique. Des concentrations de céramique,
d'armes et d'outils en fer (plus de 240 objets métalliques) ont d’abord été interprétées comme des
objets de sépultures de la culture de Przeworsk.
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
9. Quelques colliers en bronze, en forme
de couronne dentelée provenant des
territoires de la Pologne et de l’Ukraine.
n° 1 : ýmachowo ; 2 : Wybranowo ; n° 3 :
Daszewo ; n° 4 : Dwikozy ; n° 5 : Kluczewo ;
n° 6 : Boug `a Ulvivok (Ukraine) ; n° 7 :
région de Kiev ; n° 8 : Zalesie (Ukraine)
(planche T. Bochnak, d'après Pasternak
1944).
Depuis une dizaine d’années, cette découverte est
considérée comme un ensemble proche du matériel provenant de la péninsule de Jutland et des
terrains de la culture de Poieneüti-Lukaševka (ill.
10) (Garbacz 1991 ; 1994 ; Dćbrowska 1994, p. 74).
Actuellement, on admet que la découverte
en question, vraisemblablement à caractère votif,
n’appartient pas à la culture de Przeworsk, mais à
des analogies avec du mobilier du bassin de Prout
et de Siret (Kokowski 1999, p. 206-207 ; 2001, p. 112 ;
Kokowski, Łuczkiewicz 2002). Il se peut, que le
dépôt de Pikule reste en relation avec d'hypothétiques contacts entre la population de la culture
de Poieneüti-Lukaševka et de la culture de Jastorf,
propre au bassin de l’Elbe. En effet, une migration
possible de petits groupes établis dans le bassin de
Prout et Siret, et revenus dans le bassin de l’Elbe,
d'après T. Makiewicz (1986, p. 32).
177
TOMASZ BOCHNAK
10. Quelques objets du dépôt du Pikule (Pologne). n° 1,2 : des agrafes de ceinturon en fer ; n° 3 : un fragment de fourreau en bronze ;
n° 4, 5 : des éperons en fer ; n° 6 : une pointe de javelot en fer ; n° 7 : une faux en fer ; n° 8 : une hache à douille en fer.
(D'après Kokowski, Łuczkiewicz 2002.)
178
L'ÉTAT DES RECHERCHES SUR LES DÉPÔTS D'OBJETS MÉTALLIQUES DU SECOND ÂGE DU FER EN POLOGNE
CONCLUSION
En résumant nos considérations, il faut constater,
que les trouvailles d’objets métalliques sur le territoire polonais restent en rapport avec des cultures
variées et que leur origine se situe dans les différents contextes. Pour la culture celtique, à côté des
trouvailles qui se laissent interpréter comme des
dépôts relatifs au commerce (Rembielin et peut-être
aussi Gorzów), il existe aussi des dépôts considérés
comme votifs (l’épée de Wisłok à Rzeszów, la tête
du bovidé de San à Radymno), ainsi que des trésors
de monnaies et d’outils, que l’on peut interpréter
de différente façon. Dans la culture de Przeworsk,
nous pouvons distinguer un groupe dense, concentré sur un territoire limité, de trouvailles d’armes,
souvent d’origine celtique.Ces découvertes peuvent
être reconnues comme un témoignage d'offrandes
déposées dans les cours d’eau.
À présent, il est pourtant impossible de préciser si la coutume de déposer des objets militaires
sur les terres polonaises doit être mise en relation
avec les influences du monde celtique, ou avec
celles de la population des cultures de Barbaricum
de l’Europe septentrionale, où la tradition de déposer des offrandes dans un milieu humide était
séculaire et elle a été observée aussi bien pendant
les derniers siècles av.ant J.-C., qu’à la période des
influences romaines.
Les objets de la culture de Jastorf, c’est-à-dire
les dépôts de colliers en forme de couronne
dentelée et les trouvailles d’armes et d’outils
de Pikule ne trouvent pas d’analogie sur les
terres polonaises et représentent, sans aucun
doute, une culture distincte.Ces objets ne sont
pas d'influences celtiques, mais ils sont dans la
tradition de la population établie dans le bassin
de l’Elbe.
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182
Quelques autres dépôts d'Europe
Jean-Paul GUILLAUMET
Cette première table ronde sur les dépôts aux
âges du Fer présente une abondance de données
sur le sujet. Cependant, pour diverses raisons, nous
n’avons pas réussi à faire présenter par nos collègues un certain nombre de sites de l’Europe. Cette
contribution va essayer de rappeler succinctement
d’autres découvertes souvent peu connues.
LA PÉRIODE DU HALLSTATT
En Moravie karstique, en 1796, on découvre à
BýĀí Skála-Höhle proche de Blansko, une grotte
dont l’exploration archéologique s’effectuera
dans la deuxième moitié du XIXe s. L’ensemble des
découvertes est alors déposé à Vienne, capitale de
l’empire austro-hongrois (ill.1),au Naturhistorisches
Museum. Il s’agit de plus de 700 objets de parure en
bronze (ill.2-3), or, fer et sapropélithe, armement,
vaisselle, outils, pièces de harnachement, éléments
de chars, céramiques, ossements humains de plus
de quarante individus, ossements d’animaux dont
de nombreux chevaux, perles d’ambre et de verre,
amulettes, fusaïole en terre cuite, peson, marteau
et moule permanent en pierre, manche et instruments en bois de cervidés et en os, loupe et barre
de fer, vannerie, cordes et restes de plantes. Les
techniques de fouille de l’époque ne permettent
pas de différencier les phases de dépôts. Les objets
les plus anciens sont datables du Hallstatt C1 et
les plus récents de La Tène B. La grande majorité
des découvertes date du Hallstatt D. Cet ensemble
unique et encore assez mystérieux vient de faire
récemment l’objet d’une publication exhaustive
(Parzinger et al. 1995).
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 183-191 (Bibracte ; 11).
JEAN-PAUL GUILLAUMET
1. Reconstitution très imagée des scènes de sacrifices dans la grotte de BýĀí Skála (d'après Parzinger et al. 1995,
p. 184, fig. 2).
2. La figurine de bovidé de BýĀí Skála (d'après Parzinger et al. 1995, Taf. 4, n° 369).
184
QUELQUES AUTRES DÉPÔTS D'EUROPE
3. Quelques exemples de parures en bronze recueillies à BýĀí Skála (d'après Parzinger et al. 1995).
185
JEAN-PAUL GUILLAUMET
ment un dépôt de la fin du Hallstatt ou du début
de La Tène suivant des modalités déjà en usage à
l’âge du Bronze (Lelong 1994 ; Provost, Ollagnier,
Joly 1994). L'agencement et le type de mobilier
renforcent cette hypothèse.
4. Dépôt de haches à douille armoricaines en alliage cuivreux, en
provenance de Trelly (Manche) (d'après Santrot 1999, p. 18-20).
En Armorique, on peut citer les dépôts de
Treillières et de Ruffigné (Loire-Atlantique) et
en Normandie, depuis la découverte à Trelly
(Manche ; ill. 4), « d’un dépôt de hache à douilles
armoricaines associées à des parures typiques du
premier âge du Fer (Hallstatt D1) tel le bracelet
à engrenages » accompagné d’un bracelet massif à bossettes. Ces dépôts de haches à douille
en alliage cuivreux, associés ou non à d'autres
mobiliers, sont considérés du premier âge du Fer
(Santrot 1999, p. 18-20).
En Eure-et-Loir, dans les années quatre-vingtdix, deux dépôts de cinquante haches à douille
en fer, de 20 à 25 cm de longueur, pesant environ
300 g, ont été découverts fortuitement lors d’un
labour, sur la commune de Nottonville. La fouille a
montré, pour chaque dépôt, une disposition dans
un rectangle, sans doute une caisse. D’après une
photographie (ill. 5), la majorité des haches est
empilée à plat, par quatre, tête-bêche et elles sont
disposées sur les longs côtés encadrés par une
ligne de cinq haches, tranchant vers le bas. Deux
lingots bi-pyramidaux aux extrémités aplaties
inversées du type “Spitzbarren” avaient déjà été
recueillis en ce lieu. Une reprise des recherches a
permis de retrouver la cachette de barres dont le
nombre s’élève à vingt-quatre exemplaires (ill. 6).
Leurs longueurs oscillent entre 380 et 710 mm, le
poids de 3100 à 7300 g. Elles étaient, à l’origine,
empilées les unes sur les autres par six sur quatre
épaisseurs. L’existence de plusieurs dépôts, dont
deux similaires dans un même lieu, suggère forte-
186
Au Liechtenstein, en 1932, on met au jour au
pied de l’éminence de Gutenberg à Balzers, un
ensemble de huit statues, toute en alliage cuivreux,
six humaines et deux animales (Wiss 1978 ; ill.7).
Publié très rapidement, il est encore le plus grand
ensemble de statuettes en contexte de dépôt. Il ne
s‘agit pas d’un ensemble homogène et construit
comme le char de Strettweg. Ces statuettes humaines, toutes masculines, représentent des guerriers
de taille et de facture différentes aux caractères
communs affirmés, nus ou cuirassés, la plupart
casqués. De plus, ils ont tous un sexe apparent. Les
extrémités des bras ou avant-bras sont préparées
pour recevoir bouclier, lance ou hache. Les deux
animaux, un cervidé ou un bouquetin et un sanglier portaient, dans des cavités prévues à cet effet,
des yeux en émail, en verre ou en corail. Ce dépôt
par son association animaux/êtres humains, rappelle celui de Thorigné-en-Charnie (Mayenne) de
la fin du VIIe ou début du VIe av. J.-C. (Santrot 1999,
p. 78-79). Dans les deux cas, il s’agit de statues
dépareillées conservant les traces de fixation
par tenons ou brasure à l’étain sur un plateau en
métal. Cet ensemble est bien souvent considéré
comme de la fin de l’époque gauloise. Par sa cuirasse du même type que celle du Glauberg et sa
nudité héroïque, le grand personnage est datable
de la fin du Hallstatt. Les autres représentations
humaines sont, par leurs traitements et leurs nudités héroïques, affirmées plus anciennes. Les deux
représentations animalières peuvent parfaitement
correspondre à cette période.
En août 1997, la ligue spéléologique de
Bourgogne entreprend le pompage de la fontaine
vauclusienne de La Douix à Châtillon-sur-Seine
(Buvot et al. 1997 ; Coudrot 1996). Dans des
sédiments de la galerie de résurgence terrassés pour l’installation des pompes, apparaît du
mobilier métallique protohistorique. Alerté par
J.-L. Coudrot, conservateur du musée de Châtillon,
le Service Régional de l’Archéologie dépêche
P. Buvot pour suivre l’opération. La surveillance
de l’opération et quelques sondages permettent d’appréhender la topographie antique et
de recueillir un important mobilier. À l’époque
protohistorique la résurgence est sous un grand
QUELQUES AUTRES DÉPÔTS D'EUROPE
5. Dépôt de hache à douille en fer en provenance de Nottonville
“La Pièce de la Cave” (Eure-et-Loir) (d'après Provost, Ollagnier,
Joly 1994).
6 Cachette de lingots à Nottonville “La Pièce de la Cave”
(Eure-et-Loir) (d'après Lelong 1994, p. 49).
7. Quelques représentations de figurines de Balzers (dessins inédits D. Bertin).
187
JEAN-PAUL GUILLAUMET
dans un couloir d’avalanche pour le remplacer
par une protection plus importante du village
en contrebas, ce dépôt isolé comprend quatre
torques et trois bracelets en or, au décor figuré
de grande qualité. Provenant du milieu aristocratique d’Europe moyenne, ils sont datables de la
seconde moitié du Ve s. av. J.-C. (Guggisberg, Voûte
2000).
LA PÉRIODE DE LA TÈNE
8. Fibules en bronze et en fer de La Douix, Châtillon-sur-Seine
(Côte-d'Or) (d'après Buvot et al. 1997).
porche hors d'eau. Elle est un peu fréquentée
dès le Bronze final. Au Hallstatt, on y précipite
des fibules surtout en fer. Ces premiers travaux
ont déjà permis d’en recueillir plus de 210 en
majorité du Hallstatt moyen (ill. 8). À l’époque
romaine, on aménage le lieu et un premier bassin
est construit au moyen d’un mur formant barrage
où l’on dépose des ex-voto en pierres, surtout
des bustes. La totalité, ou une partie de ceux-ci,
pour des raisons inconnues, est tombée ou jetée
dans la résurgence. Si, la présence d’ex-voto
gallo-romains est bien connue dans les sources
depuis les trouvailles des sources de la Seine et
de Chamalières, la découverte d’un tel nombre
de fibules, de la fin du premier âge du Fer, est
exceptionnelle. La seule comparable a eu lieu
en Bohême à Duchcov où au siècle dernier, dans
une source thermale, on a découvert un chaudron en bronze rempli de plusieurs centaines de
fibules, bracelets et anneaux datables de la fin du
IVe s. av. J.-C. (Kruta 1971).
Pour La Tène A, le dépôt d’Erstfeld, dans le
canton d’Uri reste unique. Découvert fortuitement lors de la démolition d’un rocher situé
188
Sur le territoire des Allobroges, deux découvertes ont été souvent qualifiées de dépôts. Dans
les années 1955, sur les pentes de la colline
Sainte Blandine qui domine la ville de Vienne
(Isère) G. Chapotat recueille et étudie un amas de
mobiliers celtiques. Dans les années quatre-vingt,
F. Perrin reprend à son tour quelques travaux de
terrain et l’étude complète du mobilier recueilli
dans la faille de La Chuire, déchirure en forte
pente semblant se jeter dans la tourbière d’Hyèressur-Amby. Il s’agit de céramiques, parure en verre et
en majorité de mobilier métallique, armes, fibules,
vaisselle, outils et ustensiles. La période d’occupation principale est de La Tène D. Aucune structure
n’est associée directement à ces ensembles, très
semblables par leur composition et sans comparaison, avec les autres dépôts d’Europe (Chapotat
1970 ; Perrin 1990).
En Grande-Bretagne (Stead 1995), dans les
années cinquante, à Snettisham (Norfolk) sont
découverts plusieurs parures fragmentaires et
complètes essentiellement des torques et des
bracelets, en or pur et en or allié ainsi que des
monnaies et du métal non travaillé. Depuis, il
est fait régulièrement mention de trouvailles
sporadiques. En 1990-1991, à la suite de nouvelles découvertes, il est décidé de lancer une
opération de fouille. Les prospections et les
décapages s’effectuent sur de grandes surfaces.
Les résultats sont spectaculaires. L’emplacement
de treize dépôts est identifié dans un vaste
enclos polygonal marqué par un fossé interrompu par une entrée à l’ouest. L’ensemble
des dépôts est implanté dans la partie centrale
sans ordre apparent. Certains sont composés de
torques complets (dépôts J, H et L) et d’autres,
comme le dépôt F, regroupent des éléments de
parure brisés en or, argent et base cuivre, de
monnaies et de lingots. Il est proposé de dater
ces dépôts de la fin du Ier s. av. J.-C. et le début
du Ier s. ap. J.-C.
QUELQUES AUTRES DÉPÔTS D'EUROPE
9. Dépôt de Bešeļov (Slovaquie) lors de sa découverte
(d'après ToĀik 1951).
En Slovaquie, les dépôts les plus nombreux et
les mieux connus de la dernière période de La
Tène, sont dans les sites d’habitats fortifiés. Sur
le site de Pohanská à Plavecké Podhradie, sur la
dizaine de dépôts découverts, seulement quatre
ont été fouillés et étudiés. Les trois premiers sont
mis au jour lors des fouilles des années soixante
et le dernier en 2001. Le nombre d’objets par
dépôt varie de six à une centaine. À l’exception
d’un contrepoids de balance en alliage cuivreux,
tous les objets sont en fer. Il s’agit de demi-produits ou de barres, d’outils agricoles et artisanaux,
d’ustensiles, de pièces de char et d’un fourreau
d’épée, le tout daté du IIe s. av. J.-C. Ces dépôts sont
disséminés sur la partie haute dans le rempart
et des lieux ouverts (Pieta 2003). Liptovská Mara
est le site le mieux documenté de la culture de
Puchov qui se développe à partir du IIe s. av. J.C. dans les Tatras. Cinq dépôts se trouvent dans la
partie fortifiée du site, dans les places et les rues.
Un seul, découvert en 1992, possède un aménagement des pièces métalliques sans leurs manches,
dans un contenant en bois ou autres matériaux
périssables. Il se compose de trente objets de fer,
vingt-cinq à usage agricole : six faux avec trois
douilles de fixation du manche, quatre socs, neuf
dents de herse ou de râteau, une hache, un ciseau
à bois et une lame interprétée comme un couteau
de tourneur ; quatre objets domestiques : deux
clés, un couteau, une broche et un indéterminé
(Pieta 2000). À Bratislava, dans le secteur des fours
de potiers, on a recueilli dans un four des instruments agricoles et quelques outils en fer pour le
travail du bois (Rybová, Motyková 1982). Un autre
dépôt d’outil de fer, connu seulement en partie,
provient du village proche de Gajary. À Bešeļov,
ont été découverts d’une façon fortuite huit
objets en fer, une hache à œil, une à douille, une
10. Bijoux en or issus du trésor de Szárazd-Regöly (Budapest,
musée national hongrois) (d'après Szabó 1975, p. 162, pl. VII).
grande lance, deux faucilles, deux ciseaux à bois
et un indéterminé (ill. 9). L’ensemble, à cause de
la hache à œil, ne peut être antérieur à La Tène D
(ToĀik 1951).
En Hongrie, nous avons recensé cinq dépôts
tous datés de La Tène. Deux d’entre eux sont
composés exclusivement d’objets en or. Il s’agit de
l’ensemble de Szárazd-Regöly daté du IIIe ou IIe s. av.
J.-C. (ill. 10) composé de perles à masques, de roues,
de tubes, tous décorés de filigranes, dont les conditions de découverte restent obscures (Szabó 1975).
Le torque de Gajic du même type que ceux de
Fenouillet (Haute-Garonne) et de Civry de Touraine
près de Tours sont également sans contexte précis.
Trois de ces dépôts sont uniquement composés
d’objets de fer. L’un à Dunaújvaros où ont été
découvertes dans le Danube quatre barres de demiproduit en fer (Szabó 1966). Les deux autres ont été
trouvés dans le nord de la grande plaine hongroise.
Ils se rattachent aux phénomènes observés en
Slovaquie très proche. Celui de Petneházá, conservé
seulement en partie dans les collections du musée
archéologique András Josá de Nyíregyházi, trouvé
en 1908 (ill. 11), se compose de six coutres, huit faucilles, une enclume, deux marteaux de forge, deux
pinces de forge, une enclume, un marteau à rebattre,
une lame asymétrique (Müller 1983, p. 61-80, fig. 34). La datation est peu claire et un doute plane sur
l’homogénéité de la découverte. Le troisième dépôt
provient de la fouille franco-hongroise de l’agglomération à fortes activités artisanales celtiques de
Sajópetri, près de Miskólc. Il a été découvert en
2002 lors de l’intervention d’O. Nillesse. Dans une
189
JEAN-PAUL GUILLAUMET
11. Le dépôt de Petneházá (Hongrie) (d'après Müller 1983).
La seule publication (Guichard 2003) donne
une fausse composition du dépôt.
En Roumanie, de nombreux dépôts de périodes plus récentes rassemblent en majorité des
outils agricoles (Glodariu, Iarosslavschi 1979) mais
les travaux anciens seraient à réactualiser.
fosse oblongue, reposaient en désordre sept objets
en fer : deux forces, une hache à douille longue de
160 mm, une agrafe de construction, un outil ou instrument à soie déportée non identifié, une scorie,
une meule plate et un poids avec un anneau d’attache en fer ainsi qu'une perle en os. Cet ensemble
est datable de La Tène B2 comme l’agglomération
où se déroulent trois activités artisanales dans des
secteurs bien séparés :
– Épuration de loupe de fer et fabrication de
barres,
– Manufacture d’équipement guerrier en fer :
épée, fourreau et ceinturon, umbrine et orle de
bouclier, fibule, lance, couteau et rasoir,
– Fabrication de céramique.
Notre approche est donc loin d’être exhaustive
mais montre la diversité et la difficulté d’appréhender la plupart de ces dépôts si aucun travail
récent ne les a fait surgir de l’oubli. Seule une
reprise systématique et une critique de toutes les
données encore oubliées dans les musées permettront de cerner ce nouveau champ de recherche
pour nos périodes.
190
QUELQUES AUTRES DÉPÔTS D'EUROPE
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191
Assemblages métalliques dans les structures
du village d’Acy-Romance (Ardennes)
Bernard LAMBOT
LE VILLAGE D’ACY-ROMANCE (ARDENNES)
L’organisation spatiale du village
Le village de La Tène finale d’Acy-Romance
a été fouillé pendant seize années. Il couvre une
superficie de seize hectares dont seul un hectare,
au sud-est, n’a pu être étudié en raison des réticences de l’agriculteur. L’espace bâti, très organisé, ne
représente qu’une dizaine d’hectares.
Il conviendrait de parler de bourg pour cet
habitat. Unique gros village fouillé exhaustivement en Gaule septentrionale, il présente comme
autre particularité d’être organisé rigoureusement
autour d’une grande place centrale et de trois
cours principales d’un hectare. Un tertre de l’âge
du Bronze a servi de point de référence pour tracer un carroyage rigoureux, base d’un découpage
en parcelles et en lots bâtis.
Sur la partie sommitale du plateau a été installé un grand centre communautaire et religieux
regroupant une place centrale en forme de D
de 3 500 m2 de superficie délimitée par un fossé
palissadé. Cinq constructions cultuelles et leurs
annexes s’alignent parallèlement au grand côté
ouest de la place. Différents témoignages de pratiques cultuelles importantes ont été découverts.
C’est notamment le cas pour dix-neuf jeunes
hommes sacrifiés, d’un vingtième tué d’un coup
de hache et de trois autres individus trouvés assis
dans des fosses quadrangulaires au milieu d’une
grande cour. Des fosses comblées de restes de
brebis, toutes gravides et âgées de trois ans, témoignent d’abattages massifs (Lambot, Méniel 2000).
La dernière découverte de ce type réside dans le
rejet de milliers de fers de lances miniatures dans
la partie supérieure d’un puits.
Position géographique
Au cœur du territoire des Rèmes, cet habitat
est installé sur un plateau dominant la vallée de
l’Aisne d’une quarantaine de mètres. L’oppidum
de Château-Porcien est installé à 6 km à l’ouest, sur
la rive droite de l’Aisne. L’oppidum de Condé-surSuippe/Variscourt est éloigné de 35 km à l’ouest,
celui de Vieux-Laon (la Bibrax de La Guerre des
Gaules de César) à 45 km au nord-ouest et Reims
(Durocortorum) est à 40 km au sud.Aussitôt l’Aisne
franchie, la craie laisse la place progressivement à
des argiles rouges ferrugineuses superficielles
du Jurassique. Les crêtes pré-ardennaises sont à
40 km au nord.
La vallée en contrebas du village est très large
et était consacrée, il y a encore peu de temps
essentiellement à l’élevage. La craie affleure sur
les plateaux.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 193-209 (Bibracte ; 11).
BERNARD LAMBOT
L’étude des structures et de leur répartition
spatiale a permis de proposer des occupations
sociales différentes pour trois grands secteurs de
l’habitat. Au nord se trouvaient les éleveurs, à l’est
les agriculteurs et au sud les artisans forgerons/
dinandiers.
LE MÉTAL
La distribution des objets en métal sur une
partie de La Warde, en nombre et sans distinction
de fonction, montre quelques concentrations sur
un fond assez homogène. Ces points correspondent à des silos ou des caves dont le comblement
principal fait suite à un incendie. Reste que la
présence d’objets en fer en quantité est fonction,
comme pour tout le matériel archéologique, de
l’existence de structures de grande taille ayant
servi de pièges.
Les objets en fer
Il ne sera question ici que des objets en fer.
Le bronze n’interviendra que ponctuellement par
sa présence en compagnie de produits manufacturés en fer. L’or concerne principalement les
monnaies qui témoignent de pertes, un seul objet,
en l’espèce un bracelet, est retenu. L’argent n’est
présent que par un flanc monétaire non empreint.
Le potin est représenté en quantité par des monnaies (350 environ) et quelques anneaux.
Quatre silos, deux caves, trois trous de poteau,
une fosse, une fosse polylobée, un puits, un chablis, de La Tène C2 et La Tène D, une cave et une
fosse rectangulaire augustéennes seront prises
en compte ici. Ces structures se répartissent sur
l’ensemble de l’habitat avec une représentation
plus importante autour de la cour des forgerons/
dinandiers, ce qui est logique (ill. 1).
1. Plan général de l’habitat d’Acy-Romance (Ardennes)
et emplacement des structures mentionnées (plan
B. Lambot).
194
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
LES DIFFÉRENTES CATÉGORIES
D’ASSEMBLAGES D’OBJETS EN FER
Les petits objets fragmentés abandonnés
La structure 082505
Il s’agit d’une fosse circulaire de 1,80 m de
diamètre et de 0,75 m de profondeur, aux parois
sub-verticales. Quelques lentilles terreuses, obli-
ques, témoignent de plusieurs épisodes dans le
comblement qui est par ailleurs homogène. Le
mobilier céramique, très fragmenté, est abondant.
Cette fosse a été comblée dans un temps assez
bref, difficilement appréciable. Les ordures ont eu
le temps de se tasser au fur et à mesure du remplissage, comme le démontrent la densité des terres et
le cône de comblement final peu important.
Les objets en fer, plus d’une trentaine, sont tous
fragmentés (ill. 2). Leur nature est diverse : morceaux
2. Site d'habitat d'AcyRomance (Ardennes).
Objets en fer de la structure
082505. Le fragment de
bracelet torsadé et le petit
anneau sont en bronze
(dessins B. Lambot).
195
BERNARD LAMBOT
de fibules, croc à viande ou fourchette à chaudron,
clous divers, plaquettes de tôle, petits outils, barres
à section carrée, anse de seau cassée. S’y ajoutent
un fragment de bracelet torsadé et un anneau en
bronze, un demi-anneau en potin et une demi-perle
en verre translucide.
Cette structure témoigne d’un comblement
progressif par des rejets domestiques quotidiens,
reliquats de table, vaisselle brisée et balayages.
Les assemblages d’objets entiers
Le silo 082527
Ce silo de La Tène C2, qui fait suite à une première structure, a été recoupé à sa base par un silo
de La Tène D1b. Au fond se trouvait un couteau en
bon état et à une dizaine de centimètres au-dessus
deux socs d’araires usés, mais encore utilisables,
qui étaient enfilés l’un dans l’autre. Cette association de deux socs, connue par ailleurs, témoigne
du démontage des renforts des seps des araires et
leur conservation dans la maison ou l’appentis. Le
comblement inférieur de ce silo correspond à un
nettoyage de bâtiment incendié (ill. 3).
La céramique, abondante, représente le vaisselier d’une maison auquel s’ajoute un nombre élevé
de fragments de vases à conserver dont des dolia.
L’arasement des trous de poteau par la suppression d’un chemin lors du remembrement
nous prive de l’habitation correspondante : maison avec coin de stockage ou maison avec
3. Site d'habitat d'AcyRomance (Ardennes).
Socs d’araires trouvés
emboîtés dans une couche
de nettoyage d’un incendie
de construction et petits
objets en fer (silo 082527)
(dessins B. Lambot).
196
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
annexe ? Le comblement supérieur contenait
quelques objets fragmentés du quotidien, résultat
d’un balayage.
Cave augustéenne 051653
La cave quadrangulaire est comblée de blocs
de torchis, cuits pour la majorité, de charbons de
bois, de céramiques et d’objets métalliques. Cette
structure a été bouchée en une fois en y balayant
les restes d’un bâtiment incendié, probablement
une maison d’après la nature des objets.
Les vases gallo-belges (vingt-cinq exemplaires)
présentent des éclatements thermiques et sont
recuits sur l’ensemble de leur surface. Ils sont brisés mais complets pour la majorité. Chaque type
est en double exemplaire et il s’agit indiscutablement du vaisselier d’une petite maisonnée.
Les objets en fer correspondent dans l’ensemble à l’aménagement de la bâtisse : plusieurs
dizaines de clous de toutes dimensions, charnières, pentures, ferrures de porte et de ventaux,
serrures et clé de porte, clé et éléments de coffre,
clous à tête hémisphérique, un marteau et une
petite boucle à ardillon de courroie en bronze
(ill. 4).
Deux as émis en 17 av. J.-C. à Rome et un
sesterce d’Auguste permettent de dater l’incendie
des premières années de notre ère.
Dans le cas présent, véritable modèle, la
cave a été mise à profit pour le nettoyage de la
maison incendiée. Une partie des murs et l’ossature verticale de la maison ont été préservées, le
comblement des trous de poteau ne présentant
aucune trace d’incendie.
Après certains incendies, les poteaux verticaux
sont arrachés et leur emplacement est comblé de
détritus du nettoyage. Un certain nombre d’objets
métalliques se retrouvent dans ces trous de poteau.
Ils sont généralement entiers comme ceux de la
cave augustéenne et sont des critères de détermination du type de bâtiment ayant brûlé. Très
rare à La Tène finale, le fer devient abondant dans
l’assemblage de la charpente et dans les portes et
volets à la fin du Ie s. av. notre ère.
Commentaire
L’examen de ces quelques structures montre la diversité des cheminements des objets
métalliques découverts. Remarquable aussi est la
différence entre les objets métalliques entiers jetés
à La Tène C2 et même à La Tène D et la période
augustéenne. D’un côté socs d’araires, couteau ;
de l’autre côté ferrures de portes, de volets et de
coffres, clés et l’outil indispensable qu’est le marteau. C’est l’image même de l’habitation, de son
architecture et de son intérieur, qui transparaît au
travers de ces restes.
Les rebuts de forge
La fosse polylobée 027428
Cette vaste fosse est le résultat d’extractions
successives de craie. Ses alvéoles plus ou moins
profondes et volumineuses, ont été creusées au
fur et à mesure des besoins. Elle a été utilisée
en dépotoir et c’est ainsi que des résidus de nettoyage de forge et des environs de l’enclume y
ont été jetés. La récolte des battitures à l’aimant,
limitée à l’endroit le plus riche en scories de forge,
a permis d’en récolter 680 g.
La recherche des battitures dans les trous de
poteau des maisons des forgerons et dans les
fosses et silos proches a été négative. L’érosion
est très importante sur cette pente sud et certains
bâtiments ne sont représentés que par le fond
des poteaux d’un seul côté latéral. Seuls les rejets
contenus dans cette fosse témoignent directement
d’une activité de forge dans ce quartier de l’habitat.
Les fragments métalliques découverts, mêlés à
ces balayages, sont des rebuts et ils présentent, en
ce sens, une grande importance. Qu’y trouve-t-on ?
Essentiellement de petits morceaux de tôles, chutes de pièces découpées elles-mêmes dans des
fragments de métal récupérés. Une pièce de réparation de chaudron et une barre tordue sont deux
exceptions. Ne figure aucun objet complet et, plus
parlant encore, aucun clou intact. Cet assemblage
de fragments métalliques est de nature à caractériser, en l’absence de tout autre élément, une
activité de forge proche. Ces chutes métalliques
n’ont rien à voir avec les objets en fer du silo
082505.
La dinanderie se résume à quelques chutes
de tôles, à une découpe de pièce décorative et à
des rivets coniques de bronze. Une trentaine d’éléments à différents stades d’élaboration permettent
de reconstituer la chaîne opératoire de fabrication
de ces rivets (ill. 5).
Un objet mérite d’être signalé. Une petite boîte
quadrangulaire a été façonnée sommairement dans
une tôle découpée. Une “poignée” est même aménagée. L’art du bricolage ne date pas d’hier et c’est ici
l’illustration de la nature artisanale de la production.
197
BERNARD LAMBOT
4. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Marteau et quelques éléments de serrures, clés, pentures et
autres fragments métalliques provenant de la cave d’une maison augustéenne (cave 051653). Des dizaines
de clous de diverses formes et dimensions accompagnaient ces objets (dessins B. Lambot).
198
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
5. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Petits objets en fer jetés dans une fosse polylobée (fosse
027428). En haut à droite chaîne opératoire de fabrication de petits rivets en bronze (dessins B. Lambot).
199
BERNARD LAMBOT
Les objets de récupération
et la matière première
La fosse 027537
Cette structure de 1,6 m de diamètre et 1,15 m
de profondeur renfermait un bel échantillonnage de
fragments de céramiques, trois vases complets et de
nombreux fragments d’amphores dans son comblement supérieur. Le tout est daté de La Tène D1. Plus
d’une trentaine de restes métalliques se trouvaient
dans le comblement. Aucun objet n’est complet
et certains fragments sont des chutes. D’autres en
revanche présentent un potentiel métallique, certes
limité, mais indiscutable. C’est le cas du fer d’araire
qui bien qu’usé à l’extrême peut être réutilisé et de
la barre de gril transformée en anneau.
Il convient de remarquer une soie d’outil qui a
été tranchée au burin et une barre qui a probablement servi de matière première (ill. 6).
Cette structure se trouve à proximité d’une
construction qui est identifiée comme une maison
de forgeron. Ces objets ont été rejetés dans ce silo
en cours de comblement.
Cette structure est située au nord, sous l’auvent
de la maison du forgeron, à l’ouest de la cour. Une
autre fosse du même type est creusée symétriquement. Circulaires, elles font 80 cm de profondeur
environ et les fonds sont en cuvette. Dans cette
structure ont été découverts des objets métalliques qui sont d’évidence de la récupération. On
y trouve un support longitudinal de gril, deux
barres démontées du même gril, deux fragments
probables d’une autre barre, un morceau de cerclage aplati, un crochet de charpente, un loquet
de porte, une fibule cassée et repliée, un clou à
tête hémisphérique, une tige de section circulaire,
un fragment de barrette aplatie et une pelle à feu
au manche sectionné (ill. 8). Ces éléments sont
susceptibles d’être reforgés pour fabriquer de
petits objets.
Ce mobilier est à comparer à celui du silo
027578. Dans ce dernier cas les chutes de forge et
les objets récupérés sont associés alors que dans
cette fosse se trouvent exclusivement des objets
destinés à être transformés.
La fosse augustéenne 084700
Commentaire
Cette structure quadrangulaire, profonde
d’une quinzaine de centimètres, renfermait une
quinzaine d’objets en fer. Les fragments céramiques, peu nombreux, permettent de dater cet
ensemble de la période augustéenne.
Côte à côte se trouvent une serpette ou couteau à moissonner, une herminette à douille, un
lève loquet, un ciseau, un piton à œil, le tout en
bon état. Deux anneaux de mors, un troisième
anneau de mors ou anse de chaudron, des fragments de panse de chaudron réparé, trois anneaux
de chaîne et un morceau de cerclage de seau sont
des éléments de récupération.
Deux barres métalliques sont de toute évidence des barres de matière première. L’une à
section en “I” a été martelée à chaque extrémité.
L’autre de section carrée est légèrement écrasée
aux deux bouts.
Trois lots peuvent donc être distingués : des
outils utilisables, des objets cassés récupérés, deux
barres de matière première pour la forge (ill. 7).
Une forge fonctionnait donc à proximité, forge
dont aucune trace n’a été retrouvée. Elle se trouvait dans le secteur des agriculteurs, à une phase
où, du grand village initial, ne subsistent que trois
noyaux restreints d’habitat.
Les restes métalliques de la grande fosse
polylobée montrent ce qui subsiste après transformation d’objets récupérés, essentiellement des
chutes de tôles de petites dimensions. Les assemblages ferreux de certaines fosses et silos illustrent
la récupération d’objets destinés à être transformés
et la présence de chutes permet d’évoquer la
proximité d’une forge.
En l’attente d’une étude précise de la distribution spatiale de ces assemblages, il est déjà
possible, grâce aux dessins de la totalité des objets
en fer par structure et par l’existence de scories de
fonds de foyers, d’évoquer l’existence de petites
forges domestiques à l’extérieur du périmètre du
quartier des forgerons/dinandiers.
Le silo 027578
200
Les assemblages volontaires d’objets
Le trou de poteau 027786
Il fait partie d’un bâtiment rectangulaire à
angles coupés au nord-ouest de la cour des forgerons.
Ce bâtiment a été reconstruit une seule fois.
C’est à l’emplacement du poteau de la reconstruction qu’un lot d’outils et de quelques autres objets a
été découvert. Le poteau avait donc été récupéré.
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
6. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Objets découverts dans la fosse 027578 (dessins B. Lambot).
201
BERNARD LAMBOT
7. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Barres de fer, outils, objets divers provenant d’une fosse rectangulaire augustéenne (084700)
(dessins B. Lambot).
8. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Support et barres de gril, objets en fer provenant d'une
fosse du quartier attribué aux forgerons/dinandiers (fosse 027537) (dessins B. Lambot).
202
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
Cet assemblage est remarquable par la qualité
des objets le constituant : une douille à extrémité
arrondie (outil de dinandier ?), un soc d’araire
en bon état, une hache de bûcheron dont le tranchant n’a pas été battu (la plus remarquable du
site), une petite hache transformée en herminette
à tranchant concave, une douille à extrémité
arrondie aménagée avec probablement un fer de
lance après arasement des ailerons, un crochet de
charpente, un briquet, un petit ciseau à soie, une
pelle à feu dont le manche a été sectionné, un
magnifique ciseau à douille n’ayant certainement
jamais servi tout comme la hache et le soc.
Nous y trouvons également quelques fragments divers : barrette perforée, cerclage de seau,
épingle de fibule, ruban plié et une fusaïole. Il
n’y a pas de fragment de céramique mêlé directement à cet ensemble. On peut distinguer un
groupe d’objets neufs ayant trait à des activités
de paysans (labour et déforestation), un groupe
d’outils pouvant être en rapport avec la dinanderie, et un groupe de pièces métalliques récupérées
(ill. 9).
Ce matériel rappelle celui des trois structures présentées précédemment. Mais dans le cas
présent il s’agit d’un véritable dépôt comprenant
des outils d’artisans et des pièces finies, jamais
utilisées semble-t-il. Interpréter ce dépôt n’est pas
aisé. Difficile d’imaginer une cache, qu’elle soit de
précaution à long terme ou le produit d’un vol. Il
aurait fallu profiter du moment où le poteau de la
construction venait d’être récupéré.
Un dépôt cultuel n’est pas une hypothèse plus
positive. Pourquoi associer des bouts de ferrailles
à des outils neufs ?
Les trous de poteau 02208, 02201 et 02229
Ces structures contenaient un ou plusieurs
objets métalliques associés, dans leur remplissage,
qui résultaient tous de nettoyages de bâtiments
incendiés. Dans la première, une barre de gril
accompagnait une faux en excellent état. Dans
la seconde, une anse de seau sectionnée et martelée (publiée fautivement comme ciseau à bois,
Lambot, Méniel 1992) accompagnait un élément
d’entrave, un petit marteau, un manche de brochette, un petit ciseau. La dernière ne renfermait
qu’une petite hache. Rien de véritablement comparable entre les assemblages.
D’un côté il y a un objet en bon état et un élément
n’ayant subi aucune dégradation, de l’autre un
assemblage de pièces de récupération. La hache
est représentative d’un petit nombre d’objets isolés
découverts dans des trous de poteau (ill. 10).
Ces trois trous de poteau ont été retenus en
raison de la diversité des assemblages métalliques
et pour leur présence au sein des bâtiments religieux à l’ouest de la place centrale. Il est souvent
évoqué des dépôts de fondations pour ces objets.
Or, ils sont toujours dans ou à la partie supérieure
du remplissage des structures, dans une position
“secondaire” et dans un milieu de scories d’incendie. En l’occurrence les fragments de céramiques
témoignent d’un feu violent.
Des dépôts de fermeture pourraient être évoqués, mais la diversité des objets et le milieu
détritique renvoient à ce qui a été évoqué pour les
fosses et silos décrits.
Commentaire
Les contextes dans lesquels se trouvaient ces
objets s’opposent à toute interprétation d’ordre
cultuel, que ce soient des rites de fondation, de
condamnation, de gestes propitiatoires ou tout
autre. Une seule certitude : ils ont été déposés, dans
le sens où le geste est perceptible.
C’est notamment le cas pour la lame de faux
posée à plat à l’emplacement d’un poteau qui était
juste assez large. L’ensemble du poteau 02201 peut
s’assimiler aux restes d’un petit atelier domestique
de transformation d’objets récupérés, ramassés et
déposés après l’incendie.
En revanche l’abandon d’une faux en un aussi
bon état conduit à s’interroger. Une explication
pourrait être l’altération des qualités physiques du
métal lors de l’incendie. Le rejet de socs d’araires
ayant souffert du feu dans un silo résulterait du
même principe.
Cette interprétation conduit à imaginer une
abondance et donc un coût négligeable du fer, ce
qui s’oppose à la récupération du moindre bout de
ferraille.
Les objets isolés
Un certain nombre d’objets ont été trouvés
isolés dans des structures diverses. Leur spécificité
et leur contexte conduisent à les séparer des autres
objets trouvés isolés (couteau, hache, hachette,
pied de trépied etc.)
203
BERNARD LAMBOT
9. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Outils divers à l’état neuf et divers fragments métalliques trouvés dans un trou de poteau
d’une construction (027786) (dessins B. Lambot).
204
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
10. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Objets découverts dans des trous de poteau dans le secteur des
temples, à l’ouest de la grande place centrale (st. 02201, 02208, 02229) (dessins B. Lambot).
11. Site d'habitat
d'Acy-Romance (Ardennes).
Fragment de bracelet ou de
petit torque tubulaire en or
(photo B. Lambot).
Un bijou en or
Le fragment de grand bracelet ou de petit torque
tubulaire (diamètre intérieur calculé 10,5 cm) du
silo 114550 trouve ici sa place dans le sens où il est
susceptible d’éclairer l’interprétation qui peut être
donnée pour certain dépôt d’objet isolé. Ce bijou
a été sectionné par pliage et écrasé. L’extrémité
se termine par un anneau d’or d’1 mm de section,
serti par élargissement du tube. À 2 mm de cette
bague un clou l’a traversé de part en part. Cet objet
précieux se trouvait dans un silo de 80 cm de profondeur, à 10 cm au-dessus d’un dépôt de meules.
La structure était remplie jusqu’à la moitié de rejets
détritiques classiques (ill. 11). Le comblement était
égalisé et compacté à ce niveau. Un catillus, cassé
en deux, et un autre, complet, étaient posés bien à
plat au centre de la structure. Le comblement final
était également détritique.
Ce bijou a été arraché d’un support sur lequel
il était cloué d’après les stigmates de la perforation
et l’image antique des torques en or ornant des
statues de bois s’impose. Il s’agirait donc ici d’un
dépôt volontaire à connotation indiscutablement
religieuse. Néanmoins l’utilisation de cet objet
comme monnaie est possible en raison de son
poids, 4,38 g., proche de celui d’un lourd hémistatère. Un autre petit fragment d’un bijou tubulaire
en or a été trouvé dans une petite fosse et donne
crédit à cette hypothèse. Le caractère rituel du
dépôt ne s’imposerait plus en l’espèce, le bijou
étant devenu objet profane.
205
BERNARD LAMBOT
Une hache sortant de la forge a été trouvée
lors du décapage du quartier des artisans, à quelques mètres de la grande fosse polylobée, dans le
comblement d’un chablis (fosse 027424). Elle ne
pouvait qu’avoir été enfouie au pied de l’arbre ou
au moment de sa chute. Cet outil se caractérise par
son état neuf, le tranchant n’a pas été battu (ill. 12).
Les traces de martelage sont parfaitement visibles
sur la totalité de la surface de l’objet. C’est dans
l’environnement immédiat de cette hache qu’a
été découverte la statue en calcaire représentant
le buste d’un personnage. Des tenons latéraux et
une gorge à la base indiquent qu’elle était placée
sur un support de bois ou dans une niche creusée
dans un tronc d’un arbre.
et correspond à des rejets détritiques mêlant os et
céramique. La destruction des fibules, identiques à
une fibule de même type trouvée avec les armes
miniatures, ne semble pas banale en l’espèce.
La fosse 027056 : une pointe de lance réelle
aux ailerons recoupés et martelés, une barre de
gril sectionnée, un couteau ou une lance miniature (?) en cours de fabrication, un anneau en
potin et un anneau en fer se trouvaient dans
cette fosse accompagnant indiscutablement un
bâtiment, maison de forgeron/dinandier. Le niveau
social du propriétaire est attesté par la découverte
dans un trou de poteau (027051) de la bâtisse d’un
hémistatère uniface. Le comblement de la fosse est
détritique, sans particularité.
Un soc d’araire provient d’une petite fosse circulaire (027308) creusée devant un bâtiment au
sud du quartier des forgerons (ill. 12). Lui aussi est
neuf. Le comblement de terre ne renfermait aucun
autre objet archéologique, pas même un tesson.
Commentaire
Commentaire
Si un caractère cultuel peut être recherché
dans ces exemples, c’est par sa simplicité qu’il
se manifeste. En admettant que le fer épuré soit
abondant, facile en approvisionnement et donc
d’un faible coût, l’abandon de tels objets finis à
l’état neuf, en contexte bien particulier, ne trouve
pas d’explication rationnelle.
Les assemblages particuliers
Il convient de présenter sommairement quelques assemblages lâches, de nature différente, qui
trouvent leur place dans le thème traité et soulignent sa complexité.
La fosse 027998 : un fer de lance miniature,
une pointe de couteau, des fragments d’amphores
sont associés à un amas imposant d’os d’animaux.
Patrice Méniel, qui s’est chargé de la fouille,
conclut après l’étude des ossements que cet amas
d’ossements n’est pas de nature commune sur
le site mais ne présente pas non plus de caractères marqués plaidant pour une interprétation
cultuelle indéniable.
La fosse 027949 : deux fibules de type de
Nauheim à arc triangulaire, en bronze, cassées
volontairement se trouvaient dans le comblement
supérieur. Le comblement inférieur est classique
206
Trouvés sur des sites différents, ces assemblages
pourraient faire penser à du rituel. Le dépôt d’ossements d’animaux de la fosse 027949 n’est pas
suffisamment caractéristique, les fibules cassées
sont bien isolées contextuellement et les objets de
la fosse 027056 évoquent un balayage de maison.
Il s’agirait donc de rejets détritiques classiques.
Cette vision doit être moins catégorique. En effet, le
dépôt d’armes miniatures dont il va être question
conduit à avoir une approche plus ouverte et une
interprétation cultuelle est possible.
Un dépôt cultuel de lances miniatures
Cet imposant dépôt contenait plus de 1 500
lances miniatures et un échantillonnage important
de lances réelles mutilées volontairement (ill. 13).
C’est dans le cône résultant de l’effondrement des
parois supérieures d’un puits (027109) qu’ont été
rejetés ces ex-voto parmi lesquels figuraient une
trentaine de petits vases miniatures. La présentation détaillée de ce dépôt ne s’impose pas ici. Il
convient de mentionner la présence d’une fibule
du type de Nauheim cassée volontairement et
dont l’ardillon a été enfilé sur l’arc replié, rappelant celles de la fosse 027056.
Figurent également une bouterolle de fourreau
en bronze, des petits clous de coffrets, une série
de monnaies et de petits éléments communs en
métal, verre, bronze et os. Certains fers de lances
miniatures ont été façonnés avec des fragments
d’orles et d’ailettes d’umbo de boucliers, de
plaques de fourreaux d’épées ou de morceaux
banals de tôle et plus exceptionnellement avec
des morceaux de bracelets tubulaires en bronze.
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
12. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Hache et soc d’araire à l’état neuf trouvés respectivement dans
un chablis et dans une petite fosse près d’un bâtiment (st. 027424, st. 027308) (dessins B. Lambot).
13. Site d'habitat d'Acy-Romance (Ardennes). Dépôt cultuel de lances miniatures (photo B. Lambot).
207
BERNARD LAMBOT
Deux mains d’artisans peuvent être identifiées
parmi les plus belles réalisations, au milieu d’une
fabrication générale de qualité médiocre.
Le mobilier archéologique au sein duquel se
trouvaient ces lances était de nature détritique.
Patrice Méniel qui a étudié les ossements, conclut
à des rejets ne se différenciant pas de façon
exceptionnelle de ce qui se retrouve ailleurs sur le
site. Il y a des rejets de tables et des restes résultant
de balayages de sol. Ce puits a également servi de
latrines, première identification pour la période
gauloise. Plus profondément ont été trouvés des
restes humains rongés frais par des chiens.
Se marient ici des offrandes métalliques,
des restes humains croqués et des déjections,
association singulière peu compatible avec des
manifestations religieuses in situ.
Commentaire
Si le mot dépôt peu éventuellement être
employé pour les lances miniatures, c’est par
commodité. Il s’agit en l’espèce de rejets qui
n’ont rien d’organisé. Ils proviennent du nettoyage
d’un lieu de culte, comme les nettoyages des
maisons incendiées remplissent les silos et trous
de poteau. Or aucune construction ne se distingue par son architecture du bâti des environs
immédiats. Les autres gros dépôts d’armes miniatures proviennent de sanctuaires implantés dans
la partie septentrionale du territoire des rèmes
(Baâlons-Bouvellemont, Mouzon, Ardennes). À
Acy-Romance une construction est obligatoirement un temple et il reste à l’identifier.
Cet exemple est significatif. Il témoigne de la
difficulté de reconnaître les lieux de culte villageois lorsqu’il y a des objets caractéristiques et
dans le cas contraire, lorsque rien ne subsiste des
offrandes, de l’impossibilité même d’une évocation.
On peut alors se demander si les objets des
fosses mentionnées précédemment ne sont pas
les reliquats de pratiques religieuses, individuelles
ou catégorielles ? Fer de lance miniature, couteau
et amas singulier d’os d’animaux, fibules cassées,
lance mutilée, prendraient alors un certain sens.
208
CONCLUSION
À Acy-Romance l’image de la production semble
se limiter à des objets nécessaires à la vie quotidienne
et aux travaux agricoles. Cette perception se modifie radicalement lorsqu’on prend en compte les
objets en fer des sépultures (Lambot, Friboulet, Méniel
1994). Presque toutes renferment un objet, de la
fibule à l’énorme couteau et à la panoplie guerrière.
Les haches et socs d’araires demandent des barres
de matière première plus volumineuses que celles
découvertes sur le site. Aucune de ces grosses barres
n’a été trouvée, pas plus que les marteaux, les enclumes ou les pinces. C’est un témoignage indirect de
l’abandon progressif de l’habitat et du transport de
la matière première et des outils. Le dépôt du trou de
poteau 027786 pourrait trouver sa justification dans le
stockage provisoire d’une partie de l’outillage et de
quelque réserve métallique d’un artisan quittant le
village et démontant sa maison/atelier pour en tirer
quelques subsides. Il faut rejeter l’interprétation en
termes religieux et considérer que les hypothèses sont
innombrables, les circonstances conduisant à enterrer
un tel assemblage d’objets entiers étant multiples.
La grande fosse polylobée réceptrice de
déchets de forgeage permet de reconnaître parmi
des assemblages d’objets métalliques ce qui est
déchets de ce qui est objets récupérés. La différenciation entre objets du quotidien cassés et jetés
avec les balayages, rejets d’objets initialement
récupérés pour être reforgés et rejets d’objets
entiers après incendie, est possible.
La reconnaissance de pratiques cultuelles au travers d’objets métalliques, en l’absence de contexte
à caractère indubitablement religieux, comme un
bâtiment ou des dépôts spécifiques d’ossements,
est particulièrement délicate pour ne pas dire
impossible. À l’examen, nombre de dépôts métalliques, interprétés souvent comme probablement
cultuels, se révèlent simples collectes d’objets usagés ou abandon résultant de la quantité de métal
disponible. La perte des qualités du métal d’un
objet forgé ayant subi un incendie violent n’est pas
suffisante pour justifier l’abandon de certains outils,
bien souvent volumineux. Leur redonner toute
leur efficience n’est pas difficile pour un forgeron.
Si l’abondance du fer peut justifier l’abandon de
certains objets, la récupération de fragments parfois
dérisoires va à l’opposé de cette proposition. Des
superstitions peuvent s’attacher à ces objets ayant
subi la violence du feu. De nombreuses hypothèses
peuvent être proposées.
ASSEMBLAGES MÉTALLIQUES DANS LES STRUCTURES DU VILLAGE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)
BIBLIOGRAPHIE
Lambot, Méniel 2000 : LAMBOT (B.), MÉNIEL (P.). —
Le centre communautaire et cultuel du village gaulois
d’Acy-Romance dans son contexte régional. In :
VERGER (S.) dir. — Rites et espaces en pays celte et
méditerranéen : étude comparée à partir du sanctuaire
d’Acy-Romance (Ardennes). Actes de la table ronde
organisée à Rome les 18 et 19 avril 1997 par l’École
Française de Rome avec la collaboration de la section
des sciences religieuses de l’École Pratique des Hautes
Études, de l’UMR 126 du CNRS et de l’université de
Dijon. Rome : École Française de Rome, 2000, p. 7-139
(Collection de l’École française de Rome ; 276).
Lambot, Méniel 1992 : LAMBOT (B.), MÉNIEL (P.).
— Le Site protohistorique d’Acy-Romance (Ardennes) :
l’habitat gaulois. 1988-1990 (1). Reims : Société
Archéologique Champenoise, 1992 (Mémoires de la
Société Archéologique Champenoise ; 7).
Lambot, Friboulet, Méniel 1994 : LAMBOT (B.),
FRIBOULET (M.), MÉNIEL (P.). — Le Site protohistorique
d’Acy-Romance (Ardennes II : les nécropoles dans
leur contexte régional (Thugny, Trugny et tombes
aristocratiques) 1986-1988-1989. Reims : Société
Archéologique Champenoise, 1994 (Mémoires de la
Société Archéologique Champenoise ; 8/Dossiers de
Protohistoire ; 5).
209
Les dépôts de demi-produits de fer
(VIIIe - Ier s. av. J.-C.)
Contextes et associations de mobiliers
Marion BERRANGER
Les demi-produits de fer (ill. 1), réserve de
matière première, sont destinés à être transformés en objets finis. Ils permettent donc, de par
leur fonction, d’aborder des problématiques
relatives à la sidérurgie protohistorique (entre
autres : Berranger 2004, Crew 1994, Delamare,
Nicolas, Mencarelli 1982, Doswald 1994, FranceLanord 1963, Thouvenin 1984). Néanmoins ces
objets se trouvent majoritairement hors contextes artisanaux (ill 2). Ainsi sur trois cent neuf
sites publiés, situés en Europe continentale,
et ayant livré des demi-produits, seuls dix-sept
ont montré des indices d’un travail du fer
(Berranger 2004). Sur certains de ces sites, il
est aussi possible de mettre en évidence des
abandons volontaires de demi-produits. À partir
des dépôts publiés comportant des demi-produits de fer, nous allons détailler les types de
contextes où se trouvent ces dépôts et aborder certains questionnements que posent leurs
contextes de découverte.
Ne sont présentés ici que les premiers éléments d’une étude qui sera approfondie lors d’un
travail de thèse. Seule la documentation publiée
a été utilisée. Un futur travail se basera également
sur des découvertes non publiées et sur une documentation enrichie. Les sites pris en compte se
situent dans une zone comprise entre la France et
la Pologne. La Grande-Bretagne n’a pas été étudiée,
par manque de temps, vu la richesse de ses sites.
Cette zone continentale fournit un échantillon
suffisant. Elle sera cependant abordée lors des
recherches postérieures. Les résultats avancés ici
sont des hypothèses de travail qui devront être
confirmées lors de ces études postérieures basées
sur des contextes bien documentés.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE : Centre archéologique européen, 2006, p. 211-220 (Bibracte ; 11).
MARION BERRANGER
BREF HISTORIQUE DES RECHERCHES ET
PROBLÉMATIQUES ABORDÉES (ill.1)
Depuis le premier article identifiant des demiproduits de fer (Smith 1905) les recherches sur ces
objets se sont focalisées autour de deux thèmes
principaux : la métallurgie et leur fonction monétaire. L’attention aux dépôts de demi-produits a
été au contraire anecdotique. Parmi les quelques
recherches sur ce thème des dépôts il faut citer
le travail de Kurz (1995) centré sur l’Europe
moyenne. Certains chercheurs britanniques se sont
également intéressés à la question, surtout récemment avec les travaux de R. Hingley (Hingley 1990 ;
2004), d’autres études abordent cette problématique mais de façon ponctuelle dans le cadre de la
publication d’un site (par exemple : Peschel 1979).
Le but de cet article est, dans la suite de ces travaux, de proposer une étude de ces demi-produits
dans les dépôts. Après inventaire (disponible dans
Berranger 2004), l’accent a été mis sur une caractérisation et une confrontation des contextes de
découverte, et une attention au mobilier associé,
qui a été souvent oublié dans ce type d’étude.
Nous allons donc détailler chaque contexte,
résultat d’une étude au cas par cas de chaque
site, afin de présenter les arguments permettant
d’attester si ces demi-produits ont fait l’objet d’un
abandon volontaire ou non. Nous nous interrogerons ensuite sur la présence des demi-produits en
dépôts. À quel titre les produits semi-finis ont-ils
été abandonnés ? L’attention au mobilier associé,
en enregistrant les associations d’objets, devrait
permettre de répondre à ce type de questionnement.
Les dépôts en sanctuaires et quelques sites
(Sanzeno,le Trou de l’Ambre,etc.) ne seront pas étudiés de façon détaillée en raison de l’abondance
du mobilier présent et des difficultés entourant
leur interprétation. Ils feront l’objet d’une étude
ultérieure plus développée.
LES CONTEXTES (ill. 2)
Les habitats
Plusieurs sites d’habitats ont livré des demiproduits de fer sans qu’une activité artisanale
n’ait été mise en évidence. Ces objets sont souvent
situés, non pas dans les niveaux d’habitation, mais
en périphérie des sites. Des demi-produits proviennent des remparts à Bourguignon-lès-Morey
212
en Haute-Saône (Piningre, Ganard 1997, Berranger
2003) et au Grundberg en Allemagne (Urban,
Ruprechtberger 2003). D’autres viennent des fossés
protégeant ou délimitant le site à Creil dans l'Oise
(Fémolant 1989, Malrain, Pinard, Gaudefroy 1996),
Cormelles-le-Royal dans le Calvados (Carpentier,
Marcigny, Savary 2002), Estrées-Saint-Denis dans
l'Oise (Querel, Woimant 2002) et Niederzier en
Allemagne (Joachim 1991). Si, à Creil, Cormellesle-Royal et à Estrées-Saint-Denis, il est envisageable
que les demi-produits soient en contexte détritique, (association avec du mobilier présent de
façon habituelle en contexte détritique dans les
habitats : céramique, éléments de tissage, faune,
etc.), cette interprétation semble peu vraisemblable pour les autres sites. En effet les remparts et
les fossés précédemment cités n’ont pas servi de
zones de rejet. Les demi-produits ne sont effectivement pas associés avec du mobilier ou bien le
mobilier présent ne correspond pas à ceux que
l'on trouve généralement dans ces zones détritiques (éléments de char, outils de métallurgistes, un
nombre important de monnaie (douze et quatrevingt-onze monnaies) de même type). Le contexte
de découverte et les associations de mobilier
indiqueraient donc que ces demi-produits ont été
abandonnés volontairement et non pas jetés après
utilisation.
Un autre élément permet de renforcer cette
interprétation. Plusieurs études ont mis en évidence la pratique du recyclage du fer (Crew 1995,
Orengo 2003). P. Crew souligne ainsi que sur le site
de Danebury (Grande-Bretagne) 80 % des objets
en fer pèsent moins de 50 g. L’intérêt de ce site
est qu’il a livré également des demi-produits de
fer. Ceux-ci pèsent 9 780 g, représentant ainsi 32 %
du poids total du mobilier en fer de Danebury.
La confrontation de ces données permet d’isoler
deux actions opposées. L’une consiste à récupérer
du métal pour le recycler, l’autre à abandonner
une quantité importante de ce même métal qui
de plus était destiné à l’origine à produire des
objets. Les objets de poids réduits sont les témoins
d’une activité détritique : ils ont été rejetés car ils
n’étaient plus utilisables ; les demi-produits ont fait
l’objet d’un abandon volontaire : ils auraient pu
être transformés, mais ils ont été abandonnés pour
des raisons qui nous sont inconnues.
L’étude du mobilier métallique provenant du
site de Bourguignon-lès-Morey (Haute-Saône) conduit au même type d’observation. En 2001, le poids
LES DÉPÔTS DE DEMI-PRODUITS DE FER (VIIIE - IE R S. AV. J.-C.). CONTEXTES ET ASSOCIATIONS DE MOBILIERS
1. Les cinq types connus de demi-produits de fer (Berranger 2003). n° 1 : fer plat à extrémités amincies. Jully-les-Buxy, France (Berranger
2003) ; n° 2 : fer plat à extrémité roulée ou “currency bar”. Seurre, France (Berranger 2003) ; n° 3 : bipyramidé. Saône, France (Berranger
2003) ; n° 4 : barre quadrangulaire. Tiefenau, Suisse (Müller 1990) ; n° 5 : barre à soie. Bibracte, France.
2. Les types de contextes de découverte des demi-produits publiés, situés en Europe continentale
(inventaire dans Berranger 2004).
213
MARION BERRANGER
total des objets de fer découverts sur ce site s’élevait à 2 711 g (Dubreucq 2001). Les demi-produits
en provenant totalisent un poids de 979 g et représentent ainsi 36 % du poids du mobilier en fer de
ce site. Ce type de calcul ne peut être appliqué aux
autres sites faute d’information disponible. L’accès
aux demi-produits et l'étude de ces sites nous laissent cependant envisager l’obtention de ce type
d’information.
Comme à Danebury il est donc possible
d’interpréter la présence des demi-produits de
Bourguignon-lès-Morey comme un acte volontaire.
Traditionnellement les interprétations relatives
aux dépôts proposent deux types d’explication :
ces objets sont des caches de métallurgistes qui
n’ont jamais été récupérées ou ils ont fait l’objet d’un dépôt à vocation cultuelle ou rituelle.
La localisation de ces objets dans des remparts,
emplacements qui peuvent difficilement être
interprétés comme des lieux de stockage, et le
mobilier qui leur est associé, plaident davantage
pour une explication en correspondance avec la
dernière interprétation.
Les contextes humides
Soixante-deux sites publiés et localisés en
Europe continentale sont des contextes humides :
les demi-produits viennent de fleuves, rivières,
marécages ou tourbières.
Pour les objets provenant de zones marécageuses se pose la question de l’existence de ces zones
humides à l’époque protohistorique. Est-ce que ce
sont d’anciens cours d’eau, était-ce déjà des marécages, ou ces zones humides sont-elles apparues
récemment ? Une étude au cas par cas s’avère
nécessaire afin de répondre à ces interrogations.
Il a ainsi été mis en évidence, pour une vingtaine
de sites, que ces demi-produits provenaient d’anciennes rivières ou de fleuves (affluent du Rhin
et la Thielle) disparus mais dont il est possible de
retrouver la trace. L’étude de la disposition de ces
objets permet également de savoir si la zone était
bien humide à l’époque de l’abandon des objets.
À Aubigné-Racan (Lambert 1994) les fouilleurs
ont ainsi observé que les objets reposaient sur
une zone argileuse et que les éléments lourds
étaient plus enfoncés dans le sédiment que les
objets légers. Ces observations permettent de conclure que ce site est une ancienne zone humide.
La présence de ces demi-produits dans des zones
marécageuses, répulsives et peu propices aux
implantations humaines, peut s’expliquer par des
214
actes de déposition volontaires. Ces objets n'ont
pas été perdus sur d'anciennes voies de communication (aucun chemin de planche n’a été mis
au jour par exemple). Une zone marécageuse semble également peu propice pour la conservation
d’une réserve de métal.
Un nombre encore plus important de demiproduits provient de rivières ou de fleuves. Un
demi-produit a été découvert à Saint Marcel
(Saône-et-Loire), associé avec un fragment de placage de marbre, de la céramique et des amphores,
de la vaisselle métallique aux côtés de vestiges de
construction (épandages de pierres et de tuiles)
(Bonnamour 1984). Ce site, datable de l’époque
romaine, est pour le moment le seul exemple du
corpus qui pourrait provenir de l’érosion d’un site
de berge.
Une étude des gués de la Saône (Dumont
2002) donne accès à un inventaire du mobilier
retrouvé sur les sites ayant livré des demi-produits
de fer et permet de connaître la nature de ces
contextes. Ces contextes peuvent constituer un
échantillon afin d’observer si ces demi-produits
ont fait l’objet d’abandons volontaires. Des points
communs aux sites de la Saône peuvent être
observés. Ce sont tous des gués, ils ont livré du
mobilier qui majoritairement ne se rattache pas
à des activités domestiques (armement), et les
demi-produits ne portent pas de traces de transformation en forge. L’hypothèse d’une érosion
d’un site de berge ne semble donc pas leur être
applicable. En revanche ces points communs
sembleraient indiquer une fréquentation de lieux
privilégiés sur lesquels étaient abandonnés du
mobilier, dont des demi-produits de fer. En étudiant
la répartition de ces demi-produits en contextes
humides, on remarque que ces objets sont souvent
présents dans des cours d’eau importants, des fleuves (Rhin, Saône, Danube) et qu’ils sont regroupés
en zones de concentration. Ces concentrations
peuvent cependant s’expliquer, en partie, par un
état des découvertes liées aux dragages. Un travail
identique à celui mené sur les sites de la Saône
permettrait néanmoins d’observer si ces concentrations correspondent également à des gués ou à
des zones d’érosion de berges.
Les sanctuaires
Des demi-produits sont présents dans certains
sanctuaires. Ils se trouvent généralement dans
le fossé d’enclos aux côtés des autres types de
LES DÉPÔTS DE DEMI-PRODUITS DE FER (VIIIE - IE R S. AV. J.-C.). CONTEXTES ET ASSOCIATIONS DE MOBILIERS
mobilier représentés dans ces lieux de culte.
Ils ont également souvent subi les mêmes traitements de destruction que les autres types de
mobilier : torsion ou écrasement (Viand 2000 ;
Brunaux, Rapin 1988).
Deux hypothèses peuvent être proposées pour
expliquer leur présence dans ces lieux : ces objets
ont été utilisés pour le fonctionnement du sanctuaire ou ils ont eu un rôle de représentation :
activité socio-économique ou valeur liée à leur
contenance en métal. Quelle que soit la motivation expliquant leur présence dans ces contextes
ces demi-produits ont été finalement abandonnés
dans l’enceinte du sanctuaire. Leur participation
à l’activité du sanctuaire leur a fait acquérir un
statut spécifique qui leur a interdit de sortir de
l’enceinte sacrée.
Les tombes
Cinq sites publiés sont des contextes funéraires. Les demi-produits sont présents à titre de
mobilier d’accompagnement du défunt. Le mobilier funéraire complet est publié pour deux de
ces cinq sites : les tombes d’Ulversheim (Schaaff
1983) et Ochtrup (Wilhemi 1977). Dans le premier
cas le demi-produit est le seul élément évoquant
une activité artisanale (présence de céramiques,
parure, ustensiles de toilette, etc.), la seconde
tombe comprend des outils liés à un travail en
forge : une pelle à feu et une paire de pinces.
Nous allons observer, par la suite, si le mobilier
associé dans ce type de contexte peut aider à leur
compréhension. L’interprétation des découvertes
isolées ne comportant que des demi-produits
est difficilement abordable et surtout aucun élément (structure, mobilier associé) ne permet de
choisir entre les diverses explications. Ces découvertes peuvent être des réserves de métal qui n’ont
jamais été récupérées ou bien des offrandes. Une
dernière hypothèse, en rapport avec leur valeur
de métal, peut être envisagée. J. Rivallain (2001)
évoque une situation en Afrique où les anciens
conservaient la monnaie dans des trous aménagés
spécialement dans la terre et qui a été abandonnée suite à des combats. Ces demi-produits de
fer, qu’ils aient été des monnaies ou qu’ils aient
été conservés pour leur valeur en métal, auraient
également pu faire l’objet d’une telle conservation. Cependant, les données disponibles sur ces
objets et contextes ne permettent pas de trancher
entre ces interprétations. Peut-être ne faut-il pas
envisager une seule explication, mais plusieurs,
pour comprendre l’existence de ces découvertes
ne comportant que des demi-produits ?
Les pratiques d’abandon :
diffusion du phénomène
Les découvertes isolées
Les observations effectuées précédemment
mettent en évidence l’existence de pratiques
d’abandon volontaire de ces objets, qui ne s’expliquent pas seulement par une volonté de constituer
des réserves de métal. On peut donc supposer que
ces demi-produits ont fait l’objet de dépôts à vocation cultuelle ou rituelle. Ces pratiques concernent
toutes les catégories de demi-produits bien documentés : fers plats à extrémité roulée, bipyramidés,
barres quadrangulaires. Les offrandes ne sont donc
pas en lien avec une catégorie de demi-produit
spécifique mais bien avec ce que représentent ces
objets : activité socio-économique ou valeur du
métal. Les mêmes types de contextes se retrouvent
dans toute la zone de répartition des demi-produits
étudiés, de la France à la Roumanie. Il semble ainsi
que les mêmes pratiques se rattachaient à ces
objets sur une large zone géographique.
Douze sites publiés sont des découvertes non
liées à des structures, et attestées comme telles
par des fouilles ou des prospections. Trois sont
des associations de mobilier varié, les autres sont
des découvertes ne comprenant que des demiproduits.
Une étude des associations de mobilier,regroupé
en catégories fonctionnelles, pourrait être un moyen
de comprendre à quel titre ces demi-produits ont
été déposés. Nous allons tenter d’appliquer cette
démarche aux contextes dont la documentation est
publiée, ayant livré des demi-produits.
Des découvertes récentes de panoplies d’outils
dans les tombes ont fait l’objet d’interprétation
comme “tombes à outils” et non pas en tant que
“tombes d’artisans” (Meylan, Perrin, Schönfelder
2002). La présence de ce type de mobilier devait
néanmoins affirmer un statut particulier du porteur. Ces demi-produits, qu’ils soient présents pour
leur valeur ou en tant que témoins d’une activité
socio-économique, devaient de la même façon
affirmer l’importance du défunt ou, du moins, son
statut particulier, les tombes de ce type sont en
effet très rares.
215
MARION BERRANGER
L'ÉTUDE DES DÉPÔTS
Problématique et méthodologie
La présence de métal brut ou sous forme de
lingot dans les dépôts est attestée dès le début
de l’âge du Bronze. Les outils liés à la métallurgie
sont très peu nombreux dans ces assemblages
de mobilier. S.Verger (1992) pense que les lingots
sont présents dans ces dépôts pour leur valeur en
métal et ne sont pas liés directement à la production métallurgique. Peut-on effectuer les mêmes
observations à partir des dépôts de l’âge du Fer
contenant des demi-produits de fer ?
Nous avons pris comme présupposé que
l’étude des dépôts nécessite la prise en compte
des assemblages de mobiliers. Pour cela nous
avons regroupé ce mobilier en catégories. Les
catégories définies sont :
– la métallurgie, avec les outils ; les moules et
les déchets ; les pinces, qui ont pu être utilisées
dans les métiers de la métallurgie mais également
dans d’autres activités (Guillaumet 1998) ont été
rangées dans la catégorie métallurgie lorsqu’elles
étaient associées avec d’autres témoins de cette
activité (pelle à feu, enclume, etc.). En l’absence
d’indices d’une activité métallurgique nous les
avons classées dans la catégorie généraliste : outils
d’usage divers.
– l’agriculture : avec les faux, faucilles, etc.
– le travail du bois et de la pierre a été regroupé
car le même type d’outil est utilisé dans ces
activités : coin, gouge, ciseaux. La taille des
outils permet de différencier les activités, mais
nous n’avons généralement pas eu accès à
une illustration permettant d’obtenir ce type
d’information.
– outils d’usage divers. Cette catégorie regroupe
les outils ayant pu être utilisé dans diverses
activités, les marteaux, les limes, les spatules,
les masses, etc. et les outils de nature indéterminée.
– la vaisselle métallique.
– la vaisselle céramique.
– la parure.
– l’armement offensif : épée, armes d’hast.
– l’armement défensif : umbos, casques, cnémides, etc.
– l’immobilier, avec les clés et serrures.
– le transport avec essentiellement les éléments
de char.
– le commerce avec les monnaies.
216
nous avons isolé les couteaux et les haches
qui ne peuvent entrer dans une catégorie unique, ils ont effectivement pu avoir plusieurs
fonctions qu’elles soient domestiques, de boucherie ou des activités de sacrifices (Metzler et
al. 1991, Lambot, Méniel 2000).
Dans cette étude, nous ne prenons pas en
compte la quincaillerie car le mobilier présent
dans cette catégorie ne documente pas une catégorie fonctionnelle précise.
–
Valeur en métal
et représentation socio-économique
Le mobilier de dix dépôts publiés peut être
pris en compte dans cette étude. Cette recherche
peut potentiellement être élargie à une vingtaine
de sites publiés qu’il faut documenter. Si l’on
observe les assemblages de mobiliers (ill 3)
dans ces dépôts on remarque que sur les dix
contextes présentés, sept ont livré des objets en
rapport avec la métallurgie. Dans six cas sur sept,
cette activité est représentée par des outils :
– Kappel (Allemagne) : enclume, pinces, pelle à
feu (Peschel 1979),
– Bad Nauheim-Dankeskirche (Allemagne) :
pelle à feu, pinces (Schönberger 1952),
– BýĀi Skála (Tchéquie) : enclume, pince
(Parzinger, Nekvasil, Barth 1995),
– Tiefenau (Suisse) : pelle à feu (Müller 1990),
– Grundberg (Autriche) : enclume (Urban,
Ruprechtberger 2003),
– Ochtrup (Allemagne) : pelle à feu, pince
(Wilhemi 1977).
Ces outils ont pu représenter l’activité d’un
métallurgiste et les demi-produits pourraient être
liés à cet ensemble et tenir également ce rôle
de représentation. Ces demi-produits sont, par
ailleurs, les seuls objets ayant un rôle de réserve
de métal dans ces assemblages de mobilier. Si ces
dépôts sont une accumulation d’objets précieux
par la quantité d’objet déposé, ils sont également
un assemblage d’objets de nature et de fonction
différentes. Ces données amèneraient donc à
interpréter la présence des demi-produits, dans
ces dépôts, non en tant que valeur accumulée, en
tout cas pas davantage que le reste du mobilier
présent dans ces contextes, mais comme représentant de l’activité métallurgique, aux côtés des
outils appartenant à cette activité.
À l’exception des sanctuaires et des tombes
dans lesquels les demi-produits sont toujours
associés avec du mobilier, tous les types de
LES DÉPÔTS DE DEMI-PRODUITS DE FER (VIIIE - IE R S. AV. J.-C.). CONTEXTES ET ASSOCIATIONS DE MOBILIERS
3. Catégories de mobilier associé aux demi-produits de fer dans des dépôts de différentes natures. Les trois derniers sites
correspondent aux contextes pour lesquels sont attestés des dépôts successifs (M. Berranger).
contexte ont livré des demi-produits sans mobilier associé. Ces “dépôts” ne contenant que des
demi-produits se retrouvent effectivement dans
les habitats, à Pohanska (Paulik 1970 ; 1976) ou
au Grundberg, dépôt 4 (Urban, Ruprechtberger
2003). Dans les milieux humides, l’isolement des
demi-produits est attesté sur quelques sites. À
Hedingen (Hieirli 1901) ou Schwadernau (Von
Kaenel 1981), Rheinhausen (Anonyme 1925) ou
Janneby (Peschel 1979) les demi-produits ont été
retrouvés dans des fosses aménagées dans une
tourbière ou dans l’ancien cours d’une rivière,
sans aucun mobilier associé. Enfin, nous avons
déjà cité le cas des découvertes isolées n’ayant
livré ni structure ni mobilier. Nous avons déjà
souligné la difficulté à interpréter ces dépôts
sans mobilier associé.
Une interprétation purement “pratique” est
envisageable dans chaque cas. La présence de
demi-produits dans les habitats peut s’expliquer,
comme pour les découvertes isolées de toute structure, comme des réserves de métal non récupérées.
Les demi-produits présents en milieux humides
peuvent provenir de pertes suite à un naufrage ou
à leur déchargement.
Nous avons cependant déjà démontré que
ces interprétations prenant en compte des
explications événementielles nous semblaient peu
crédibles en raison de la localisation récurrente
de ces découvertes : dans les remparts pour les
sites d’habitats ou sur des zones de gués pour
les découvertes en rivière. À Pohanska (Paulik
1970 ; 1976) les demi-produits proviennent
d’une terrasse au sommet de l’oppidum et non
de sa périphérie, ce qui distingue ce site des
autres habitats. L’explication en tant que dépôt
cultuel est néanmoins envisageable car plusieurs
autres dépôts d’objets métalliques sont connus
sur ce même emplacement. La récurrence de
ces découvertes de mobilier, la quantité d’objets
présents (de quelques exemplaires à une
centaine) et leurs caractères communs avec les
autres dépôts d’objets métalliques découverts en
Europe permettent d’interpréter cet ensemble de
découvertes, au sommet de l’oppidum, comme des
dépôts volontaires.
La prise en compte du mobilier associé
montre qu’il existe une séparation entre des
dépôts composés uniquement de demi-produits
et d’autres associant produits semi-finis à d’autres
types d’objets. Comment interpréter cette différence ? La majorité des dépôts ayant livré du
mobilier associé semble indiquer que la présence
des demi-produits est en lien avec leur rôle dans
la production métallurgique. Il serait cependant
simpliste d’expliquer les dépôts ne comprenant
que des produits semi-finis comme des réserves
217
MARION BERRANGER
de métal et ceux avec association de mobilier
comme des représentations socio-économiques.
Les dépôts de Niederzier (Joachim 1991) seraient
un contre-exemple de ce type d’interprétation.
Nous ne connaissons pas tout le mobilier trouvé
avec ces demi-produits mais nous savons que ces
objets sont associés avec une grande quantité de
monnaies (12 et 91) de même type. Ce genre d’association pourrait ainsi être un exemple de dépôt
de valeur métallique regroupant monnaie et fer
en semi-produit.
mobilier publié. Une étude quantitative ne sera
cependant pas oubliée dans une étude ultérieure.
Son objectif sera notamment d’observer s’il existe
une codification dans ces dépôts, en fonction
de leur localisation géographique et/ou de leur
appartenance chronologique.
CONCLUSION
L’étude des dépôts de demi-produits nous
montre que ces objets ont été abandonnés dans
des contextes variés et selon des modalités diverses. Le but de cette présentation était double :
exposer un premier inventaire des types de contextes où peuvent être mis en évidence des dépôts
de demi-produits et tester une étude de ces
dépôts à partir de leur mobilier associé. Ce travail,
à ses prémices, nous a ainsi conduits à définir les
thèmes de recherches à aborder ultérieurement :
– dans quels types de contextes ont eu lieu ces
dépôts ? Quelles sont les différences et les
points communs entre ces contextes ?
– à quel titre sont présents ces demi-produits :
en tant que valeur abandonnée ou représentation socio-économique ?
– existe-t-il une codification dans la constitution
des dépôts ?
Sans adopter cette position caricaturale on
peut cependant tenter d’expliquer ces deux cas
de figure. On peut supposer que les dépôts ne contenant que des demi-produits représentent une
quantité importante de métal et donc de valeurs
sacrifiées. Dans le second type de dépôt, il y a eu
également ce sacrifice de richesse sous la forme
de demi-produits et d’autres objets, mais il se rattache un niveau de complexité supplémentaire
par la volonté d’associer des objets variés dans un
rôle de représentation socio-économique plus ou
moins diversifié.
Une démarche quantitative visant à observer
la proportion représentée par chaque catégorie
fonctionnelle dans un dépôt est la suite logique
de l’étude des dépôts de demi-produits à partir du
mobilier. La documentation publiée actuelle ne
nous permet pas pour le moment de réaliser un
tel travail : très peu de sites ont l’intégralité de leur
Cette recherche sera poursuivie dans le cadre
d’une thèse se basant sur une documentation plus
importante, comprenant les sites exploités ici et
sur des données inédites.
218
LES DÉPÔTS DE DEMI-PRODUITS DE FER (VIIIE - IE R S. AV. J.-C.). CONTEXTES ET ASSOCIATIONS DE MOBILIERS
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220
Les dépôts d’objets en fer dans les établissements
ruraux gaulois de l’ouest de la France
Le rituel est-il au fond de la poubelle ?
Olivier NILLESSE
INTRODUCTION
LES FOSSÉS
Parmi les particularités de l’archéologie celtique, nous avons parfois à faire à des dépôts de
mobiliers en fer enfouis dans le sol. Les exemples
les plus caractéristiques ont fait l’objet d’une
exposition au Mont Beuvray en 2003. Leur interprétation n’est pas aisée, mais dans certains cas,
il est probable que ce matériel a été soustrait
de son utilisation dans le cadre d’un rituel qui
a conduit à sa mise en terre. Les motivations de
tels gestes sont, en revanche, plus délicates à
déterminer. À partir d’un corpus de 76 établissements ruraux majoritairement datés de la fin du
second âge du Fer dans l’ouest de la France des
ensembles essentiellement composés d’objets en
fer sont analysés par type de contenant : fossés,
fosses et trous de poteau. Les mobiliers de onze
sites (ill. 1) retenus pour cette étude, sont d’abord
décrits avant d’essayer de distinguer les dépotoirs
d’habitat des dépôts que l’on qualifie avec prudence de “particuliers”.
Inventaires des sites et du mobilier
Le mobilier métallique est présenté à une même
échelle, c’est pour cette raison que les mesures ne
sont généralement pas données. Les dessins des
différents auteurs ont été numérisés et repris pour
permettre une présentation homogène.
Cairon (Calvados), Eélazar (ill. 2)
Fossé 8
Une évaluation systématique d’enclos repérés
par photographie aérienne a permis d’explorer
l’enclos n° 3 (San-Juan et al. 1999). Les mobiliers
présentés appartiennent à des contextes datés de
La Tène D par la céramique indigène et des amphores Dressel 1. L’occupation se poursuit au Ier siècle
de notre ère.
–
–
–
–
–
8-511 : petite serpette, fragmentaire, fer.
8-512 : hache à soie ou tranchet (?), fer.
8-513 : ciseau droit (?), fer.
8-514 : piton à double attache, fer. La pièce est
insérée entre deux planches.
8-515, 8-517 : douilles coniques à extrémités massives, fragmentaires, fer. Il s’agirait d’extrémités
de bâtons ferrés destinés à planter des végétaux
ou à pratiquer des avant-trous pour installer des
poteaux comme le suggère G. San Juan à la suite
de B. Cunliffe (1984). Plus simplement, ces objets
pourraient correspondre à des socs d’araires.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE, Centre archéologique européen, 2006, p. 221-246 (Bibracte ; 11).
OLIVIER NILLESSE
1. Les sites présentés (DAO J-M. Bryand).
222
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
2. Cairon (Calvados), Eélazar, la fosse 2 n’est pas localisée (DAO J-M. Bryand, d’après San Juan et al. 1999, p. 138, 166).
223
OLIVIER NILLESSE
–
–
–
–
–
–
8-518 à 8-520 : indéterminés, fer.
8-521 : bague, alliage base cuivre.
8-522, 8-524 : anneaux, alliage base cuivre.
8-523 : anneau, plomb.
8-525 : fibule, fragmentaire, alliage base cuivre.
L’objet n’est conservé que par une partie du
pied et le départ de l’arc, il peut s’agir d’un
exemplaire de type La Tène II ou pseudo La
Tène II.
8-526 : indéterminé, alliage base cuivre.
Pouillé (Vendée), Le Grand Paisilier (ill. 3)
L’établissement du Grand Paisilier (Nillesse 1993 ;
Guillaumet, Nillesse 2000) a livré de nombreux
fragments de pilettes de four à sel, un rasoir
et plusieurs outils. La datation est assurée par
un abondant mobilier (amphores, céramiques
indigènes et parures), la phase 1 est attribuée à
La Tène C2/D1a, la phase 2 à La Tène D1a. Les
sondages 5 (2 m de large pour une profondeur
3. Pouillé (Vendée), Le Grand Paisilier. DAO : J-M. Bryand d’après les dessins de P. Noguès, X. Pinto, I. Cattedu (Nillesse 1993,
pl. 4, 51 ; Guillaumet, Nillesse 2000, p. 263).
224
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
identique) ont livré une association de deux
lève-loquets et le sondage 8, deux outils pouvant
être utilisés pour le travail du cuir.
Fossé 1, sondage 5 (phase 1)
–
9-589, 9-590 : deux lève-loquets, fer. Le premier
objet comporte un anneau de suspension, le
second est fragmentaire.
Fossé 1, sondage 8 (phase 2)
–
–
9-596 : gouge à soie, fer.
9-598 : alène, fer.
Autres outils du site provenant de différents
sondages
–
–
9-595 : repoussoir, fer.
9-597 : alène (?), fer.
Dissay-sous-Courcillon (Sarthe),
Beauregard (ill. 4)
Le mobilier céramique indique une date de
création des enclos à La Tène D1 mais la majorité
de l’occupation se situe à La Tène D2a. Le site a
livré deux épées, un rasoir et des instruments agricoles Des outils et une grande quantité de scories
4. Dissay-sous-Courcillon (Sarthe),
Beauregard (DAO J-M. Bryand ;
Nillesse 2004, pl. 4, 62).
225
OLIVIER NILLESSE
en calotte (208 restes pour un poids de plus de
18 kg) témoignent du travail du métal. Les objets
recouverts d’une épaisse gangue de produits de
corrosion ont seulement été radiographiés, ce
qui ne permet pas de produire des coupes. Les
mobiliers présentés ont été trouvés en association
(Nillesse 2004).
–
Fossé 3, sondage 57
–
–
–
54-1182, 54-1183, 54-1185 à 54-1188 : une ou deux
pinces de forgeron, fragmentaires, fer. Si l’on
rassemble les fragments de bras, l’on obtient
un objet de plus de 550 mm. Ce type de grande
taille est attesté par ailleurs en Europe celtique
(Guillaumet 1998). Les trois tiges soudées par la
rouille indiquent peut-être l’existence de deux
outils.
54-1189 : pelle à feu, fragmentaire, fer. Le manche n’est pas conservé.
Fossé 1, sondage 14
–
–
54-1190 : étampe ou tas, fer. L’objet n’étant radiographié que sur une face, son interprétation est
délicate.
54-1191 : objet massif de section rectangulaire,
fer. Il faut attendre son nettoyage pour permettre une interprétation (il peut s’agir d’une
matrice, d’une étampe ou d’un tas).
Fossé 3, sondage 63
–
54-1192, 54-1193 : Deux socs d’araires à douille
ouverte.
Echiré (Deux Sèvres), Piémont (ill. 5)
Une opération de diagnostic a permis de dégager 25 m d’un enclos de 75 m sur 66 m repéré par
photographie aérienne (Nillesse 1998). 35 tessons
correspondent à des écuelles à profil en “S”, à une
jatte à bord rentrant et à un vase ovoïde. Ils étaient
accompagnés de restes d’amphores républicaines.
Ce matériel est daté de La Tène D1. L’ensemble du
mobilier a été trouvé dans un fossé sur quelques
décimètres carrés.
Fossé 1, sondage 1
–
–
226
34-966 : couteau à douille et dos arqué, fragmentaire, fer.
34-967 : chute de barre ou de currency bar, fer.
–
–
–
–
34-968 : attache de ceinturon, fer. Ce modèle
possède un crochet bien séparé de la boucle
comme on en connaît à La Tène D1 (Brunaux,
Lambot 1987).
34-970 : indéterminé, fer.
34-971 : petite serpette à croc, fer.
34-972 : méta de moulin à farine, fragmentaire,
granit.
34-1199, 34-1200 : plaques, fer. Les rabats visibles
sur les côtés indiquent peut-être des éléments
de fourreau d’épée.
34-1201, 34-1202 : fourreau d’épée, fragmentaire, fer (barrette ou bouterolle).
Mondeville (Calvados), L’Étoile II (ill. 6-7)
Le site de l’Étoile (Besnard-Vauterin 1996) a
été dégagé dans sa presque totalité, mais la nature
des terrains ne favorise pas la lecture des structures ce qui explique que la chronologie relative
des différents creusements n’a pas pu être établie
entièrement. L’occupation comporte cinq phases,
elle débuterait à La Tène C pour s’achever au
Haut-Empire. Le fossé dans lequel a été découvert
le mobilier métallique est attribué à la phase 2
(La Tène C) de l’établissement avec beaucoup de
prudence.
Outre le dépôt que nous présentons, le site a
également livré deux cerclages de roues posés
l’un sur l’autre. Ils ont un diamètre de 1 110 mm
pour une largeur de 35 mm. Le matériel d’accompagnement est constitué d’un anneau en alliage
base cuivre, de quelques tessons non identifiables,
d’une mandibule et de quelques côtes humaines.
L’ensemble provient d’une fosse quadrangulaire de
2,05 m de côté pour une profondeur de 1,10 m sous
le niveau de décapage. Les objets sont contenus
dans une couche constituée d’un limon incluant
des charbons de bois, des cendres et une grande
quantité de coquilles de coques. L’auteur de la
fouille rapproche cette découverte des tombes à
char de type Marcilly-sur-Eure (Duval, Verron 1993)
ou de La Mailleraye-sur-Seine (Lequoy 1993) et
propose l’hypothèse d’une tombe pillée. Le dépôt
présenté provient du comblement d’un fossé.
Fossé 215
–
22-802 à 22-806 : chaudron, fragmentaire, fer
et alliage base cuivre. Les deux anses sont
conservées. Sur la pièce 22-805, on distingue
une plaque en alliage base cuivre fixée sur la
bande de fer par deux rivets en fer.
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
5. Echiré (Deux Sèvres), Piémont (DAO : J-M. Bryand ; Nillesse 1998, pl. 3, 5, 7).
227
OLIVIER NILLESSE
6. Mondeville (Calvados), L’Étoile II. DAO : J-M. Bryand (d’après Besnard-Vauterin 1996, pl. 6, 52, 53).
228
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
7. Mondeville (Calvados), L’Étoile II (DAO J-M. Bryand, d’après Besnard-Vauterin 1996, pl. 52, 53).
–
–
–
–
22-807 : six barres, fer, fragmentaires. Elles
appartiennent à un ou plusieurs objets.
22-808 et 22-809 : Deux lève-loquets à anneau de
suspension, fer. L’objet 22-809 est fragmentaire.
22-810 : gouge à douille de section ronde,
fer. Un objet de même dimensions (370 mm)
est connu dans les collections du musée de
Normandie. Il est attribué à un sabotier ou à un
tonnelier (Halbout et al. 1987).
22-811 : serpette en forme de croissant, fer. On
trouve ces serpettes dans des établissements
ruraux gaulois comme au Bac d'Athis (San
Juan 1994) à Eélazar (ill. 2) ou aux Genâts
–
–
–
–
–
–
–
(Guillaumet, Nilesse 2000).
22-812 : lame d’épée (?), fer, fragmentaire.
22-813 : cerclage (?), fer. L’objet pourrait appartenir à un récipient en bois, il est déformé.
22-814 : anneau ouvert (brisé ?), fer.
22-815 : indéterminé, fer.
22-816 : piton ouvert (?), fer.
22-817 : attache de récipient de type seau, fer.
L'objet est à mettre en relation avec l'anse 22-818
(ill. 7).
22-818 : anse à extrémités recourbées pour fixer
les attaches sur un récipient en bois. Le cerclage
22-813 appartient peut-être au même objet.
229
OLIVIER NILLESSE
Caractérisation des dépôts
Dans les établissements ruraux, les fossés sont
utilisés comme dépotoirs. La répartition du mobilier est assez diffuse : à Beauregard, par exemple,
les quantités de matériel par m3 de l’enclos le
plus “riche” avec un poids total de 135 kg sont faibles : 8,4 g d’objets métalliques, 10 g d’amphores,
20 g d’os, 20 g de scories et 76 g de céramiques
indigènes. Dans la plupart des cas, les différentes catégories de matériels sont mélangées et se
distribuent à peu près proportionnellement d’un
tronçon de fossé à l’autre. C’est dans ce sens que
l’on interprète le graphique (ill. 8) figurant les
quantités par type de reste et par sondage d’un
fossé des Genâts (Nillesse 1997). Dans ces structures, les objets en fer relèvent d’activités diverses.
Ainsi, dans le fossé 8 de Eélazar (ill. 2), on identifie
une serpette illustrant le travail du bois, deux probables socs d’araires, une lame de tranchet ou de
hache, un possible ciseau droit et des pièces de
quincaillerie. Le mobilier des fossés est constitué
d’objets usés, cassés ou en bon état.
Au sein de ces rejets,on trouve parfois des objets
relevant de la même activité. Au Grand Paisilier
(ill. 3), un sondage a livré une gouge et une alène.
Les deux outils pourraient témoigner du travail du
cuir. Sur cet habitat, on relève aussi un ciseau droit
et une autre probable alène utilisés pour le même
travail. À Beauregard (ill. 4), une pelle à feu et les
restes d’une ou deux pinces de forgeron ont été
trouvés côte à côte. On note également qu’une
probable étampe et un objet massif peut-être lié à
la paléomanufacture métallique (matrice, étampe,
tas ?) proviennent aussi d’un même sondage. Si ces
objets sont en position primaire de rejet (ce qui
est toujours difficile à démontrer dans un fossé)
ces assemblages peuvent être la conséquence du
rejet simultané d’objets faisant partie d’une même
panoplie.
Parmi les associations d’objets identiques, le cas
des socs d’araire et des clefs “laconiennes” mérite
d’être souligné. À Beauregard (ill. 4), deux socs ont
été trouvés l’un à côté de l’autre. Une fosse du Bac
d’Athis (ill. 9) en livre également deux comme probablement un fossé d’Eélazar (ill. 2) Dans l’Aisne,
à Sermoise, Le Pré du Bout de la Ville (fouilles
F. Gransar, information orale : F. Malrain), trois socs
et une hache étaient contenus dans une fosse. Au
Grand Paisilier (ill. 3), deux lève-loquets proviennent
du même sondage, ce que l’on observe aussi sur le
site des Genâts. Dans l’Oise, à Jaux, Le Camp du Roi
(Malrain 1996), trois lève-loquets et une lame de
forces réutilisée en couteau ont été trouvés groupés
dans un fossé. À L’Étoile II (ill. 6), deux clefs proviennent d’une concentration d’objets métalliques.
8. Composition du mobilier de chaque sondage d’un fossé des Genâts exprimé en nombre de restes. La faune n’a pas été dénombrée
mais uniquement pesée, sa représentation dans ce graphique a été adaptée : 10 grammes d’os = 1 objet.
230
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
L’araire et la charrue possèdent une forte connotation symbolique depuis l’antiquité avec les
labours sacrés et jusqu’à l’époque moderne avec
par exemple le Plough Monday, inscrit au calendrier chrétien anglais. De nos jours des concours
de labours lors de fêtes agraires perpétuent d’une
certaine manière ce sentiment. A.G. Haudricourt
et M. J.-Brunhes Delamarre (1986) dans leur volumineux ouvrage sur la charrue à travers le monde
ont particulièrement développé ce sujet.
Pour l’époque gauloise, des socs d’araires
sont représentés dans les dépôts massifs d’objets
métalliques comme ceux de Kolín en République
Tchèque (Rybová, Motyková 1983) et d’autres
comme Hainbach, Kaiserbrunn en Allemagne
(Mosleitner 1999), Liptovská Mara (Pieta 2003a)
et Pohanská (Pieta 2003b) en Slovaquie, Kolín
en République Tchèque (Rybová, Motyková
1983), le Grünberg en Autriche (Urban 2003) et
Galich-Lovachka en Ukraine (Beranova 1980).
Un cas particulier a été reconnu à Hélouine
(ill. 15) où le soc a été découvert associé à trois
vases entiers et à des tiges de fer dans un trou
de poteau. J.-L. Brunaux (1986) estime que la
taille et le poids des socs découverts dans le sol,
les rivières ou les marécages conduisent à écarter l’hypothèse de leur perte et que l’on doit
considérer que ce sont des dépôts volontaires
à part entière.
À Piémont (ill. 5), un couteau à douille et dos
arqué, une chute de barre, une attache de ceinturon, un outil à douille, des probables fragments
de fourreau d’épée et une méta de meule ont été
découverts sur une surface de moins d’un mètre
carré dans le fond d’un fossé. Ces objets et 36 tessons constituent les seules découvertes de cette
structure fouillée sur plus de 22 m.
À L’Étoile II (ill. 6-7), au centre d’un fossé peu
profond, on a trouvé les restes d’un chaudron,
deux lève-loquets, une grande gouge, une petite
faucille, une possible lame d’épée, des éléments
d’un seau, un fragment de mors, un piton et
d’autres objets non identifiés ou non identifiables. Ces trois ensembles sont hétéroclites et
relèvent d’activités ou de domaines différents
sans que l’on comprenne les combinaisons d’objets. L’explication la plus simple est certainement
celle d’une mise au rebut du matériel. Cependant,
les regroupements de mobiliers métalliques, la
quasi-absence d’autres déchets domestiques, la
nature ou la rareté d’objets comme le chaudron
(deux mentions seulement dans notre base)
et les probables pièces d’armement sont des
éléments particuliers qui indiquent peut-être
d’autres intentions.
LES FOSSES
Inventaires des sites et du mobilier
La découverte d’araires entièrs conservés dans
la tourbe en Europe du nord inviterait même
à y voir les objets d’un rituel agraire. Pour les
lève-loquets, F. Malrain (Malrain, Matterne, Méniel
2002) évoque la possibilité d’un symbole de la
propriété : « La clef toujours de grandes dimensions, revêt peut-être une fonction symbolique
forte analogue à la “clef de la ville” de l’époque
médiévale. L’anneau de suspension, qui termine
systématiquement la clef, montre d’ailleurs clairement qu’elle devait être accrochée, sans doute à
la ceinture du propriétaire, et donc l’accompagner
dans ses déplacements, de façon simplement pratique, mais aussi ostentatoire. » Si ces objets sont
bien en position primaire et si l’on admet leur
fonction symbolique, leur présence par au moins
deux dans les fossés peut témoigner d’un dépôt
délibéré dont l’objectif demeure néanmoins totalement obscur.
Très rarement, on trouve des concentrations
de mobilier presque ou exclusivement métallique.
Fleury-sur-Orne (Calvados), Bac d’Athis
(ill. 9-10)
La datation du site est assurée par la céramique, les parures et les importations, elle est à situer
à La Tène D et au gallo-romain précoce. Outre le
matériel de la fosse 1, le site a livré de nombreux
objets métalliques dont un fer de lance, plusieurs
fibules, divers outils agricoles et un poucier de
passoire (objet unique dans notre corpus). 3 900
restes d’animaux ont été récoltés.
Une fosse bien conservée se distingue des
autres dépôts du site par une proportion importante de petits animaux. Une carcasse de cheval
non découpée et des crânes entiers témoignent
de pratiques attestées dans certains sanctuaires
gaulois. Le mobilier présenté provient d’une fosse
contenant une fibule de Nauheim attribuable à
La Tène D1. Les objets n’étant pas radiographiés,
leur identification n’est pas toujours certaine
(San Juan 1994).
231
OLIVIER NILLESSE
Fosse 1
–
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1-19 : plaque avec deux rivets, fer.
1-21 : anneau, fer.
1-24, 1-25 : poignées (?), fer.
1-28 à 1-33 : 6 plaques, fragmentaires, fer.
1-34, 1-35 : socs d’araires à douille ouverte,
fragmentaires, fer.
1-36, 1-37 : objets en forme de socs, fragmentaires, fer. Ces outils de petites dimensions
(54 mm et 66 mm) peuvent correspondre à
des extrémités en fer d’instruments aratoires
9. Fleury-sur-Orne (Calvados), Bac d’Athis (DAO J-M. Bryand, d’après San Juan 1994, p. 134, 158).
232
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
10. Fleury-sur-Orne (Calvados), Bac d’Athis (DAO J-M. Bryand, d’après San Juan 1994, p. 156-157).
–
–
–
–
ou à des gouges destinées à couper la racine
ou la tige de certaines plantes.
1-38 : piton ou crampon fragmentaire, fer.
1-18, 1-20, 1-22, 1-23, 1-26, 1-27, 1-39 à 1-41, 1-45
à 1-47, 1-49, 1-58, 1-59, 1-60 : indéterminés, fer.
1-42, 1-43, 1-48 : pentures à œil, fer. Leurs dimensions (99 mm et au moins 159 mm) indiquent
probablement qu’elles appartiennent à des
portes ou à des volets différents.
1-44 : objet formé d’un fer plat replié formant
un œil permettant d’attacher un anneau, fer.
Pièce de suspension ou partie d’un heurtoir
de porte ?
–
–
–
–
–
–
1-50, 1-51 : pitons fermés, fer.
1-52 : plaques rassemblées par deux tiges
rivetées, fer. Agrafe permettant de relier deux
planches.
1-55 : plaque comportant deux tiges rivetées,
fragmentaire, fer. Objet similaire au n° 1-52.
1-53, 1-54, 1-56, 1-57 : crampon de menuiserie,
fer.
1-61 : lamelle, alliage base cuivre.
1-62 : fibule de Nauheim, alliage base cuivre.
233
OLIVIER NILLESSE
Cairon (Calvados), Eélazar (ill. 2)
Le site a été décrit précédemment pour le mobilier de l’un de ses fossés (San Juan et al. 1999).
–
ouverte, fer. Leur identification n’est pas aisée,
ils peuvent correspondre à des socs d’araires.
23-832 : objet à douille, fer. Il est proche des
quatre exemplaires précédents mais de plus
grandes dimensions.
Fosse 2
Echiré (Deux Sèvres), Le Bois Roux (ill. 13)
–
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–
8-527 : hache à douille, fer.
8-528 : serpe à soie (?), fer. Interprétation
donnée par G. San Juan.
8-529 : curette à douille, fragmentaire, fer.
L’outil de petites dimensions (75 mm) plutôt
qu’une hache à douille peut correspondre à
un décrottoir à soc.
8-530 : croc à viande, fer.
8-531 : soc d’araire à douille, fer.
8-532 : serpette en forme de croissant, fer.
8-533 à 8-536 : indéterminés, fer.
Quetteville (Calvados), La Cohaigne (ill. 11-12)
La céramique découverte sur le site ne permet
qu’une datation large à La Tène D. À proximité
d’un bâtiment à porche, un silo a livré un ensemble
d’objets métalliques. Deux tessons et un fragment
de meule accompagnent cet ensemble. Les objets
n’ayant pas été radiographiés, l’identification est
très partielle (Lepaumier 1996 ; 2001).
À l’occasion d’un diagnostic sur un enclos
datable de La Tène D1, un ensemble d’objets
en fer d’une dizaine de kilos a été mis au jour
dans une structure aux contours mal définis
(Poissonnier 2003). Il était accompagné d’un tesson d’amphore républicaine. Les objets n’ont pas
été radiographiés et les dessins ne figurent pas
toutes leurs faces.
Fosse 11, sondage 127
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Fosse 48
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234
23-819 : armature de bêche, fer. Ce type
d’outil n’est pas fréquent et semble se rencontrer essentiellement en Basse-Normandie
comme dans l’établissement de Vert Buisson
à Saint Gatien-des-Bois (Paris 1997) ou dans
le site fortifié de La Courbe (Peuchet 1993).
23-820 : soc d’araire, fer. C’est un modèle
large à l’inverse des onze autres exemplaires
étroits répertoriés dans notre base.
23-821 : l’objet en fer est identifié par l’auteur
de la découverte comme une lame de faux.
L’emmanchement perpendiculaire à la lame
ne correspond cependant pas à ce type
d’outil. Il s’agirait plutôt d'un faucard, outil
utilisé pour nettoyer les fossés.
23-822 : cerclage, fer. L’objet fait probablement partie d’un récipient en bois.
23-824 : pièce formée d’une barre arrondie probablement clouée sur du bois, fer.
Fragmentaire.
23-825 à 23-827 : indéterminés, fer.
23-828 à 23-831 : quatre objets à douille semi-
–
–
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5-448 : pince de forgeron, fer. Les bras ont été
endommagés lors du décapage mécanique.
L’outil mesure environ 440 mm. Le mors et le
contremors sont soudés par la rouille, la forme
exacte de la gueule et de la mâchoire ne peuvent être déterminées.
5-449 : tas massif, fer. Le plan de la table rectangulaire n’est pas dessiné, elle est débordante.
5-450 : chasse à œil déporté, fer. La forme
convexe de la table indique un travail de
chaudronnerie.
5-451 : tas à bigorne, fer. La table présente un
aplatissement qui se termine par une bigorne
tronconique.
5-452 : tas ou étampe, fer. La table est écrasée,
un nettoyage permettrait de mieux identifier
l’objet.
5-453 : crampon de menuiserie, fer.
5-454, 5-455 : Indéterminés, fer.
5-456 : marteau à œil déporté, fer. L’œil a conservé des clous mis en force pour maintenir
le manche. La panne massive de section rectangulaire est arquée, sa partie terminale plus
étroite sert à plier et marquer le métal.
5-457 : clou de menuiserie à tête ronde, fer.
5-458 : indéterminé, fer. Il pourrait s’agir d’un
outil à manche plein comportant une lame.
5-459 : ciseau droit à douille, fer.
5-460 : ciseau droit à douille (?), fer, fragmentaire. L’outil a été endommagé à la fouille.
5-461 : fer de lance (?), fer, fragmentaire.
L’objet a été endommagé à la fouille. Un examen visuel semble permettre de reconnaître
une flamme détériorée.
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
11. Quetteville (Calvados), La Cohaigne (DAO J-M. Bryand, d’après Lepaumier 1996, pl. 7, 11-12 ; 2001, pl. 7-8, 12-14).
235
OLIVIER NILLESSE
12. Quetteville (Calvados), La Cohaigne (DAO J-M. Bryand, d’après Lepaumier 2001, pl. 12-14).
236
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
13. Echiré (Deux Sèvres), Le Bois Roux (DAO J-M. Bryand, d’après Poissonnier 2003, pl. 3, 10).
237
OLIVIER NILLESSE
Barbezieux (Charente), Les Petits Clairons
(ill. 14)
Le site des Petits Clairons (Baigl 1995 ; Baigl
2000) est occupé du néolithique à la période
moderne. Au second âge du Fer, une forte occupation est attestée. Un fossé de 2,50 m de large
et d’autres creusements linéaires de plus petites
dimensions permettent d’évoquer un enclos.
Pour la céramique, J. Gomez (Baigl 1995) fait
remarquer que des éléments comme les pieds
débordants et l’utilisation de peinture ne figurent pas dans les ensembles de La Tène D des
sites régionaux. La peinture rouge est par contre
connue dans la Gironde pour La Tène B. Par
ailleurs, le corpus des Petits Clairons rappelle
celui de la Grotte des Perrats à Agris. Cette attribution correspond à la datation au 14C obtenue
sur les fours de potiers du site avec un pic de
probabilité de la fourchette autour de 187 av.
J.-C. La fosse contenant le mobilier est située
à proximité d’autres creusements. Les objets
métalliques sont essentiellement disposés sur
les bords de la fosse. Deux vases dont l’un complet et des tessons accompagnent ce mobilier,
ils ont été partiellement brûlés.
Fosse 3038
–
42-1072 : couteau à manche plein à anneau de
suspension, fer.
– 42-1073 : couteau à manche plein à anneau de
suspension, fer. Il est de modèle identique au
précédent mais de plus petits dimensions.
– 42-1074 : tige triangulaire, fer. Alène ?
– 42-1075 : indéterminé, fer.
Une petite plaque de bronze est également
signalée.
Caractérisation des dépôts
À Eélazar (ill. 2), le mobilier d’une fosse est
composé de divers outils ou ustensiles relevant de
plusieurs domaines. L’agriculture est représentée
par un soc d’araire et sa probable curette. La petite
faucille appartient peut-être à l’équipement du
vannier. La cuisine est illustrée par le croc à viande,
le travail du bois par une hache et peut-être une
serpe. Les autres pièces ne sont pas identifiables.
Pour ce site, aucun élément ne semble permettre
d’évoquer autre chose qu’un dépotoir plus riche
que ceux d’une écrasante majorité d’établissements ruraux.
238
Au Bac d’Athis (ill. 9-10), une fosse a livré une
soixantaine de restes d’objets. Ils étaient regroupés sur 50 cm2 au fond de la structure et disposés
selon une certaine organisation : les plaques ou
lames constituaient un petit amas entouré par les
autres objets. Quelques petits tessons et de rares
fragments osseux sont aussi signalés. La composition du dépôt est hétéroclite. On y trouve deux
socs d’araires et deux autres outils à douille, des
pièces de quincaillerie dont l’absence des clous
de fixation pour certaines indiquerait un démontage préalable. Le reste du mobilier est constitué
d’objets personnels comme une fibule et de pièces non identifiées ou non identifiables.
D’autres structures du Bac d’Athis ont livré
d’autres objets métalliques peu fréquents dans les
établissements ruraux comme un poucier de passoire, un fer de lance, un style et des monnaies. Le
traitement particulier de la faune dans une fosse
rappelle des pratiques rencontrées dans certains
sanctuaires et différencie ce site des habitats “classiques”. En présence d’un tel contexte, faut-il voir
dans la fosse 1, un simple réceptacle à détritus ou
un dépôt réalisé avec les mêmes motivations qui
ont conduit au traitement original de la faune ?
À La Cohaigne (ill. 11-12), une partie seulement du mobilier métallique est identifiable. Il se
réfère principalement à l’agriculture, du travail de
la terre à la récolte et jusqu’à sa transformation :
un ou plusieurs socs d’araires, une armature de
bêche, une probable lame de faux et un fragment
de meule. Cette association d’objets représentant
une partie d’une chaîne opératoire agricole a été
trouvée dans un silo destiné à en conserver la production. Il s’agit d’un des rares cas où contenu et
contenant se réfèrent au même domaine. Si cette
particularité n’est pas fortuite, elle pourrait constituer un élément en faveur d’une interprétation
de ce dépôt comme la trace d’un rituel de nature
agricole.
Au Bois Roux (ill. 13), les 10,250 kg d’objets en fer se rapportent au travail du métal et
du bois, il existe peut-être un fer de lance. On
remarque d’emblée que cet ensemble n’est pas
aussi hétéroclite que celui par exemple d’Eélazar (ill.2). Les outils semblent avoir été utilisés
comme le signale en particulier l’écrasement
de la table d’un marteau. Le poids conséquent
du dépôt en fait l’établissement rural gaulois le
plus “riche” en métal de la région d’étude. Cet
assemblage et son poids conséquent (15 kg
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
14. Barbezieux (Charente), Les Petits Clairons. DAO (DAO J-M. Bryand, d’après Baigl 1995, pl. 36, 44, 65).
239
OLIVIER NILLESSE
“seulement” à Kolín : Rybová, Motyková 1983)
rappellent les dépôts massifs d’objets en fer
attestés en Europe celtique.
Comme pour La Cohaigne, le dépôt du Bois
Roux n’est probablement pas lié à la récupération ou la dissimulation du métal. En effet,
conserver le fer dans le sol est aberrant car il
rouille et aucune trace de coffre en bois ou
en toute autre matière périssable qui auraient
pu le préserver n’a été mise en évidence.
L’intégrité actuelle et la valeur financière à
l’époque gauloise de ce matériel semblent
pouvoir écarter aussi l’hypothèse de leur mise
au rebut et plutôt indiquer une mise en terre
délibérée. La composition du dépôt de Bois
Roux peut désigner un artisan spécialisé ou
plus simplement : la caisse à outils nécessaire
pour entretenir et réparer l’habitat et son mobilier... Ce point ne sera jamais éclairci car, le site
ne sera pas fouillé.
Néanmoins, dans ces deux établissements, l’on
pourrait avoir à faire à des dépôts votifs s’exprimant
par la rétrocession d’une quote-part à la terre des
bienfaits qu’elle procure aux agriculteurs qui la
cultivent et peut-être à des artisans qui en utilisent
les ressources minérales. Le biais utilisé consisterait
à se séparer d’une partie de l’outillage qui apporte
la prospérité (en espérant une certaine reconnaissance de ce fait). La production elle-même, est-elle
associée à ces dépôts ? En l’absence d’analyses
paléobotaniques à La Cohaigne, on ne peut répondre à la question. Au Bois Roux, on ne peut affirmer
qu’un ou des objets ont été produits par celui ou
ceux qui sont à l’origine du dépôt.
fosse a plus de chance de ne pas être perturbé car
il ne subit pas les réorganisations que connaissent
les enclos qui sont parfois agrandis (recreusements pour adjoindre de nouvelles branches),
curés ou quand ils sont comblés, réaménagés
pour installer des palissades. En conséquence,
les dépôts primaires en fosse se conserveront
mieux. Ceci étant dit, l’interprétation de certains
de ces ensembles est tout aussi délicate que pour
les fossés. À Eléazar et plus encore que pour les
concentrations de mobiliers dans les fossés précédemment évoquées, l’hypothèse détritique est
la plus évidente.
Au Bac d’Athis, c’est le traitement particulier
de la faune dans une fosse rappelant des pratiques observées dans des sanctuaires qui amène à
s’interroger sur la nature du dépôt d’objets métalliques ; la disposition originale des diverses pièces
selon la description de G. San Juan est un autre
élément pour évoquer la possibilité d’un dépôt
mis en place rituellement.
À La Cohaigne et au Bois Roux, pour des
raisons évoquées plus haut, il semble difficile de
reconnaître de simples dépotoirs. Nous y voyons
plutôt les traces d’un rituel organisé pour des
raisons votives par des catégories socioprofessionnelles bien déterminées (au moins à La Cohaigne).
Le cas des Petits Clairons est caractéristique de la
limite de nos interprétations. Si intuitivement l’on
est persuadé que le dépôt participe d’un rite, les
éléments pour l’affirmer sont faibles. Plus encore,
les motivations d’un tel acte demeurent obscures.
LES TROUS DE POTEAU
Aux Petits Clairons (ill. 14), une fosse a livré
deux couteaux, deux autres objets en fer indéterminés et les restes de plusieurs vases dont l’un
complet est partiellement brûlé. Les objets ont
été mis en terre alors qu’une partie au moins
devait encore être en bon état. Cet assemblage
s’apparente à ce que l’on peut découvrir dans une
tombe à incinération. Ce n’est vraisemblablement
pas le cas, sauf si les parties supérieures de la fosse
contenant les cendres du défunt sont érodées.
Là encore, l’intégrité du matériel constitue un
élément important pour écarter l’hypothèse d’un
simple dépotoir. Par contre, les motivations qui ont
amené à la constitution de ce dépôt, outre qu’elles
visent très probablement à établir un rapport avec
le monde chthonien, ne sont pas établies.
Contrairement aux fossés, le mobilier d’une
240
Inventaires des sites et du mobilier
Marcé (Maine-et-Loire), Hélouine (ill. 15)
L’occupation de l’établissement est datée de
La Tène D1 par la céramique indigène et les
amphores républicaines. Des céramiques et des
objets métalliques ont été mis au jour dans un
trou de poteau (Nillesse 2003).
Trou de poteau 677
–
–
7-486, 7-489 : deux tiges de section carrée, fer.
7-487 : soc d’araire, fer. L’objet est usagé.
Dans les contextes détritiques des fossés de
l’établissement, deux autres socs également
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
15. Marcé (Maine-et-Loire), Hélouine (DAO J-M. Bryand ; Nillesse 2003, pl. 4, 11).
241
OLIVIER NILLESSE
usés ont été trouvés. Cette partie métallique
de l’araire subit d’importants frottements
quand elle est en action. G. Lerche (2003)
a labouré un champ avec une reconstitution de charrue médiévale pendant cinq
ans. Cinq socs durent être utilisés. Le plus
usé, d’un poids original de 1 480 g, a perdu
958 g de fer et sa longueur fut raccourcie de
80 mm.
Echiré (Deux Sèvres), Le Chemin Chevaleret
(ill. 16)
Le site (Cornec 2000 ; Nillesse 2000) a livré
3 214 tessons de céramiques indigènes et 3 135
tessons d’amphores. On relève la présence de
gouttières de fourreau d’épée et d’une représentation anthropomorphe ithyphallique sur anse
d’amphore.
16. Echiré (Deux Sèvres), Le Chemin Chevaleret (DAO J-M. Bryand, d’après Cornec 2000, pl. 7, 72-73).
242
LES DÉPÔTS D'OBJETS EN FER DANS LES ÉTABLISSEMENTS RURAUX GAULOIS DE L'OUEST DE LA FRANCE
L’abondant matériel permet de dater le site de
La Tène C2 et du début de La Tène D1. Les objets
présentés proviennent uniquement des trous de
poteau qui livrent près de la moitié du mobilier
métallique du site (26 objets pour un total de 46).
Caractérisation des dépôts
Le dépôt d’Hélouine (ill. 15) est le plus
clair. Dans ce qui fut primitivement un trou de
poteau d’un bâtiment qui en comporte quatre,
des céramiques et des objets métalliques ont
été mis au jour. Une grande écuelle à profil en “S”
contenait un vase ovoïde qui a livré deux tiges et
un soc d’araire usé. Les objets métalliques étaient
rassemblés en paquet contre les parois de la céramique. Un petit vase ovoïde était déposé au-dessus
de l’ensemble.
Ce dépôt évoque une pratique rituelle en
relation avec l’agriculture comme l’indiquerait la
fonction du bâtiment : un probable grenier et au
moins un des objets : le soc. Il a été mis en place
après le démontage du bâtiment comme en témoigne la conservation du négatif de deux poteaux.
Trous de poteau
–
13-1055 : cure-oreille ou instrument chirurgical, fragmentaire, alliage base cuivre. Ce type
d’objet peut correspondre à un cure-oreille.
Un exemplaire à palette plus ronde est connu
à Manching (Maier et al. 1992), S. Sievers ne
connaît aucun parallèle exact et penche aussi,
mais avec beaucoup de guillemets, pour une
possible utilisation médicale. La faible profondeur de la palette peut en effet, faire penser à
une sonde chirurgicale (specillum : Rich 1987)
comme celle en forme de spatule (spathomelae) de la tombe du chirurgien d’Obermenzing
(Künzl 1991) mais l’extrémité n’est pas creuse.
E. Künzl rappelle aussi que ces instruments
peuvent aussi être utilisés en pharmacie ou en
cosmétique.
– 13-697 : Pilon de mortier à fard, alliage base
cuivre. Cette identification est basée sur l'étude
que R. Jackson (1985) a proposé pour ce
type d'objet principalement connu en GrandeBretagne et surtout pour l'époque romaine.
– 13-698 : tige plate en spirale, alliage base cuivre.
Cette pièce peut être une partie d’un objet ou
un résidu de fabrication (à mettre en relation
avec les scories d’alliage cuivreux découvertes
sur le site). Des exemplaires à spires un peu
plus larges et moins détendues sont connus au
Magdalensberg (Deimel 1987).
– 13-700 : style, fragmentaire alliage base cuivre.
L’objet peut être interprété comme un style à
cause de la forme en palette de l’une de ses
extrémités, l’autre partie pointue (destinée à
écrire) n’est pas conservée.
– 13-705 : couteau à manche plein, fer.
– 13-720 : piton ouvert, fer.
– 13-721 : couteau à douille, fer, fragmentaire.
Une monnaie a aussi été trouvée dans un trou
de poteau. Il s’agit d’un potin attribué aux Bituriges
Cubi de type BN 4302/4303 (Nash 1978).
Au Chemin Chevaleret (ill. 16), 56 % du mobilier métallique provient des trous de poteau. Ils
ont livré des objets rares dans les établissements
ruraux comme un cure-oreille, un probable style
ou l’unique monnaie du site. Pour les plus petites
pièces, on peut imaginer un dépôt accidentel mais
pour les couteaux (184 et 247 mm) l’hypothèse est
moins vraisemblable. Aux Genâts (Nillesse 1997),
moins de 6 % du matériel métallique a été trouvé
dans des trous de poteau mais il s’agit du seul
rasoir ou de l’une des quatre monnaies et d’une
chute de barre. Comme à Chemin Chevaleret le
mobilier provient du remplissage des fosses et
jamais du négatif du poteau, les objets sont donc
présents dès la fondation du bâtiment.
Les dépôts dans les trous de poteau sont de
deux types. Le premier (Hélouine) comporte, entre
autres choses, un soc usagé. Il est enterré dans le
négatif d’un poteau d’un grenier démonté. Ce dépôt
illustre peut-être de façon symbolique un cycle agricole (du labour au stockage des productions). En
tout cas, il interdit l’utilisation du bâtiment. Dans le
second cas, les objets sont présents dès la création
de la structure. Si le mobilier n’est pas erratique, il
peut s’agir du témoignage d’un rituel de fondation
comme on le pratique encore aujourd’hui pour les
bâtiments publics ou privés.
243
OLIVIER NILLESSE
CONCLUSION
D’une façon générale, on remarque (et c’est
bien normal pour des établissements ruraux) que
c’est le domaine de l’agriculture qui est le plus
souvent rencontré. Ainsi, parmi les onze sites, on
dénombre un minimum de neuf socs d’araires
(peut-être treize avec les objets non nettoyés de
La Cohaigne). L’identification du travail du fer est
plus étonnante alors que cette activité est généralement discrète sur ce type de site (Guillaumet,
Nillesse 2000). C’est aussi le cas pour l’armement
et pour une série d’objets “rares” à la campagne
comme les styles, les chaudrons, les monnaies, les
rasoirs, les cerclages de récipients en bois ou les
mors de chevaux. Il est probable que ces fréquences sont à mettre en relation avec la nature rituelle
d’une partie de ces dépôts.
Dans notre échantillonnage, le travail du bois
n’est pas reconnu dans les proportions auxquelles
l’on pourrait s’attendre dans des habitats ruraux.
Enfin, la quincaillerie souvent représentée témoigne bien du milieu étudié : des habitats.
Comme nous l’avons souligné au début de
cet article, le mobilier métallique est rare dans
les établissements ruraux. C’est pour cette raison
qu’il doit être regardé avec attention à chaque
fois que des dépôts se démarquent par les quantités, la qualité ou qu’ils sont trouvés dans des
contextes particuliers. Nous avons passé en revue
plusieurs cas de figure et presque à chaque fois,
la distinction entre dépotoir domestique et dépôt
votif n’est pas facile à établir. Si parfois, la nature
des trouvailles permet de douter de la confortable hypothèse détritique, les motivations qui ont
amené à la mise en terre de certains assemblages
sont par contre souvent incertaines.
Au mieux, reconnaît-on des gestes qui ne relèvent pas d’une logique purement pratique. Cette
prudence dans l’interprétation tient au sujet d’étude.
En effet, les établissements ruraux même s’ils ont
bénéficié de nombreuses fouilles sont encore
très mal connus et la documentation est difficile
d’accès : son analyse globale reste à faire. Il faut
maintenant multiplier les observations pour valider
cette pré-étude nécessairement incomplète.
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246
Dépôts de mobiliers métalliques
de la période de La Tène
Premier essai de classement
Gérard BATAILLE
Le phénomène de déposition de mobilier
métallique est une des manifestations les plus
emblématiques de la protohistoire européenne. Ces
pratiques puisent leurs origines avec l’apparition
du métal dans les sociétés d’Europe septentrionale
et sont attestées au moins jusqu’au XIXe s. dans
certaines régions.Ainsi, vouloir interpréter les manifestations celtiques de ce genre, en connaître
les raisons, nous semble utopiste, mieux vaut à
notre avis, commencer par analyser d’une manière
homogène et objective les ensembles de mobiliers
métalliques issus de dépôts laténiens. Pour ce faire,
nous tenons à inscrire ce travail dans la lignée de
celui réalisé par S.Verger (1992), mais adapté aux
données archéologiques de l’époque laténienne.
Ainsi, notre classement des ensembles s’orientera selon trois critères :
− l’étendu chronologique du gisement ;
− la quantité globale de mobilier
(exprimé en NMI) ;
− la part prise par les différentes catégories de
mobilier (exprimé en NMI) ;
Toutefois, cet article n’est qu’un premier essai,
il ne vise donc pas à l’exhaustivité, mais est un
point de départ d’une recherche plus vaste, qui
ne prend en compte que des ensembles suffisamment documentés et d’origine terrestre.
Ainsi, lors d’une première partie, sera réalisée
une présentation sommaire des ensembles retenus. Ces petites notices sont présentées par ordre
alphabétique et contiennent les informations
minimum dont nous avons besoin, c’est-à-dire, la
quantité globale d’artefacts métalliques et une
liste des types objets retrouvés en NMI (ce qui peut
induire des différences avec les nombres donnés
dans les publications d’origine), une attribution
chronologique de l’ensemble, ainsi que quelques
précisions sur le contexte de découverte. Dans une
deuxième partie, nous nous attacherons à classer
les ensembles, d’abord selon leur attribution chronologique, puis selon la quantité globale d’objets
qu’ils ont livré et enfin selon leur composition.
Dans la dernière partie, nous présenterons les
résultats de ces classements.
Bataille (G.), Guillaumet (J.- P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et 14
octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p 247-256 (Bibracte ; 11).
GÉRARD BATAILLE
1. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt d’Altdorf
(G. Bataille).
PRÉSENTATION DES GISEMENTS
RETENUS POUR L’ÉTUDE
Le dépôt d’Altdorf (Uri, Suisse)
Découvert fortuitement en 1915, le dépôt
d’Altdorf (Müller, Köenig 1990) réuni douze
objets en fer (ill. 1). Il s’agit avant tout d’outils
agricoles et de travail du bois, ainsi que d’une
aiguille, mais également d’un couteau et de trois
clefs, donc des objets plus en rapports avec la
sphère domestique. L’attribution chronologique
de l’ensemble n’est pas assurée par les objets qui
le composent, ceux-ci n’étant pas de très bons
marqueurs chronologiques. Il est toutefois, traditionnellement daté du Ier s. av. J.-C., donc de La
Tène D. C’est cette datation que nous retiendrons
pour la suite.
Le dépôt de Berne-Tiefenau (Berne, Suisse)
Le célèbre ensemble de mobilier métallique de
Berne-Tiefenau fut trouvé en 1849 par des ouvriers
lors de la construction d’une route, au nord de la
ville de Berne, en contrebas de l’oppidum de Enge
(Müller, Köenig 1990 ; Moscatti, Frey, Kruta 1991).
À l’origine, se furent environ un millier de pièces
métalliques qui ont été mises au jour. Toutefois,
leurs dispersions dans des collections privées et
des musées à travers le monde, empêche d’avoir
une vision globale de cet ensemble. Grâce aux
travaux de Félix Müller, nous pouvons actuellement
réfléchir sur un panel de 443 objets en NMI (ill. 2),
ce qui permet d’avoir un aperçu représentatif de ce
qu’était cet ensemble à l’origine.
Le dépôt de Berne-Tiefenau rassemble des
objets qui présentent une chronologie longue, les
plus anciens peuvent être attribués à la fin de La
Tène B2 et les plus récents de La Tène D2. Il s’agit
248
2. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
Berne-Tiefenau (G. Bataille).
d’objets de nature variés soit, des objets de parure,
du fourniment, des éléments d’attelage et de char,
de l’outillage, des demi-produits de fer, des ustensiles domestiques et de la quincaillerie (ill. 2).
Le dépôt de Cernov
(Moravie, République tchèque)
L’ensemble de mobilier métallique de Cernov
provient de fouilles réalisées au cœur de l’habitat
fortifié du même nom en 1987. Dix-neuf objets
métalliques furent recueillis (ill. 3) au sein de ce
dépôt. Il s’agit d’outils liés à l’agriculture, comme
un soc d’araire, mais également au travail du bois
(deux haches à douille) et au travail du métal
(un tas-marteau). Ce gisement a également fourni
un grand coutelas en fer, qui peut être interprété
comme une arme, ou comme un ustensile domestique. Mais cet ensemble contient également
d’après l’auteur (Moscatti, Frey, Kruta 1991 ; Cizmar
1990 ; 1993) dix objets liés à la sphère domestique
et à la construction que nous ne pouvons pas
DÉPÔTS DE MOBILIERS MÉTALLIQUES DE LA PÉRIODE DE LA TÈNE. PREMIER ESSAI DE CLASSEMENT
3. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
Cernov (G. Bataille).
caractériser d’après les données disponibles.Ainsi,
son classement sera incertain et basé uniquement
sur les neuf objets documentés (ill. 3). Ce dépôt
est attribué au Ve s. av. J.-C. soit de La Tène A, par
son contexte et par le grand coutelas.
Le dépôt de La Chuire (Larina, Isère, France)
Le dépôt de La Chuire (Perrin 1990) provient
d’une faille à l’intérieur du site fortifié du “camp
de Larina” (Larina, Isère, France). Il s’agit d’un
ensemble qui a fourni pour la période de La
Tène 339 objets métalliques (en NMI), mêlés à
des fragments de céramiques et des ossements
humains et de faune. L’ensemble métallique qui
nous intéresse ici, rassemble des objets sur une
longue étendue chronologique de La Tène B2 à
La Tène D2a et regroupe des objets de fonction
variés (ill. 4), des objets de parures, des pièces de
fourniment, des ustensiles domestique et de cuisson, de l’outillage, des éléments d’attelages et de
la quincaillerie.
Le dépôt de Chynov-Libcice
(Bohême, République tchèque)
Cet ensemble d’objets en fer a été trouvé sous
le sol d’une maison d’époque laténienne, au sein
d’un habitat groupé. Les objets étaient contenus
dans un vase en céramique et enroulés dans un
linge, sauf deux faux appuyées contre le vase
(Moscatti, Frey, Kruta 1991 ; Sankot, Vojtechovska
1986). Ce sont environ 56 fragments d’objets qui
ont été mis au jour. Il s’agit principalement de
fragments d’outils (trois marteaux, cinq limes,
un ciseau, deux faux) et de quelques pièces
de fourniment (trois fers et deux talons d’arme
d’hast) et d’un couteau. Les autres artefacts sont
très dégradés, il s’agit principalement de déchets
et de tôles difficilement déterminables, ainsi le
4. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
La Chuire (G. Bataille).
classement de ce dépôt se fera sur des données
partielles qui donnent l’impression qu’il s’agit
avant tout d’un ensemble regroupant des objets
liés à la production métallique et agricole. Par sa
position stratigraphique, cet ensemble est attribué
au milieu du Ve s. av. J.-C., soit de La Tène A.
Le dépôt de Duchov
(Bohême, République tchèque)
Découvert fortuitement en 1882, cet ensemble
provient d’une source thermale. On estime que
deux mille à deux mille cinq cents objets de
parures celtiques (fibules, bracelets et bagues),
toute en bronze de la fin du IVe s. av. J.-C. (La Tène
B1/B2), étaient contenues dans un chaudron
249
GÉRARD BATAILLE
5. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
Föker Laas Riegel (G. Bataille).
en bronze (Kruta 1971 ; 2000). Il s’agit d’un des
ensembles les plus importants jamais découverts
et il est fort regrettable qu’il soit impossible d’en
faire le décompte exact à cause de la dispersion
des objets à travers l’Europe.
Le dépôt de Erstfeld (Uri, Suisse)
L’ensemble d’Erstfeld est composé de six
objets de parures en or. Il s’agit de quatre torques et
de deux bracelets (Furger-Gunti 1984 ; Guggisberg
1997 ; Wyss 1975 ; Kruta 2000). Ce dépôt fut découvert fortuitement sous un rocher en 1962 lors de
travaux de construction dans la vallée de Locher.
L’attribution chronologique la plus couramment
acceptée considère que ces objets sont datés du
milieu du Ve s. av. J.-C., soit de La Tène A.
Le dépôt de Föker Laas Riegel
(Carinthie, Autriche)
L’ensemble de Föker Laas Riegel est issu de
fouilles clandestines en 1989 et fut acquis par le
musée de Mayence (Allemagne). Il semble que ce
dépôt provient d’un puits situé au pied d’un site fortifié (Keltische Jahrtausend 1993 ; Schaaff 1990 ; Kruta
2000). Cet ensemble est composé de trente-quatre
pièces d’armement (ill. 5) qui peuvent être attribuées
au milieu du IIIe s. av. J.-C., soit de La Tène C2.
Les dépôts du Gründberg (Linz, Autriche)
L’oppidum du Gründberg se trouve en HauteAutriche dans la région de Linz-an-der-Donau
(Urban, Ruprechtberger 2003). Les fouilles conduites en 1997 sur son rempart sud, ont permis de
mettre au jour trois dépôts d’objets métalliques
(ill. 6) pris dans la construction du rempart. Les
restes d’un quatrième dépôt ont été retrouvés dans
250
6. Quantification en NMI du mobilier métallique des dépôts du
Gründberg. a : Gründberg I ; b : Gründberg III ; c : Gründberg III
(G. Bataille).
les éboulis du mur, celui-ci comportait, entre autres,
deux lopins de fer.
– Gründberg I a livré seize objets (ill. 6a), principalement des objets liés à l’outillage et la
production.
– Gründberg II a livré douze objets (ill. 6b),
répartis à part égale entre l’armement (trois
individus, deux épées et un fourreau), la sphère
domestique (trois individus, une broche, une
pelle à feu et une fourchette) et l’outillage et
la production (un marteau et une hache).
– Gründberg III a livré treize objets (ill. 6c),
répartis à part égale entre l’outillage et la production (une hache, un marteau et une paire
de tenailles), la sphère domestique (deux crémaillères et une broche) et de l’attelage (deux
DÉPÔTS DE MOBILIERS MÉTALLIQUES DE LA PÉRIODE DE LA TÈNE. PREMIER ESSAI DE CLASSEMENT
frettes de moyeu et un bandage de roue). Et
enfin une foëne, qui peut être une arme, mais
également un outil de production, servant à la
chasse ou à la pêche.
De par leur contexte de découverte, ces trois
ensembles sont attribués à La Tène D1.
Le dépôt de Kolín
(Bohême, République tchèque)
Le dépôt de Kolín est une découverte fortuite,
qui a eu lieu lors de travaux de construction dans
la ville de Kolín. Cet ensemble est attribué à La
Tène D, soit aux deux derniers siècles de notre ère.
Nous ne pouvons être plus précis étant donné le
manque de marqueur chronologique fiable au sein
de cet ensemble. Le nombre de fragments d’objets
en fer mis au jour est de 68 (Rybová, Motyková
1983). Il s’agit avant tout d’outils (ill. 7), principalement agricole (douze haches et herminettes,
deux faucilles et une faux, un fer de bêche, au
moins trois paires de forces, deux 2 socs d’araire),
8. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
Liptovska Mara (G. Bataille).
mais également en rapport avec le travail du bois
et du métal (un marteau, un ciseau, un tas d’enclume, sept demi-produits en fer, deux burins…),
également quelques ustensiles liés à la sphère
domestique (dix couteaux, une crémaillère…)
et quelques éléments d’attelage (une clavette, un
bandage) et enfin une pièce de fourniment de
fourniment (un umbo).
Le dépôt de Liptovska Mara (Slovaquie)
Le dépôt de Liptovska Mara a été mis au
jour en 1992 dans une petite cavité, lors des
fouilles des environs de l’aire cultuelle du site
fortifié du même nom (Pieta 2000 ; 2003). Cet
ensemble a fourni 29 objets en fer (ill. 8). Il s’agit
principalement d’outils agricoles, mais également
d’ustensiles se rapportant à la sphère domestique,
tel un couteau, une broche et une clef. Cet ensemble peut être attribué par le contexte général du
site au Ier s. av. J.-C, soit de La Tène D1 ou D2.
Les dépôts de Pohanská
(Plaveche Pohradie, Slovaquie)
7. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
Kolín (G. Bataille).
Au sein d’un oppidum du Ier s. av. J.-C. ont été
mis au jour une série de dépôts, trois lors des
fouilles de 1968-1971 (Paulik 1976 ; ill. 9) et un
en 2001 (Pieta 2003). Trois ou cinq autres sont
signalés : il s’agit de trouvailles réalisées par des
prospecteurs. Le dépôt trouvé en 2001 ne peut être
intégré à cette étude, car mise à part la notice réalisée par K. Pieta (2003), ce dépôt est encore inédit
et il nous est impossible de réaliser le décompte
exact de la centaine d’objet le composant.
– Pohanská I (ill. 9a), quinze objets, majoritairement outillage et production, également du
fourniment et des ustensiles domestiques.
251
GÉRARD BATAILLE
10. Quantification en NMI du mobilier métallique du dépôt de
Wauwil (G. Bataille).
ESSAIS DE CLASSEMENT
9. Quantification en NMI du mobilier métallique des dépôts de
Pohanská a : Pohanská I ; b : Pohanská II ; c : Pohanská III
(G. Bataille).
–
Pohanská II (ill. 9b), cinq objets, majoritairement outillage et production et un ustensile
domestique.
– Pohanská III (ill. 9c), uniquement composé de
huit currency-bars.
L’attribution chronologique de ces trois dépôts
peut être La Tène C2/D1 par le contexte général
de l’oppidum.
Le dépôt de Wauwil (Luzern, Suisse)
Découvert fortuitement, les objets ont été
recueillis en deux fois, en 1896 et en 1905 en ce
qui concerne les deux chenets (Müller, Köenig
1990). Cet ensemble est traditionnellement
attribué au Ier s. av. J.-C., donc à La Tène D. Au
total, ce sont quatorze objets en fer qui ont
été recueillis (ill. 10). Il s’agit principalement
d’outils (une faux, un burin, un ciseau, une
hache, une herminette, une paire de forces,
une pince) lié au domaine agricole, au travail
du bois et à la métallurgie, ainsi que quelques
ustensiles liés à la sphère domestique (trois
anses de vaisselle [?], une clef).
252
Ce bref inventaire, nous permet de constater
que quelques ensembles présentent des objets qui
couvrent une longue période chronologique, ce qui
inciterait à penser qu’ils ont été constitués en plusieurs fois. Cette catégorie de dépôts concerne deux
ensembles, ceux de Berne-Tiefenau et de La Chuire.
Les autres gisements recensés pour cette présentation semblent être les vestiges de manifestations
ponctuelles, qui ont permis de réunir les objets
composant les ensembles en une fois. Dans cette
catégorie de dépôts, sont classés les ensembles de
Altdorf, de Cernov, de Chynov-Libcice, d’Erstfeld,
de Föker Laas Riegel, les dépôts du Gründberg,
de Kolín, de Liptovska Mara, les ensembles de
Pohanská et enfin de Wauwil.
Le dépôt de Duchov présente une autre
particularité. Certes, il semble indéniable que
l’enfouissement des objets dans le chaudron correspond à une seule manifestation. Toutefois, les
typologies et la chronologie des objets déposés
ne permettent d’être certain que tous les individus
sont parfaitement synchrones. Il semble plus que
probable que la collecte des objets a été réalisée
sur plusieurs années, voir plusieurs décennies.
Donc, ce dépôt en tant que tel, est bien le fait d’une
manifestation unique, mais le regroupement des
objets peut être le reflet de pratiques espacées dans
le temps, qui ont été enfouis en une fois.
Lorsqu’on essaie de regrouper les gisements
selon la quantité globale d’artefacts, les groupes
ainsi formés ne sont pas les mêmes. On peut ainsi
distinguer six groupes (ill. 11) :
– Groupe 1 (Gr. 1) : ensembles de plus d’un millier de pièces. Un seul représentant pour ce
groupe : Duchov ;
DÉPÔTS DE MOBILIERS MÉTALLIQUES DE LA PÉRIODE DE LA TÈNE. PREMIER ESSAI DE CLASSEMENT
11. Classement des
ensembles selon la quantité
globale d’objets (G. Bataille).
–
–
–
–
Groupe 2 (Gr. 2) : ensembles de plus d’une
centaine de pièces. Deux représentants pour
ce groupe : Berne-Tiefenau et La Chuire ;
Groupe 3 (Gr. 3) : ensembles qui comprennent
entre cinquante et cent objets. Deux représentants pour ce groupe : Kolín et Chynov-Libcice ;
Groupe 4 (Gr. 4) : ensembles qui comprennent
entre vingt et cinquante objets. Deux représentants pour ce groupe : Föker Laas Riegel et
Liptovska Mara ;
Groupe 5 (Gr. 5) : ensembles qui comprennent
entre dix et vingt objets.Sept représentants pour
ce groupe : Cernov, Gründberg I, Pohanská I,
Wauwil, Gründberg II, Gründberg III et Altdorf ;
–
Groupe 6 (Gr. 6) : ensembles qui comprennent
moins de dix objets.Trois représentants pour ce
groupe : Pohanská II et III et Erstfeld.
Un autre classement d’ordre quantitatif
est possible. On peut essayer de grouper les
ensembles non plus selon la quantité globale
des objets qu’ils ont fournis, mais selon leur
composition de mobilier. Ainsi, on obtient le
classement suivant :
– Des ensembles de classe A, qui sont composés
d’un seul type d’objet. Le seul exemple du corpus
réuni pour cette étude est celui de Pohanská III,
qui n’a livré que des currency-bars.
253
GÉRARD BATAILLE
–
–
254
Des ensembles de classe B, qui réunissent
plusieurs types d’objets qui correspondent à
une seule catégorie fonctionnelle. Trois dépôts
du corpus correspondent à cette définition. Il
s’agit du dépôt de Föker Laas Riegel qui est
constitué que de pièces de fourniment et ceux
de Duchov et d’Erstfeld qui n’ont livré que des
objets de parures. Donc cette classe B peut se
subdiviser en sous-classe selon la catégorie
fonctionnelle représentée. Ainsi, nous décidons que les dépôts constitués uniquement
d’éléments guerriers sont de sous-classe 1
(B.1) et ceux composés que d’éléments de
parure de sous-classe 2 (B.2).
Des ensembles de classe C, dans lesquels nous
classons tous les dépôts qui présentent une
mixité des catégories fonctionnelles représentées. Cette classe peut se subdiviser selon la part
prise par les différentes catégories d’objets les
unes par rapport aux autres. Ainsi, nous distinguons les ensembles majoritairement composés
d’éléments guerriers soit de sous-classe 1 (C.1).
Dans cette sous-classe, seul le dépôt de BerneTiefenau se retrouve, surtout si on considère que
les pièces de char et d’attelages appartiennent
également à la sphère guerrière. Toutefois, cet
ensemble présente une part importante de demiproduit de fer. La deuxième sous-classe que nous
pouvons créer d’après notre corpus est celle
qui regroupe les dépôts mixtes majoritairement
constitués d’outils et d’artefacts liés à la production. Cette sous-classe C.2, réunie les ensembles
de Cernov, de Chynov-Libcice, d’Altdorf, le dépôt
du Gründberg I, de Kolín, de Liptovska Mara, de
Wauwil et enfin le dépôt de Pohanská I. Une
dernière sous-classe se distingue (C.3). Cette dernière regroupe des ensembles hétérogènes, où
aucune catégorie fonctionnelle n’est majoritaire.
Généralement dans cette sous-classe, l’outillage
et les vestiges de productions sont les plus
nombreux, mais une ou deux autres catégories
prennent également une part importante de
l’ensemble. On peut classer dans cette catégorie
le dépôt de La Chuire, où derrière l’outillage,
la parure prend une forte part, tout comme les
ustensiles domestiques. Les autres ensembles de
sous-classe C.3 sont ceux de Gründberg II (mixité
entre outils, fourniment et ustensiles domestiques), de Gründberg III (outillage prédominant,
mais forte part des ustensiles domestiques), de
Pohanská II (outillage prédominant, mais forte
part des ustensiles domestiques).
12. Classement général des ensembles (G. Bataille).
RÉSULTAT DES DIFFÉRENTS
CLASSEMENTS
Les trois critères que nous avons retenu pour
réaliser le classement des ensembles étudiés nous
permettent d’en réaliser un classement systématique et ordonné que nous avons synthétisé sur le
tableau (ill. 12).
L’analyse de ce tableau synthétique nous
permet de réaliser quelques constatations. Tout
d’abord, il est remarquable que les trois plus grands
ensembles de mobilier (Groupe 1 et 2), c’est-à-dire
Duchov, Berne-Tiefenau et La Chuire, sont tous trois
des ensembles qui présentent un spectre chronologique plus au moins long, et fournissent tous des
objets caractéristiques de La Tène B2.
Les dépôts les plus anciens de La Tène A et B1
sont soit des ensembles constitués uniquement
d’objets de parure (Duchov et Erstfeld), soit des
gisements qui présentent une majorité d’outillage
et de vestiges de production, essentiellement
métallique.
L’unique dépôt daté exclusivement de La Tène
C est celui de Föker Laas Riegel. Celui-ci est le seul
à être exclusivement composé de fourniment. Ce
phénomène trouve un écho dans les pratiques
constatées sur la composition des ensembles
métalliques issus de sanctuaires laténiens, où nous
avons constaté qu’à La Tène C, les pièces d’armement sont les objets les plus couramment déposés
et souvent les seuls (Bataille 2004).
En ce qui concerne les dépôts de La Tène D,
ils présentent tous une surreprésentation de la
catégorie outillage et production. Avec quelques
variantes, certains dépôts présentant une composition plus hétéroclite, où certes les outils sont les
DÉPÔTS DE MOBILIERS MÉTALLIQUES DE LA PÉRIODE DE LA TÈNE. PREMIER ESSAI DE CLASSEMENT
auquel nous sommes arrivés n’est qu’une étape
dans notre recherche, mais la méthodologie que
nous avons retenu pour cette présentation, c’està-dire coupler la chronologie des ensembles
avec d’une part la quantité globale d’objets (en
NMI) et d’autre part, la composition des dépôts,
s’avère être applicable et permet déjà sur un faible corpus d’obtenir des hypothèses tangibles qui
nous permettent d’espérer à terme des résultats
concrets et novateurs.
objets les plus représentés, mais ils peuvent être
accompagnés dans des proportions équivalentes
par des objets de la parure et/ou des ustensiles
domestiques.
Toutefois, ces constatations ne reposent que
sur un nombre restreint de gisement et il faut les
prendre avec circonspection. L’objectif principal
de cette analyse était avant tout de mettre en
place un protocole de classement des dépôts
de mobilier métallique laténiens. Le classement
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256
Les objets métalliques des âges du Fer
découverts en contexte fluvial
Les exemples de la Saône (France), du Danube (Allemagne)
et de la Ljubljanica (Slovénie)
Annie DUMONT, Andrej GASPARI, Stefan WIRTH
LES OBJETS ISSUS DES COURS D’EAU
RAPPEL DU PHÉNOMÈNE
Les fleuves et les rivières d’Europe ont livré et
livrent encore de nombreuses trouvailles dont la
portée emblématique et symbolique est souvent
mise en avant. Parmi ces éléments, on compte de
nombreux objets de valeur, souvent considérés
comme des chefs-d’œuvre de l’artisanat protohistorique. L’analyse des corpus archéologiques
révèle que certains types d’objets sont présents
majoritairement, voire uniquement, dans les cours
d’eau. Les recherches menées récemment dans
différents cours d’eau montrent que ce phénomène semble s’inscrire dans la longue durée,
de la Protohistoire (Gaspari 2004) à l’Antiquité
(Bonnamour, Dumont 1996) et peut-être jusqu’au
haut Moyen Âge. Cette contribution fait le point
des données disponibles pour les âges du Fer et
cherche à revaloriser l’ensemble de cette documentation.
HISTORIQUE DES RECHERCHES
Dès le milieu du XIXe s., les catalogues des
grandes collections européennes et les ouvrages
traitant d’archéologie protohistorique intègrent
des lots de mobilier issus des cours d’eau (Wegner
1995). Il faut cependant attendre les années
soixante pour que le phénomène soit analysé de
façon globale, en considérant différentes périodes et plusieurs zones géographiques. Walter
Torbrügge est le premier archéologue européen
cherchant à replacer dans un contexte les milliers
d’objets extraits de façon anarchique et incontrôlée des lits fluviaux (Torbrügge 1960 ; 1970-1971 ;
1991, p. 345 sq.; 1996). Il propose de traiter les
découvertes fluviales comme une catégorie de
sources équivalentes aux sépultures, aux habitats
ou aux dépôts. À sa suite, et plus particulièrement pour l’Allemagne, s’inscrivent les travaux de
Ludwig Pauli. D’après lui, les découvertes fluviales
constituent un élément important dans la compréhension des croyances celtiques et des échos
que l’on peut en retrouver aux cours des périodes
suivantes, notamment dans l’Antiquité mais aussi,
probablement, au début du Moyen Âge (Pauli
1983 ; 1986 ; 1987 ; Pauli, Wilbers 1985).
Le développement de l’archéologie subaquatique permet aujourd’hui de porter un regard
nouveau sur ce sujet (Bonnamour, Dumont, Wirth
2001). D’un point de vue historique, il faut rappeler que les premières investigations menées en
plongée dans le lit d’une rivière ont eu lieu en
Slovénie, dans la Ljubljanica, en 1884 (Gaspari
2003). En France, la recherche en archéologie
fluviale a connu un développement qui permet
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F.-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 257-277 (Bibracte ; 11).
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
de disposer d’une liste assez précise des types
de sites susceptibles d’être préservés dans les lits
mineurs des cours d’eau. Louis Bonnamour (conservateur au musée Denon à Chalon-sur-Saône),
après avoir surveillé dès les années soixante les
dragages effectués dans la région de Chalon-surSaône, a ensuite mené, pendant vingt ans, des
prospections et des fouilles subaquatiques, faisant
de la Saône chalonnaise la portion de cours d’eau
européen ayant livré l’inventaire le plus riche
(Bonnamour 1990 ; 2000a). Grâce à ses travaux
de longue haleine, on dispose d’un important
corpus archéologique ainsi que d’une bonne
connaissance de la morphologie de la rivière et
de l’évolution de certaines portions du lit mineur,
comme les hauts-fonds (Dumont 2002).
Le résultat des recherches effectuées dans
la Saône et plus récemment dans d’autres cours
d’eau français (Seine, Charente, Hérault, Loire),
ainsi que la poursuite des prospections dans la
Ljubljanica en Slovénie, montrent que le potentiel, loin d’être épuisé, reste largement méconnu
et que seule la multiplication d’opérations de
terrain alliant l’archéologie subaquatique aux
disciplines associées généralement au domaine
terrestre (recherche en archives, prospections géophysiques, etc.) déboucheront sur une meilleure
connaissance des vallées fluviales et de tous les
faits humains qui leur sont associés.
OBJECTIFS
Les recherches menées dans la Saône ont
concerné tous les types de sites et toutes les périodes : elles ont livré un important corpus mobilier
mais n’ont pas permis de découvrir de structures
des âges du Fer. À l’échelle européenne, les sites
des âges du Fer connus en contexte fluvial ou
en zones humides sont rares et ont pour la plupart été fouillés anciennement : la documentation
lacunaire qui leur est attachée n’en permettra pas
d’interprétation définitive. S’il ne fallait citer qu’un
exemple on pourrait choisir celui, emblématique,
de La Tène. Nous restons donc face à un ensemble de données inégalement constitué selon les
différentes régions européennes, essentiellement
composé d’objets métalliques.
Malgré ces handicaps de départ,plusieurs pistes
de recherche sont envisageables : recherche de pertinences statistiques se dessinant à grande échelle,
analyse des convergences et des divergences dans
258
la composition du mobilier métallique des régions
tests, mise en évidence, s’ils existent, de caractères
spécifiques aux différents cours d’eau.
CONDITIONS DE DÉCOUVERTE
ET VALIDITÉ DES CORPUS DISPONIBLES
La constitution des lots d’objets issus du
domaine fluvial et la connaissance des sites de lit
mineur sont étroitement liées aux différentes phases d’aménagement des cours d’eau et au type de
matériel employé pour draguer : il est absolument
nécessaire de les prendre en considération préalablement à toute tentative d’analyse. La validité
des corpus dépend également du suivi ou de
l’absence de surveillance de ces travaux par les
archéologues. Tous les grands ou moyens cours
d’eau européens ont livré à un moment ou un
autre du mobilier archéologique, mais ces objets
n’ont que trop rarement été récupérés. La compilation des nombreuses mentions de découvertes,
mise en parallèle avec les inventaires des collections publiques, montre bien que lorsqu’aucun
contrôle des dragages n’a été effectué, on peut
difficilement considérer comme fiable les lots
d’objets recueillis tant les pertes ou les destructions sont nombreuses (Dumont 2002, p. 62-67,
annexe 8).
D’après le comptage des épées de l’âge du
Bronze découvertes dans la Grande Saône, on
estime que l’on dispose aujourd’hui, pour cette
catégorie, de moins de la moitié de l’échantillon
d’origine. Le pourcentage des pertes d’objets des
âges du Fer est probablement supérieur à celui
qui a été constaté pour les armes en bronze
de la période précédente. En effet, les éléments
en fer (armes ou outils) ne sont souvent, à leur
sortie de l’eau, que d’informes morceaux de
métal rouillés. De plus, s’ils n’ont pas été soumis
rapidement à un traitement approprié, comme
c’est souvent le cas des objets conservés dans
les collections particulières, ils se sont considérablement dégradés. Ce constat plutôt négatif peut
être modéré pour certains cours d’eau, comme
la Saône ou la Ljubljanica, qui ont très tôt suscité
un vif intérêt de la part des chercheurs, et qui
ont par la suite fait l’objet de prospections et de
fouilles subaquatiques.
Des observations faites par les archéologuesplongeurs depuis une vingtaine d’années, il ressort
quelques constantes.
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
Les dragages, en brassant d’énormes quantités
de matériaux ont certes été destructeurs, mais ont
permis de révéler des vestiges qui étaient parfois
enfouis profondément dans les alluvions. Nous
n’avons pas à notre disposition, ou du moins très
rarement, dans l’état actuel de la recherche, les
moyens matériels et humains d’accéder à de tels
sites.
Les sites actuellement découverts au cours de
campagnes de prospection à vue subaquatiques
sont en cours d’érosion. Cette reprise d’érosion,
qui semble relativement récente, a été constatée
dans différents cours d’eau : elle est sans doute
liée aux resserrements des lits fluviaux par les
constructions de digues, de ponts, de quais et par
les différents travaux d’aménagements pratiqués
à grande échelle depuis plus de 150 ans. On
ne connaît pas encore la progression de cette
érosion, mais comme pour les dragages, on peut
d’ores et déjà affirmer que si elle dégage des sites
et en permet l’accès direct, elle constitue une
grave menace pour la préservation du patrimoine
fluvial.
Les sites livrant du mobilier et des structures
en place sont généralement conservés dans
des sédiments argileux et assez compacts. Il
reste encore de nombreuses études à réaliser
en liaison étroite avec des géomorphologues
spécialisés dans le domaine fluvial pour comprendre la taphonomie de ces vestiges.
Rappelons enfin que ce type d’investigation est très récent par rapport aux recherches
conduites en archéologie terrestre ou même en
domaine lacustre et maritime et que le domaine
à explorer reste très vaste tant d’un point de vue
géographique que chronologique et structurel.
REPRÉSENTATION
DES CATÉGORIES D’OBJETS
Dans cet article, toutes les catégories d’objets ne sont pas traitées de façon égale car
des sujets, tels que l’analyse détaillée de la
présence répétée de casques ou de récipients
métalliques dans les milieux humides, dépassent largement le cadre de cette étude. Il
apparaît cependant indispensable de citer tous
les types d’objets, le but de cette contribution
étant d’attirer l’attention sur le fait que l’ensemble des productions métalliques des âges du
Fer découvert dans les cours d’eau forme une
gamme riche et variée.
Les armes
Les armes constituent les objets le plus souvent
cités lorsque l’on aborde le sujet des découvertes
fluviales : d’une part parce que leur nombre est
généralement supérieur aux autres productions
métalliques, d’autre part parce que ce sont des
éléments faisant l’objet de nombreuses études et
synthèses typo-chronologiques et technologiques.
Les découvertes sont nombreuses et concernent
surtout le deuxième âge du Fer (ill. 1). On peut
citer en France et en Europe, sans souci d’exhaustivité, celles qui sont issues de l’Ognon (Monnet,
Thévenin 1983), de l’Yonne (Hure 1931 ; Louis
1954b), de la Marne (Chevallier 1959 ; 1963 ;
Guillaumet 1974), du Rhône (Durand 1993), de
la Seine (Piganiol 1963 ; Guillaumet 1974), du
Danube (Rieckhoff-Pauli 1983, p. 83-84 ; Sievers
2001 ; Spindler 1980 ; Rapin, Szabó 1998 ; Wirth
2000, fig. 6 ; Pollack 1986), du Lech (Uenze 1986),
de la Lahn (Kunter, Frey 2001) ou encore de la
Haine (Hubert 1982) et de la Broye (Kaenel 1988),
de la Tamise (Stead 1984) ou de la rivière Withan
(Fitzpatrick 1984).
Dans la Saône, sept armes sont attribuables
au premier âge du Fer alors que l’on en recense
135 du deuxième âge du Fer (soixante-treize
épées, deux fourreaux seuls, cinquante-neuf lances et un casque). Sur soixante-quinze épées et
fourreaux, six sont attribuables à La Tène sans
plus de précision, dix-huit à La Tène ancienne,
vingt-six à La Tène moyenne et vingt-cinq à La
Tène finale (Guillaumet, Szabó 2002) : on peut
en déduire que leur nombre varie peu durant
tout le deuxième âge du Fer. Les origines ou les
influences qui ont pu être dégagées concernent
diverses zones européennes : les îles britanniques, l’Italie, la Hongrie, le moyen Danube et le
plateau suisse (Guillaumet 1990). Certains types,
comme les épées à sphères, se répartissent dans
toute l’Europe celtique continentale ; beaucoup
d’exemplaires sont issus de milieux aquatiques
mais aucun ne provient de contexte sépulcral
(Spindler 1980 ; Gendron et al., 1986 ; Wehrberger,
Wieland 1999 ; Wehberger 2000 ; 2001 ; Taffanel
2002 ; Paysan 2004). Dans la Ljubljanica, on
dénombre vingt et une épées avec fourreaux
appartenant à La Tène C2 et à La Tène D, cinquante-cinq pointes de lance et deux casques en
fer (Gustin 1990 ; Gaspari 2003).
Aucun umbo de bouclier ne figure parmi les
découvertes et la rareté, voire l’absence d’arme-
259
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
1. Répartition chronologique des épées (avec ou sans fourreau) du deuxième âge du Fer et d’époque romaine découvertes
dans la rivière Ljubljanica en Slovénie (A. Gaspari).
ment défensif, est une particularité commune à
tous les cours d’eau d’Europe centrale et d’Europe de l’Est aux âges du Fer. En revanche, sur les
îles britanniques, le dépôt de boucliers existe aux
âges du Bronze et du Fer (Kurz 1995 ; Stead 1985 ;
1991).
On ne peut clore le chapitre concernant
l’armement sans évoquer les casques de type
Mannheim. Ces casques, qui étaient en premier
lieu considérés comme purement laténiens,
ont ensuite été attribués, sur la base de leur
technologie et de leur diffusion, aux légions
césariennes (Feugère 1990, p. 112 ; Schaaff 1988,
fig. 8). La majorité de ces casques sont issus du
milieu fluvial, c’est-à-dire hors de tout contexte
stratigraphique. Un exemplaire a été retiré d’un
bras du Rhône, peut-être sur l’emplacement d’un
gué (Perrin 1990, p. 14). Trois ont été trouvés dans
la Grande Saône : un au nord de Lyon, non localisé précisément (Feugère 1994, p. 46), un sur le
gué de Taponas (Gallay, Hubert 1972, p. 299) et
un sur le gué de Raconnay (Bonnamour 1976,
p. 20). Un quatrième provient du Doubs à Ciel
(Feugère 1990, n° 131). On en connaît un extrait
du Danube à Straubing (Reinecke 1951) et
deux exemplaires sont pointés sur le cours du
Rhin à Mayence et à Mannheim (Schaaff 1988).
260
Les puits à offrandes d’Agen, datés de la fin de
l’âge du Fer, en ont également livré plusieurs
(Boudet 1995). Dans ces dépôts, qui semblent
une spécificité culturelle du sud-ouest de la
France, les casques sont associés directement ou
indirectement à des vases céramiques indigènes
complets, des crochets en fer, de la vaisselle
métallique, des éléments de parure (fibule et
bague), des seaux en bois ainsi que des amphores vinaires italiques.
La présence de ce type de casque dans un
tel contexte amène à formuler deux hypothèses
quant aux découvertes de la Saône en particulier et, par extension, des autres cours d’eau. La
première consiste à les voir comme un élément
certain des armées de César et à les interpréter
comme les témoins de faits de guerre connus
(la guerre des Gaules). La deuxième hypothèse
serait de considérer qu’ils ont été déposés
volontairement dans l’eau selon une tradition
laténienne, dans une période transitoire, en
même temps que d’autres catégories d’armes.
M. Feugère souligne en effet que les notables
indigènes du milieu du Ier s. av. J.-C. assimilaient
sans doute le casque romain à un signe supplémentaire d’intégration et donc, de pouvoir
(Feugère 1994, p. 47).
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
Les outils
Les outils ont sans aucun doute moins retenu
l’attention des dragueurs que les armes : sortis de
l’eau avec une forte corrosion, ils pouvaient être
apparentés à des objets récents ne présentant
pas d’intérêt. Sur les passages à gué de la Saône,
on en recense un faible nombre, une quinzaine
en tout (couteaux, haches, faucille). Lorsqu’ils
sont découverts en dehors d’un contexte stratigraphique, ces éléments restent difficiles à dater
précisément. G. Kurz en a recensé dans différents
cours d’eau d’Europe centrale (Kurz 1995).
Plusieurs dizaines de haches et d’herminettes de différents types, datées du premier et du
deuxième âge du Fer, ont été découvertes dans
la rivière Ljubljanica mais on ne connaît malheureusement pas leur répartition géographique
précise ni leur éventuelle association à d’autres
objets. Leur répartition chronologique est similaire à ce que l’on connaît aux mêmes périodes
dans les sépultures. Les haches du Hallstatt final,
qui peuvent être interprétées comme des outils
ou comme des armes, comprennent des types
variés, dont celui de Schaftlochaxt, bien connu
dans les Alpes de l’Est et qui perdurent pendant
le deuxième âge du Fer. Les outils laténiens sont
représentés par une quinzaine d’herminettes que
l’on rencontre couramment dans les dépôts de
la même période (Kurz 1995) et douze haches
nordiques caractéristiques de la fin du deuxième
âge du Fer.
Comme la plupart des autres rivières européennes, la Ljubljanica a livré un petit nombre
de couteaux. On peut noter que la rareté de cette
catégorie d’objet caractérise également les lieux
de culte terrestres et les sanctuaires.
Les lingots
Sur la Grande Saône, des lingots en fer (seize
en tout), plats et à soie enroulée, de type “currency
bar”, ont été découverts sur plusieurs passages à
gué. Sur la petite Saône, à Seurre, plusieurs dizaines d’exemplaires ont été remontés par une
drague au cours de l’hiver 1976-1977. La carte de
répartition élaborée par K. Peschel (1989-1990,
fig. 20) figure deux lingots de type Manching dans
le Danube en Bavière. Un fragment d’un lingot
semblable a été trouvé dans une gravière du Lech,
affluent du Danube en Bavière (Uenze 1986).
L. Bonnamour précise que, en raison de leur
aspect peu spectaculaire, bon nombre des lingots
remontés par les dragues ont dû passer totalement inaperçus. À Seurre et au gué des Piles,
seule l’identification par un archéologue sur la
drague même, peu après la trouvaille, a permis
d’éviter qu’ils ne soient rejetés à l’eau ou vendus
à la ferraille (Bonnamour 1980, p. 23).
Trois lingots bipiramidaux épais (type Colmar)
sont signalés dans le lit de la Saône (Déchelette
1913, fig. 56 ; Mohen 1980, p. 51) et un dans le
Danube, en Bavière (Seitz 1967). Tout comme la
plupart des outils, la datation de ces objets, hors
contexte stratigraphique, reste problématique.
À plusieurs reprises, des lingots bipyramidaux
avaient été remarqués, souvent regroupés en lots
de 2, 3, 5 et jusqu’à 10,15 exemplaires, en milieu
humide. C’est notamment la découverte, en 1922,
d’une dizaine de ces objets et d’une pirogue,
lors de dragages effectués dans le Neckar à l’embouchure de la Kocher (Bade-Wurtemberg), qui
avait fourni l’argument décisif aux auteurs pour
interpréter la présence de ces objets dans l’eau
comme le résultat de pertes accidentelles de cargaisons au cours d’un transport par voie fluviale.
Cependant, le monoxyle extrait du Neckar n’a
jamais été daté et son association directe avec les
lingots n’est pas attestée (Wieland 200a ; 2000b).
Outre les découvertes de lingots dans des
dépôts terrestres comme celui de Bern-Tiefenau
(Müller 1990) ou de Niederzier (Joachim 1991),
on peut mentionner deux découvertes en milieu
aquatique : en Irlande, à Llyn Cerrig Bach (Green
1991), sur la rive d’un ancien lac, au pied d’une
petite falaise, des lingots figuraient parmi un
ensemble d’objets divers (armes, chaînes de
prisonnier, outils, objets domestiques). Sur la
station de La Tène (Suisse), ils sont mentionnés
par dizaines et R. Wyss, à propos de la découverte
des marais de Wauwil, les compare aux monnaies
(Wyss 1984, p. 138). Plusieurs auteurs ont souligné
la qualité “pré-monétaire” de ces objets qui rappelle l’aes grave, type de lingot que l’on trouve
au début de l’histoire de la monnaie en Italie
(Kleemann 1981).
La vaisselle métallique
Parmi les rares exemples de vaisselle métallique hallstattienne issue de cours d’eau figurent
deux cistes à cordons, l’une provenant d’un
ancien méandre du Danube à Ingolstadt-Dünzlau
261
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
2. Une partie du mobilier des âges du Fer recueilli sur le gué du Port Guillot, la Saône, communes de Lux et
de Saint-Marcel (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
(Reichart 1967), l’autre du Rhin (Wegner 1976,
p. 153, n° 601). On recense également une situle
extraite du Main (Abels 1998), une autre découverte dans la Ljubljanica (non publiée) et six
récipients trouvés sur les passages à gué de la
Saône (Dumont 2002, p. 152).
En revanche, les fleuves et les rivières semblent
avoir livré un nombre relativement important de
récipients métalliques du deuxième âge du Fer,
mais l’inventaire exhaustif en est presque impossible en raison du faible nombre d’éléments publiés.
262
De plus, une part importante de ces objets se trouve
dans des collections privées. Le corpus référencé
dans la vallée de la Saône reflète bien ce problème :
on compte trente éléments laténiens (vingt-huit
récipients et deux louches-fourchettes), dont la
moitié se répartit sur deux gués localisés au sud de
Chalon-sur-Saône, c’est-à-dire dans le secteur qui a
fait l’objet d’un suivi archéologique (ill. 2).
Un atelier de production de vases métalliques a pu exister dans les environs immédiats de
Chalon-sur-Saône, mais sa présence, si elle était un
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
jour attestée, ne suffirait pas à expliquer les raisons
pour lesquelles ces récipients se sont retrouvés
dans la rivière, sur des points de franchissement. Il
est peu probable que tous ces vases aient été perdus accidentellement. On avance souvent la thèse
du naufrage d’un bateau sur chacun des gués où
ont été retrouvés plusieurs récipients de la même
période alors qu’on ne dispose d’aucune donnée
permettant d’attester l’existence d’un commerce
de ce type d’objets par voie fluviale. En effet, aucun
bateau du deuxième âge du Fer n’a été découvert
et pour le premier âge du Fer on ne peut que citer
la pirogue monoxyle de Saint-Germain du Plain
(Dumont, Treffort 1994). De plus, si on attribuait
également la présence, dans le chenal, des autres
objets (armes, outils, etc.) à des naufrages, on en
déduirait que les âges du Fer ont connu de bien
piètres navigateurs.
L’existence d’une zone portuaire et la perte de
ces objets au cours de manœuvres de transbordement ont également été évoquées. Cependant,
on peut penser que ces objets auraient pu être
récupérés car la hauteur d’eau sur les gués, en
dehors des périodes de crue, était faible (quelques dizaines de centimètres à un mètre). De
plus, on constate que les vases découverts dans
la Saône, pour la plupart des chaudrons, ont servi
avant de se retrouver dans la rivière : onze d’entre
eux présentent des réparations, parfois multiples,
sur le fond, la panse ou au niveau des attaches.
Les objets destinés au négoce sont habituellement
neufs ou au moins en bon état.
Plusieurs importations du monde méditerranéen sont répertoriées dans la vallée de la Saône :
une anse en bronze, découverte entre Chalon et
Tournus, datée du IVe s. av. J.-C., a probablement été
fabriquée dans un atelier grec d’Italie ; une aryballe, peut-être issue du gué de Benne-Lafaux au
sud de Chalon, appartient à un groupe de vases
datés des Ve et IVe s. av. J.-C. dont les formes les plus
proches proviennent d’Italie (Guillaumet 1984) ;
une cruche à embouchure trilobée découverte
sur le gué du Port Guillot a été fabriquée quelque
part dans le monde grec au cours du IVe s. av. J.-C.
(Guillaumet, Szabó 1985, p. 71).
À cette série s’ajoutent trois vases en argent
d’époque républicaine découverts sur le gué
de Gigny-Thorey (Bonnamour 1985b ; 1989). La
Ljubljanica a également livré trois pièces de vaisselle en bronze tardorépublicaine : une cruche
de type Gallarate, une cruche de type Pescate et
une cruche avec une anse de type zoomorphe
(Horvat 1990, fig. 32 ; Brescak 1995, fig. 4 : 2). Plus à
l’est, on peut citer un autre exemplaire du type de
Pescate trouvé dans le Danube près de Novi Sad
(Popovic 1992, p. 64-66, fig. 4).
La parure
Parallèlement à l’étude des vestiges prédominants du monde des hommes (armes), on peut
s’interroger sur la présence/absence d’éléments
féminins dans le corpus provenant des cours d’eau,
comme l’a fait G. Kurz (1999). Aux âges du Fer, d’importants lots d’éléments de parure, sans doute des
offrandes, sont connus dans des endroits marqués
par la présence d’une source. La collecte de nombreuses fibules hallstattiennes dans la source de la
Douix à Châtillon-sur-Seine (Côte-d'Or) fait penser
à la découverte de Duchov en Bohême, d’où l’on a
tiré plus de 1 600 objets de parure, dont des centaines de fibules (Müller 2002, p. 76, 86).
Dans l’inventaire des découvertes issues de la
Saône et de ses affluents, on constate que les éléments de parure ou d’accessoires vestimentaires
sont assez peu nombreux. Un bracelet hallstattien
est mentionné dans le Doubs à Besançon, au Pont
Battant (Joan 2003, p. 158s) ; dans la Saône, on en
connaît deux sur le gué du Port Guillot et un sur
le gué de Gigny-Thorey. Pour le deuxième âge du
Fer, sept éléments ont été recensés (Dumont 2002,
p. 158). À l’échelle européenne, on ne peut que
généraliser le propos sur la rareté de ces objets
dans les cours d’eau. Il paraît évident que cette
sous-représentation est en grande partie liée à la
petite taille et à la fragilité de ce type d’accessoires
et qu’ils ont ainsi eu peu de chance d’être récoltés
sur les dragues. Deux exemples montrent que lorsqu’une attention particulière est portée à tous les
vestiges, y compris ceux de petite taille, lors d’un
suivi de dragage, ou au cours d’une prospection
subaquatique conduite de façon systématique, les
objets de parure figurent parmi les découvertes.
Ainsi, le passage à gué de Jean-de-Saône, près de
Tournus, a livré le plus grand nombre de fibules
(dix, toutes périodes confondues), parce que les
membres du Groupe de Recherches Archéologiques
de Tournus ont surveillé la station de criblage où
étaient triés les produits des dragages (Feugère
1978). Dans la Ljubljanica, le suivi des dragages
et les recherches subaquatiques ont livré vingt
fibules du type de Certosa, des pendants d’oreille
et une boucle de ceinture du Hallstatt final. Une
seule fibule du début du deuxième âge du Fer
est connue (du type de Münsingen) alors qu’on
263
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
3. Répartition chronologique des fibules des âges du Fer et d’époque romaine découverte dans la rivière Ljubljanica en Slovénie
(A. Gaspari).
recense dans cette même rivière dix exemplaires
en bronze de La Tène moyenne et finale ainsi que
treize fibules d’époque augustéenne (ill. 3).
Ces exemples illustrent bien les pertes d’information et les risques de discuter à partir de
corpus incomplets, risques qui sont d’autant plus
importants que la taille des objets diminue. La
discussion reste donc ouverte en ce qui concerne
les objets de parure.
Les ustensiles de foyer
Les broches à rôtir, découvertes seule ou groupées en faisceaux, ne sont signalées que dans
la Saône : dix-sept au total sont réparties sur six
passages à gué (Dumont 2002, p. 152 ; Guillaumet
1996). On connaît également deux landiers, une
pelle à feu et un chenet (Gallay, Hubert 1972 ;
Gallay, Spindler 1972). D’autres chenets ont été
découverts dans le Danube et ses affluents (Seitz
1987 ; Uenze 1991 ; Kurz 1995, p. 28, fig. 5 ; Wirth
2000), ainsi qu’un élément de crémaillère (Pauli
1987). On peut aussi signaler un élément de cadre
en fer, à figuration très stylisée de tête de bovidé,
trouvé dans le Rhône, probablement sur le gué de
Grigny (Feugère 1982 ; 2002). Aucun objet de ce
type n’est référencé parmi les découvertes de la
Ljubljanica.
264
Les catégories d’objets peu représentées en
contexte fluvial
Parmi les objets représentés en faible nombre
dans les cours d’eau, on peut citer les mors de
cheval (quatre proviennent de la Saône et un
mors de cerf du Danube : Pauli 1983 ; Wirth 2000),
ainsi que les entraves à cadenas dont on connaît
quatre exemplaires dans la vallée de la Saône.
L’attribution chronologique de ces entraves au
deuxième âge du Fer par A. Daubigney et Guillaumet (1985) avait été remise en question par
C. Rolley (1994). Cependant, la découverte d’un
exemplaire pratiquement identique aux entraves
de la Saône, sur le site terrestre d’Herblay (Oise),
daté de la première moitié du Ier s. av. J.-C., confirme
bien la première datation. Les auteurs considèrent
que la présence d’un cadenas implique l’utilisation de ces entraves pour l’homme et non pour un
animal (Daubigney, Guillaumet 1985). N. Spichtig
(1995), dans la publication d’une entrave découverte sur le site de Bâle - Gasfabrik, rappelle que la
plupart des entraves connues proviennent de lieux
de culte et de dépôts en milieu aquatique.
Peu de monnaies gauloises figurent parmi les
trouvailles fluviales et on peut penser qu’en raison
de leur petite dimension, ces éléments ont pu
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
des Antiquités nationales. Même si elle est probablement postérieure à la Conquête, son existence
méritait d’être rappelée car il s’agirait d’une des
rares représentations de dieu gaulois découverte
en milieu fluvial.
Dans la Ljubljanica, deux statuettes en bronze
d’origine italique ont été trouvées à 40 m l’une
de l’autre ce qui semble indiquer l’existence
d’un lieu de dépôt votif (Gaspari, Krempus 2002 ;
Istenic 2001).
LA PRÉDOMINANCE DU MOBILIER LATÉNIEN
4. Tête en bronze recueillie à la fin du XIXe s., dans la Saône
près de Lyon (photo extraite de la publication dans la Revue
Archéologique par A. Danicourt en 1880).
échapper aux chercheurs. Mais le fait que même
en cas de surveillance accrue, aucune n’ait été
recueillie, laisse supposer que cette absence correspond bien à une réalité archéologique. Par ailleurs,
pour l’époque romaine, beaucoup de monnaies
ont été découvertes dans les cours d’eau, partout
en Europe, mais ce phénomène reste toujours sousestimé (Pauli 1986 ; Wirth 1993). Aucune monnaie
gauloise ne figure au répertoire des objets localisés
précisément sur les gués de la Saône et les catalogues de découvertes anciennes en signalent une
vingtaine seulement.
Ce constat est valable également pour le
Danube ; en revanche, en Slovénie, trois dépôts de
monnaies celtiques et républicaines ont été découverts dans le lit de la Ljubljanica et un quatrième
dans une berge (Kos, Semrov 2003).
Deux statues ont été découvertes dans la
Saône : une statue ithyphallique en bois, interprétée comme une représentation de divinité, datée
du Hallstatt final par 14C (Bonnamour 1983, p. 27 ;
Bonenfant, Guillaumet 1998) et une tête humaine
en bronze recueillie à la fin du XIXe s. dans la Saône
près de Lyon (Danicourt 1880). Elle a malheureusement disparu dans la destruction du musée de
Péronne en 1917. D’après la photo (ill. 4), on peut
cependant noter une nette ressemblance avec la
statue du dieu de Bourray conservée au musée
En énumérant les différentes catégories
d’objets présentes de façon récurrente dans les
découvertes fluviales, on note que la plupart des
éléments se rattachent au deuxième âge du Fer :
dans la vallée de la Saône, 95 % des armes et 80 %
de la vaisselle des âges du Fer sont laténiens. La
rareté des éléments du premier âge du Fer est un
fait avéré, qui semble se retrouver dans les trois
cours d’eau pris en compte dans cette étude. Les
cartes de répartition, par conditions de découverte, des épées du Hallstatt C (type Gündlingen,
type Mindelheim, type Tamise), réalisées par W.
Torbrügge (1970-1971, pl. 16-17) illustrent bien
ce phénomène. Seules les épées de la région
Atlantique font exception et on peut également
citer les deux épées de type Gündlingen découvertes dans la Saône au Port de Grosne et à La
Truchère (Boulud 1995).
Pour cette période, la Grande Saône a également livré une bouterolle en bronze et une pointe
de lance au gué de Jean-de-Saône. Une deuxième
lance hallstattienne a été recueillie sur le gué du
Port de Brouard et deux poignards du Hallstatt D
sont localisés sur le gué d’Allériot et sur le gué
des Piles. Le diagramme représentant, par époque,
le mobilier datable issu de la Petite et de la Haute
Saône, montre une forte représentation de l’âge
du Bronze, une quantité de mobilier relativement
importante pour le deuxième âge du Fer, une
prédominance de la période antique mais très
peu de découvertes hallstattiennes (ill. 5). Cette
disproportion est encore plus visible sur l’histogramme présentant les trouvailles du Danube
dans deux importantes portions de chenal en
Bavière (Wirth 2000, p. 89, fig. 10). En revanche,
dans la Ljubljanica, après un déclin évident au
début de l’âge du Fer, on constate une reprise dès
le Hallstatt final et une très nette augmentation du
nombre d’objets présents dans le lit de la rivière à
La Tène moyenne et finale (Gaspari 2003, p. 47).
265
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
met en relation les trois types de dépôts suivants :
sépultures, stocks de métal et cours d’eau. Cette
éventualité a également été évoquée par R. Bradley
(1991), pour qui les découvertes subaquatiques
peuvent être complémentaires des découvertes
terrestres. Il souligne que si l’on peut suggérer un
lien entre ces catégories, il est plus difficile de trouver une interprétation. Peut-on opposer à la rareté
des épées du Hallstatt retrouvées dans la Saône
des découvertes plus abondantes en sépultures ?
L’absence de tombes hallstattiennes à proximité
immédiate de la Saône ne permet pas de répondre à cette question. On peut simplement signaler
qu’une étude récente (Gerdsen 1986) montre que
les régions voisines (Franche-Comté et Bourgogne
aux environs de Dijon et de Châtillon-sur-Seine)
ont livré de nombreuses tombes à épée du début
du Hallstatt.
5. Diagramme représentant, par époque, le mobilier archéologique
recueilli dans la Petite et la Haute Saône (S. Wirth).
Dans la vallée de la Saône, cette rareté des
découvertes du premier âge du Fer avait tout
d’abord été imputée à une péjoration climatique
qui aurait entraîné une désertion des bords de la
rivière (Armand-Calliat 1958), en opposition avec
l’occupation dense du Bronze final qui bénéficiait de conditions climatiques plus clémentes.
Cependant, des études récentes ont permis de
recenser des sites hallstattiens établis près du
cours d’eau, montrant ainsi que les implantations
humaines n’ont pas cessé durant cette période
(Collet 1991).
Il faut donc chercher d’autres raisons pour
expliquer la rareté des découvertes d’objets du
premier âge du Fer dans les lits des fleuves et des
rivières et notamment étudier précisément un
éventuel changement dans les pratiques cultuelles en se tournant vers les découvertes terrestres
(sépultures, sanctuaires).
Pour le premier âge du Fer comme pour l’âge du
Bronze, des essais de comparaison entre le mobilier
issu des cours d’eau et le mobilier découvert dans
les sépultures ont été tentés. Sur le Rhin moyen,
les faits suivants ont été constatés par W. Torbrügge
(1970-1971) : le faible nombre d’épées retrouvées
en milieu humide au tout début du Hallstatt serait
compensé par un accroissement du dépôt d’épées
dans les sépultures. Cette tendance serait inversement proportionnelle aux pratiques existantes à la
fin du Bronze final. En France, P.-Y. Milcent (1994)
266
INTERPRÉTATION DES DÉPÔTS FLUVIAUX
L’érosion des sites de berge
et l’hypothèse funéraire
Certaines catégories d’objets des âges du Fer,
issues du lit mineur des cours d’eau, trouvent des
comparaisons dans le domaine sépulcral. Il s’agit
des chenets et des broches qui sont des dépôts
funéraires traditionnels au Hallstatt et que l’on
recense dans la sépulture de Clémency par exemple (Metzler-Zens 1991). La vaisselle de bronze et
les armes sont déposées dans la majorité des tombes aristocratiques gauloises (épées et lances). Il a
donc souvent été tentant d’expliquer la présence
de ces objets par l’érosion de tombes implantées
le long des berges. Dans le cas de la Ljubljanica,
l’absence de sites des âges du Bronze, des âges du
Fer et de la période romaine sur les bords immédiats de la rivière, à proximité des concentrations
d’objets immergés bien connues, permet d’éliminer de façon certaine cette hypothèse (Gaspari
2003). Dans le cas de la Saône, l’importance des
découvertes dans le lit mineur supposerait, dans
l’hypothèse de sépultures détruites par l’action des
eaux, une concentration de nécropoles particulièrement riches et réparties tout au long du cours
de la Grande Saône. Pour le moment, les tombes
de ces périodes sont quasiment absentes du val
de Saône. Une seule découverte terrestre, pouvant
être interprétée comme une sépulture, est signalée
près du gué de Gigny-Thorey, au lieu-dit “le Plâtre”,
à 300 m de la Saône, sur une butte, c’est-à-dire hors
de portée des eaux (Bonnamour 1985a). Il s’agit de
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
fragments d’une épée gauloise à l’intérieur de son
fourreau. Cet unique exemple ne permet pas d’affirmer que toutes les tombes étaient implantées dans
les mêmes conditions, mais une certaine logique
peut le laisser supposer.
Dans tous les cas de rivières à régime lent
comme la Saône, l’hypothèse de l’érosion n’expliquerait qu’une partie des découvertes, celles qui
sont effectuées immédiatement au pied des berges. Les prospections et les fouilles subaquatiques
menées dans la Saône chalonnaise ont en effet
démontré que les vestiges issus de sites de berge
connus n’étaient jamais déplacés loin de leur
point d’origine par l’action du courant. Beaucoup
d’objets ont par ailleurs été découverts au milieu
du chenal, comme par exemple sur le gué de la
Casaque, où deux pointes de lance proviennent
d’une zone empierrée à l’époque romaine et
localisée au milieu de la rivière, à 100 m du bord.
Pour ces objets, découverts dans un pavage de
gué conservé en position primaire, l’explication
du dépôt volontaire dans le lit du cours d’eau, sur
une zone de faible profondeur, voire exondée en
période sèche, est la plus probable.
Du fait historique au fait cultuel…
Dès le XIXe s., la présence d’armes dans les cours
d’eau est rattachée à des faits militaires historiques,
et plus particulièrement à la guerre des Gaules.
Ainsi, dans la littérature sur la vallée de la Saône,
on ne compte pas moins de quatre passages à gué
identifiés comme ayant servi aux Helvètes pour
franchir la Saône… Ces portions de chenal ont en
commun d’être des hauts-fonds naturels importants
sur lesquels un abondant mobilier archéologique
de toutes les périodes a été découvert.
Dans les années cinquante, les interprétations
proposées pour expliquer la présence d’armes
protohistoriques dans les cours d’eau ne font plus
référence au récit de la Guerre des Gaules mais
plutôt aux légendes irlandaises. Un article écrit par
R. Louis (1954a) signale des découvertes d’armes
dans le lit de la Marne, le long d’une chaussée
empierrée (gué). Si l’auteur a le mérite d’accorder
un intérêt à ce genre de trouvailles, il développe
également une théorie qui sera reprise jusqu’à nos
jours pour expliquer la présence d’armes de l’âge
du Bronze mais aussi des âges du Fer dans les
cours d’eau : les combats sur les passages à gué. R.
Louis puise des références dans les épopées irlandaises qui relatent des combats mythologiques sur
des gués (Louis 1954a, p. 187).
Dans le cas de la Saône, on peut opposer à
l’hypothèse des combats sur les gués la proportion
d’épées découvertes dans leur fourreau, position
qui ne correspond pas à une attitude offensive ou
défensive. Sur soixante-treize épées du deuxième
âge du Fer, soixante-deux ont été recueillies avec
leur fourreau, ce qui représente environ 85 %. La
plupart de ces fourreaux sont en très mauvais état
et parfois même, il n’en subsiste que des traces. On
peut donc supposer que, parmi le groupe des épées
retrouvées seules, certains exemplaires étaient dans
leur fourreau au moment de leur immersion, mais
que celui-ci n’a pas été préservé.
Le même phénomène a été observé dans la
rivière Ljubljanica, où la plupart des épées laténiennes ont été découvertes intactes, dans leur
fourreau (Gaspari 2003). Au cours des dernières
décennies, les régions voisines des Alpes de l’Est,
ont livré plusieurs sites remarquables de dépôts
d’objets. Sur les pentes du Mont Sorantri, près de
Raveo (Carnia, Italie), les découvertes comprennent des épées fragmentées, des éléments de
fourreaux, des boucliers, des lances et des fibules
datés de La Tène B2 et de la période augustéenne,
avec une majorité d’éléments laténiens (Righi
2001).Toutes les armes ont été rituellement détruites et exposées sur des planches ou des arbres,
comme le montre l’exemple d’un fourreau cassé
en deux morceaux déposés ensemble. La découverte de Förker Laas Riegel, dans la vallée de Gail
(Carinthie, Autriche) comprend des épées dans
des fourreaux décorés, des casques, des lances,
des boucliers déposés vers 300 av. J.-C (Schaaff
1990). Avant d’être déposés dans deux fosses, les
objets ont été brûlés et sacrifiés. On peut encore
citer un groupe de dix umbos de boucliers, qui
étaient également volontairement endommagés,
découvert sur le site de l’ancienne Teurnia, près
de Spitall, dans la vallée de la Drava, en Autriche
(Lippert 1992 ; Gugl 2000, p. 124-126). Les umbos,
qui se rattachent à des formes germaniques et
de la Celtique de l’Est, datent de La Tène C2 et
La Tène D et ne représentent peut-être qu’une
part d’un dépôt plus important. Une des plus
intéressantes découvertes récentes provient du
sommet du Frauenberg, près de Leibniz, en Styrie
(Autriche) : une fouille de sauvetage a livré un
fossé comblé avec des os humains et de la faune
ainsi que différents types d’objets, dont des fragments d’armes de La Tène D (Tiefengraber, Grill
1997). Le contexte suggère l’existence d’un sanctuaire du même type que ceux qui sont connus en
Gaule du Nord.
267
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
C’est avec les dépôts des sanctuaires du nord
de la France tels que Ribemont-sur-Ancre ou
Gournay-sur-Aronde, que l’on peut tenter de comparer les découvertes de la Saône. Celui de
Gournay, qui a fonctionné de la première moitié
du IIIe s. av. J.-C. jusqu’à environ 120 av. J.-C., a livré,
comme le lit de la Saône, des armes trouvant
leur comparaison dans tout le monde celtique.
Les armes recueillies sont considérées comme
des objets de prestige par leur décor ou leur
rareté, ce qui pourrait s’appliquer à une partie
des exemplaires issus de la rivière. Mais contrairement à Gournay, aucun élément de bouclier n’a
été retrouvé dans la Saône, alors que cette arme
est présente en grande quantité dans le sanctuaire (trois fois plus de boucliers que de lances).
L’importance du bouclier comme signal visuel
dans la bataille, mais aussi lors de l’exposition de
trophée dont il est un des principaux éléments,
fait penser qu’il n’y a pas eu d’expositions similaires d’armes au bord de la Saône, sur les gués et
probablement sur les autres cours d’eau pris en
compte dans cette étude.
Dans d’autres zones géographiques et plus
particulièrement dans le domaine atlantique, en
Irlande ou en Grande-Bretagne par exemple, des
boucliers ont été découverts dans des lacs ou
des cours d’eau, comme la Tamise ou la rivière
Witham (Fitzpatrick 1984, p. 298).
Les fourreaux de Ribemont-sur-Ancre sont
presque tous dotés de leur système de suspension (Lejars 1994), comme le sont les fourreaux
découverts dans la rivière Ljubljanica, alors que
les meilleurs exemplaires issus de la Saône ne
conservent, dans quelques cas, que le pontet.
D’après J.-P. Guillaumet, ces suspensions n’étaient
déjà plus solidaires de l’arme au moment de leur
immersion. Les lames d’épée n’ont pas fait l’objet
d’examens détaillés, mais l’étude des fourreaux
menée par J.-P. Guillaumet révèle que deux exemplaires au moins portent des traces de réparation.
Une partie de ces armes, non quantifiable pour le
moment, a donc servi avant de se retrouver dans
la Saône. Il en va de même pour certaines panoplies qui, lors de leur entrée dans les sanctuaires,
n’étaient pas neuves et pouvaient avoir été utilisées, probablement dans des combats (Brunaux,
Rapin 1988). Ces observations sur l’état des armes
sont limitées par les problèmes de conservationrestauration des objets sortis de l’eau. En effet,
beaucoup d’épées découvertes dans la Saône ou
dans la Ljubljanica n’ont pas été extraites de leur
fourreau.
268
La dernière comparaison que l’on pourrait
établir entre les armes des sanctuaires et celles
de la Saône, c’est leurs provenances multiples,
avec des lieux d’origine parfois très éloignés du
lieu de dépôt.
La principale différence entre les objets issus
des sanctuaires et ceux provenant des cours d’eau,
réside dans le fait qu’aucune trace de destruction
volontaire (épée ou lance ployée, bris inhumatoire) n’a été constatée sur les armes extraites des
rivières. Si elles ont été déposées volontairement
dans l’eau, il n’a pas semblé nécessaire de les
rendre inutilisables. Le seul fait de les mettre dans
l’eau consistait en une destruction et ne nécessitait donc pas un travail de bris ou de sacrifice
préalable. Dans certains cours d’eau, on peut
penser que la turbidité de l’eau et la profondeur
rendaient toute récupération impossible. En revanche, en certains points, comme les passages à gué
où la hauteur d’eau, lorsqu’ils étaient praticables,
était très faible, ces armes et autres objets étaient
vraisemblablement accessibles. D’autres facteurs
intervenaient donc probablement, tel que des
interdits religieux. Jules César relève ce fait : « Il
n’est pas arrivé souvent qu’un homme osât, au
mépris de la loi religieuse, dissimuler chez lui son
butin ou toucher aux offrandes : semblable crime
est puni d’une mort terrible dans les tourments »
(BG VI, XVII).
La Saône comme la Ljubljanica ont livré, avec
les armes des âges du Fer, d’autres objets contemporains (outils, parures, instruments liés au foyer).
Il en va de même pour la plupart des cours d’eau
européens : chenets dans la Marne, cadre métallique dans le Rhône, mors dans l’Yonne, outils
divers (faucille, houe, gouge, couteaux) dans la
Haine.
L’étude du site de Gournay a permis à A. Rapin
d’affirmer que les principes régissant l’entrée des
armes sont différents dans un sanctuaire ou dans
une sépulture. De la même façon, on peut penser
que la variabilité des objets contenus dans les
dépôts, dont la fonction n’est pas encore expliquée, implique des motivations diverses.
Pour J.-L. Brunaux, ces dépôts se répartissent en
deux catégories : l’une à forte proportion d’armes,
d’équipement militaire (La Tène, sanctuaires de
type belge), l’autre caractérisée par la découverte
de Kolín en Bohême (armement peu nombreux,
objets liés à l’artisanat, à l’habitat et à l’attelage
ainsi qu’aux activités agricoles et domestiques ;
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
6. Le mobilier du deuxième âge du Fer recueilli sur le gué du Port de Grosne (la Saône, communes d’Ouroux et de
Marnay). Ce passage est celui qui a livré, dans la vallée de la Saône entre Verdun-sur-le-Doubs et Lyon, le plus grand
nombre d’armes laténiennes (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
Rybová, Motyková 1983). Le dépôt de la faille
de la Chuire à Larina (Isère) se rapproche de la
deuxième catégorie, avec pour principale différence, la présence de nombreuses fibules (Perrin
1990). Il fait penser aux découvertes de la colline
de Sainte-Blandine à Vienne (Chapotat 1970). Ce
dernier site concerne une période allant du IIe s. av.
J.-C. jusqu’à l’époque augustéenne, alors que la
majorité du mobilier de la faille de la Chuire va du
milieu du IIIe s. av. J.-C. jusqu’à la première moitié
du Ier s. av. J.-C. Une différence apparaît : à SainteBlandine, aucun objet n’a subi de destruction
volontaire alors que la faille de la Chuire a livré,
entre autres, une fourchette déformée et une lame
de faux ployée. On le voit, la bipartition des dépôts
annoncée ci-dessus n’est pas si évidente lorsqu’on
analyse en détail leur contenu.
Le mobilier de la Saône comporte des caractères communs à ces sites mais aussi quelques
différences notables. Comme sur le site de La
Tène, on a une majorité d’armes, mais contraire-
ment à ce qui est constaté sur cette station, dans
la Saône, de même qu’à Sainte-Blandine, aucune
n’a été dégradée. Aucun élément de bouclier
n’est présent, contrairement à La Tène, à Larina
ou à Sainte-Blandine. Les ustensiles de toilette,
rasoirs, forces, pinces à épiler, sondes ou cuillers à
fard, présents à Sainte-Blandine et à La Tène sont
absents de la Saône et de la faille de la Chuire. La
Saône n’a livré, sur les gués, aucune pièce de char,
alors que ce type de mobilier existe à Larina, à La
Tène mais pas à Sainte-Blandine. On peut également opposer l’absence de monnaies celtiques
sur les passages de la Saône (tout en gardant à
l’esprit d’éventuels problèmes de représentativité),
aux nombreuses découvertes effectuées sur les
sites de La Tène (Müller 1992) et de Port (Müller
1991 ; Wyss, Rey, Müller 2002), dans les marais de
Lucerne, dans les dépôts de Bern-Tiefenau (Mûller
1990) et de Niederzier.
Si on prend la répartition des découvertes
par site, les gués de la Saône (pour lesquels on
possède le plus de données) ont livré un nombre
269
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
7. Le mobilier du deuxième âge du Fer recueilli sur le gué de Jean-de-Saône (la Saône, commune de Montbellet). Pour
quarante-trois objets métalliques récoltés on ne compte que trois céramiques : les tessons ont été rejetés à l’eau par les
dragueurs et plusieurs éléments métalliques ont été dispersés (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
d’objets très inférieur à celui des grands dépôts,
auxquels il est tentant de les comparer. La faille
de la Chuire contenait plusieurs milliers d’objets
métalliques et de céramiques presque complètes.
À Sainte-Blandine, lors de la seule découverte fortuite de 1955, plus de 1 400 pièces en bronze, en fer
et en céramique ont été recensées dans 4 m3 de
terre (Chapotat 1970). Le dépôt de Bern-Tiefenau
comprenait de 700 à 1 000 objets de métal.
Le gué du Port de Grosne sur la Saône, est,
pour le moment, le plus riche en armes : vingt du
deuxième âge du Fer (ill. 6). Si on tient compte du
270
pourcentage de perte estimé (Dumont 2002), en
considérant qu’on possède moins de la moitié du
mobilier, ce chiffre passerait à cinquante armes.
On n’aurait donc déposé volontairement, en
moyenne, sur les 450 ans que couvre le deuxième
âge du Fer, qu’une arme tous les neuf ans. Ce
chiffre est presque le même pour le gué de Benne
Lafaux (découvertes anciennes). Ceux de Jean
de Saône (ill. 7), de Gigny-Thorey (ill. 8), des
Ronzeaux (ill. 9) ou de Verdenet (ill. 10) ont livré
chacun une dizaine d’armes.
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
8. Une partie du mobilier du deuxième âge du Fer récolté sur le gué de Gigny-Thorey. Un peu plus de la moitié des éléments
recueillis pour cette période sont des objets métalliques. Une série d’objets italiques importés dans le courant du Ier s. av. J.-C. a
pu être identifiée : elle comprend des morceaux d’amphores, de la céramique arétine et trois vases en argent, au centre et en
bas de la figure (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
Ces chiffres sont inférieurs en ce qui concerne
la vaisselle métallique ou l’outillage par exemple. Même en tenant compte des pertes, on reste
encore loin des lots d’armes ou d’autres objets
cités à titre de comparaison.
Cependant, si les découvertes de sites de gués
sont numériquement inférieures aux grands dépôts
connus, elles présentent un caractère assez homogène et surtout répétitif. Sur une cinquantaine de
kilomètres, du gué de Verdenet (au nord de Chalon)
à celui de Fleurville, huit gués ont livré chacun un
lot d’au moins une vingtaine d’objets du deuxième
âge du Fer (armes, céramiques, vaisselle, outils,
divers).
Dans la même zone, d’autres passages présentent le même type de découvertes mais en nombre
restreint (moins de dix objets). Ce constat pourrait
s’appliquer par extension à toute la Grande Saône
malgré le manque chronique de données relatives
à la partie aval et peut-être également à la Petite
Saône, où des découvertes similaires ont été effectuées. Il reste à savoir si ce phénomène est propre
à la Saône ou à une zone géographique plus étendue, ou s’il pourrait se répéter sur tous les cours
d’eau pendant le deuxième âge du Fer.
Dans la Ljubljanica, il est intéressant de constater que les découvertes de la fin du Hallsatt
correspondent à l’assemblage du mobilier que
l’on retrouve dans les sanctuaires contemporains
de la Vénétie, des Brandopferplätze des Alpes et
des offrandes découvertes dans les failles des
zones karstiques.
Si des différences existent selon les périodes
et les zones géographiques dans les assemblages
d’objets ou dans les pratiques (bris préalable au
dépôt ou objets déposés intacts), on peut s’interroger sur d’éventuelles différences dans les types
d’actions qui ont conduit au dépôt de ces objets.
271
ANNIE DUMONT, ANDREJ GASPARI, STEFAN WIRTH
9. Le mobilier du deuxième
âge du Fer recueilli sur le gué
des Ronzeaux (la Saône,
communes d’Epervans et de
Lux). Ces vestiges ont été
trouvés des deux côtés du
lit mineur, dans une zone
bien délimitée. Ce secteur est
aujourd’hui considéré comme
étant entièrement détruit
par les dragages (dessins
C. Michel, musée Denon,
Chalon-sur-Saône).
10. Les armes du deuxième âge du Fer recueillies sur
le gué de Verdenet (la Saône, commune de Sassenay).
L’inventaire recense deux céramiques seulement de
cette époque, ce qui est caractéristique des collectes
sélectives effectuées par les dragueurs (dessins C. Michel,
musée Denon, Chalon-sur-Saône).
Aux dépôts collectifs des grands sanctuaires
viendraient peut-être s’ajouter, en complément,
des actions plus individuelles se déroulant en
d’autres lieux, comme les cours d’eau. Il est bien
évidemment extrêmement difficile de connaître
les motivations précises et par là même le sens
de tels actes. On peut simplement conclure que
dans le cas de dépôts ayant lieu dans des endroits
peu peuplés, on ne peut espérer disposer d’un
autre contexte archéologique. Le fait de retrouver
une concentration de types similaires d’armes et
d’autres éléments en un point précis constitue
en lui-même un contexte, d’autant plus si le phénomène s’inscrit dans la longue durée, ce qui est
manifestement le cas pour les dépôts d’objets
dans les fleuves et les rivières.
272
LES OBJETS MÉTALLIQUES DES ÂGES DU FER DÉCOUVERTS EN CONTEXTE FLUVIAL
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277
Les dépôts laténiens d’Allemagne
La continuité d’un phénomène en Europe
Sabine RIECKHOFF
À la mémoire de Konrad Spindler (1939-2005)
OBJECTIFS
Dans cette contribution 1 je ne traiterai pas de
chaque dépôt laténien d'Allemagne en détail ni
des quelques dépôts célèbres comme par exemple le petit arbre cultuel en or de Manching (Maier
1991). Je voudrais plutôt présenter la méthode
d’analyse et les possibilités d’interprétation. En
effet, je pense que nous pourrions connaître beaucoup plus des dépôts et qu’ils seraient une source
d’informations plus riche, si nous considérions
plus précisément et d’une manière diachronique
les modes d’assemblages, les lieux de la déposition et la répartition du phénomène.
Plus précisément, je démontrerai, à travers
les dépôts d’outillage mixte en fer, que la comparaison entre l’époque laténienne et l’époque
romaine en Allemagne est très instructive, car elle
permet une nouvelle interprétation des raisons
des dépositions.
DÉFINITION GÉNÉRALE DU DÉPÔT
Tout d’abord, j'aborderai ma définition du
dépôt métallique en général, et les notions qui
jouent un rôle dans cette définition. Je suis d’accord dans l'ensemble avec celle de H. Geißlinger
(1983). Pour lui, un dépôt est défini par le lieu, le
type d’assemblages et le contexte.
Pour le lieu, on peut distinguer entre milieu
sec et milieu humide (source, fleuve, lac, marais,
puits) ; le lieu peut se trouver dans un habitat, dans
un sanctuaire ou à un endroit isolé, marqué par un
aménagement naturel, extraordinaire ou non.
Les ensembles peuvent se composer d’un assemblage homogène constitué soit d'objets identiques
comme les monnaies, soit d'objets divers mais
appartenant à une même catégorie, comme la
parure d’une femme. L’autre possibilité concerne
des objets hétérogènes, par exemple dans les
dépôts d’outillage et d’armes comme dans le
Massenfunde (découvertes en masse) de type
Tiefenau (Müller, Koënig 1990). Les objets isolés se
classent dans une troisième catégorie, comme par
exemple l’arbre cultuel de Manching mentionné
ci-dessus (Kubach 1985 ; Winghart 1986).
Généralement, les objets peuvent être complets,
inutilisables ou intentionnellement détruits ; il
peut s’agir de matières premières ou de déchets,
de grands et lourds objets ou des petits fragments de différents matériaux, bronze, fer, argent
ou or.
Pour le contexte, nous distinguerons les
situations réversibles et irréversibles (dans les
fleuves, les lacs, les puits, les fentes de rocher, et, au
moins partiellement, les marais).
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 279-292 (Bibracte ; 11).
SABINE RIECKHOFF
Pour l’interprétation, il s’agit seulement de
dépôts irréversibles que nous pourrions interpréter comme des offrandes (à condition qu’il ne
s’agisse pas de pertes accidentelles) et non destinés à être retrouvés.
−
RÉGIONS ET ÉPOQUES CONCERNÉES
−
Je parlerai des régions à l'est du Rhin, plus
précisément celles d’Allemagne surtout d’Allemagne du Sud, entre les Alpes et la moyenne
montagne. Ce sont les régions qui participent à
la culture du Hallstatt et La Tène et qui furent sous
l’influence de Rome – période allant du Ve s. av.
J.-C. jusqu’au Ve s. ap. J.-C.
−
ÉTAT DE LA RECHERCHE
Notre connaissance des dépôts en Allemagne
est relativement bonne. Les dépôts hallstattiens et
laténiens furent décrits par G. Kurz (1995). Depuis,
d'autres furent découverts, mais leur observation
reste la même. Pour les dépôts romains, il existe
de nombreuses études que j’ai rassemblées en
bibliographie, jusqu’en 1998 (Rieckhoff 1998,
pp. 528). Un peu plus tard, un tableau des dépôts
romains du IIIe s. entre le Rhin et le Danube fut
publié par T. Fischer (1999). Il s’agit, à vrai dire,
à moitié de dépôts d’un contexte certain ou
probable.
En revanche, l’interprétation de dépôts en
Allemagne est très controversée et parfois même
très stricte. On peut distinguer plusieurs parties
dans l’histoire de l’interprétation :
− Au XIXe s., les dépôts furent considérés pour
la première fois comme une catégorie spécifique (Worsaae 1844). En 1897, le Danois
Sophus Müller a établi la notion de “dépôt”
dans la terminologie archéologique. Il fit la
différence entre les “dépôts” réversibles et
les “offrandes” irréversibles (Müller 1897). À
cause du traitement de ces dernières, en particulier en Europe du Nord, l’interprétation du
“sacré”s’imposait.
− En Allemagne du Sud, la discussion se développa dans une autre direction. Depuis le
début du XXe s., dans le cadre d’une appréhension plus évolutive et rationnelle des sciences,
nous fûmes d’avis qu’il s’agissait surtout de
dépôts servant de cachettes aux marchands
ou aux forgerons (Schumacher 1914 ; Behrens
1927 ; Heck, Kraft 1927).
280
−
−
−
−
Dans les années vingt, dans le cadre d’une
politique nationaliste et raciale en Allemagne,
P. Reinecke interpréta les dépôts comme une
réaction de la population indigène vis-àvis de l’invasion des peuples étrangers. Il a
groupé les dépôts en Katastrophenhorizonte
(Reinecke 1925).
Une interprétation divergente des dépôts, la
première fois donnée au début du XXe s., a
été mise en évidence en 1955 par H. Hundt
qui proposa de parler de Totenschatz ou
Selbstausstattung, qui signifie l'équipement
d’une personne pour l’autre monde (Beltz
1910 ; Hundt 1955).
En 1960, grâce à W. Torbrügge, l’interprétation
profane ou sacrée des objets trouvés en milieu
humide, est traitée pour la première fois au
même niveau (Torbrügge 1971) 2. À peu près
en même temps, W. H. Zimmermann publia un
article (qui n'a jamais été considéré comme
il l'aurait mérité) sur les offrandes explicitement de fleuves, marais, sources et puits
« provenant de l’Allemagne du Sud-Ouest »
(Zimmermann 1970).
En 1985, L. Pauli a ajouté l’idée qu’il s’agissait
souvent d’une forme de dépôts d’argent, qui
pouvaient être non seulement une cachette
mais aussi une offrande (Pauli 1985) 3.
Depuis l’exposition Gaben an die Götter en 1997
à Berlin, nous avons rejoins l’opinion du XIXe s.
selon laquelle tous les dépôts préhistoriques
devaient être interprétés comme sacrés: « ... so
wird man die Opferhypothese als die normale
anzusehen haben » (Hänsel 1997, p. 15) 4.
Mais ce n’est pas valable pour les dépôts romains,
parce que la plupart de ces grands et riches
dépôts appartiennent au IIIe jusqu’au Ve s. ap. J.C., c’est-à-dire à l’époque de grandes invasions.
E. Künzl mais aussi T. Fischer étaient d’avis qu’il
s’agissait d’objets cachés ou perdus par des
Germains qui avaient pillé les sites romains
et les sanctuaires. Presque tous les auteurs se
sont déclarés d’accord avec cette interprétation
(Fischer 1995 ; 1999 ; Künzl 1996 ; 2000).
Dès le début, je n’ai pas été d’accord avec cette
interprétation exclusivement profane. Il y a quelques années, j’ai ajouté à cette discussion la
notion et la définition du sacrifice germanique
(Rieckhoff 1998). Cependant, d’autres auteurs
comme par exemple A.Thiel, parlent aussi d’actes de sacrifice pour les armes de l’époque
impériale récente, trouvées dans les fleuves et les
rivières (Thiel 2000).
LES DÉPÔTS LATÉNIENS D’ALLEMAGNE : LA CONTINUITÉ D’UN PHÉNOMÈNE EN EUROPE.
TOUR D’HORIZON DES DÉPÔTS
LATÉNIENS EN ALLEMAGNE
et dans les Alpes, à laquelle la France et les pays
danubiens ne participent pas.
Je donnerai ensuite un tour d’horizon sur la
répartition, la datation et l’interprétation des
dépôts laténiens les plus importants en Allemagne,
mis en ordre par catégories et par époques. Il
s’agit de :
− la parure en bronze
− les fibules
− les objets en métal précieux
− les armes
− les lingots en fer
− l’outillage mixte en fer.
Je ne prendrai pas en compte les monnaies
car elles constituent une catégorie propre.
Les dépôts en métal précieux
La parure en bronze
Cette catégorie comprend des anneaux
ayant une large répartition à travers l’Europe
centrale. Elle est représentée en Allemagne par
à peu près 20 dépôts de l’âge du Fer ancien
(Hallstatt D-La Tène B) concentrés dans la zone
de moyenne montagne (Hesse, Thuringe) et
déposés en milieu sec.
Les fibules
Elles ont été plus rarement déposées, mais de
façon continue du Hallstatt D à La Tène D, surtout
en milieu humide, de manière à ce que l'on puisse
parler de sacrifice. Il faut mentionner en particulier les sites de Egesheim (Baden-Württemberg) et
de Kranjski Rak (Slovénie).
À Egesheim,à environ 40 km à l’ouest de la célèbre fortification hallstattienne de la Heuneburg sur
le Danube, se trouve un plateau sans habitat, avec
un banc de rocher percé d’un grand porche de
formation naturelle dans la roche, de 6 m de haut
et 4 m de large. Là, les femmes ont jeté leurs fibules
pendant presque 300 ans, entre la fin du Hallstatt
D et La Tène B (Bauer, Kuhnen 1993). Il faut aussi
avoir la plus grande attention pour la découverte
par un berger près d’un col peu important d’une
paire de fibules en or de norisch-pannonischer
Typ, datées d’environ 100 ap. J.-C. Il s'agit d'une
véritable offrande si nous ne voulons pas admettre
qu’une femme, en faisant une promenade dans les
Alpes, ait perdu ses fibules, les seules en or parmi
plus que 1 500 exemplaires retrouvés (Pauli 1986).
Remarquons que la déposition des fibules est
une tradition commune en Allemagne, en Italie
Ces dépôts, en particulier des torques, bien
connus en France et en Angleterre mais aussi en
Bohème et dans les Alpes, sont presque totalement
absents dans notre pays. Du temps de la civilisation
des oppida, ont été retrouvés deux célèbres dépôts
de fibules,l’un à Manching (Bayern) (Krämer 1971)
et l’autre à Langenau (Baden-Württemberg : Reim
1979). Les deux fibules en argent de Manching
appartiennent au “type de Lauterach” et au “type à
coquille”; les fibules en bronze doré de Langenau
sont décorées de corail. Tous ces exemplaires sont
datés de La Tène D2a. D’ailleurs, à part le petit
arbre de Manching mentionné ci-dessus, les seules dépositions notables sont celle de Trichtingen
(Baden-Württemberg), le grand anneau en argent,
et celle de Niederzier (Nordrhein-Westfalen), le torque et les monnaies en or. Ces deux exemples sont
sans doute des offrandes. Niederzier fait, à vrai dire,
déjà partie de la tradition rituelle gauloise mais
ne comble pas la lacune en Allemagne du Sud.
Pourquoi les dépôts en métal précieux sont-ils
absents ici ? Il est sûr que ce ne sont pas les matières premières qui manquent, la région abonde en
dépôts de monnaies d’or ou d’argent.Y-aurait-il des
raisons religieuses, sociales ou chronologiques ?
Aujourd’hui, nous pouvons seulement poser la
question, mais pas y répondre.
Les armes
J’ajouterai une remarque sur les armes qui
sont connues sur plus de 150 sites et dont un
quart se trouve en Allemagne du Sud. Il s’agit surtout d’épées, de lances en moins grande quantité,
immergées dans de grands fleuves, la plupart sans
doute dans un contexte d'offrande. L’immersion
des épées commence au Ve s. av. J.-C., culmine au
IIIe s. et diminue de nouveau au Ier s. av. J.-C. Tous les
types, aussi bien les épées à sphères, se concentrent le long de la Saône, de la Seine, du Danube
supérieur ainsi que des lacs de la Suisse occidentale, mais ils ne franchissent la frontière de
l’Autriche que dans quelques rares exemples.
Les lingots en fer
Les dépôts allemands les plus caractéristiques
sont ceux qui contiennent des lingots reproduits
281
SABINE RIECKHOFF
pour cette raison sur le titre de l’ouvrage de
Kurz (1995). On peut en distinguer deux grands
groupes, premièrement les barres bipyramidales
(Doppelspitzbarren) que l’on retrouve beaucoup
plus souvent et deuxièmement les lingots en
barre (Stabbarren), auxquels appartient aussi la
forme spécifique des lingots aux extrémités roulées (Schwertbarren).
Les lingots bipyramidaux les plus anciens
datent de l’époque de Hallstatt (Peschel 1979 ;
Sievers, Drescher, Rochna 1984). L’unique exemple
d’un dépôt daté de l’époque romaine a été trouvé
immédiatement au sud de la frontière allemande
(Kaiseraugst : Müller 1985, p. 27, fig. 15). Il n’y a
qu’un seul lingot daté de La Tène A-B (Landau :
Kurz 1995, n° 453) et deux exemplaires coupés,,
datés du temps des oppida (Manching : Jacobi
1 974, n° 1500-1 501). Le type Manching (n° 1499)
avec un bout élargi semble être plus caractéristique pour cette période. Bien que le plus ancien
lingot en barre provienne aussi de l’époque hallstattienne (Peschel 1979, p. 37, fig. 1), la datation de
La Tène C-D est surtout valable pour ces lingots,
en particulier pour ceux aux extrémités roulées,
car plusieurs d'entre eux ont été retrouvés sans
ambiguïté dans le contexte de la civilisation
des oppida (Jacobi 1974, n° 1505 ; Schäfer 2003).
Pourtant, ils ont disparu à l’époque romaine : une
caractéristique de la discontinuité entre La Tène D
et l’époque augustéenne à l’est du Rhin.
La majorité des lingots provient de fleuves et
des lacs où ils ont été retrouvés dans un endroit
isolé. Reinecke explique cette situation comme
un « horizon de catastrophe » de La Tène finale,
qu’il a définit, sous l’influence de l’esprit du temps,
par analogie avec les dépôts de monnaies. Nous
retrouvons encore cette interprétation en 1995
chez Kurz. Mais le plus souvent aujourd’hui, nous
comprenons, d’une manière plus objective, les
dépôts comme cachettes de matières premières
le long des routes fluviales de commerce. Mais
est-ce que tout cela est logique si l’on considère
la répartition totale ? Si les lingots bipyramidaux
étaient typiques pour les voies commerciales de
la civilisation des oppida, n’attendrions-nous pas
une répartition semblable à celle de la fibule de
type Nauheim, par exemple ? Cependant, la réalité
est complètement différente.
La concentration des lingots en Allemagne de
l’ouest et du sud-ouest et sur le Plateau suisse est
282
frappante. Bien qu’il y ait du fer presque partout,
ils sont manifestement immergés ou enterrés surtout dans une région limitée. Cette limitation et
répétition pourraient très bien s’expliquer comme
un témoignage d’une pratique religieuse. Ce serait
une question intéressante si ces communautés
religieuses étaient les nucléi des groupes ethniques qui se sont développées durant la deuxième
moitié du Ier millénaire av. J.-C. Car la répartition
des lingots correspond assez bien aux régions
pour lesquelles nous avons connaissance, par
les auteurs antiques, surtout des Trévires et des
Helvètes au IIe au Ier s. av. J.-C. On pourrait en
conclure les rites d’une religion proto-trévirenne et
proto-helvètienne de déposition des lingots en fer,
longtemps avant l’émergence de la civilisation des
oppida. Je ne fais que présenter cette hypothèse,
pour montrer le potentiel de l’étude des dépôts,
dans l’histoire de la civilisation celtique.
LES DÉPÔTS D’OUTILLAGE MIXTE EN FER
DE L’ÂGE DU FER
Les dépôts d’outillage mixte en fer dont
quelques-uns contiennent aussi des armes – en
quantité cependant moins importante que dans
la découverte en masse, ou Massenfunde – constituent l’une des caractéristiques de la civilisation
des oppida à l’est du Rhin, de l’Allemagne jusqu'en
Hongrie (ill. 1). Kurz recense environ 90 sites, dont
un quart se trouve en Allemagne.Visiblement, ils se
concentrent au nord du Danube, particulièrement
dans la région de la montagne moyenne, avec une
tendance vers le nord, ce que nous développerons
ci-dessous.
Presque un tiers de ces dépôts provient de
milieu humide, mais pour la plupart ce sont des
objets isolés que je ne présenterai pas. Beaucoup
de dépôts ont été découverts dans, ou à proximité,
d’un habitat. Ils se situaient à l’intérieur de zones
d’habitation (Kelheim : Kurz 1995, n° 425A), ou
aux environs de l’enceinte (Dünsberg, inédit), en
partie à l’extérieur des habitats le long des talus
(Schloßberg von Neuenbürg : Kurz 1995, n° 586),
mais aussi en position isolée, éloignés de tout habitat, souvent en rapport avec l’eau.
Interprétation profane
Les dépôts d’outillage en fer ont été datés
par Kurz comme les dépôts de lingots identifiés
par Reinecke et interprétés comme des cachettes
LES DÉPÔTS LATÉNIENS D’ALLEMAGNE : LA CONTINUITÉ D’UN PHÉNOMÈNE EN EUROPE.
1. Liste des dépôts d’outillage mixte en fer laténiens trouvés à l’est du Rhin (S. Rieckhoff).
d’artisans déposées pendant une période trouble
et confuse du Ier s. av. J.-C. C’est pourquoi Kurz
considère les dépôts d’outillage en fer comme
un bric-à-brac de ferraille. Je ne suis pas du
tout d’accord avec cette idée. À mon avis, il est
bien possible de distinguer les collections de
ferraille (comme, par exemple, la fosse 822b de
Manching : Sievers 2003, p. 140) des dépôts rituels,
comme, par exemple, Körner en Allemagne, Kolín
en Tchécoslovaquie ou Wauwil en Suisse. `
Cependant, c’est l’analyse de la composition de
ces dépôts qui permet de distinguer ces différences.
Le résultat d’une telle analyse dépend du concept
théorique dans lequel cette analyse est intégrée.
Interprétation sacrale
En publiant les dépôts de Kolin, A. Rybová et
K. Motyková ont réalisé une telle analyse. Elles
montrent, d’une manière très fonctionnelle, la
différence entre les dépôts d’outillage en fer en
contexte domestique, qu’elles interprètent comme
des cachettes de ferraille, et les dépôts, en position
isolée, comme Kolín et d’autres, qu’elles interprètent comme des offrandes.
Les auteurs fondent leur interprétation
sur un concept historique et politique qui
considère ces dépôts comme des offrandes religieuses : « die bewegten Zeiten der Endphase der
keltischen Herrschaft in Böhmen und die kriegerischen Ereignisse spiegeln, die zur allmählichen
Landnahme durch germanische Stämme kurz vor
der Zeitenwende führten ». Étant donné que les
outils agricoles et artisanaux sont caractéristiques
des dépôts d’outillage en fer, ces offrandes représentent, selon Rybová et Motyková, une couche
sociale de paysans et d’artisans. Je serais d’un
avis différent. La composition des dépôts indique
plutôt les sacrifices d’une élite dont les biens
de prestige reflètent leur identité en tant que
membre de l’aristocratie : la propriété foncière et
immobilière le symposium, le transport (le char
et le cheval), le pouvoir économique, la qualité
de prêtre. Il va de soi que cette élite était aisée de
manière différente ; aussi, tous les dépôts n’étaient
pas composés de la même façon, mais ont une
283
SABINE RIECKHOFF
structure identique. En outre, beaucoup d’objets
ont leur propre symbolique religieuse.
Une approche symbolique des dépôts
Il est impossible de comprendre les dépôts
d’outillage en fer, si on essaie d’attribuer aux outils
seulement une manière fonctionnelle à un métier
particulier. Est-ce que la hache est l’offrande du
forgeron qui l’a faite ou du charpentier qui l’a
utilisée ? Ou est-elle l’outil de boucherie d’un chef
de tribu qui vient de célébrer un sacrifice sanglant
parce qu’il est en même temps le prêtre, comme
cela a été supposé pour le défunt de la tombe
princière de Hochdorf ? De telles questions ne
font pas avancer la recherche car nous ne pouvons pas y répondre.
Pour cette raison, j’ai essayé d’identifier la
signification symbolique ou cultuelle des objets
provenant des dépôts et de les regrouper. Les
catégories suivantes ont été mises en évidence
(ill. 2) :
− La production artisanale.
– La consommation.
– L’agriculture.
– Le transport (le char et le cheval).
− La quincaillerie de la maison.
– Le statut et le rang social.
− La magie.
– L’argent.
La production artisanale, dominée par l’élite,
est représentée par les outils. Parmi ceux-ci, les
haches sont les objets les plus fréquents (si on ne
suppose pas que ce sont tous des objets de culte
utilisés pour abattre les animaux offerts en sacrifice). Mais la présence d’autres outils, comme les
ciseaux et plus rarement les mèches et les limes,
qui ont servi avec certitude à la production artisanale, est aussi attestée. Quelquefois on rencontre
des outils de forge comme les enclumes, les marteaux et les pinces. Ils représentent le pouvoir
de disposer de la métallurgie du fer, le secteur
de production le plus important non seulement
dans les oppida mais encore au sein de la société
germanique.
Une caractéristique significative des dépôts
d’outillage en fer est la composition hétérogène
des objets. On y trouve des outils pour le travail du
bois autant que la métallurgie. C’est pourquoi, seul
un assemblage appartenant au secteur de production unique pourrait être interprété comme une
cachette d’artisan, à conditions que le contexte
284
du dépôt (par exemple à l’intérieur d’un habitat
et sous le sol d’un bâtiment) soit compatible avec
cette interprétation (Golling : Kurz 1995, n° 336) 5.
Généralement, il faut interpréter les dépôts isolés
et éloignés des habitats, même s'ils contiennent
peu de catégories, comme le rite d’une élite, c’està-dire une élite plus modeste, des propriétaires de
plus petites fermes .
En principe, dans l’antiquité, les artisans ne pouvaient pas disposer librement des ressources, qui
étaient sous le contrôle d’un personnage important
ou chef de la tribu. Un bel exemple de ce système
est une tuyère de fourneau de réduction déposée
sur le plafond de la tombe d’un noble du Titelberg à
Clemency (Luxembourg : Metzler et al. 1991).
Les objets tels que les pelles à feu, la louche,
les chaudrons, les fourchettes à chaudrons, les
broches, les crocs à viande et les barres de gril
constituent la deuxième catégorie : la consommation. Ces outils représentent le repas commun
– non seulement celui du noyau familial, mais
aussi celui qui se déroulait lors du symposium
aristocratique, des festins tribaux, d’activités cultuelles ou du sacrifce de commensalité ou auprès
de la tombe d’un défunt. Toutes ces cérémonies
avaient une fonction sociale. Elles permettaient à
l’élite de montrer leur richesse en distribuant de
la viande et de l’alcool et de renforcer l’esprit de
communauté.
Les outils agricoles comme les éléments de
socs d’araires, les faux, les faucilles et les houes,
font partie de la troisième catégorie. Ils symbolisent
la propriété foncière et la richesse au sens propre
ainsi que la végétation, la fécondité et le bien-être
d’une communauté agricole au sens large.
La quatrième catégorie est composée de fragments de roues, de mors, de moyeux et d’esses.
Les mors et les chars représentent le transport
en tant que privilège aristocratique. En même
temps, les véhicules ou bien les roues (ainsi que
les bateaux) ont toujours symbolisé des forces
surmontant le temps et l’espace, C’est aussi pourquoi ils jouent un rôle important dans les récits
mythologiques.
Les clés qui peuvent être considérées comme
le symbole de la maison et du domaine privé ne
sont pas rares. Le sacrifice de clé est attesté depuis
l’âge du Bronze 6. Les clous, les agrafes et les ferrures de l’architecture en bois peuvent quelques fois
également symboliser la maison.
LES DÉPÔTS LATÉNIENS D’ALLEMAGNE : LA CONTINUITÉ D’UN PHÉNOMÈNE EN EUROPE.
2. Pohanská, SK – objets en fer. 1 : burin ; 2 : soc ; 3 : fourreau d’épée (fragment) ; 4-6 : objets indéfinissables ;
7 : pelle à feu ; 8 : faux ; 9,13 : clés ; 10-12 : hache ; 14 : forces (fragment) ; 15 : couteau (Paulik 1970).
285
SABINE RIECKHOFF
Il est étonnant de voir que les armes ne
jouent qu’un rôle secondaire. Aucun équipement
complet tel qu’on les connaît dans les tombes,
composé d’une épée, d’un bouclier et d’une lance,
n’a été mis au jour. La mutilation intentionnelle
qui caractérise les armes provenant des tombes et
des sanctuaires n’est attestée qu’une fois (Körner).
Il s’agit soit de la moitié d’un fourreau d’épée
(Pohanská) ou de minces fragments de bouclier
(Kolin), soit de lances quelquefois complètes au
moment du dépôts mais sans la hampe en bois
(l'oppidum d'Heidetränk).
Tout cela laisse penser qu’il s’agit plutôt d’un
symbole de statut d’une élite que d’un symbole de
guerrier comme dans les découvertes en masse.
En ce sens la trompette de guerre (carnyx) de
Kappel n’est pas un objet militaire mais un objet
de prestige. Les épées peuvent aussi être considérées comme les insignes du pouvoir, tout comme
les fers de lances,que l'on retrouve plus fréquemment, ou encore les armes de chasse symbolisant
un niveau de vie élevé. Ces dernières peuvent
ainsi être comparées aux pointes de flèches et à
l'hameçon qui ont été découverts dans la tombe
de Hochdorf.
Les objets que je qualifierai d’objets magiques
constituent une catégorie particulière. Il s’agit d’objets apparaissant sporadiquement comme, par
exemple, une aiguille en bronze ou une balance,
et qui représentaient peut-être des connaissances
particulières ou possédaient, ce qui me semble
être plus probable, une fonction symbolique dont
nous ignorons la signification. Cela pourrait être
valable pour d’autres objets, comme les forces,
qui apparaissent de temps en temps. D’un côté, les
forces peuvent représenter l’élevage de moutons et
la transformation de la laine ; de l’autre côté, elles
font partie, non seulement à l’époque de La Tène
mais encore au début du Moyen Âge, du mobilier
funéraire découvert dans les tombes d’hommes
aisés. Cette coutume est attestée depuis les rasoirs
de l’âge du Bronze. Ceci s’explique sans doute par
le fait que la coupe de barbe et de cheveux possède une certaine signification symbolique qui se
manifeste aussi dans les mythes (par exemple dans
l’histoire de Samson qui a perdu sa force colossale
après que Dalila l’eut privé d’une boucle de ses cheveux). La découverte de plusieurs femmes scalpées
à Regensburg-Harting, faisant partie d’un sacrifice
sanglant germanique du IIIe s. ap. J.-C., semble indiquer la même interprétation. J’utiliserai ce dépôt
par la suite en tant que comparaison.
286
Le fer brut et la ferraille font partie du
domaine des outils de forge. Les lingots jouaient
peut-être un rôle particulier parce qu’ils servaient
aussi éventuellement de moyen de paiement
prémonétaire. C’est pour cette raison qu’ils sont
également un symbole de richesse.
Dans l’illustration 1, j’ai rassemblé des dépôts
caractéristiques pour souligner mon interprétation.
Régularité et répétition sont les signes des actions
rituelles (Sternquist 1970). Il est déterminant pour
la sélection (que l’on pourrait agrandir encore)
qu’au moins trois catégories se trouvent dans les
premières quatre colonnes. Cependant, il faut
concéder que l’interprétation de quelques objets
soit évidemment ambivalente. Les pelles à feu,
par exemple, ne sont pas seulement considérées
comme instrument de cuisine et ainsi comme
symbole du repas rituel, mais aussi comme outils
de forgeron pour le travail du métal.
Cette dernière interprétation est privilégiée par
la plupart des archéologues, car ils sont majoritairement convaincus que les dépôts en fer étaient
des cachettes d’artisans. Mais en contrepartie, la
liste montre également l’existence de pelles à
feu dans des dépôts qui ne contiennent aucun
outil faisant référence à la métallurgie (Pohanská,
Körner).
À mon avis, les “objets indéfinissables”, qui
doivent normalement être considérés comme de
la ferraille, ne sont pas un argument pour une
cachette d’artisan. Ils pourraient aussi signaler
que le traitement de fer était contrôlé par l’aristocratie.
En comparaison : le caractère symbolique
des offrandes chez les Germains
Nous pouvons confirmer cette interprétation
symbolique des dépôts d’outillage en fer de La
Tène finale en analysant les dépôts germaniques
du deuxième âge du Fer et de l’époque romaine.
Du point de vue structural, ils ressemblent assez
bien aux rites celtiques bien que des différences
concrètes soient manifestes. Nous connaissons
par exemple des lieux de sacrifices centraux qui
ont été utilisés par une grande communauté et
qui peuvent être comparés aux découvertes en
masse gauloises comme à La Tène ou aux sanctuaires de type Gournay.
À l’intérieur du sanctuaire des eaux d’Oberdorla près de Weimar (Behm-Blancke 2003),
LES DÉPÔTS LATÉNIENS D’ALLEMAGNE : LA CONTINUITÉ D’UN PHÉNOMÈNE EN EUROPE.
fréquenté pendant presque un millénaire, les
archéologues ont découvert – à côté d’objets
sacrifiés – les restes d’un grand nombre d’animaux dont une partie avait été consommée lors
d’un sacrifice de commensalité. L’autre partie
de ces restes d'animaux, qui témoignait d’une
sélection, avait été sacrifiée, découpée et déposée
selon certains rituels. Ce site ressemble beaucoup
au sanctuaire de Gournay-sur-Aronde en Picardie.
A la même époque, beaucoup de petits lieux de
sacrifices existaient en milieu marécageux le long
des côtes de la mer du Nord et de la mer Baltique.
On y a sacrifié des objets du domaine rural et
artisanal. Parmi ces objets en bois ou en métal
figurent des socs d’araires, des faux, des faucilles,
des houes, des bêches, des fléaux, des haches, des
couteaux, des tarières à cuillère, des enclumes,
des tenailles, des marteaux, des limes, des roues
de char, des lingots en fer, mais aussi des fusaïoles,
des tissus et des vases contenant de la nourriture.
Ces produits alimentaires prouvent qu’il s’agit,
avec certitude, d’offrandes et non pas d’objets que
l’on voulait seulement cacher pendant un certain
temps.
L’exemple d’une offrande germanique
du IIIe s. ap. J.-C. :
un dépôt d’outillage mixte en fer
Les dépôts d’outillage en fer de La Tène
finale ressemblent le plus aux dépôts de fer du
IIIe s. ap. J.-C. qui se concentrent le long du Limes
de Germanie Supérieure, province conquise par
les Alamans. Ceux-ci se trouvent à l’intérieur des
villages à côté de camps romains (vici), souvent
dans des puits, mais aussi dans des fosses peu
profondes. La recherche a tendance à interpréter
ces dépôts comme des dépôts de ferraille ou
bien, depuis un certain temps, comme des butins
de pillards germaniques. Il y avait sans doute des
dépôts de ferraille dont les objets, provenant des
ruines romaines, ont été ramassés et cachés par
des Romains ou des Germains. En analysant le
contexte, il est pourtant possible à La Tène finale
de faire la différence entre ces dépôts de ferraille
et les sacrifices.
La composition d’au moins une douzaine de
dépôts d’outillage en fer du IIIe s. ap. J.-C., situés
surtout en Baden-Württemberg (ill. 3), est presque
identique aux dépôts d’outillage en fer laténiens
que je viens d’interpréter comme les offrandes
d’une élite aristocratique. Ces dépôts de l’époque
romaine, que je considère comme des sacrifices
germaniques, contiennent, eux aussi, principalement le matériel de cuisine, des outils agricoles,
la quincaillerie de maison (de préférence des
ferrures appartenant aux portes, des serrures et
surtout des clés), des outils des artisans (surtout
des haches), des éléments de chars et d’attelage,
et des objets magiques. Il est étonnant que les
armes, comme à La Tène finale, n’apparaissent
que rarement malgré la proximité des complexes
militaires. Par ailleurs, ce n’est sûrement pas par
hasard si beaucoup de dépôts étaient immergés
dans des puits comme beaucoup d’offrandes
laténiennes.
Il est évident que le symbolique des objets a
plus ou moins évolué par rapport à la Préhistoire
puisqu’une part de ces objets n’existait pas
encore à La Tène finale. Parmi ces nouveaux
objets figurent la fourche à fumier, la grille à
fenêtre, le fer à cheval, le collier de cheval ainsi
que quelques objets magiques. Pourtant, on
trouve les forces et la balance dans les dépôts
laténiens, le style, l’encrier ou le compas apparaissent maintenant pour la première fois. Ces
ustensiles, utilisés pour écrire, mesurer et compter étaient inconnus au milieu culturel rural et
guerrier des Germains. Mais c’est probablement
pour cette raison qu’ils ont été ressentis comme
des objets magiques.
J’ai essayé de vérifier l’hypothèse selon
laquelle les dépôts du IIIe s. ap. J.-C. peuvent être
considérés comme des restes de sacrifices collectifs de victoire des Germains en examinant
le matériel provenant de deux puits d’une villa
rustica près de Regensburg-Harting (Rieckhoff
1998). Sur ce site, parmi les outils en fer déjà
mentionnés ci-dessus (ill.4a et b), ont été mis au
jour neuf personnes, les anciens habitants de la
villa, qui ont été tués, scalpés, décapités, découpés, mutilés et dont les dépouilles ont ensuite été
jetées dans les puits. L’hypothèse est validée par
la découverte des animaux offerts en sacrifice ou
plutôt des restes de ces animaux, un squelette de
cheval complet, deux pattes de boeuf, six chiens
complets et un chien décapité. La sélection et le
traitement des animaux de sacrifice semble être
comparable avec le site de La Tène et identique
avec celui de Oberdorla; ce qui prouve clairement que ces découvertes ne correspondent pas
seulement à un assaut sanglant et une cache des
objets en fer arbitrairement assemblé.
287
SABINE RIECKHOFF
3. Liste des dépôts d’outillage mixte en fer des provinces germaniques à l’est du Rhin au IIIe s. ap. J.-C. (S. Rieckhoff).
LA CONTINUITÉ DU PHÉNOMÈNE EST
LA CONTINUITÉ D’UN RITE EUROPÉEN
ARCHAÏQUE
En Allemagne du Sud, il n’y a pas de continuité entre La Tène finale et le début de l’époque
romaine. Les objets de La Tène D2b (environ
50/40-15 av. J.-C.) sont absents entre le Rhin et l’Inn.
C’est pourquoi il ne peut pas y avoir de continuité de culte telle qu’elle est attestée à l’ouest
du Rhin, dans les Alpes ou chez les Germains. Les
ressemblances entre la composition des dépôts
d’outillage mixte en fer de La Tène finale et les
sacrifices de victoire des envahisseurs germaniques dans la région du Limes, qui sont plus récents
de 300 à 400 ans, n’ont aucun rapport direct. Leurs
points communs résultent des mêmes croyances
religieuses très répandues en Europe ancienne. On
trouve des croyances semblables durant tous les
âges du Fer, chez les “Celtes” et chez les “Germains”
(que signifient ces notions ethniques ?).
Des sacrifices effectués par une communauté
politique qui enfouit ses biens les plus précieux
dans des lieux sacrés – métaux précieux, objets
de culte, argent – ou les jette à l’eau, existent
partout. Des sacrifices d’armes, effectués par une
288
communauté de guerriers, sont accompagnés
de sacrifices sanglants et parfois les sacrifices
humains sont courants partout. En plus, à côté
des sacrifices individuels, existent les rituels d’une
élite locale, dont les dépôts laténiens d’outillage
mixte en fer font partie. Leur caractère n’a pas
été reconnu jusqu’à présent parce que les deux
périodes, La Tène finale et l’Antiquité tardive,
sont toujours traitées séparément. Il faut pourtant étudier les modes de dépôt d’une manière
diachronique afin de reconnaître de tels points
communs structuraux sur une longue durée.
À mon avis, les découvertes des puits de
Regensburg-Harting prouvent que les dépôts
d’outillage mixte en fer, non seulement celui du
IIIe s. ap. J.-C. mais encore ceux de la civilisation
des oppida, structurés d’une manière presque
identique, étaient des offrandes, bien que le
contexte historique soit complètement différent
et sans continuité directe.
Quoi qu’il en soit, la fonction sociale des sacrifices celtiques et des cérémonies de la victoire
germaniques était probablement très semblable :
le rituel servait de moyen de légitimation du pouvoir, de promotion personnelle et de renforcement
de l’esprit de corps en se référant à des forces
surnaturelles.
LES DÉPÔTS LATÉNIENS D’ALLEMAGNE : LA CONTINUITÉ D’UN PHÉNOMÈNE EN EUROPE.
4a. Regensburg-Harting. Objets en fer romains (Rieckhoff 1998). 1 : faux ; 2 : style ; 3 : collier de cheval ; 4 : porte-gonde ; 5 : serrure ;
6 : grille à fenêtre ; 7 : pioche. (1 : échelle 1:9 ; 2, 4-6 : échelle 1:3 ; 3 : échelle 1:4 ; 7 : échelle1:8).
289
SABINE RIECKHOFF
4b. Regensburg-Harting (Rieckhoff 1998). 8 : pelle à feu ; 9 : fourche à fumier ; 10-11 : armature ; 12 : forces ; 13 : clé ;
14 : cloche ; 15 : parties sacrifiées d’un cheval. (8 : échelle1:9 ; 9 : échelle 1:8 ; 10-11 : échelle 1:4 ; 12-14 : échelle 1:3).
290
LES DÉPÔTS LATÉNIENS D’ALLEMAGNE : LA CONTINUITÉ D’UN PHÉNOMÈNE EN EUROPE.
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NOTES
1. L’article suivant correspond, en substance, à ma communication préparée pour la table ronde de Bibracte des 13-14 octobre 2004 sur
« Les dépôts d’objets métalliques aux âges du Fer en Europe ». Il n’est complété que par des notes et quelques réflexions. Je remercie C. von
Nicolai pour la traduction et D. Lukas pour son aide précieuse sur ordinateur.
2.Voir aussi Pauli (1987).
3. Fonction de l’argent des dépôts : Sommerfeld (1994) ; Lenerz-de Wilde (1995).
4. Contre cela : Rieckhoff (1998, p. 481).
5. Golling (Kurz 1995, n° 336) : marteau, enclume, deux pinces, pelle à feu et quelques pièces en fer, enterrés à l’intérieur de l’habitat.
6.Voir le petit dépôt à Manching, fosse D, secteur 28 : deux fibules en argent mentionnées ci-dessus et une clé en fer (Krämer 1971).
292
La découverte de Tailly (Côte-d’Or)
Un dépôt votif d'époque gallo-romaine en Bourgogne ?
Louis BONNAMOUR
Voici un an, le musée de Chalon-sur-Saône faisait l’acquisition auprès d’un collectionneur bourguignon,
d’un vase en bronze accompagné de vingt-six objets en fer *.
Trouvé par un clandestin dijonnais en 1998, cet ensemble de documents archéologiques avait alors été
vendu à un antiquaire de Montélimar, racheté par un premier collectionneur puis par un second qui assura
la restauration du récipient en bronze avant de proposer la totalité de la trouvaille au musée de Chalon.
L’atelier de restauration du musée a assuré le traitement des objets en fer découverts à l’intérieur du vase.
LOCALISATION DE LA DÉCOUVERTE
Selon le témoignage de l’inventeur, le vase
reposait disposé horizontalement, recouvert par
une épaisseur de 45 cm de terre, de pierres et de
fragments de tegula. La trouvaille est intervenue au
lieu-dit “Les Reppes”, à l’est du village de Tailly et
à proximité de la source des Fontenis, elle-même
située à quelque 200 m d’une voie secondaire
parallèle à la voie Beaune-Autun (Thevenot 1969).
En direction de l’est, le prolongement de cette
voie est particulièrement apparent tant sur les
documents cartographiques que sur le terrain où
on peut le suivre sur la commune de Cissey notamment à travers toute l’étendue du bois de Servotte,
marqué par une traînée de gravier. Cette voie est
en outre jalonnée de sites gallo-romains dont un
qui semble correspondre à l’emplacement d’un
petit sanctuaire et où ont été découverts un lot de
monnaies antiques, une petite statuette de cochon
ainsi qu’une attache d’anse en bronze d’un type
proche de celui que l’on observe sur la situle de
Tailly. Situés en bordure de la même voie, les deux
points de trouvailles, sont distants de moins de
2 km.
LA SITULE
Ce récipient de grandes dimensions en tôle
de bronze travaillée par martelage, est constitué
de plusieurs parties assemblées. Alors que le fond
a été riveté, la partie supérieure du vase, les attaches de l’anse ainsi que les pieds sont soudés. Les
dimensions du vase sont les suivantes : diamètre
du fond 158 mm, diamètre de la panse 286 mm,
diamètre du rebord 234 mm, hauteur du vase
288 mm, hauteur totale avec l’anse en position
verticale 440 mm. Le fond est surélevé par trois
pieds massifs en forme de pelte et l’on observe
une pièce de réparation rivetée à la base de la
panse. En forme de feuille de vigne, les attaches
de l’anse sont ornées d’un masque barbu ; l’anse,
massive, est surmontée d’un anneau et terminée
par des masques zoomorphes (ill. 1).
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F.-58). Glux-en-Glenne- : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 293-299 (Bibracte ; 11).
LOUIS BONNAMOUR
1. Situle en bronze provenant de Tailly (Côte-d'Or) (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
Observons que ce type de récipient est
totalement absent des riches séries de vases
métalliques antiques issus de la Saône. Les
seuls éléments de comparaison connus sont
constitués par les trois situles du “trésor” d’Apt
conservé au musée d’Avignon (Cavalier 1988)
et dont une seule, complète, possède encore son
anse et ses attaches.
Selon E. Poulsen (1979) les trois attaches subsistantes ayant appartenu aux situles d’Apt, diffèrent
par leur forme ovale, du modèle en forme de
feuille de vigne jusqu’alors connu uniquement par
des spécimens isolés. Trois attaches de ce type ont
été découvertes en forêt de Compiègne (Tassinari
1975), une autre est originaire du département de
Seine Maritime (Tassinari 1995), une dernière, sans
provenance précise, appartient aux collections du
294
Landesmuseum de Trêves (Poulsen 1979, pl. 141,
n° 16).
Outre le vase de Tailly (ill. 1), encore muni
de ses deux attaches, deux autres attaches isolées apparentées au même type mais ornées de
masques féminins, sont récemment entrées dans
les collections du musée de Chalon. La première,
déjà mentionnée, a été trouvée dans le bois de
Servotte à Cissey (Côte-d'Or), la seconde provient
des environs de Nuits-Saint-Georges (ill. 2a et b).
Ces trois dernières trouvailles étant intervenues
dans un rayon d’une dizaine de kilomètres, on
est légitimement en droit de poser la question de
l’existence éventuelle d’un atelier de production
local ou régional.
De forme proche de celle de Tailly, les situles
d’Apt sont considérées comme des fabrications
LA DÉCOUVERTE DE TAILLY (CÔTE-D’OR). UN DÉPÔT VOTIF D'ÉPOQUE GALLO-ROMAINE EN BOURGOGNE ?
2a et b. Attaches de situles ornées de masques féminins. a :
Cissey (Côte-d'Or), bois de Servotte ; b : Les environs de NuitsSaint-Georges (Côte-d'Or) (dessins C. Michel, musée Denon,
Chalon-sur-Saône).
provinciales du IIe s. de notre ère (Cavalier 1988,
p. 63). À défaut d’autres éléments de datation,
nous retiendrons cette attribution chronologique
pour l’ensemble des objets appartenant à la trouvaille de Tailly.
3. Le site de Tailly (Côte-d'Or). a : Hipposandales ; b : Clavettes
de moyeux de roues en fer de type 2b de la classification établie par W.-H. Manning ; c : Clavettes de moyeux de roues en fer
de type 2a (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
LES OBJETS EN FER
Les hipposandales
Les clavettes de moyeux de roues
Au nombre de deux, elles appartiennent à
un même modèle pourvu de quatre anneaux et
semblent n’avoir équipé que les pattes avant de
l’animal (ill. 3a).
Au nombre de six, elles se rapportent à deux
groupes distincts. Quatre spécimens appartiennent au type 2a de la classification établie par
W.-H. Manning (Feugère et al. 1992, p. 94-96). Elles
sont constituées d’une tige de section carrée et
d’une simple tête aplatie ; leur longueur varie de
174 à 184 mm (ill. 3c).
Les deux autres clavettes, attribuables au
type 2b de la même classification ont une longueur sensiblement plus faible de 160 et de
170 mm. Elles se distinguent des précédentes par
la présence, au niveau de la tête, d’un appendice
recourbé formant anneau (ill. 3b).
Les fers à bœufs ou bousandales
Ils sont représentés ici par dix-huit spécimens
dont treize complets (ill. 4-5). Il est toutefois difficile de dire si les différences observées dans
leur état de conservation correspondent à des
degrés d’usure différents (fers neufs, fers usagés),
ou seulement à une oxydation différentielle. La
série apparaît typologiquement homogène avec
notamment sur les fers les mieux conservés (ill. 4)
des stries externes longitudinales et en forme de
295
LOUIS BONNAMOUR
4. Fers à bœufs ou bousandales provenant de Tailly (Côte-d'Or) (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
296
LA DÉCOUVERTE DE TAILLY (CÔTE-D’OR). UN DÉPÔT VOTIF D'ÉPOQUE GALLO-ROMAINE EN BOURGOGNE ?
5. Fers à bœufs ou bousandales provenant de Tailly (Côte-d'Or) (dessins C. Michel, musée Denon, Chalon-sur-Saône).
297
LOUIS BONNAMOUR
“X”, constituant un même dessin. La longueur des
fers varie de 134 à 166 mm et leur largeur de 60
à 70 mm. Tous se rapportent à un type unique, le
type A, défini par Véronique Brouquier-Reddé, type
jusqu’alors représenté par dix spécimens pour l’essentiel localisé en Bourgogne (Brouquier-Reddé
1991, fig. 14).
Pour la première fois nous constatons donc
la présence non plus d’un spécimen isolé, mais
de dix-huit exemplaires groupés dans une même
trouvaille. Le fait n’est sans doute pas anodin.
QUELQUES RÉFLEXIONS CONCERNANT
LA COMPOSITION DE LA TROUVAILLE
DE TAILLY
La présence dans le remplissage du niveau
recouvrant la situle, de pierres et de tegula implique
le voisinage d’un site antique (habitat, sanctuaire ?)
ce qui ne saurait surprendre. La faible profondeur
de l’enfouissement, la position couchée du vase
pourrait traduire soit un dépôt hâtif soit un dépôt
purement symbolique (voir la casserole en bronze
du gué de la Casaque).
Le dépôt est constitué à la fois d’un objet semiprécieux, le vase en bronze et d’objets vulgaires
en fer. Objets vulgaires certes mais objets de la vie
quotidienne pour un individu précis.
La première hypothèse qui vient à l’esprit est
celle d’un stock de forgeron, mais un tel stock
avait-il une valeur suffisante pour en privilégier
l’enfouissement en cas de danger ? Il est ici
regrettable qu’on ne puisse trancher de manière
absolue quant au caractère neuf et usagé de certains fers. Cela a été le sentiment du restaurateur
mais, objectivement, il semble difficile de trancher de manière catégorique. Compte tenu du
caractère très spécifique des vingt-huit objets en
fer contenus dans la situle, l’hypothèse d’un stock
d’artisan ne serait défendable que dans le cas
d’objets neufs répondant à une commande précise, enfouis dans la précipitation du fait d’une
menace imprévue…
L’hypothèse d’un dépôt intentionnel à caractère votif, semble plus séduisante :
− du fait du lieu de découverte au voisinage
d’une source située en bordure d’une voie
avec possibilité d’existence d’un sanctuaire
rural ;
298
−
de par la composition même du dépôt. La série
d’objets en fer paraît en effet trop étroitement
liée à la profession d’un seul et même individu
en l’occurrence un transporteur, pour que
cela soit le fait du hasard. De toute évidence,
cette série d’objets en fer est représentative
de l’équipement d’un petit transporteur propriétaire d’une voiture à deux roues tirée
par un cheval (deux hipposandales, deux
clavettes de type 2b) et d’un char à quatre
roues (quatre clavettes de type 2a, ensemble
des bousandales) tiré par un nombre indéterminé de bœufs, vraisemblablement deux ou
quatre. Les recherches de V. Brouquier-Reddé
(Brouquier-Reddé 1991, p. 45-46) ont en effet
montré la difficulté d’interprétation du nombre de bousandales utilisé par animal du fait
de l’ignorance totale dans laquelle nous nous
trouvons de savoir si chaque onglon avant et
arrière était équipé ou seulement les onglons
des pattes avant, voire uniquement les onglons
externes des pattes avant.
De ce fait, dans l’ignorance totale dans laquelle
nous nous trouvons des conditions exactes d’utilisation comme des habitudes des bouviers
antiques, le nombre de bœufs utilisés pour tracter
ce char à quatre roues a pu varier de deux (un fer
à chaque onglon interne et externe de chacune
des pattes antérieures et postérieures plus deux
fers de secours) à neuf bœufs (un fer à chaque
onglon externe des seules pattes avant).
La présence à l’époque romaine, à l’emplacement d’un sanctuaire terrestre, sanctuaire rural
probablement, compte tenu de sa situation géographique, n’a rien en soi de surprenant si l’on se
réfère aux représentations des stèles funéraires où
le métier du défunt est souvent mis en lumière par
la figuration d’un ou de plusieurs outils caractéristiques et à forte valeur symbolique.
Le même phénomène se remarque sur les
gués de la Saône où la vaisselle métallique, les
armes mais aussi les outils, sont systématiquement
présents dans les dépôts votifs comme l’a prouvé
la fouille du gué de la Casaque au sud de Chalon
(Bonnamour, Dumont 1994). Actuellement, à
défaut de certitude, une forte présomption nous
laisse donc penser que le dépôt de Tailly pourrait
correspondre à un dépôt votif comparable à ceux
rencontrés dans le lit de la Saône aux emplacements des sites de gués.
LA DÉCOUVERTE DE TAILLY (CÔTE-D’OR). UN DÉPÔT VOTIF D'ÉPOQUE GALLO-ROMAINE EN BOURGOGNE ?
BIBLIOGRAPHIE
Bonnamour, Dumont 1994 : BONNAMOUR (L.),
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état des découvertes et données récentes de fouilles.
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p. 141-154.
Poulsen 1979 : POULSEN (E). — The manufacture of
final models of roman mass produced pail handle
attachments. In : Bronzes hellénistiques et romains.
Traditions et renouveau. Actes du 5e colloque
international sur les bronzes antiques. Lausanne, 1979,
p. 241-247 (Cahiers d’archéologie romande [CAR] ; 17).
Brouquier-Reddé 1991 : BROUQUIER-REDDÉ (V.). — La
sandale en fer du bœuf romain ou bousandale. Saalburg
Jahrbuch, 46, 1991, p. 41-56.
Tassinari 1975 : TASSINARI (S.). — La vaisselle en
bronze romaine et provinciale au Musée des Antiquités
nationales. Paris : CNRS, 1975 (Gallia, supplément ; 29).
Cavalier 1988 : CAVALIER (O.). — Le trésor d’Apt.
Un ensemble de vaisselle métallique gallo-romaine.
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bronze : Collections du Musée départemental des
antiquités, Rouen. Rouen : Conseil Général/Amis des
Musées départementaux de la Seine-Maritime, 1995.
Feugère et al.1992 : FEUGÈRE (M.), THAURÉ (M.),
VIENNE (G.), avec la collaboration de BUISSON (J.-F.),
POUSSOU (Ph.), VERNOU (C.). — Les objets en fer dans
les collections du musée archéologique de Sainte (Ier au
XVe s.). Édition des musées de Saintes, 1992.
Thevenot 1969 : THEVENOT (E). — Les Voies
romaines de la Cité des Éduens. Bruxelles : Latomus,
1969 (Latomus ; 98).
* Ces objets sont inventoriés dans les collections archéologiques du musée Denon sous les numéros 03.1.1 à 03.1.27.
299
Des dépôts métalliques dans un contexte
du VIe siècle après J.-C.
À Chevroches “Le Domaine de Noé” (Nièvre)
Frédéric DEVEVEY, Anne LARCELET
DONNÉES SUR L’AGGLOMÉRATION
GALLO-ROMAINE
La commune de Chevroches se situe à l’est du
département de la Nièvre, à 3 km au sud-est de
Clamecy. Le secteur étudié est drainé par l’Yonne
et ses affluents, dont les deux principaux sont le
Beuvron et l’Armance. Cette microrégion constituée de collines et de plateaux est appelée “les
Vaux d’Yonne”.
Le village de Chevroches est constitué d’un
groupement d’habitations qui dominent le canal
du Nivernais et l’Yonne qui s’écoulent au pied du
promontoire rocheux.
Un fort contraste existe entre la végétation
de la vallée (cultures et prairies) et les plateaux
boisés. Le fond de la vallée, orientée nord-sud, est
à environ 70 m sous le plateau et se développe
sur plus de 500 m de large au droit du hameau
de Chantenot, au sud de Chevroches. Il réduit
à 200 m environ vers “l’écluse de la Maladrerie”
L’éperon de Chevroches présente une déclivité
assez forte du sud-est vers le nord-ouest. Le point
le plus élevé du site se trouve à proximité du
rempart néolithique, à la côte moyenne de 197 m
(NGF).
Le plateau est bordé à l’est par une falaise
abrupte dans laquelle plusieurs cavités sont visibles.
Le méandre fossile a été classé comme site
naturel au titre de la loi de 1930 en 1989. Il se situe
à quelques mètres au-dessus du niveau actuel
de la rivière. Les alluvions qui se sont déposées
ont donné à cette vallée un caractère très fertile ;
l’agriculture y est omniprésente.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir.: Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 301-326 (Bibracte ; 11).
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
Découvert par photographie aérienne en 1998
le site gallo-romain de Chevroches (Nièvre), a fait
l’objet de sondages et d’une fouille de sauvetage
en 2001-2002 (ill.1). Les investigations sur le terrain
ont montré que nous étions en présence d’une
“agglomération secondaire” implantée au début
du Ier siècle de notre ère et abandonnée au début
du Ve siècle. Sa surface totale n’est pas connue,
mais au moins cinq îlots, délimités par des voies et
des ruelles, ont été identifiés sur une superficie de
plus de 14 500 m2 (ill.2).
Plusieurs phases de constructions et de
création de bâtiments, au caractère parfois monumental, ont été mises en évidence. Une trame
viaire, installée au milieu du Ier siècle de notre ère,
servira de maille urbaine durant trois siècles.
Au cours du second siècle, l’adoption des
techniques architecturales romaines se généralise
et se concrétise par la réorganisation de certains
îlots et surtout par la construction d’un bassin
monumental de 18 m de large sur 27 m de long (il
s’agit en fait de la longueur connue à ce jour). Sa
profondeur est de 2,30 m environ. Si son rôle n’est
pas encore défini (pisciculture, ornement, captage
de source, installation portuaire ?), il est associé à
un petit édicule cultuel.
Les maisons, les divers bâtiments sont
construits selon des techniques romaines, en particulier grâce à l’utilisation du mortier de chaux
et de moellons soigneusement équarris (opus caementicum). Les murs sont décorés d’enduits peints
aux motifs floraux ou mythologiques. Certaines
maisons reçoivent l’eau courante ainsi que le
chauffage par le sol (l’hypocauste).
La partie sud du site a montré la présence
d’une activité métallurgique soutenue (forges et
travail du bronze), depuis le IIIe s., jusqu’à l’abandon
de cette partie du site, à la fin du IVe s. ap. J.-C.
Quatre aires de travail ont été clairement identifiées dans l’îlot A (ill.3). La plus ancienne, datée
du IIe s. ap. J.-C., n’a laissé que peu de traces. Elle se
situait dans un petit bâtiment (pièce n° 21) dont
seules les fondations ont été reconnues. Un fond
de foyer, associé à de nombreuses scories (argilosableuses et calottes) y ont été identifié.
La seconde zone d’atelier, datée des années
250/320 ap. J.-C., se situait dans un grand bâtiment
(pièce n° 3) où les niveaux d’utilisation, des bases
de foyers et un socle d’enclume ont été retrouvés.
La troisième aire de travail (pièce n° 2), a été
implantée au début du IVe s. ap. J.-C. dans une pièce
1. Vue aérienne de la fouille sur l’emplacement du futur port de plaisance sur le Canal du Nivernais (cliché F. Devevey, 2001).
302
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
2. Plan général de l’agglomération gallo-romaine de Chevroches, toutes phases confondues (Inrap, 2004).
303
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
3. Chevroches “le domaine de Noé” (Nièvre). Vue générale de l’îlot A, vers le sud-est (cliché Inrap, 2002).
4. Chevroches (Nièvre). Plan de l’îlot A et localisation des dépôts métalliques (plan Inrap, 2004).
304
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
qui communiquait avec la pièce n° 3. Il s’agissait à
l’origine d’une pièce d’habitation domestique (IIe et
IIIe s. ap. J.-C.), transformée, par la suite, en forge. Un
fond de four (de raffinage ?) y a été mis au jour.
Enfin, suite à un important incendie survenu
vers 320 ap. J.-C., les pièces n° 2 et n° 3 ont été
abandonnées. Mais l’activité métallurgique n’a
pas été interrompue pour autant.
Un nouvel atelier a été installé dans le même
îlot d’habitation. La fouille a montré qu’il y avait
donc eu un transfert de l’activité dans cette
nouvelle zone (pièce n° 14). L’étude des rejets,
ainsi que des différentes structures de cet atelier
a montré que le travail du fer (forge), cohabitait avec le travail (plus ponctuel ?) du bronze.
L’activité métallurgique semble disparaître (du
moins pour ce secteur de l’agglomération), à la
fin de la décennie 350. Plusieurs caches et dépôts
métallurgiques ont été découverts à proximité de
l’atelier de la pièce n° 14, dont un lot de plus de
200 objets manufacturés en fer, bronze et plomb,
ainsi que trois trésors monétaires.
Cet article présente d’une manière synthétique
l’étude du contenu de ces dépôts, mais également
leur contexte stratigraphique et topographique
afin d’en établir la fonction et le statut.
LES DÉPÔTS MÉTALLIQUES
Quatre dépôts métalliques, dont le contexte
d’enfouissement est estimé autour de 350 ap.
J.- C. ont été mis au jour dans l’îlot A (ill.4). Ils sont
liés stratigraphiquement et chronologiquement au
fonctionnement de la pièce n° 14, mais, comme
nous allons le voir, leur nature et leur fonction sont
différentes.
Le dépôt US 1020 (ill.5)
C’est au cours des premiers jours de la fouille
que l’important dépôt US 1020 a été mis au jour.
Ce dernier se situait dans l’angle sud-ouest de
la pièce n° 8. Il correspondait à une fosse de
1,10 m de diamètre et d’une profondeur de 70 cm
qui avait été creusée dans le remblai de destruction de la pièce n° 8. Ce niveau était également
présent dans la pièce n° 3 et la pièce n° 7. Comme
nous l’avons vu plus haut, ces trois pièces ont
subi un violent incendie vers 320 ap. J.-C., qui a
provoqué leur destruction. C’est dans ces niveaux
que les dépôts US 1020, US 1027 et US 1028 ont été
implantés.
5. Chevroches “le domaine de Noé” (Nièvre). Mise au jour du
dépôt d’objets dans l'US 1020 (cliché Inrap, 2001).
Lors de la fouille, le dépôt US 1020 se présentait comme un enchevêtrement d’objets de
diverses natures et fonction : objets en fer, en
bronze et en plomb. Il s’agissait d’outils en état
de fonctionnement (compas, marteaux d’orfèvres, ciseaux…), usagés ou cassés. S’y ajoutaient
notamment des éléments de constructions
(agrafes), des éléments de serrures, des clés (fer
et bronze), des éléments de chars, des clous, des
barres de forges. Malgré une fouille fine de ce
dépôt, aucun tri particulier ne semble avoir été
effectué par son propriétaire. L’unique regroupement correspondait aux clous, qui devaient
être à l’origine réunis dans un sac. Le reste des
objets devait être regroupé dans un grand sac
qui ne nous est pas parvenu. Son aspect particulièrement hétérogène montre une volonté
de regrouper un maximum de matière première, destinée à la refonte, ou à la réparation
d’autres objets. Parmi les objets collectés par
le métallurgiste, figure “le disque astrologique
de Chevroches” et une garniture de fourreau
fabriquée à Aquae Helveticae (actuelle Baden
en Suisse) par les ateliers de Gemellianus. En
revanche, l’absence totale de monnaie dans ce
dépôt avait attiré notre attention.
La découverte du dépôt US 1028 nous donne
la réponse. Sans anticiper sur l’étude de ce
dépôt, nous pouvons souligner que certains
objets (dont une fibule fragmentée et la garniture de fourreau) sont beaucoup plus anciens
que leur date d’enfouissement.
En fait, aucun objet dans ce dépôt ne donne
une datation certaine de l’enfouissement. Seule
la stratigraphie a permis de fournir une date
précise.
305
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
6. Chevroches “le domaine de Noé” (Nièvre). Vue du dépôt de
monnaies “US 1027” (cliché Inrap, 2002).
Le dépôt US 1027 (ill.6)
Le dépôt/trésor US 1027 a également été
mis au jour dans la couche de destruction de
la pièce n° 8. Il s’agissait ici d’un trésor de 867
monnaies (et cinq flans) qui à l’origine devaient
être regroupées dans un sac qui a disparu depuis.
Aucune fosse n’a été observée, car le trésor avait
sans doute été caché dans les gravats de la pièce
PCE 08, et de ce fait, aucun trou véritable n’avait
été fait (Gricourt 2004).
Si l’étude finale ne nous a pas été encore rendue par le Cabinet des médailles de Paris, nous
pouvons néanmoins en présenter les premiers
résultats qui ont d’importantes implications à la
fois dans la nature de ce dépôt, mais également
dans celle du dépôt US 1020 et de l’activité métallurgique de cette époque à Chevroches :
Tout d’abord, la monnaie la plus récente identifiée dans ce trésor est une “officielle”, produite
à Trêves en 342-343 ap. J.-C. Selon D. Gricourt, le
Terminus doit être toutefois plus tardif (autour
des années 350), compte tenu des “minimissimes”
qui composent l’essentiel du trésor.
L’étude a porté ensuite sur une recherche systématique des liaisons de coins. Il a ainsi repéré
73 coins de droits pour 72 coins de revers dans
les proportions suivantes : (les pourcentages correspondent aux 73 coins d’imitations reconnus) :
Pour les droits (les pourcentages correspondent aux 73 coins d’imitations reconnus) :
− 10 Constantin II, soit 13,69 %
− 1 Constance II, soit 1,36 %
− 2 Constant, soit 2,73 %
− 19 Empereurs indéterminés (Constantin I,
306
Constantin II, Constance II, Constant ou éventuellement Delmace), soit 26,02 %
− 18 Urbs Roma, soit 24,65 %
− 17 Constantinopolis, soit 23,28 %
− 1 Fausta, soit 1,36 %
− 2 Hélène, soit 2,73 %
− 3 Théodora, soit 4,10 %
Pour les revers (les pourcentages correspondent aux 72 coins d’imitations reconnus) :
− 1 Gloria exercitus à deux enseignes, soit 1,38 %
− 32 Gloria exercitus à une enseigne, soit 44,44 %
− 11 Urbs Roma, soit 15,27 %
− 21 Constantinopolis, soit 29,16 %
− 2 Pax publica, soit 2,77 %
− 4 Pietas romana, soit 5,55 %
− 1 Spes publica ou Spes augg de Tétricus I ou
Tétricus II (sic), soit 1,38 %
Seuls trois exemplaires officiels de monnaies
ont été reconnus dans le trésor, qui est donc composé à 99,65 % d’imitations. De plus, l’étude de la
surface des monnaies de ce trésor montre que
plus de 98 % d’entre elles ne présentent pas de
trace d’utilisation.
Cette étude montre que certains coins sont
surreprésentés et forment l’immense majorité du
trésor, ce qui statistiquement, est incompatible
avec les trésors monétaires “classiques”, amassés
par des particuliers.
Pour D. Gricourt, ces dernières ont été forgées
sur place et n’ont pas circulé, ou bien, si elles
proviennent d’un autre lieu (forcément très proche), elles n’ont jamais été dispersées. Selon ses
conclusions, plus de 99 % des monnaies du trésor
US 1027 ont été frappées à Chevroches.
Le dépôt US 1028 (ill.7)
Le dépôt US 1028 a été mis au jour dans l’angle
sud-est de la pièce n° 3. Il a été caché dans les gravats de démolition de la pièce, contre le mur 1 507.
Comme pour le trésor US 1027, aucune fosse ou
creusement n’était visible à la fouille.
Le premier objet qui a été découvert dans
ce dépôt est une assiette en bronze étamé, complète et intacte, qui avait été posée à l’envers sur
un vase de type “Nied. 33”. Ce dernier présentait
une cassure ancienne sur une partie de la panse,
dont le tesson manquant n’a pas été retrouvé. Il
est fort probable que ce dernier manquait déjà
au moment de l’enfouissement. Le vase renfermait 263 monnaies, quatre objets circulaires (trois
rondelles monéiformes et une petite applique
circulaire à deux rivets).
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
penser que ce nummus, à l'égard à son titre de fin
relativement élevé par rapport aux productions
des années 320, n’a pas dû circuler très longtemps,
de telle sorte que le sinistre peut être effectivement daté à partir de 322.
Cet élément prouve donc sans équivoque que
lors de l’enfouissement du dépôt US 1028 dans
la couche de démolition de la pièce n° 3, plus
aucune monnaie qui le composait n’avait cours et
donc plus aucune de ces 263 monnaies n’avait de
valeur monétaire. D. Gricourt en vient aux mêmes
conclusions que les nôtres : « Concernant le trésor
US 1028, je suis effectivement persuadé que nous
avons affaire à une réserve de métal destiné à la
fonte » et non à un trésor, au sens pécuniaire du
terme.
Le dépôt US 1074
Le dépôt d’objets US 1074 a été mis au jour dans
la pièce n° 14,dans l’angle nord-ouest.Contrairement
aux autres dépôts, ce dernier avait été déposé au
fond d’une petite fosse ovale, de 0,43 m x 0,30 m. Sa
profondeur était de 24 cm. Il se composait de huit
objets en fer, dont un fer de lance.
CONCLUSION
7. Chevroches “le domaine de Noé” (Nièvre). Mise au jour du
dépôt de monnaies “US 1028”. Ce dernier était couvert par une
assiette en bronze étamé, complète (cliché Inrap, 2002).
Contrairement au trésor de l’US 1027, ce dernier regroupait un lot hétéroclite de monnaies :
quelques sesterces très usés, un denier de Trajan
très usé également, des imitations radiées de la
fin du IIIe s. et des nummi au 1/96e de livre. Les
monnaies les plus récentes issues de ce dépôt
correspondent à ce type de monnaie et sont à
l’effigie de Constantin I et de Lucinius I. Elles ont
été émises par l’atelier de Trêves en 316-317. De
ce fait, la composition des monnaies de ce dépôt
bute sur la réforme de 318 ap. J.-C..
Comme nous venons de la voir, ce dépôt a été
caché dans les remblais de démolition de la pièce
n° 3. La fouille du dernier niveau de sol de cette
pièce, scellé par sa couche d’incendie, a livré une
monnaie qui correspond à un nummus réformé
de Constantin II, émis en 321-322 ap. J.-C. Cette dernière présente encore la totalité de son argenture
d’origine, ce qui signifie qu’elle a très peu circulé.
La datation de l’incendie comporte donc un terminus post quem. Mais on est toutefois en droit de
Les découvertes de Chevroches remettent
en cause l’attribution et le statut que peut avoir
un dépôt métallique, s’il n’est pas reconnu dans
un contexte stratifié et s’il n’est pas replacé dans
son contexte archéologique. Ceci implique également qu’il peut y avoir une grande différence de
datation absolue entre les objets d’un dépôt et
l’assemblage de ce dernier.
Dans le cas du dépôt US 1028, le “décalage”
chronologique est particulièrement significatif :
la datation des objets contenue est différente de
celle de leur enfouissement. Il en est de même
pour le dépôt US 1020. Si son contexte d’enfouissement est également attribué au milieu du IVe s.,
aucun des objets qui le compose ne permet de
donner une date aussi “élevée” dans le temps.
Bien que nombreux, les objets ne sont pas
assez caractéristiques. Quant à la garniture de
fourreau de Gemellianus, sa fabrication est attribuée à la seconde moitié du IIe siècle ap. J.-C., le
fragment de fibule circulaire est attribué au IIIe siècle. Peut-on alors dater la constitution d’un dépôt
par la seule typo-chronologie ? Enfin, que dire
de l’assemblage même des objets d’un dépôt ?
À quelle logique répond t-il ?
307
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
Les dépôts 1020, 1 027 et 1 028 sont des réserves de métal contemporaines. L’une regroupe un
assemblage hétéroclite d’objets ou de fragments
d’objets de toutes tailles,de toutes origines (notons
en revanche l’absence des métaux précieux : or et
argent) que nous classerons dans les objets voués
à la récupération (aux pièces “détachées”) dont
la majeure partie était vouée à servir à nouveau,
en remplacement d’une pièce similaire.
La réserve de métal US 1028 est composée à
99 % de monnaies qui ne sont plus en circulation
lors de l’enfouissement. Comme l’a montré la présence de monnaies partiellement fondues dans
la pièce n° 14, ce “trésor monétaire” n’en est vraisemblablement pas un. Il s’agit ici d’une réserve
de métal, dont la composition est exclusivement
basée sur des alliages base cuivre, vouée à être
refondue, c’est-à-dire destinée au recyclage.
Donc, seul le dépôt 1027, composé de presque 900 monnaies est identifié comme un trésor,
caché à la même époque, en raison de sa valeur
fiduciaire. De plus, l’étude numismatique a prouvé
que ce trésor a été fabriqué sur place et qu’il n’a
jamais circulé.
Tous ces éléments nous montrent à quel point
il est difficile, voir hasardeux de vouloir donner
un statut fonctionnel, votif ou chronologique à un
dépôt métallique s’il n’est pas à la fois replacé dans
un contexte stratigraphique et topographique.
La fonction de chaque dépôt de Chevroches
n’a pu être déterminée que par corrélation avec
l’étude des autres dépôts et une bonne connaissance de leur environnement archéologique.
Que dire alors des dépôts plus anciens qui la
plupart du temps sont issus de contextes archéologiques inconnus ? Comment savoir, par exemple,
si un dépôt de haches en bronze a été constitué
pour sa valeur symbolique, fiduciaire, marchande
ou “simplement” comme réserve de métal ?
F. D.
RÉPARTITION DES OBJETS PAR CATÉGORIES
La fouille du site de Chevroches a mis au jour
trois fosses contenant des objets métalliques et
a permis de les mettre relation avec un atelier
métallurgique en activité P14 (tableau 1 et 2).
Deux de ces fosses (US 1074 et 1 020) sont interprétées comme des dépôts. La troisième fosse
(US 1078) correspondrait plus à une fosse de
rejet de l’atelier P14. Toutes semblent constituer
les réserves de métal de l’artisan en même temps
qu’elles témoignent d’une activité de recyclage
des pièces en fer et en bronze. En tenant compte
de ce contexte particulier, l’intérêt de l’étude des
objets de ces dépôts porte sur leur relation avec
l’activité de l’atelier P14. Hormis les chutes et les
barres de forge présentes dans les dépôts US 1078
et 1 020 signalant une production métallurgique,
le reste des objets reflètent-ils une partie de la
production de l’atelier P14, ou proviennent-ils de
récupération ? La fosse la plus grande, US 1020
contient une centaine d’objets en fer et une
vingtaine d’objets en bronze. Cette dernière est
particulièrement importante car elle atteint presque la même proportion que la totalité des objets
en fer provenant des couches archéologiques du
308
site, soit 104 objets pour le dépôt US 1020, pour 153
objets provenant des couches archéologiques. Les
deux autres fosses ne dépassent pas, pour la fosse
US 1078, dix-sept objets en fer et cinq en bronze, et
pour la fosse US 1074 sept objets en fer.
Le mobilier métallique provenant des dépôts
tout comme celui exhumé des couches archéologiques a été classé par catégorie qui définit
le genre de l’objet. Le mot construction, utilisé
pour désigner une catégorie est un terme général
employé pour regrouper des éléments d’assemblage ou des objets courants dont les usages variés
ne les destinent pas uniquement à un emploi
lié au bâtiment (comme la clouterie, les chaînes,
les crochets, les anneaux, les viroles, les pattes de
scellement, les agrafes, les renforts, les gonds, les
charnières, les ferrures…).
En ce qui concerne Chevroches, six autres catégories permettent de classer le reste du mobilier
métallique. La catégorie artisanale est assez bien
représentée avec des outils apparentés aux métiers
du métal et de la construction (charpentier, tailleur
de pierre, maçon). La catégorie domestique également assez importante en quantité de pièces en
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
Catégories
US Objets
Fer
US objets
Bronze
Dépôts US
1020 Fer
Dépôt US
1020 Bronze
TOTAUX
4
0
1
0
5
+ 1?
0
7
0
12
Arme
41
Agricole
Artisanat
39
8 + 7?
24
0
78
Char/attelage
6
0
2
1
8
Harnachement
1
1?
0
5
7
Construction
43
0
53
0
96
Domestique
20
26 +11 ?
9
14
80
Indéterminé
35
13
9
0
57
153
66
104
20
343
TOTAUX
Tableau 1. Répartition des objets découverts à Chevroches “le domaine de Noé”, par catégorie (construction :
sans clous). (1 : il s'agit de 4 dents de râteau ou de herse appartenant probablement au même objet).
CONT
Arme
Agri
Artis
V N/S
1
V E/O
3
Char/
atte
HarT
1
Voie
Const
Domes
Indé
1
1
2
2
3
TOTAUX
3
8
2
5
3
8
2
7
20
2
7
6
5
21
P3
1
3
1
5
P5
1
1
2
1
1
6
P7
3
2
4
1
P8
1
P1
P2
1
P9
P11
1
4
P15
1
2
1
9
1
1
1?
1
2
1
2
1
3
1
1
1
M67
1
1
10
2
HS
1
1
M47
4
5
39
6
1
43
3
2
2
US 1078
1
2
1
Bassin
6
2
1
P21
P22
26
2
2?
P19
TOTAUX
7
2
P16
P18
2
1
1
2
2
1
1?
P10
P14
10
4
17
1
3
1
1
2
20
35
154
1
Tableau 2. Répartition spatiale des objets par catégorie (hors dépôt US 1020).
Abréviations - Agri = Agricole ; Artis = Artisanat ; Char/atte = Char/attelage ; Frgt = fragment ; HarT = harnachement ;
Const = construction ; Domes = Domestique ; Indé = indéterminé ; HS = Hors stratigraphie ; V N/S = Voie nord-sud ;
P1- 22 = Pièce 1- 22 ; M67/M47 = Mur.
309
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
1. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Les objets de la fosse US 1074 (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
fer et en bronze, englobe des types d’objets variés
tel que notamment des éléments de foyer, de vaisselle, d’huisserie, de puisage, d’ameublements ou
de parure. Les catégories char/harnachement et
agricole regroupent quelques objets. L’armement
est sous représenté. Enfin, la catégorie des indéterminés qui regroupe les fragments d’objets selon
leur forme, permet de prendre en compte la totalité
du mobilier.
des pièces, est présentée entièrement sur une planche toutes catégories confondues (ill.1).
Cet article ne traite que du mobilier métallique
provenant des fosses/dépôts même si certaines
planches comportent également des objets provenant des couches archéologiques du site.
Les illustrations des objets des fosses/dépôts
US 1020 et 1 078 sont présentées par catégorie tandis que la fosse US 1074, du fait du petit nombre
Les clous en sont les éléments les plus abondants. Les autres objets recouvrent une grande
variété de type et d’usage et, au-delà de leur
310
La catégorie construction
(ill.1 : US 1074, n°4 et ill.2-7)
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
identification, ils apportent une information assez
limitée sur le site. Parmi les éléments de renforts et
de cerclages, les deux bandes repliées n° 94 et 95
paraissent trop minces pour être des bandages de
roue de char et la présence des trous de fixation
caractériserait plus la fonction de cerclage. Quant
aux objets (n° 88, 89, 90, 93, 96) il s’agit de différents types de renforts dont les formes spécifiques
induisent des fonctions précises qui restent pour
le moment difficilement déterminables.
Parmi les objets usuels représentés tels que la
clouterie, les viroles, les fragments de chaîne, les
anneaux, les gonds et les charnières, on retiendra
simplement la présence de deux groupes de types
de clous. Les premières se caractérisent par une
absence de tête de frappe et sont généralement
tordues. Un profil similaire est cité parmi les pièces d’assemblage d’un char (Kiss, Bökönyi 1989,
p 95). Les deuxièmes se distinguent par une tige
effilée de section carrée, s’épaississant régulièrement pour se terminer sur une extrémité aplatie
avec une torsion visible de profil. L’aspect de cette
extrémité rappelle la trace de découpe qui résulte
de la séparation entre la tige de préhension et l’objet façonné. Ces tiges seraient donc des chutes de
forge. Cependant, un profil similaire est également
identifié comme un type de crochet-clou (?) utilisé
pour maintenir, soutenir ou réunir des panneaux
(bois ?). Un ensemble d’agrafes et de pattes fiches
de tailles diverses se distingue également par leur
nombre bien que d’un usage varié. On note que
ces objets se retrouvent fréquemment parmi les
éléments d’assemblage dans la charronnerie (Kiss,
Bökönyi 1989 ; Venedikov 1960).
rectangulaire placée sous le pourtour du chapeau
(passage d’un harnais ?). Les objets n° 19 et 20
dont le profil circulaire et bombé les attribuerait à
la même catégorie n’ont, en revanche, pas de système d’attache à pied caractérisant l’applique de
harnachement. De plus, l’exemplaire n° 20 comporte sur sa surface un décor et une inscription en
grec. Le décor, dont le contour est actuellement en
cours d'étude, est organisé sous la forme de douze
cases alignées sur le pourtour du disque.
La catégorie de l’artisanat (ill.9-10)
La catégorie charronnerie (ill.7-8)
Parmi les outils identifiés, tous n’ont pas une
attribution certaine à un métier. La fosse/dépôt
US 1020 a livré une douzaine d’outils. On trouve
les métiers du métal mais aussi le travail du bois
et dans une moindre proportion, le travail du cuir
et de la pierre. La fosse US 1078 ne contenait que
deux outils : un poinçon attribué au travail du
métal, essentiellement à cause de sa forme bombée
(US 1078,14) et un fragment de scie (US 1078,15).
Parmi les outils incomplets difficilement identifiables, l’objet (n° 37) comporte un tranchant à
dent. Par sa forme il s’agirait soit d’un racloir pour
le nettoyage des peaux, soit d’une scie. L’épaisseur
du dos et la largeur étroite de cette lame rapprocheraient plus cet objet du racloir. Si l’on prolonge
le départ d’épaulement de l’objet (n° 35), on
trouve une forme se rapprochant d’un tranchet
ou d’un couteau à pied en demi-lune, objet caractéristique de découpe des peaux (Duvauchelle
1990, p 37). Le petit ustensile à tranchant (n° 39)
reste aussi d’attribution incertaine. La finesse de
la tige limite son utilisation à des matières souples
tel que l’argile ou le stuc.
Dans cette catégorie, on identifie formellement
pour le dépôt US 1020, que deux objets en fer : le
n° 59 se situe au niveau de l’essieu qu’il protège
et/ou renforce et un exemplaire de fer à bœuf avec
le fragment n° 98.
Les objets en bronze complètent cet ensemble apparenté au char. Cinq objets sont attribués
au harnachement du cheval : les n° 4, 16, 17, 18
(US 1020) et un objet de la fosse US 1078,3 de
forme losangique avec une fixation à deux pattes
(sans illustration). Tous comportent un aspect
esthétique et certains sont fonctionnels. La pointe
en fer associée à une tête en bronze (n° 15) dont
la fonction esthétique n’est pas à remettre en
question, est classée dans cette catégorie à cause
de sa dimension et par la présence d’une boucle
Les outils associés aux métiers du bois regroupent quatre exemplaires du dépôt US 1020 en
plus de l’exemplaire de scie US 1078,15. Bien
que la tête de la gouge (n° 31) révèle des traces
de frappe très marquées tentant à l’attribuer au
travail de la pierre (Duvauchelle 1990, p 30), la
gouge reste un outil couramment et principalement utilisé pour le travail du bois. Une longue
période d’utilisation sur des bois plus ou moins
durs peut également laisser des traces de cette
sorte. Les deux autres ustensiles (n° 30 et 34) sont
assez incomplets. L’outil n° 30 s’apparenterait
à un bédane sans autre preuve qu'une ressemblance morphologique avec cet outil. L’outil
n° 34 est soit un pied-de-biche, soit un marteau
arrache-clou. Le profil de l’objet, bien que limité
311
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
2. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie construction. Les agrafes (?) ou cerclages en fer
(cliché A. Larcelet).
312
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
3. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie construction. a : pattes fiches ; b : fragments de charnières,
gonds et crochets en fer (cliché A. Larcelet).
313
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
4. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie construction : les éléments de suspension et les crochets (?)
en fer (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
314
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
5. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie construction : les renforts et les cerclages en fer (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
315
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
6. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie construction : la clouterie en fer : a : les clous ; b : crochets ou
clous du dépôt US 1020 (cliché A. Larcelet).
316
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
7. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie construction : la clouterie et les pièces en fer liées à la charronnerie
(dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
par la cassure, ne révèle pas un profil courbe très
prononcé qui caractérise le pied-de-biche et, en
cela, le rapprocherait plus du profil du marteau
arrache-clou. Du travail du bois, les métiers de
charpentier ou de menuisier, liés à la construction
paraissent le mieux correspondre aux quelques
outils identifiés de ce groupe. Seul le poids du fil à
plomb (n° 36) fait référence au métier de la pierre
car le compas n° 29 bien que caractéristique de
cette corporation, se retrouve également dans les
métiers du bois et chez le forgeron. Une marque
résultant d’un coup accidentel est visible sur la
surface de l’objet.
Le métier de tailleur de pierre est assez bien
représenté par un groupe d’outils provenant du
secteur 1. La présence du poids dans le dépôt
US 1020 et celle attestée d’outils de tailleur de
pierre, dont certains proviennent du contexte de
l’atelier P14, implique déjà l’existence de l'activité
de cet artisanat et permet de supposer une relation
sur l’origine et/ou l’entretien de ces outils avec la
forge P14, avant leur récupération définitive.
317
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
8. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie harnachement : les objets en bronze liés au harnachement du dépôt
US 1020 (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
Quatre outils sont attribuables aux métiers
du métal. Ces outils ont en commun la spécificité d’être utilisés pour des travaux de précision
de façonnage et de décoration sur des objets
de petite dimension. Il s’agit de deux marteaux
(n° 32 et 33) qui ne diffèrent l’un de l’autre, que
par leur dimension ; d’un petit poinçon n° 38
ainsi que l’objet (n° 111), interprété comme une
petite enclume (un autre exemplaire d’enclumette a été identifié parmi l’outillage provenant
du site). Ce dernier comporte une tête épaisse
et légèrement bombée montrant des traces de
frappes et d’usures. La tige, effilée, massive et
décentrée, permet la fixation de l’outil sur un
support plus large (pièce de bois, enclume ?).
Le contexte archéologique du site n’a pas
révélé la présence d’un artisan orfèvre auquel
conviendraient ces outils. Ces derniers ne sont
pas cassés et étaient utilisés avant leur stockage.
Proviennent-ils de la fabrication de l’atelier P14
et/ou ont-ils été récupérés par l’artisan qui s’en
serait peut-être servi lui-même ? Ce groupe a pu
être employé à des travaux de chaudronnerie ou
à la fabrication d’autres types d'objets plutôt à
base de cuivre qu'en fer, aux vues de leur petite
dimension. Le poinçon US 1078 peut être intégré à
ce groupe car il comporte les mêmes attributs : les
travaux de finition.
318
La catégorie des barres et des chutes de
forge (ill.10-11)
Au total, une trentaine d’objets en fer appartiennent à cette catégorie répartit dans les deux
dépôts US 1020 et 1 078 regroupant une vingtaine de pièces, le reste provenant de la fouille.
Les fragments en bronze, identifiés dans cette
catégorie, ne proviennent que de la fouille.
Les trois barres (n° 49, 109 et 110) du dépôt
US 1020 ont été identifiées comme des produits
de base de forge et non comme des objets, même
si leurs surfaces ont fait l’objet d’un travail de
martelage précis, formant une section carrée ou
rectangulaire régulière. Elles se caractérisent toutes les trois par une tige effilée sur une extrémité
qui permettrait leur préhension à la pince pour le
travail de transformation en produit fini.
À ce sujet on retrouve parmi les chutes de
forge identifiées comme tige de préhension, une
forme et une taille similaire à celle des barres
de forge. La plupart des chutes de forge sont des
tiges de dimension modeste ne dépassant pas
les 7 cm de longueur, les plus grandes atteignent
une douzaine de centimètres. Il faut signaler que
leur petite taille facilite leur perte dans un atelier
plus aisément qu’un autre type de chute de plus
grande dimension.
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
9. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie artisanat : les outils en fer du dépôt US 1020 (dessins A. Larcelet,
Y. Amrane).
319
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
10. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie artisanat : les chutes de forge et les outils en fer de la fosse
US 1078 (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
Elles se caractérisent toutes par une extrémité
effilée prévue pour la préhension, tandis que
l’autre extrémité révèle soit un aplatissement ou
l'on a une sorte de pincement sous la forme d’un
biseau à un ou deux pans, soit une torsion sous la
forme d’un bec ou d’une barbelure, qui témoigne
de la découpe. Parmi les fragments de tôles et de
plaques inventoriés tant en bronze qu’en fer, il est
difficile de distinguer le fragment d’objet de la
chute de forge, en l’absence de trace de découpe
directement lisible, ou de pliage intentionnel. Peu
de chutes ont pu être identifiées malgré la présence, en nombre, de ces fragments.
En ce qui concerne les fosses dépôts 1 020/1078,
des deux exemplaires, n° 45 et US 1078,1, aucun
ne peut être clairement identifié comme chute de
tôle. La dimension moyenne des chutes ne rend
compte que d’une production d’objets de taille
320
modeste, mais n’exclut pas pour autant la production d’objets de dimension plus importante, dont
les chutes ont pu être réemployées plus facilement
et rapidement.
Les objets de la catégorie agricole (ill.12)
Cette catégorie regroupe quelques objets aux
fonctions diverses. Un émondoir (n° 21) et une
serpette (n° 22) outils à tranchant employés pour
des taches de dégrossissage et de taille de pièces
de bois brut, ont pu être utilisés tout aussi bien par
un paysan, qu’un bûcheron ou par un artisan du
bois.
Les quatre tiges interprétées comme des dents
de râteau (ill.1, US 1074,5 à 8), la pointe (n° 25)
qui, associée à un bâton grâce à son emmanchement à douille, a pu servir à pousser des bêtes à
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
11. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Catégorie artisanat. Les barres et chutes de forge en fer du
dépôt US 1020 (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
321
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
12. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Les objets en fer de la catégorie agricole (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
l’attelage et le fragment de force n° 105, forment
un autre groupe d’outillage aux fonctions plus
hypothétiques. Le fragment d’entrave (n° 86), dont
le diamètre de 6 cm limite l’utilisation sur des
animaux de petite taille, termine cet ensemble
d’objets hétéroclites, ne mettant en évidence ni
une activité agricole, ni une production de ce
genre d’objets.
La catégorie armement n’est quasiment pas
représentée, si ce n’est peut-être, une pointe de
pilum (n° 26 ; ill.12) et une pointe de lance à
emmanchement à douille (ill.1, US 1074).
La catégorie des objets domestiques (ill.13-14)
Cette catégorie regroupe plusieurs familles
d’objets dont les usages variés se réfèrent à
322
diverses activités de la vie quotidienne tel que
notamment l’habillement, la parure, la vaisselle,
les éléments de foyer, le puisage, la serrurerie,
le mobilier d’habitation. Parmi les objets en fer
du dépôt US 1020, la catégorie domestique est
représentée principalement par des clefs de différents types et plutôt de grande dimension ce
qui évoque une récupération par l’artisan (n° 99,
100, 101, 102, 103). Le reste du mobilier se résume
à trois objets incomplets et hétéroclites dans
leur fonction : une anse de seau n° 104, un objet
indéterminé (n° 106) et un fragment de bord de
vaisselle (n° 107).
Dans le petit dépôt US 1074 un crochet de
crémaillère complet et un fragment de poignard
représentent cette catégorie. Quant au dépôt US
1078, seul un fragment de bord de vaisselle a été
identifié (US 1078,13, sans illustration).
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
13. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Les objets domestiques en fer (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
323
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
14. Chevroches “le Domaine de Noé” (2001-2002). Les objets domestiques en bronze (dessins A. Larcelet, Y. Amrane).
Les objets en bronze du dépôt US 1020 se rapportent essentiellement à des garnitures de meuble
(n° 2, 4, 6, 10, 12) et à des éléments de serrurerie (n° 7,
8, 13). Le reste du mobilier forme un petit groupe
hétéroclite avec un fragment de vaisselle (n° 3), un
fragment de garniture de fourreau (n° 14), un fragment de fibule (n° 9) et deux anneaux (n° 1 et 11).
Dans la fosse US 1078, nous dénombrons
un fragment de bord de vaisselle (US 1078,2,
324
sans illustration) et un fragment de clochette
(US 1078,3, sans illustration).
La représentation des objets dans cette catégorie est lacunaire par l’absence de groupe d’objets
particuliers tant dans la fosse/dépôt, que sur le site.
L’aspect hétéroclite de l’ensemble ne concourt
pas à mettre en évidence un type d’habitat ou une
production métallurgique orientée sur la fabrication de ce type d’objet.
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES DANS UN CONTEXTE DU VIE SIÈCLE APRÈS J.-C. À CHEVROCHES “LE DOMAINE DE NOÉ” (NIÈVRE)
La catégorie des fragments
d’objets indéterminés (sans illustration)
Contrairement aux objets de cette catégorie
provenant des couches archéologiques, le mobilier
des fosses/dépôts US 1020 et 1 078 comporte peu
de pièces. Nous distinguons autant de produits
plats que de produits à base de barre. Les objets
sont fragmentés et généralement en mauvais état
de conservation. Parmi les fragments de plaques
(US 1020,113 et 57), certaines sont recourbées en
formant des angles droits et sont percées de trous
pour la fixation. Ces éléments évoquent la fonction
de renfort.
CONCLUSION
Le creusement US 1078, par sa fonction de
fosse de rejets de forge, témoigne d'abord de
l’activité de métallurgie du fer de l’atelier P14. La
petite taille des chutes et les fragments informes
répertoriés, ne nous semblent cependant, pas
assez représentatifs de la production et n’apportent guère de précision sur le ou les objets
produits. La présence du poinçon sur l'objet
US 1078,14, seul exemplaire fini de l’ensemble
et en bon état, quoique légèrement tordu sur sa
partie inférieure, est surprenante.
En ce qui concerne les deux dépôts US 1020 et
1 074, les objets des catégories armement, domestique ou agricole ne forment pas de groupes
cohérents et englobent des objets aux fonctions
disparates. S'il est tentant de percevoir une production d'éléments de char dans l'atelier P14, les
faits le justifiant sont trop ténus pour le vérifier. les
objets du dépôt et aussi ceux provenant du site
pouvant être rapportés à cette catégorie forment
un groupe cohérent avec celui des clés de ce
mobilier métallique. Mais ils sont peu nombreux
à être identifiés clairement. Les autres sont certaines pièces d'assemblage ou de renforts classés
d'abord dans la catégorie du char de manière
hypothétique.
On remarquera quand même notamment
dans le dépôt US 1020, la complémentarité des
fonctions entre les quelques objets du dépôt US
1 020, ceux en bronze se rattachant au harnachement (par ailleurs quasiment absents parmi le
mobilier provenant des couches archéologiques)
et les objets en fer apparentés au char.
Aucun élément de char n’a été retrouvé dans
le contexte même de l’atelier P14, ni aucun outil
caractérisant la charronnerie n'a été identifié.
La présence de ces objets souvent de grande
dimension s’explique d’abord par la fonction de
réserve de métal des dépôts. Ces objets ont pu
provenir du démontage d’un char ou de récupérations fortuites. Rien n’empêche cependant
d’envisager, dans le cadre de la polyvalence de la
production dont semble se caractériser la forge
P14, que l’artisan forgeron ait eue à réparer ou à
remplacer, une ou plusieurs pièces sur un char.
La polyvalence de la forge se fonde sur l'absence d'une série d'objets témoignant d'une
spécialisation et au contraire sur la variété des
objets stockés. Le métal accumulé sous diverses
formes (barre et chutes de forge, objets fragmentés ou non) dans les fosses/dépôts, laisse
supposer une consommation régulière du fer
ou/et assure à l’artisan un stock de métal toujours disponible. L’espace de l’atelier P14 et la
cour attenante permettent également d’envisager une production d’objets de tailles diverses.
La présence majoritaire de fer nous semble
d’abord identifier un atelier de production, une
forge, capable de produire des outils ou tous
autres objets résultant d’une demande.
Les outils, dont certains étaient complets
et situés dans le contexte de l’atelier P14, qui
sont liés aux métiers de la construction tels que
menuisier, charpentier, tailleur de pierre assez
bien identifiés dans le mobilier métallique, correspondraient aux objets que cette forge a pu
produire. Notons que la cohabitation de bronzier
et de forgeron dans un même espace semble
difficilement envisageable pour des raisons d’organisation et de répartition des zones de travail.
Toutefois, la possibilité d’une cohabitation des
métiers de bronzier et de forgeron transparaît
bien au sein de l’atelier P14 avec la présence
du fer et du bronze dans l’atelier, dans le dépôt
US 1020 et par la présence d'objets mixtes (n° 15,
ill.8). Cette cohabitation contribue à accentuer
la polyvalence de la production de cet atelier.
Cependant, la quantité d’objets contenue dans le
dépôt US 1020 amène à se demander si l’acquisition de ces pièces de métal ne s’est pas faite dans
un même temps et non par accumulation progressive, jusqu’à son enfouissement. D’ailleurs, la
présence du groupe d’outils liés manifestement
au travail du métal (n° 32, 33, 38, 111 et probablement l’exemplaire US 1078,14) pose la question
de leur provenance. Ils forment un groupe assez
homogène qui représente un outillage employé
325
FRÉDÉRIC DEVEVEY, ANNE LARCELET
pour des travaux de précision et orientent l’activité
sur le travail de petits objets en fer ou en bronze. Le
fait que ce groupe soit stocké dans le dépôt US 1020
indique non seulement qu’ils ont été récupérés par
l’artisan mais que ce dernier n’en avait pas usage.
artisans du métal auxquels succéda la forge P14.
En revanche, si ces outils ont appartenu à l’artisan
de la forge P14, leur stockage dans le dépôt suppose que l’activité de l’atelier ne nécessitait plus
l’utilisation de ce genre d’outils. Cette hypothèse
implique que la production d’un type d’objet est
abandonnée, au cours, ou dès l’installation de la
forge P14
Par conséquent, nous pouvons nous demander si ces outils n’ont pas pu appartenir à un des
A. L.
BIBLIOGRAPHIE
Duvauchelle 1990 : DUVAUCHELLE (A.). — Les outils
en fer du musée romain d’Avenches. Bulletin de
l’Association Pro Aventico, 32, 1990.
Kiss, Bökönyi 1989 : KISS (A), BÖKÖNYI (S.). — Das
römerzeitliche Wagengrab von Kozarmisleny (Ungarn,
Kom. Baranya) & Die Pferdeskelette des römischen
Wagengrabes von Kozarmisleny (Anhang). Budapest :
Magyar Nemzeti Muzeum, 1989 (Régészeti Füzetek Ser. II. ;
25).
Gricourt 2004 : GRICOURT (D.). — L'étude des
monnaies du site de Chevroches, le domaine de Noé.
In : DEVEVEY (F.). — Chevroches, “le domaine de Noé”.
Rapport final d'opération de fouille préventive (DFS).
Sennecey-lès-Dijon : INRAP, 2005, 2 vol.
Venedikov 1960 : VENEDIKOV (J). — Trakiyskata
Kolesnitsa - Le char de Thrace. Sofia, 1960.
326
Conclusion de la table ronde
Patrice MÉNIEL
À l’issue de ces deux journées, pendant lesquelles on a pu mesurer l’étendue et la diversité
du phénomène des dépôts d’objets métalliques
aux âges du Fer en Europe, ce propos final sera
orienté selon deux axes. Le premier, dans un esprit
pluridisciplinaire, est de signaler quelques similitudes entre les approches que l’on peut faire des
dépôts métalliques et des amas d’ossements animaux. Le second est d’essayer de contribuer à l’un
des objectifs de cette réunion, à savoir un point
méthodologique sur l’étude, les comparaisons et
l’interprétation de ces dépôts.
DES DÉPÔTS DE MÉTAL
ET D’OSSEMENTS ANIMAUX
C’est de nombreuses discussions informelles,
avec, entre autres, Thierry Lejars ou Jean-Paul
Guillaumet, qu’est née l’idée qu’il était possible
d’établir un certain nombre d’analogies entre la
nature, l’histoire et l’étude des restes animaux
et des objets métalliques. En effet, il n’est pas
rare que des dépôts d’ossements côtoient des
amas métalliques, que ce soit dans des tombes,
des sanctuaires ou des Brandopferplätze. Ce
voisinage attire naturellement l’attention sur les
contextes, immédiat (le contenant) ou proche
(le site), qui recèlent de tels dépôts. Mais, audelà de ce voisinage, de profondes analogies
peuvent apparaître entre ces deux catégories
de mobiliers. En effet, il est possible d’y définir
des ensembles anatomiques, squelettes ou panoplies, d’y relever des traces de sacrifice, de suivre
leur décomposition, d’étudier leur mode de
dépôts, d’en décompter les éléments subsistants.
Ces similitudes débouchent évidemment sur des
convergences méthodologiques pertinentes et
devraient naturellement conduire à des approches communes.
Ces deux journées ayant été consacrées au
métal, il peut être utile d’élargir le champ, comme
cela m’a été suggéré aussi bien par les organisateurs que lors de l’exposé préliminaire, à quelques
exemples de dépôts animaux. Cela permet d’attirer l’attention sur le fait que les pièces métalliques
sont assez régulièrement des restes d’objets plus
complexes, et à ce titre à considérer comme des
éléments de squelettes à replacer dans un processus de décomposition et de dégradation, au
sein d’une démarche essentielle pour en saisir
l’histoire.
Bataille (G.), Guillaumet (J.-P.) dir. : Les dépôts métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Actes de la table ronde des 13 et
14 octobre 2004 (Glux-en-Glenne – F.-58). Glux-en-Glenne : BIBRACTE. Centre archéologique européen, 2006, p. 327-334 (Bibracte ; 11).
PATRICE MÉNIEL
Les quelques exemples de dépôts animaux
qui suivent, présentent divers états de dislocation :
os isolés, parties de squelettes ou squelettes complets, isolés ou en groupe. Ces états peuvent se
rencontrer sur des dépôts ne comportant que des
restes animaux, ou associés à des restes humains.
Mais ce n’est pas le lieu de développer l’ensemble
des possibilités et des combinaisons déjà observées dans ce domaine.
Des amas d’ossements de bœuf ou de chevaux, souvent peu fragmentés mais dépourvus de
relations articulaires, ont été trouvés lors de grands
décapages (Chevrières “la Plaine du Marais” (ill. 1)
ou Verberie “Les Gats” (ill. 2), Méniel à paraître).
Ces ossements ont été déposés en une fois dans
de vastes dépressions, datées de La Tène ancienne,
sans rapport direct avec un habitat. Des dépôts
analogues, mais plus récents, ont été découverts
dans certains secteurs du village d’Acy-Romance
(Méniel 1998) (ill. 3). Ces animaux ont été consommés, mais le nombre de sujets représentés, six ou
plus, implique une consommation collective.
Des dépôts d’ossements, moins denses que les
précédents, mais ayant fait l’objet d’une sélection
et/ou de traitements particuliers, se distinguent
parfois de la masse des déchets culinaires qui
constituent l’essentiel des trouvailles sur nombre de sites. Ces dépôts témoignent du statut de
certains animaux qui ne sont pas consommés
(souvent des chevaux, parfois des bœufs), et dont
une partie des ossements (crânes, ou autres) peut
faire l’objet d’un dépôt ; c’est le cas de certains
ensembles à Acy-Romance ou à Braine (Auxiette
2000), par exemple.
Dans d’autres cas, les ossements animaux, parfois maintenus en connexion anatomique, ont fait
l’objet de déplacements après que la décomposition ait déjà été bien entamée. Ces déplacements
(à moins qu’il s’agisse du prélèvement d’une
pièce, le crâne par exemple) s’accompagnent
habituellement de pertes plus ou moins sévères
d’ossements, en particulier des plus petits. Ce phénomène, d’abord observé à Gournay-sur-Aronde
(Brunaux, Méniel, Poplin 1985), l’a été également
1. Dépôt daté de La Tène ancienne d’ossements de six bœufs, trois porcs et un mouton découverts à proximité d’un établissement rural de La Tène moyenne à Chevrières "La Plaine du Marais" (Oise). Fouille F. Malrain, programme de sauvetage dans la
Vallée de l’Oise (cliché P. Méniel).
328
CONCLUSION DE LA TABLE RONDE
2. Verberie "les Gats" (Oise) : dépôt de La Tène ancienne d’ossements de quatre bœufs, quatre chevaux, un porc et un mouton.
Fouille F. Malrain, programme de sauvetage dans la Vallée de l’Oise (cliché P. Méniel).
3. Dépôt d’ossements déposés simultanément de trois bœufs et de trois chevaux consommés découverts dans le village de La
Tène finale d’Acy-Romance (Ardennes). Fouille programmée B. Lambot (cliché P. Méniel).
329
PATRICE MÉNIEL
4. Dépôt d’ossements déposés simultanément d’ossements de trois chevaux déposés dans un tronçon de
fossé du site de La Tène moyenne de Thaon (Calvados). Fouille G. San-Juan SDAC (cliché P. Méniel).
330
CONCLUSION DE LA TABLE RONDE
sur d’autres sites, comme Thaon (ill. 4) (San-Juan
et al. 1999) ; tous ces sites ont également livré des
os humains. Une variante est une dislocation in
situ des relations articulaires ; cette dernière se
manifeste uniquement par des déplacements, et il
ne manque pas d’ossements.
Le dernier cas est celui des squelettes en
connexion, complets ou non. Ils peuvent être
inhumés seuls ou en groupe, en une ou plusieurs
fois. La nécropole de Vertault, du début du Ier s. de
notre ère, nous offre des illustrations de ces diverses possibilités (Jouin, Méniel 2001). La première
est illustrée par deux inhumations individuelles
(ill. 5). La seconde par le dépôt en une fois de
dix sujets (ill. 6), dont les squelettes sont plus ou
moins superposés. Enfin, la troisième (ill.7) est le
fruit d’une série de dépôts de deux ou trois sujets
à chaque fois, dont la mise en place dans une
grande fosse s’opère aux détriments de dépôts
antérieurs.
Ces dépôts multiples font l’objet d’enfouissements
différés qui, s’ils ont été assez rapides pour éviter la
dislocation des squelettes, a permis néanmoins aux
chiens d’intervenir sur les carcasses (ouverture des
abdomens). Ces inhumations d’animaux, effectués
en dehors des murs de l’agglomération, voisinent
avec des inhumations humaines contemporaines.
De ce rapide tour d’horizon, il ressort que les
dépôts d’animaux qui se distinguent au mieux
des déchets domestiques sont ceux pour lesquels
l’agencement anatomique initial est préservé, ou au
moins perceptible. C’est le degré de fragmentation,
des relations articulaires puis des os eux-mêmes,
qui s’avère l’un des critères les plus efficaces pour
les mettre en évidence. L’analyse impose une attention particulière aux relations articulaires et aux
positions sur le terrain. En effet, s’il est possible de
restituer après coup des ensembles anatomiques,
seule l’observation in situ permet d’attester les relations anatomiques, qu’il s’agisse de connexions ou
de positions relatives. Dans le domaine des dépôts
métalliques, cela permet de distinguer un coffret
détruit, d’un coffret décomposé en place, dont
témoignent les éléments métalliques en position
“anatomique” (ill. 8).
5. Sépulture individuelle d’un étalon dans la nécropole d’animaux de Vertault (Ier s. de notre ère, Côte-d’Or). Fouille programmée
J.-M. et M. Mangin (cliché P. Méniel).
331
PATRICE MÉNIEL
6. Sépulture de dix étalons déposés simultanément dans la nécropole d’animaux de Vertault (Ier s. de notre ère, Côte-d’Or).
Fouille programmée J.-M. et M. Mangin (cliché P. Méniel).
7. Sépulture collective d’étalons déposés successivement par groupes de deux ou trois dans la nécropole d’animaux de Vertault
(Ier s. de notre ère, Côte-d’Or). Fouille programmée J.-M. et M. Mangin (cliché P. Méniel).
332
CONCLUSION DE LA TABLE RONDE
8. Éléments en bronze d’un couvercle de coffret découvert en place dans un amas du IIe siècle de notre ère, dans le temple de
Mercure au sommet du Puy-de-Dôme (Puy-de-Dôme). Fouille programmée D. Tardy (cliché P. Méniel).
MÉTHODE D’ÉTUDE
DES DÉPÔTS MÉTALLIQUES
Il me semble que les dépôts qui nous ont
été présentés mériteraient la mise en place d’un
fonds documentaire commun, par le biais d’une
banque de données informatisée. Cette banque
de données me semble une étape incontournable pour la conduite des études synthétiques et
comparatives envisagées dans le programme de
la table ronde. La mise en place de ces modalités,
forcément standardisées et quelque peu schématiques, ne doit évidemment pas conduire à
un appauvrissement des analyses individuelles
conduites sur les dépôts : elle aurait seulement
pour objet de réunir un certain nombre d’élé-
ments décrits selon une procédure commune.
Cela conduirait évidemment à un certain degré
de schématisation, mais ouvrirait à des traitements statistiques et à l’élaboration de critères
représentatifs.
N’étant pas spécialiste des dépôts métalliques,
je me suis évidemment inspiré des résultats présentés au cours de ces deux journées pour établir
une première liste de questions et de critères descriptifs nécessaires pour essayer de leur apporter
des réponses. Il est bien sûr évident que ces grandes lignes, établies par un observateur extérieur ne
peuvent être, au mieux, qu’une étape initiale qu’il
conviendra de modifier afin de les adapter aux
besoins de la communauté.
333
PATRICE MÉNIEL
Questions soulevées par l’étude des dépôts
Modalités et composition du dépôt :
– gestes et vocabulaire
– nature, valeur des objets
Éléments pour une description sommaire
commune
Contexte (terrestre, souterrain ou aquatique) :
– immédiat (contenant et structure)
– proche (le site)
Nature du dépôt :
– individuel ou collectif ?
– rituel ou profane ?
Relations régionales :
– entre dépôts terrestres, souterrains, aquatiques
– avec les habitats
– avec les sanctuaires
– avec les nécropoles
Relation avec des événements :
– locaux (incendie, abandon)
– économique (relation masses déposées,
masses en usage)
– historiques
Nature des objets présents :
– degré d’élaboration/dégradation (lingot,
ébauche, chute, objet, fragment)
– degré de représentativité : ensemble complexe (panoplie, trousse à outils, service à
boire, de cuisson), objet isolé (arme, outil) ou
partie d’objet (lame, umbo, fragment, miette)
– traces (feu, sacrifice, décomposition, cassure)
Règles d’assemblages :
– inventaire : critères de dénombrements :
nombre de restes (NR), nombre minimum
d'individu (NMI) et poids des restes (PR)
– dynamique du dépôt (instantané, accumulation, primaire, secondaire…)
– chronologie des objets et datation du dépôt
Histoire du dépôt (taphonomie) :
– modalités de mise en place (posé, rangé, jeté,
réparti…)
– dynamique d’enfouissement (immédiate,
différée, naturelle…)
– perturbation au cours du séjour en terre ou
en grotte
– fouille, collecte sélective, mode d’enregistrement, relevé
– assemblages et créations contemporaines
BIBLIOGRAPHIE
Auxiette 2000 : AUXIETTE (G.). — La faune de la vallée
de l’Aisne. Les installations agricoles de l’âge du Fer en
France septentrionale. Paris : Éditions Rue d’Ulm, 2000,
p. 169-180 (Études d’Histoire et d’Archéologie ; 6).
Brunaux, Méniel, Poplin 1985 : BRUNAUX (J.-L.),
MÉNIEL (P.), POPLIN (F.). — Gournay I : les fouilles sur
le sanctuaire et l’oppidum (1973-1984). Amiens : Revue
Archéologique de Picardie, 1985 (Revue Archéologique
de Picardie, n° spécial).
Jouin, Méniel 2001 : JOUIN (M.), MÉNIEL (P.). — Les
dépôts animaux et le fanum gallo-romains de Vertault
(Côte-d’Or). Revue Archéologique de l’Est, 50, 2001,
p. 119-216.
334
Méniel 1998 : MÉNIEL (P.). — Le Site protohistorique
d’Acy-Romance (Ardennes) III : les animaux et l’histoire
d’un village gaulois (fouilles 1989-1997). Reims : Société
Archéologique Champenoise, 1998 (Mémoires de la
Société Archéologique Champenoise ; 14/hors-série
1998).
San Juan et al. 1999 : SAN JUAN (G.), MÉNIEL (P.),
MATTERNE-ZECK (V.), SAVARY (X.), JARDEL (K.). —
L’occupation gauloise au nord-ouest de Caen. L’évaluation
en sondage du plateau de Thaon (Calvados). Revue
Archéologique de l’Ouest, 16, 1999, p. 131-194.
Achevé d’imprimer en août 2006
sur les presses de la Nouvelle Imprimerie Laballery
58500 Clamecy
Dépôt légal : août 2006
Numéro d’impression : 605092
Imprimé en France
Les premiers dépôts des âges du Fer, identifiés à la fin XIXe et au début du XXe siècle, furent découverts
dans des rivières, des marais et des lacs, comme à La Tène en Suisse et à Kappel en Allemagne. Au début de
la seconde moitié du XXe siècle, furent mis en évidence d’autres types de dépôts d’objets en fer. Il s’agit en
majorité d’outillage artisanal et agricole de la période des oppida, essentiellement en Tchécoslovaquie, dont
les plus connus sont ceux de Kolín, Hostyn et Pohanská.
La découverte de dépôts du premier âge du Fer et du début de la période de la Tène est encore plus
récente. En France, elle a permis de reclasser un certain nombre de dépôts de haches en bronze, tant
dans l’Ouest qu’en Bourgogne et dans les régions limitrophes, en mettant en valeur une déposition encore
méconnue de bracelets en alliage base cuivre. Dans le même temps, étaient mis en évidence des dépôts
d’objets en fer du Hallstatt, surtout en République tchèque.
Ce renouvellement de la documentation justifiait la tenue d’une table ronde consacrée aux dépôts
d’objets métalliques au second âge du Fer en Europe tempérée. Lors de la présentation des communications,
il est apparu que le sujet est une source inépuisable de thèmes de recherche, que chaque auteur développe
selon sa propre vision. La diversité des approches montre les multiples réalités du phénomène des dépôts :
composition, répartition, signification et datation, ainsi que le travail qui reste encore à accomplir.
Parc
naturel
régional
du Morvan
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ISSN : 1281-430X
ISBN : 2-909668-44-4
Prix de vente : 32 €.
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